
A l’attention de Son Excellence Monsieur Saïd Djinnit, Représentant Spécial du Secrétaire Général des Nations-Unies pour l’Afrique de l’Ouest.
1 - Depuis le premier tour de l’élection présidentielle, la question électorale a changé de nature : la compétition n’oppose plus deux hommes mais deux légitimités ethniques.
D’un côté, les Malinkés et de l’autre les Peuls. La légitimité du leader historique, Alpha Condé, n’est plus qu’un prétexte à la mobilisation identitaire malinké, redoutant les conséquences d’une perte d’influence sur le pouvoir d’Etat.
La mobilisation peule semble plus profonde, s’affirmant dès le premier tour de l’élection présidentielle.
Elle exprime une volonté féroce de revanche de la communauté ethnique la plus nombreuse en Guinée contre l’histoire, une histoire récente tissée de frustrations et de répression sanglante et de discrimination systématique sous le long règne de Sékou Touré, un malinké.
Cellou D. Diallo est le porte-drapeau de l’exigence d’une réparation de ce tort historique, opposé à une autre exigence celle d’une juste reconnaissance du mérite de l’opposition historique à Sékou Touré incarné par A. Condé. Nous sommes désormais en face du choc de deux légitimités politiques, d’autant plus irréductibles qu’elles s’identifient désormais aux deux communautés ethniques les plus importantes en Guinée.
2 - L’élection pour le deuxième tour doit désormais être considérée sous le rapport d’une rivalité ethnique. Les normes habituelles de l’élection dans une démocratie représentative ne sauraient être décisives pour dégager un résultat acceptable par les protagonistes. Un candidat, un parti peut admettre sa défaite.
Mais pas une ethnie. Les considérations techniques, toutes les garanties de transparences, mises en œuvre seules, resteront inopérantes dans ce cas de figure. Aux yeux de chaque camp, l’élection, si elle ne confirme pas sa prétention présidentielle ne serait qu’un complot ourdi par l’ethnie adverse.
3 - Les préparatifs du deuxième tour semblent trop avancés pour être reportés à nouveau. Les deux candidats ne tarissent pas de déclarations apaisantes et d’engagements à respecter le résultat des urnes.
Mais le face à face n’oppose pas que les deux hommes. Et dans l’atmosphère inflammable des tensions ethniques électorales, l’étincelle fatale peut provenir de n’importe où. De surcroît des acteurs puissants, les factions militaires ou/et les mafias de la drogue, pour le moment écartés du jeu, n’attendent que l’occasion d’un chaos postélectorale pour tirer les marrons du feu.
4 - En Guinée, l’administration est en lambeaux ; l’armée également. L’élection actuelle fait peser le risque d’un éclatement de la cohésion sociale, dernier refuge de la paix civile. Tous les indices, font penser qu’elle court le danger d’un lendemain électoral de type kenyan sinon pire.
L’implosion de la Guinée ne peut que conduire à la déstabilisation de toute la région. Il est donc primordial que la communauté internationale se préoccupe davantage des précautions et garanties pour la préservation de la paix civile à la proclamation des résultats que des dispositions techniques et des garanties de transparence du scrutin
5 - La spécificité essentielle de ce deuxième tour de l’élection présidentielle en Guinée est la mise en jeu de la paix civile qui risque de ne pas survivre à la défaite de l’un quelconque des camps. Faut-il annuler le processus électoral et prolonger le pouvoir militaire ? La décomposition avancée de celui-ci menace d’aboutir au même résultat dans un délai pas forcément long. Et la prolongation indéfinie de la période électorale est tout aussi risquée.
L’organisation du deuxième tour s’impose donc et dans un délai pas trop long. Mais il y a lieu de l’organiser dans un autre esprit : intéresser les protagonistes à s’en tenir aux résultats proclamés. Aussi, les forces politiques guinéennes et la communauté internationale doivent-elles tenir compte de la spécificité du contexte et innover en conduisant le processus à un résultat inédit : zéro perdant, deux gagnants. A la manière des jeux olympiques.
6 - Il s’agit de créer un premier prix et un deuxième prix. Le candidat qui arrive en tête gagne le fauteuil présidentiel. Le second, au lieu de subir le sort habituel des perdants (« mordre la poussière » et son corollaire de déconvenues durant toute la mandature), doit être récompensé par un autre fauteuil prestigieux, qui lui permette d’attendre la prochaine échéance dans les meilleures conditions. On peut lui créer un poste de vice-président à l’américaine ou un statut de chef de file de l’opposition à la britannique (avec possibilité et moyens pour la mise en place et le fonctionnement d’un gouvernement de l’ombre).
7- Dans cet esprit, il est urgent que les Candidats conviennent de la formule adéquate et se donnent le temps de l’introduire dans l’arsenal légal et de lui faire une publicité suffisante pour que l’espoir grand ou petit supplante la peur et la haine dans les deux camps en compétition.
8 - Enfin il n’est jamais tard pour rectifier le tir et éviter la catastrophe. Je vous remercie, Excellence, de l’attention que vous porteriez à cette note sommaire et vous prie d’agréer l’expression de ma haute considération
Nouakchott le 2 novembre 2010
Mohamed Ould Maouloud, Président de l’Union des Forces de Progrès (UFP) Mauritanie
source: cridem.org
1 - Depuis le premier tour de l’élection présidentielle, la question électorale a changé de nature : la compétition n’oppose plus deux hommes mais deux légitimités ethniques.
D’un côté, les Malinkés et de l’autre les Peuls. La légitimité du leader historique, Alpha Condé, n’est plus qu’un prétexte à la mobilisation identitaire malinké, redoutant les conséquences d’une perte d’influence sur le pouvoir d’Etat.
La mobilisation peule semble plus profonde, s’affirmant dès le premier tour de l’élection présidentielle.
Elle exprime une volonté féroce de revanche de la communauté ethnique la plus nombreuse en Guinée contre l’histoire, une histoire récente tissée de frustrations et de répression sanglante et de discrimination systématique sous le long règne de Sékou Touré, un malinké.
Cellou D. Diallo est le porte-drapeau de l’exigence d’une réparation de ce tort historique, opposé à une autre exigence celle d’une juste reconnaissance du mérite de l’opposition historique à Sékou Touré incarné par A. Condé. Nous sommes désormais en face du choc de deux légitimités politiques, d’autant plus irréductibles qu’elles s’identifient désormais aux deux communautés ethniques les plus importantes en Guinée.
2 - L’élection pour le deuxième tour doit désormais être considérée sous le rapport d’une rivalité ethnique. Les normes habituelles de l’élection dans une démocratie représentative ne sauraient être décisives pour dégager un résultat acceptable par les protagonistes. Un candidat, un parti peut admettre sa défaite.
Mais pas une ethnie. Les considérations techniques, toutes les garanties de transparences, mises en œuvre seules, resteront inopérantes dans ce cas de figure. Aux yeux de chaque camp, l’élection, si elle ne confirme pas sa prétention présidentielle ne serait qu’un complot ourdi par l’ethnie adverse.
3 - Les préparatifs du deuxième tour semblent trop avancés pour être reportés à nouveau. Les deux candidats ne tarissent pas de déclarations apaisantes et d’engagements à respecter le résultat des urnes.
Mais le face à face n’oppose pas que les deux hommes. Et dans l’atmosphère inflammable des tensions ethniques électorales, l’étincelle fatale peut provenir de n’importe où. De surcroît des acteurs puissants, les factions militaires ou/et les mafias de la drogue, pour le moment écartés du jeu, n’attendent que l’occasion d’un chaos postélectorale pour tirer les marrons du feu.
4 - En Guinée, l’administration est en lambeaux ; l’armée également. L’élection actuelle fait peser le risque d’un éclatement de la cohésion sociale, dernier refuge de la paix civile. Tous les indices, font penser qu’elle court le danger d’un lendemain électoral de type kenyan sinon pire.
L’implosion de la Guinée ne peut que conduire à la déstabilisation de toute la région. Il est donc primordial que la communauté internationale se préoccupe davantage des précautions et garanties pour la préservation de la paix civile à la proclamation des résultats que des dispositions techniques et des garanties de transparence du scrutin
5 - La spécificité essentielle de ce deuxième tour de l’élection présidentielle en Guinée est la mise en jeu de la paix civile qui risque de ne pas survivre à la défaite de l’un quelconque des camps. Faut-il annuler le processus électoral et prolonger le pouvoir militaire ? La décomposition avancée de celui-ci menace d’aboutir au même résultat dans un délai pas forcément long. Et la prolongation indéfinie de la période électorale est tout aussi risquée.
L’organisation du deuxième tour s’impose donc et dans un délai pas trop long. Mais il y a lieu de l’organiser dans un autre esprit : intéresser les protagonistes à s’en tenir aux résultats proclamés. Aussi, les forces politiques guinéennes et la communauté internationale doivent-elles tenir compte de la spécificité du contexte et innover en conduisant le processus à un résultat inédit : zéro perdant, deux gagnants. A la manière des jeux olympiques.
6 - Il s’agit de créer un premier prix et un deuxième prix. Le candidat qui arrive en tête gagne le fauteuil présidentiel. Le second, au lieu de subir le sort habituel des perdants (« mordre la poussière » et son corollaire de déconvenues durant toute la mandature), doit être récompensé par un autre fauteuil prestigieux, qui lui permette d’attendre la prochaine échéance dans les meilleures conditions. On peut lui créer un poste de vice-président à l’américaine ou un statut de chef de file de l’opposition à la britannique (avec possibilité et moyens pour la mise en place et le fonctionnement d’un gouvernement de l’ombre).
7- Dans cet esprit, il est urgent que les Candidats conviennent de la formule adéquate et se donnent le temps de l’introduire dans l’arsenal légal et de lui faire une publicité suffisante pour que l’espoir grand ou petit supplante la peur et la haine dans les deux camps en compétition.
8 - Enfin il n’est jamais tard pour rectifier le tir et éviter la catastrophe. Je vous remercie, Excellence, de l’attention que vous porteriez à cette note sommaire et vous prie d’agréer l’expression de ma haute considération
Nouakchott le 2 novembre 2010
Mohamed Ould Maouloud, Président de l’Union des Forces de Progrès (UFP) Mauritanie
source: cridem.org