La menace qui risque d’enterrer notre jeune expérience démocratique se précise, avec l’annonce coup sur coup des candidatures, aux élections présidentielles antidémocratiques prévues le 6 juin 2009, du Général Abdel Aziz et d’un malheureux journaliste du nom de Ibrahima Moctar Sarr qui s’ingénie à vouloir faire de la politique.
Pourquoi, raisonnablement, devons-nous refuser ces élections ne visant ni plus ni moins qu’à légitimer le coup d’état honteux du 6 août 2008 et cherchant, à la même occasion, à faire le lit du despotisme dans notre pays ? Un coup d’état qui tente d’évincer le président démocratiquement élu de la république islamique de Mauritanie, Sidi Mohamed ould Cheikh Abdallahi et unanimement condamné par la Communauté internationale. Quel danger guette notre pays, s’il s’y soumet ? Pourquoi devons-nous exiger le retour à la légalité constitutionnelle et à l’Etat de droit? En quoi le despotisme constitue-t-il un danger pour nos libertés et notre épanouissement ? Quel rôle et place incombent aux fonctionnaires de l’Etat mauritanien face à la crise qui secoue notre pays ? Les fonctionnaires que le philosophe allemand Georg Wilhelm Friedrich Hegel appelle « la classe universelle » et qualifie de « conscience juridique du peuple » ou « d’intelligence cultivée du peuple », éléments constitutifs et donc indispensables à la rationalité d’un Etat. Au regard de l’histoire, que doit nous inspirer les expériences politiques d’autres nations ?
Pour répondre à ces questions vitales, nous proposons de revisiter la philosophie politique, de manière générale, et la sociologie compréhensive de Max Weber. Le réexamen des principes qui sous-tendent ces savoirs stimulera, nous osons l’espérer, le combat salutaire que les forces vives de notre pays mènent contre le retour du régime despotique que des militaires égarés et leurs suppôts veulent imposer à notre peuple et visant à le priver de sa liberté.
S’il y’a quelque chose que partagent bien le général Abdel Aziz avec notre fameux journaliste politicien c’est bien la haine de la loi, de la constitution de notre pays. Le philosophe Hegel dit de la haine de la loi, qu’elle est le démon « le schibboleth auquel se laissent manifestement et infailliblement reconnaître le fanatisme, la faiblesse d’esprit et l’hypocrisie des bonnes intentions, quels que soient les vêtements dont il se recouvre » (cf. philosophie du droit, par.258, add). A cet égard, on comprend mieux l’intérêt que l’on doit accorder à l’existence des lois fixes et précisément définies liant les gouvernants aussi bien que les gouvernés et qui permet de distinguer l’Etat rationnel ou Etat de droit de toute forme de despotisme. Aussi faut-il préciser, que dans un Etat rationnel, les sujets en se soumettant aux autorités, ils obéissent à la loi d’où émane le pouvoir de celles-ci ; et conformément à laquelle elles statuent. De ce fait le devoir qui contraint le citoyen est de nature différente d’une relation d’obédience privée. C’est en ce sens que pour Hegel la constitutionnalité de l’Etat achève l’idéalisation, autrement dit la dépersonnalisation des droits et des devoirs. De ce point de vue, tout citoyen quel qu’il soit doit conformer ses décisions aux exigences de la légalité, et non au contenu arbitraire de sa seule volonté subjective. Ce qui fait dire au sociologue Max Weber, qu’une distance temporelle nous rapproche plus que de Hegel, que c’est la suppression des rapports d’obédience personnels qui est le caractère distinctif de la domination légale propre à l’Etat rationnel.
A l’adresse de nos fonctionnaires mauritaniens à toutes fins utiles, de sorte qu’ils se rappellent qu’ils doivent se démarquer logiquement des interventions injustifiées et inconsidérées, d’un Général potentat, dans tous les secteurs de la vie publique dans notre pays, nous proposons d’exposer ici quelques caractéristiques résumées du fonctionnariat spécialisé, dans un Etat moderne, selon Weber. Soulignons pour lever toute équivoque que c’est parce que nous trouvons certainement des similitudes entre les descriptions que fait Weber de l’Etat rationnel reposant sur le fonctionnariat spécialisé et la fonction publique mauritanienne, que nous nous autorisons, pour les besoins de la démarche qui nous concerne, une telle contextualisation. Selon Weber, avant tout, les fonctionnaires sont personnellement libres, non liés à aucun rapport d’allégeance personnelle, de sorte que leur engagement se fait sur une base contractuelle ; ils ne sont pas propriétaires de leur emploi, moins encore des moyens permettant de l’exercer ; leur recrutement se fait en fonction de leur qualification que vérifie un examen et sanctionne un diplôme les rendant apte à remplir une fonction aux compétences définies, précises et limitées ; cette fonction étant une activité principale voire unique est rémunérée par un salaire leur permettant d’y consacrer la totalité de leurs temps de travail, celui-ci varie compte tenu de différents paramètres, il s’agit de l’avancement dans la carrière qui doit être assorti de l’assurance d’une pension de retraite ; les corps de fonctionnaire parce que organisés en hiérarchie sont strictement soumis à une discipline.
Par ce rappel, nous avons voulu ici, par un effet de feed back, attirer l’attention des fonctionnaires mauritaniens administrateurs ou enseignants éducateurs , en tant que « conscience juridique » et « intelligence cultivée du peuple », sur leur rôle d’avant-garde dans la défense de l’Etat dont ils sont les premières sentinelles et les piliers, en ce sens qu’il leur appartient non seulement de veiller à l’exécution de ses lois et à leur respect seuls garants du bon fonctionnement de ses institutions , mais aussi de veiller à l’éducation du peuple par l’enseignement. A ce titre, ils doivent constituer le front le plus solide contre l’usurpation du pouvoir opérée par la junte militaire le 6 août 2008, dans notre pays. Notre peuple doit vaincre la crainte du despotisme, au risque de sombrer. Ecoutons ce que dit, Charles Louis de Secondât Baron de Montesquieu et de la Brède, de la législation et du despotisme et méditons le «…Pour former un gouvernement modéré, il faut combiner les puissances, les régler, les tempérer, les faire agir… c’est un chef d’œuvre de législation…un gouvernement despote saute pour ainsi dire aux yeux ; il est uniforme partout ». Le principe du despotisme est la crainte « Il faut donc qu’il abatte tous les courages et y éteignent jusqu’au moindre sentiment d’ambition », il rend impossible toute édification de fortune, aucune position stable. Le despotisme détruit toute vie sociale ; toutes les personnes y sont égales parce que personne n’y est rien, l’éducation s’y réduit à l’apprentissage de la crainte, la défense à s’entourer d’un désert.
Nous sommes prévenus de ce que nous réserve le Général Aziz et il nous en a donné un avant goût, dans la mesure où il use unilatéralement des deniers publiques, emprisonne les adversaires à son putsch, récompense ceux qui le soutiennent, par des promotions et des recrutements dans l’administration totalement injustifiés, il monopolise les média d’Etat, il confisque nos libertés privées et publiques. Bref, il cultive la crainte chez nos paisibles citoyens qui, il y a huit mois, vivaient sereinement dans un Etat de droit.
Que notre Général sache que le peuple mauritanien, en adoptant une constitution démocratique, a établi en toute souveraineté et librement un contrat qu’il se doit de respecter. Ce peuple n’a pas choisi d’adhérer à un pacte Hobbesien visant à soumettre l’abandon de son droit naturel à l’institution d’un quelconque souverain non partie au contrat. Aussi, doit-on penser, pour paraphraser Jean Jacques Rousseau, que les mauritaniens, à l’occasion de leur contrat, ont mis « en commun » leur personne et toute leur puissance « sous la suprême direction de la volonté générale » et ont reçu « en corps chaque membre comme partie indivisible du Tout » (cf. contrat social, 1, 6). Notre Général ignore la nature profonde, les principes qui sont au fondement du choix du peuple mauritanien, lorsque celui-ci a opté pour l’entrée en démocratie. Le Général Aziz a-t-il vraiment compris pourquoi nous nous sommes choisis une constitution comme ensemble de lois positives ? Ce choix est métaphysique, il concerne la vie et la survie de la société mauritanienne. Il s’agit pour notre peuple de vivre dans la paix et la concorde civile. Et pour cela, nous avons adopté ces lois positives c'est-à-dire des lois instituées et voulues qui sont censées régler les comportements de tous les citoyens. Montesquieu pense à juste titre que ces dites lois sont indispensables dans le mesure où l’homme en tant qu’être naturel est soumis aux lois de sa nature humaine, mais parce que doté d’intelligence, il est capable d’agir de façon désordonnée. Pour preuve, en bafouant la constitution de notre pays, le Général Abdel Aziz a créé le désordre et mis en place tous les ingrédients d’une guerre civile.
L’histoire de notre pays retiendra que le Général est l’homme qui a tenté d’enterrer notre jeune expérience démocratique. De la même façon, cette histoire marquera d’une pierre noire les propos insultants du guide libyen Mouammar Kadhafi et du président français Nicolas Sarkozy minimisant le combat héroïque du peuple mauritanien contre les usurpateurs responsables du coup d’état du 6 août 2008. Le président français n’avait-il pas dit, il n y a pas si longtemps à Dakar, que l’Afrique n’était pas encore rentrée dans l’histoire. Ces propos tranchent nettement avec ceux de Maximilien Robespierre l’un de ses illustres compatriotes, un digne acteur et représentant de la révolution française qui croyait en la déclaration universelle des droits de l’homme. Se prononçant sur la question du maintien de l’esclavage dans les colonies françaises des Antilles, Robespierre dit en substance : un peuple qui ne respecte pas la liberté des autres peuples ne sait pas non plus ce qu’est la liberté. Si ce n’était pas la foi en la liberté qui eut cru qu’un jour l’Amérique qui fut esclavagiste aurait porté à la présidence des Etats-Unis un président noir, en la personne de Barak Obama., pour conduire sa destinée. Cette foi religieuse en la liberté -à laquelle s’est abreuvé le charismatique combattant pour le droit civique des africains américains, le Pasteur martin Luther King- est inscrite en lettre d’or dans la Déclaration d’indépendance des Etats-Unis qui est la première déclaration universelle des droits de l’homme. Il est dit dans cette déclaration datant de 1776, précédent de treize années la Déclaration universelle des droits de l’homme française : « Tous les hommes sont créés égaux ; ils sont doués par le créateur de droits inaliénables ; parmi ces droits se trouvent la vie, la liberté et la poursuite du bonheur ». Cette déclaration inspirera la constitution américaine de 1787 dite de Philadelphie, et ce à travers les 10 premiers amendements placés en préambule de cette constitution et qui correspond à une déclaration des droits le (Bill of rights) ratifiés en 1791. Ces amendements appelleront d’autres amendements et le vote d’autres lois, notamment le 14ième amendement abolissant l’esclavage ratifié en 1868 et l’adoption des lois civiques entre 1957 et 1965 garantissant le droit de vote aux africains américains. C’est parce que des générations d’américains ont porté et incarnés des idées nobles comme la défense de la liberté, qu’ils les ont fixées dans une constitution et mises en œuvre par des institutions stables, pour le bonheur de tout un peuple, que le président Barak Obama a pu dire, un jour, Yes We can. Il a cru au rêve du pasteur Martin Luther King, celle d’une Amérique réconciliée, son peuple la main dans la main chantant à l’unisson le chant de la liberté. L’Amérique a cru nécessaire, impérieux et indispensable d’appliquer ce que lui dicte sa foi chrétienne et son adhésion réfléchie aux idées du siècle des lumières. Aussi, des générations d’américains ont su à l’instar de, Hobbes, Montesquieu, Rousseau, Hegel, Weber ou d’autres penseurs aussi illustres et quelque que soit la distance temporelle qui peut les séparer les uns des autres, appliquer la devise des lumières que le philosophe Kant résume par la formule « Sapere Aude » c'est-à-dire Ose Savoir. Parce que tous ont osé savoir, ils ont pu inspirer l’humanité et contribuer à son avancement.
Il est vrai que nous sommes en quête permanente de la perfection, il va sans dire qu’il n’y a pas d’oeuvres humaines parfaites, et à ce propos, les aspects souvent européocentristes qu’on rencontre dans l’ouvrage des penseurs que nous avons abordés, ici, ne changent en rien en la qualité de leurs contributions. Celles-ci nous invitent de toute façon à la réflexion, car elles s’adressent à la Raison universelle dont le créateur a doté tous les hommes.
Osons espérer, que cette présente contribution nous aidera, nous mauritaniens, à transcender la grave crise que nous traversons depuis le coup d’Etat du 6 août 2009.
Dakar, le 15 avril 2009
Moustapha Touré
Pourquoi, raisonnablement, devons-nous refuser ces élections ne visant ni plus ni moins qu’à légitimer le coup d’état honteux du 6 août 2008 et cherchant, à la même occasion, à faire le lit du despotisme dans notre pays ? Un coup d’état qui tente d’évincer le président démocratiquement élu de la république islamique de Mauritanie, Sidi Mohamed ould Cheikh Abdallahi et unanimement condamné par la Communauté internationale. Quel danger guette notre pays, s’il s’y soumet ? Pourquoi devons-nous exiger le retour à la légalité constitutionnelle et à l’Etat de droit? En quoi le despotisme constitue-t-il un danger pour nos libertés et notre épanouissement ? Quel rôle et place incombent aux fonctionnaires de l’Etat mauritanien face à la crise qui secoue notre pays ? Les fonctionnaires que le philosophe allemand Georg Wilhelm Friedrich Hegel appelle « la classe universelle » et qualifie de « conscience juridique du peuple » ou « d’intelligence cultivée du peuple », éléments constitutifs et donc indispensables à la rationalité d’un Etat. Au regard de l’histoire, que doit nous inspirer les expériences politiques d’autres nations ?
Pour répondre à ces questions vitales, nous proposons de revisiter la philosophie politique, de manière générale, et la sociologie compréhensive de Max Weber. Le réexamen des principes qui sous-tendent ces savoirs stimulera, nous osons l’espérer, le combat salutaire que les forces vives de notre pays mènent contre le retour du régime despotique que des militaires égarés et leurs suppôts veulent imposer à notre peuple et visant à le priver de sa liberté.
S’il y’a quelque chose que partagent bien le général Abdel Aziz avec notre fameux journaliste politicien c’est bien la haine de la loi, de la constitution de notre pays. Le philosophe Hegel dit de la haine de la loi, qu’elle est le démon « le schibboleth auquel se laissent manifestement et infailliblement reconnaître le fanatisme, la faiblesse d’esprit et l’hypocrisie des bonnes intentions, quels que soient les vêtements dont il se recouvre » (cf. philosophie du droit, par.258, add). A cet égard, on comprend mieux l’intérêt que l’on doit accorder à l’existence des lois fixes et précisément définies liant les gouvernants aussi bien que les gouvernés et qui permet de distinguer l’Etat rationnel ou Etat de droit de toute forme de despotisme. Aussi faut-il préciser, que dans un Etat rationnel, les sujets en se soumettant aux autorités, ils obéissent à la loi d’où émane le pouvoir de celles-ci ; et conformément à laquelle elles statuent. De ce fait le devoir qui contraint le citoyen est de nature différente d’une relation d’obédience privée. C’est en ce sens que pour Hegel la constitutionnalité de l’Etat achève l’idéalisation, autrement dit la dépersonnalisation des droits et des devoirs. De ce point de vue, tout citoyen quel qu’il soit doit conformer ses décisions aux exigences de la légalité, et non au contenu arbitraire de sa seule volonté subjective. Ce qui fait dire au sociologue Max Weber, qu’une distance temporelle nous rapproche plus que de Hegel, que c’est la suppression des rapports d’obédience personnels qui est le caractère distinctif de la domination légale propre à l’Etat rationnel.
A l’adresse de nos fonctionnaires mauritaniens à toutes fins utiles, de sorte qu’ils se rappellent qu’ils doivent se démarquer logiquement des interventions injustifiées et inconsidérées, d’un Général potentat, dans tous les secteurs de la vie publique dans notre pays, nous proposons d’exposer ici quelques caractéristiques résumées du fonctionnariat spécialisé, dans un Etat moderne, selon Weber. Soulignons pour lever toute équivoque que c’est parce que nous trouvons certainement des similitudes entre les descriptions que fait Weber de l’Etat rationnel reposant sur le fonctionnariat spécialisé et la fonction publique mauritanienne, que nous nous autorisons, pour les besoins de la démarche qui nous concerne, une telle contextualisation. Selon Weber, avant tout, les fonctionnaires sont personnellement libres, non liés à aucun rapport d’allégeance personnelle, de sorte que leur engagement se fait sur une base contractuelle ; ils ne sont pas propriétaires de leur emploi, moins encore des moyens permettant de l’exercer ; leur recrutement se fait en fonction de leur qualification que vérifie un examen et sanctionne un diplôme les rendant apte à remplir une fonction aux compétences définies, précises et limitées ; cette fonction étant une activité principale voire unique est rémunérée par un salaire leur permettant d’y consacrer la totalité de leurs temps de travail, celui-ci varie compte tenu de différents paramètres, il s’agit de l’avancement dans la carrière qui doit être assorti de l’assurance d’une pension de retraite ; les corps de fonctionnaire parce que organisés en hiérarchie sont strictement soumis à une discipline.
Par ce rappel, nous avons voulu ici, par un effet de feed back, attirer l’attention des fonctionnaires mauritaniens administrateurs ou enseignants éducateurs , en tant que « conscience juridique » et « intelligence cultivée du peuple », sur leur rôle d’avant-garde dans la défense de l’Etat dont ils sont les premières sentinelles et les piliers, en ce sens qu’il leur appartient non seulement de veiller à l’exécution de ses lois et à leur respect seuls garants du bon fonctionnement de ses institutions , mais aussi de veiller à l’éducation du peuple par l’enseignement. A ce titre, ils doivent constituer le front le plus solide contre l’usurpation du pouvoir opérée par la junte militaire le 6 août 2008, dans notre pays. Notre peuple doit vaincre la crainte du despotisme, au risque de sombrer. Ecoutons ce que dit, Charles Louis de Secondât Baron de Montesquieu et de la Brède, de la législation et du despotisme et méditons le «…Pour former un gouvernement modéré, il faut combiner les puissances, les régler, les tempérer, les faire agir… c’est un chef d’œuvre de législation…un gouvernement despote saute pour ainsi dire aux yeux ; il est uniforme partout ». Le principe du despotisme est la crainte « Il faut donc qu’il abatte tous les courages et y éteignent jusqu’au moindre sentiment d’ambition », il rend impossible toute édification de fortune, aucune position stable. Le despotisme détruit toute vie sociale ; toutes les personnes y sont égales parce que personne n’y est rien, l’éducation s’y réduit à l’apprentissage de la crainte, la défense à s’entourer d’un désert.
Nous sommes prévenus de ce que nous réserve le Général Aziz et il nous en a donné un avant goût, dans la mesure où il use unilatéralement des deniers publiques, emprisonne les adversaires à son putsch, récompense ceux qui le soutiennent, par des promotions et des recrutements dans l’administration totalement injustifiés, il monopolise les média d’Etat, il confisque nos libertés privées et publiques. Bref, il cultive la crainte chez nos paisibles citoyens qui, il y a huit mois, vivaient sereinement dans un Etat de droit.
Que notre Général sache que le peuple mauritanien, en adoptant une constitution démocratique, a établi en toute souveraineté et librement un contrat qu’il se doit de respecter. Ce peuple n’a pas choisi d’adhérer à un pacte Hobbesien visant à soumettre l’abandon de son droit naturel à l’institution d’un quelconque souverain non partie au contrat. Aussi, doit-on penser, pour paraphraser Jean Jacques Rousseau, que les mauritaniens, à l’occasion de leur contrat, ont mis « en commun » leur personne et toute leur puissance « sous la suprême direction de la volonté générale » et ont reçu « en corps chaque membre comme partie indivisible du Tout » (cf. contrat social, 1, 6). Notre Général ignore la nature profonde, les principes qui sont au fondement du choix du peuple mauritanien, lorsque celui-ci a opté pour l’entrée en démocratie. Le Général Aziz a-t-il vraiment compris pourquoi nous nous sommes choisis une constitution comme ensemble de lois positives ? Ce choix est métaphysique, il concerne la vie et la survie de la société mauritanienne. Il s’agit pour notre peuple de vivre dans la paix et la concorde civile. Et pour cela, nous avons adopté ces lois positives c'est-à-dire des lois instituées et voulues qui sont censées régler les comportements de tous les citoyens. Montesquieu pense à juste titre que ces dites lois sont indispensables dans le mesure où l’homme en tant qu’être naturel est soumis aux lois de sa nature humaine, mais parce que doté d’intelligence, il est capable d’agir de façon désordonnée. Pour preuve, en bafouant la constitution de notre pays, le Général Abdel Aziz a créé le désordre et mis en place tous les ingrédients d’une guerre civile.
L’histoire de notre pays retiendra que le Général est l’homme qui a tenté d’enterrer notre jeune expérience démocratique. De la même façon, cette histoire marquera d’une pierre noire les propos insultants du guide libyen Mouammar Kadhafi et du président français Nicolas Sarkozy minimisant le combat héroïque du peuple mauritanien contre les usurpateurs responsables du coup d’état du 6 août 2008. Le président français n’avait-il pas dit, il n y a pas si longtemps à Dakar, que l’Afrique n’était pas encore rentrée dans l’histoire. Ces propos tranchent nettement avec ceux de Maximilien Robespierre l’un de ses illustres compatriotes, un digne acteur et représentant de la révolution française qui croyait en la déclaration universelle des droits de l’homme. Se prononçant sur la question du maintien de l’esclavage dans les colonies françaises des Antilles, Robespierre dit en substance : un peuple qui ne respecte pas la liberté des autres peuples ne sait pas non plus ce qu’est la liberté. Si ce n’était pas la foi en la liberté qui eut cru qu’un jour l’Amérique qui fut esclavagiste aurait porté à la présidence des Etats-Unis un président noir, en la personne de Barak Obama., pour conduire sa destinée. Cette foi religieuse en la liberté -à laquelle s’est abreuvé le charismatique combattant pour le droit civique des africains américains, le Pasteur martin Luther King- est inscrite en lettre d’or dans la Déclaration d’indépendance des Etats-Unis qui est la première déclaration universelle des droits de l’homme. Il est dit dans cette déclaration datant de 1776, précédent de treize années la Déclaration universelle des droits de l’homme française : « Tous les hommes sont créés égaux ; ils sont doués par le créateur de droits inaliénables ; parmi ces droits se trouvent la vie, la liberté et la poursuite du bonheur ». Cette déclaration inspirera la constitution américaine de 1787 dite de Philadelphie, et ce à travers les 10 premiers amendements placés en préambule de cette constitution et qui correspond à une déclaration des droits le (Bill of rights) ratifiés en 1791. Ces amendements appelleront d’autres amendements et le vote d’autres lois, notamment le 14ième amendement abolissant l’esclavage ratifié en 1868 et l’adoption des lois civiques entre 1957 et 1965 garantissant le droit de vote aux africains américains. C’est parce que des générations d’américains ont porté et incarnés des idées nobles comme la défense de la liberté, qu’ils les ont fixées dans une constitution et mises en œuvre par des institutions stables, pour le bonheur de tout un peuple, que le président Barak Obama a pu dire, un jour, Yes We can. Il a cru au rêve du pasteur Martin Luther King, celle d’une Amérique réconciliée, son peuple la main dans la main chantant à l’unisson le chant de la liberté. L’Amérique a cru nécessaire, impérieux et indispensable d’appliquer ce que lui dicte sa foi chrétienne et son adhésion réfléchie aux idées du siècle des lumières. Aussi, des générations d’américains ont su à l’instar de, Hobbes, Montesquieu, Rousseau, Hegel, Weber ou d’autres penseurs aussi illustres et quelque que soit la distance temporelle qui peut les séparer les uns des autres, appliquer la devise des lumières que le philosophe Kant résume par la formule « Sapere Aude » c'est-à-dire Ose Savoir. Parce que tous ont osé savoir, ils ont pu inspirer l’humanité et contribuer à son avancement.
Il est vrai que nous sommes en quête permanente de la perfection, il va sans dire qu’il n’y a pas d’oeuvres humaines parfaites, et à ce propos, les aspects souvent européocentristes qu’on rencontre dans l’ouvrage des penseurs que nous avons abordés, ici, ne changent en rien en la qualité de leurs contributions. Celles-ci nous invitent de toute façon à la réflexion, car elles s’adressent à la Raison universelle dont le créateur a doté tous les hommes.
Osons espérer, que cette présente contribution nous aidera, nous mauritaniens, à transcender la grave crise que nous traversons depuis le coup d’Etat du 6 août 2009.
Dakar, le 15 avril 2009
Moustapha Touré