Ba Mamadou Bocar est né en 1954 à SINTHIANE-PADALAL dans le département de Maghama au Gogol. Il est Ingénieur d’application Télécom et titulaire d’une maîtrise de Physique. Il créa en septembre 1986 avec d’autres de ses amis un Comité de soutien aux détenus noirs après les arrestations des militants des FLAM le même mois. Il fut arrêté en Octobre 1986, jugé et condamné à quatre ans de réclusion, le 14 octobre 1986.
Il purgea sa peine dans les prisons de Nouakchott, Aioun et le bagne de Oualata. Libéré le 14 décembre 1989, il rejoint ses amis dans l’exil. Il vit actuellement en exil à Sarcelles en France.
A la suite du dernier congrès des FLAM et les divergences avec des membres de la direction, sur la stratégie du mouvement après le 3 août, il crée avec d’autres dissidents une nouvelle organisation dénommée FLAM-RENOVATION dont il préside le bureau provisoire. Nous l’avons rencontré et il a bien voulu répondre à nos questions.
Nouakchott Info- Vous venez de créer une organisation politique dénommée FLAM-RENOVATION, qui représente une scission du mouvement des Forces de Libération Africaines de Mauritanie. Pourquoi cette organisation et quelles sont ses grandes orientations ?
BA Mamadou Bocar : D’abord permettez-moi de vous remercier de l’intérêt que vous portez à notre organisation. Je dois dire que notre organisation est née après le congrès de Cincinnati de décembre 2005 au cours duquel est apparue une divergence entre nos camarades et nous, sur la prise en compte de la réalité politique nationale. A partir du moment où les FLAM ont solennellement renoncé à travers la Déclaration de Dakar à la lutte armée comme mode de règlement du conflit qui les oppose au système, et que cette option n’a pas été remise en cause par la plus haute instance de l’organisation, la conséquence logique aurait été d’envisager de mener le combat à l’intérieur du pays aussi. C’est ce que mes amis et moi avons proposé. En plus, la répression qui s’était abattue sur nous durant les années quatre-vingt et quatre-vingt-dix a cessé. Il fallait donc profiter de ce nouvel espace pour s’ouvrir aux forces progressistes et lutter au plus près des populations au nom desquelles nous avons lutté des décennies durant. Ce sont là les raisons qui ont présidé à la naissance de notre organisation qui s’attellera à mobiliser pour une implication active des mauritaniens de l’intérieur, sans exclusive, à la solution des déportés, du passif humanitaire, et au-delà, à la résolution des questions centrales de la cohabitation et de l’esclavage.
N.I-Quelle évaluation faites-vous du dernier congrès des Forces de Libération Africaines de Mauritanie, tenu fin décembre aux Etats-Unis ?
BA Mamadou Bocar : le congrès de décembre a été un moment difficile pour notre organisation, pour tous ceux qui étaient soucieux de son avenir. Il s’est déroulé en l’absence de nos sections africaines ce qui est bien dommage. Il y a eu deux lignes que nous n’avons malheureusement pas pu concilier.
Nous avons alors pris nos responsabilités et nous assumons. En tout état de cause, nous sommes sereins et réalistes, nous ferons ce que nous serons capables de faire avec ceux qui voudront bien le faire avec nous.
N.I- La Question nationale est l’un des principaux dossiers, ayant alimenté les revendications de votre organisation depuis sa création en Mars 1983.
Après plus de deux décennies de lutte et compte tenu de votre expérience et la situation sur le terrain dans le pays, avez-vous une nouvelle approche de cette question?
BA Mamadou Bocar : Je pense qu’il y a eu une grande évolution par rapport à cette question. En effet, il y a encore quelques années, cette question n’intéressait que les noirs qui en sont les principales victimes par leur exclusion et leur marginalisation. Aujourd’hui, la question nationale est sur toutes les lèvres, les partis en parlent, les associations de la société civile également. Si Ould Taya disait qu’il n’y avait pas de réfugiés et que le passif humanitaire était une pure invention des associations qui en font un fond de commerce, Ely reconnaît l’existence de ces problèmes, sans toutefois vouloir leur trouver des solutions durant la transition et c’est dommage. Notre organisation est consciente que c’est seulement dans un cadre incluant toutes les composantes nationales que les problèmes pourront être solutionnés et c’est heureusement possible.
La résolution correcte de la question nationale et sociale, conditionne la paix dans notre pays et la stabilité dans la sous région. Elle était et demeure une préoccupation permanente dans notre action.
N.I : Le dossier des réfugiés mauritaniens au Sénégal et au Mali, a servi de fond de lutte et parfois de commerce, pour nombre de partis politiques, d’organisations et d’Hommes mauritaniens à l’intérieur comme à l’extérieur. Mais avec la transition, l’on s’acheminerait vers une solution acceptable par toutes les parties, en particulier les réfugiés eux-mêmes qui ont tant enduré. La dernière visite de l’ambassadeur américain dans ces camps se situerait dans cette optique. Votre lecture de tout ça et que préconisez-vous pour une solution définitive à ce drame ?
BA Mamadou Bocar : Le peuple mauritanien ne peut vivre heureux, tranquille en sachant qu’une partie des siens vit au Sénégal et au Mali dans des conditions vraiment précaires. Tout le monde se rappelle dans quelles conditions de violence se sont passées ces déportations (tortures, viols, confiscations de biens, papiers d’état civil et parfois des exécutions sommaires). Le règlement de cette question doit se faire selon les cadres traditionnels prévus par les Nations Unies impliquant réfugiés, pays d’origine et pays d’accueil. Toute solution à cette question doit émaner d’une volonté politique, d’abord du pays d’origine de ces réfugiés. Une volonté d’aller de l’avant. Elle passe par la mise en place d’une commission technique nationale d’évaluation composée des membres de la société civile comme du monde politique devant évaluer le rétablissement dans leur dignité et l’indemnisation indispensable des déportés. Nous pensons que cela doit se faire maintenant, et c’est possible, si seulement la volonté politique y est, et c’est de cette façon seulement qu’on évitera tout fond de commerce.
N.I : Dans l’interview accordé par Mr. Samba Thiam, président des FLAM à notre journal, ce dernier et en réponse à une question relative à la place de l’Islam dans leurs programmes, a fait état de l’existence de non-musulmans au sein de l’organisation. Pourriez-vous éclairer l’opinion sur ces déclarations et que représente l’Islam pour les FLAM-RENOVATION ?
BA Mamadou Bocar : Ce qui nous lie en tant que militants d’une organisation politique c’est son orientation. Celle de FLAM/RENOVATION ne remet pas en cause l’islamité de notre peuple. En effet l’islam joue un rôle fédérateur dans la mesure où tous les mauritaniens sont musulmans et l’islam fait partie aujourd’hui de notre culture à tous. C’est également vrai que la pratique de notre religion qui prêche la tolérance et l’amour du prochain est incompatible avec l’exploitation et l’exclusion.
N.I :-Quels regards portez-vous sur la Transition après six mois ?
BA Mamadou Bocar : Nous trouvons que la transition manque de courage et de vision politique et c’est dommage. Elle aurait pu aller plus loin dans les mesures. Depuis la naissance de notre pays, l’Etat a toujours favorisé une composante de la population sur l’autre. Cet état de fait doit cesser si l’on veut construire une véritable Nation. Il est en outre impensable en effet de mettre en place une démocratie en ayant en suspens des questions comme celle des déportés mauritaniens au Sénégal et au Mali, celle du passif humanitaire. Il s’agit de questions qui appellent des réponses permettant d’apaiser les cœurs et les esprits et de décrisper le climat social et politique.
Mieux ils auraient pu aider à trouver des solutions justes aux questions épineuses de la cohabitation et de l’esclavage dans la mesure où ils ne sont candidats à aucun mandat électif. Au lieu de ça ils se sont focalisés sur la préparation des élections comme si les élections seulement pouvaient résoudre tous nos problèmes.
Nous pensons que c’est une erreur car démocratie ne rime pas seulement avec élection. Elle doit refléter les aspirations de tout le peuple.
N.I : A quand le retour en Mauritanie des FLAM-RENOVATION et quelles sont vos priorités ?
BA Mamadou Bocar : Notre stratégie est de nous impliquer dans le champ politique intérieur. Dans les semaines à venir, des responsables se rendront au pays pour rencontrer les acteurs politiques et porter directement le message qui est le nôtre au peuple mauritanien.
N.I : Un dernier mot Monsieur le Président ?
BA Mamadou Bocar : La lutte sera longue et le chemin certainement semé d’embûches, nous ne devons pas désespérer mais plutôt redoubler d’efforts. Car, ainsi seulement, nous construirons une société de justice, de paix et d’égalité que nous léguerons à nos enfants. C’est un combat qui mérite d’être mené et que personne ne mènera à notre place et nous devons tous accepter le prix qu’il demande.
La situation que nous vivons aujourd’hui peut être un point d’eau dans le désert, un point d’eau qui peut tarir à tout instant, abreuvons nous, purifions nous mais surtout prions pour qu’il devienne un Océan.
Propos recueillis par
Cheikhna Ould Nenni
Il purgea sa peine dans les prisons de Nouakchott, Aioun et le bagne de Oualata. Libéré le 14 décembre 1989, il rejoint ses amis dans l’exil. Il vit actuellement en exil à Sarcelles en France.
A la suite du dernier congrès des FLAM et les divergences avec des membres de la direction, sur la stratégie du mouvement après le 3 août, il crée avec d’autres dissidents une nouvelle organisation dénommée FLAM-RENOVATION dont il préside le bureau provisoire. Nous l’avons rencontré et il a bien voulu répondre à nos questions.
Nouakchott Info- Vous venez de créer une organisation politique dénommée FLAM-RENOVATION, qui représente une scission du mouvement des Forces de Libération Africaines de Mauritanie. Pourquoi cette organisation et quelles sont ses grandes orientations ?
BA Mamadou Bocar : D’abord permettez-moi de vous remercier de l’intérêt que vous portez à notre organisation. Je dois dire que notre organisation est née après le congrès de Cincinnati de décembre 2005 au cours duquel est apparue une divergence entre nos camarades et nous, sur la prise en compte de la réalité politique nationale. A partir du moment où les FLAM ont solennellement renoncé à travers la Déclaration de Dakar à la lutte armée comme mode de règlement du conflit qui les oppose au système, et que cette option n’a pas été remise en cause par la plus haute instance de l’organisation, la conséquence logique aurait été d’envisager de mener le combat à l’intérieur du pays aussi. C’est ce que mes amis et moi avons proposé. En plus, la répression qui s’était abattue sur nous durant les années quatre-vingt et quatre-vingt-dix a cessé. Il fallait donc profiter de ce nouvel espace pour s’ouvrir aux forces progressistes et lutter au plus près des populations au nom desquelles nous avons lutté des décennies durant. Ce sont là les raisons qui ont présidé à la naissance de notre organisation qui s’attellera à mobiliser pour une implication active des mauritaniens de l’intérieur, sans exclusive, à la solution des déportés, du passif humanitaire, et au-delà, à la résolution des questions centrales de la cohabitation et de l’esclavage.
N.I-Quelle évaluation faites-vous du dernier congrès des Forces de Libération Africaines de Mauritanie, tenu fin décembre aux Etats-Unis ?
BA Mamadou Bocar : le congrès de décembre a été un moment difficile pour notre organisation, pour tous ceux qui étaient soucieux de son avenir. Il s’est déroulé en l’absence de nos sections africaines ce qui est bien dommage. Il y a eu deux lignes que nous n’avons malheureusement pas pu concilier.
Nous avons alors pris nos responsabilités et nous assumons. En tout état de cause, nous sommes sereins et réalistes, nous ferons ce que nous serons capables de faire avec ceux qui voudront bien le faire avec nous.
N.I- La Question nationale est l’un des principaux dossiers, ayant alimenté les revendications de votre organisation depuis sa création en Mars 1983.
Après plus de deux décennies de lutte et compte tenu de votre expérience et la situation sur le terrain dans le pays, avez-vous une nouvelle approche de cette question?
BA Mamadou Bocar : Je pense qu’il y a eu une grande évolution par rapport à cette question. En effet, il y a encore quelques années, cette question n’intéressait que les noirs qui en sont les principales victimes par leur exclusion et leur marginalisation. Aujourd’hui, la question nationale est sur toutes les lèvres, les partis en parlent, les associations de la société civile également. Si Ould Taya disait qu’il n’y avait pas de réfugiés et que le passif humanitaire était une pure invention des associations qui en font un fond de commerce, Ely reconnaît l’existence de ces problèmes, sans toutefois vouloir leur trouver des solutions durant la transition et c’est dommage. Notre organisation est consciente que c’est seulement dans un cadre incluant toutes les composantes nationales que les problèmes pourront être solutionnés et c’est heureusement possible.
La résolution correcte de la question nationale et sociale, conditionne la paix dans notre pays et la stabilité dans la sous région. Elle était et demeure une préoccupation permanente dans notre action.
N.I : Le dossier des réfugiés mauritaniens au Sénégal et au Mali, a servi de fond de lutte et parfois de commerce, pour nombre de partis politiques, d’organisations et d’Hommes mauritaniens à l’intérieur comme à l’extérieur. Mais avec la transition, l’on s’acheminerait vers une solution acceptable par toutes les parties, en particulier les réfugiés eux-mêmes qui ont tant enduré. La dernière visite de l’ambassadeur américain dans ces camps se situerait dans cette optique. Votre lecture de tout ça et que préconisez-vous pour une solution définitive à ce drame ?
BA Mamadou Bocar : Le peuple mauritanien ne peut vivre heureux, tranquille en sachant qu’une partie des siens vit au Sénégal et au Mali dans des conditions vraiment précaires. Tout le monde se rappelle dans quelles conditions de violence se sont passées ces déportations (tortures, viols, confiscations de biens, papiers d’état civil et parfois des exécutions sommaires). Le règlement de cette question doit se faire selon les cadres traditionnels prévus par les Nations Unies impliquant réfugiés, pays d’origine et pays d’accueil. Toute solution à cette question doit émaner d’une volonté politique, d’abord du pays d’origine de ces réfugiés. Une volonté d’aller de l’avant. Elle passe par la mise en place d’une commission technique nationale d’évaluation composée des membres de la société civile comme du monde politique devant évaluer le rétablissement dans leur dignité et l’indemnisation indispensable des déportés. Nous pensons que cela doit se faire maintenant, et c’est possible, si seulement la volonté politique y est, et c’est de cette façon seulement qu’on évitera tout fond de commerce.
N.I : Dans l’interview accordé par Mr. Samba Thiam, président des FLAM à notre journal, ce dernier et en réponse à une question relative à la place de l’Islam dans leurs programmes, a fait état de l’existence de non-musulmans au sein de l’organisation. Pourriez-vous éclairer l’opinion sur ces déclarations et que représente l’Islam pour les FLAM-RENOVATION ?
BA Mamadou Bocar : Ce qui nous lie en tant que militants d’une organisation politique c’est son orientation. Celle de FLAM/RENOVATION ne remet pas en cause l’islamité de notre peuple. En effet l’islam joue un rôle fédérateur dans la mesure où tous les mauritaniens sont musulmans et l’islam fait partie aujourd’hui de notre culture à tous. C’est également vrai que la pratique de notre religion qui prêche la tolérance et l’amour du prochain est incompatible avec l’exploitation et l’exclusion.
N.I :-Quels regards portez-vous sur la Transition après six mois ?
BA Mamadou Bocar : Nous trouvons que la transition manque de courage et de vision politique et c’est dommage. Elle aurait pu aller plus loin dans les mesures. Depuis la naissance de notre pays, l’Etat a toujours favorisé une composante de la population sur l’autre. Cet état de fait doit cesser si l’on veut construire une véritable Nation. Il est en outre impensable en effet de mettre en place une démocratie en ayant en suspens des questions comme celle des déportés mauritaniens au Sénégal et au Mali, celle du passif humanitaire. Il s’agit de questions qui appellent des réponses permettant d’apaiser les cœurs et les esprits et de décrisper le climat social et politique.
Mieux ils auraient pu aider à trouver des solutions justes aux questions épineuses de la cohabitation et de l’esclavage dans la mesure où ils ne sont candidats à aucun mandat électif. Au lieu de ça ils se sont focalisés sur la préparation des élections comme si les élections seulement pouvaient résoudre tous nos problèmes.
Nous pensons que c’est une erreur car démocratie ne rime pas seulement avec élection. Elle doit refléter les aspirations de tout le peuple.
N.I : A quand le retour en Mauritanie des FLAM-RENOVATION et quelles sont vos priorités ?
BA Mamadou Bocar : Notre stratégie est de nous impliquer dans le champ politique intérieur. Dans les semaines à venir, des responsables se rendront au pays pour rencontrer les acteurs politiques et porter directement le message qui est le nôtre au peuple mauritanien.
N.I : Un dernier mot Monsieur le Président ?
BA Mamadou Bocar : La lutte sera longue et le chemin certainement semé d’embûches, nous ne devons pas désespérer mais plutôt redoubler d’efforts. Car, ainsi seulement, nous construirons une société de justice, de paix et d’égalité que nous léguerons à nos enfants. C’est un combat qui mérite d’être mené et que personne ne mènera à notre place et nous devons tous accepter le prix qu’il demande.
La situation que nous vivons aujourd’hui peut être un point d’eau dans le désert, un point d’eau qui peut tarir à tout instant, abreuvons nous, purifions nous mais surtout prions pour qu’il devienne un Océan.
Propos recueillis par
Cheikhna Ould Nenni