Levée de fonds, mobilisation des électeurs, débats d’idées… A l’approche du scrutin du 17 novembre, le parti au pouvoir compte sur ses militants au sein de la diaspora.
Cinq jours après son lancement, vendredi 18 octobre, la cagnotte lancée par le Pastef France avait déjà récolté 6 000 euros. L’argent collecté par la branche française des Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef), le parti du président Bassirou Diomaye Faye et du premier ministre Ousmane Sonko, doit contribuer au financement de la campagne des élections législatives du 17 novembre.
Tamsir Bathily, militant du Pastef France, espère obtenir le même succès que pour la présidentielle, en mars. Lors d’un dîner de gala, en janvier, à Paris, lui et ses camarades avaient fièrement posé avec un fac-similé géant de chèque affichant les fonds récoltés : 125 millions de francs CFA, soit 190 000 euros.
« Pour ces élections législatives comme pour les derniers scrutins, la section française du Pastef va jouer un rôle important », indique un dirigeant du parti qui a requis l’anonymat. Dès 2017, le Pastef avait fait un meilleur score en France qu’au Sénégal. Aux élections législatives de 2022 et présidentielle de 2024, il était arrivé en tête dans la circonscription Europe du Nord et du Centre, où trois postes de députés sont en jeu aux prochaines législatives.
La communauté sénégalaise en France est estimée entre 200 000 et 300 000 personnes. Parmi elles, le Pastef France revendique 10 000 adhérents à jour de cotisation. Mais il y a plus que les enjeux purement mathématiques. Traditionnellement, on prête aux électeurs de la diaspora un rôle d’influenceurs. « Dans certaines familles, le membre résidant à l’étranger peut être un prescripteur, mais c’est une tendance qui s’étiole », nuance Tamsir Bathily.
« Il est difficile de savoir si les électeurs de la diaspora ont ce rôle particulier. Quoi qu’il en soit, la diaspora a vite été un axe de la stratégie d’Ousmane Sonko quand il a fondé le Pastef, en 2014 », explique Amadou Tidiane Thiello, doctorant à Bordeaux, qui étudie le Pastef en Europe. Des cadres du parti se rendent régulièrement en France pour structurer les militants, à l’instar de Bassirou Diomaye Faye, qui, avant d’arriver au pouvoir, a effectué deux voyages à Paris en 2018 et en 2022.
Un activisme effréné
Lors de la crise politique entre 2021 et 2024, les « patriotes » résidant en France se sont lancés dans un activisme effréné. Tamsir Bathily se souvient des nombreux rassemblements, les samedis, sur des places de Bordeaux, Paris ou Lyon, ainsi que des manifestations lorsque l’ancien président Macky Sall se rendait à Paris. « Les images de ces actions sur les réseaux sociaux ont eu un fort effet sur les Sénégalais », observe Amadou Tidiane Thiello.
La section française du Pastef est aussi un vivier dans lequel le parti pioche depuis qu’il est aux affaires. Certains de ses cadres ont ainsi été appelés au Sénégal pour occuper des postes dans la nouvelle administration. Parmi eux, son coordinateur, Alioune Sall, devenu ministre de la communication, des télécommunications et du numérique. Fatou Kiné Diakhaté, diplômée en finance, a quant à elle rejoint le cabinet présidentiel, tandis que Jean-Michel Sène est devenu, à seulement 28 ans, directeur général de l’Agence sénégalaise d’électrification rurale.
Au sein du parti, la section française porte des sujets spécifiques, voire alimente des formes d’expertise. Dette à l’égard de la France, restitution des œuvres d’art, mémoire des tirailleurs sénégalais… « Tout ce qui touche aux questions postcoloniales tient à cœur à nos militants », souligne Tamsir Bathily.
Les militants du Pastef France ont également tissé des liens forts avec la classe politique française. Durant la crise politique qui a précédé la présidentielle de mars, ils ont rencontré le député de gauche Arnaud Le Gall, membre de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale. Depuis, les liens avec la France insoumise (LFI) se sont consolidés. Mariama Dieng, cadre en France et proche d’Ousmane Sonko, a participé à l’organisation de la visite de Jean-Luc Mélenchon à Dakar, en mai, et œuvré à la venue d’Ayib Daffé, le secrétaire général du Pastef, aux universités d’été de LFI en août.
Jules Crétois (Dakar, correspondance)
Source : Le Monde - (Le 24 octobre 2024)
Cinq jours après son lancement, vendredi 18 octobre, la cagnotte lancée par le Pastef France avait déjà récolté 6 000 euros. L’argent collecté par la branche française des Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef), le parti du président Bassirou Diomaye Faye et du premier ministre Ousmane Sonko, doit contribuer au financement de la campagne des élections législatives du 17 novembre.
Tamsir Bathily, militant du Pastef France, espère obtenir le même succès que pour la présidentielle, en mars. Lors d’un dîner de gala, en janvier, à Paris, lui et ses camarades avaient fièrement posé avec un fac-similé géant de chèque affichant les fonds récoltés : 125 millions de francs CFA, soit 190 000 euros.
« Pour ces élections législatives comme pour les derniers scrutins, la section française du Pastef va jouer un rôle important », indique un dirigeant du parti qui a requis l’anonymat. Dès 2017, le Pastef avait fait un meilleur score en France qu’au Sénégal. Aux élections législatives de 2022 et présidentielle de 2024, il était arrivé en tête dans la circonscription Europe du Nord et du Centre, où trois postes de députés sont en jeu aux prochaines législatives.
La communauté sénégalaise en France est estimée entre 200 000 et 300 000 personnes. Parmi elles, le Pastef France revendique 10 000 adhérents à jour de cotisation. Mais il y a plus que les enjeux purement mathématiques. Traditionnellement, on prête aux électeurs de la diaspora un rôle d’influenceurs. « Dans certaines familles, le membre résidant à l’étranger peut être un prescripteur, mais c’est une tendance qui s’étiole », nuance Tamsir Bathily.
« Il est difficile de savoir si les électeurs de la diaspora ont ce rôle particulier. Quoi qu’il en soit, la diaspora a vite été un axe de la stratégie d’Ousmane Sonko quand il a fondé le Pastef, en 2014 », explique Amadou Tidiane Thiello, doctorant à Bordeaux, qui étudie le Pastef en Europe. Des cadres du parti se rendent régulièrement en France pour structurer les militants, à l’instar de Bassirou Diomaye Faye, qui, avant d’arriver au pouvoir, a effectué deux voyages à Paris en 2018 et en 2022.
Un activisme effréné
Lors de la crise politique entre 2021 et 2024, les « patriotes » résidant en France se sont lancés dans un activisme effréné. Tamsir Bathily se souvient des nombreux rassemblements, les samedis, sur des places de Bordeaux, Paris ou Lyon, ainsi que des manifestations lorsque l’ancien président Macky Sall se rendait à Paris. « Les images de ces actions sur les réseaux sociaux ont eu un fort effet sur les Sénégalais », observe Amadou Tidiane Thiello.
La section française du Pastef est aussi un vivier dans lequel le parti pioche depuis qu’il est aux affaires. Certains de ses cadres ont ainsi été appelés au Sénégal pour occuper des postes dans la nouvelle administration. Parmi eux, son coordinateur, Alioune Sall, devenu ministre de la communication, des télécommunications et du numérique. Fatou Kiné Diakhaté, diplômée en finance, a quant à elle rejoint le cabinet présidentiel, tandis que Jean-Michel Sène est devenu, à seulement 28 ans, directeur général de l’Agence sénégalaise d’électrification rurale.
Au sein du parti, la section française porte des sujets spécifiques, voire alimente des formes d’expertise. Dette à l’égard de la France, restitution des œuvres d’art, mémoire des tirailleurs sénégalais… « Tout ce qui touche aux questions postcoloniales tient à cœur à nos militants », souligne Tamsir Bathily.
Les militants du Pastef France ont également tissé des liens forts avec la classe politique française. Durant la crise politique qui a précédé la présidentielle de mars, ils ont rencontré le député de gauche Arnaud Le Gall, membre de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale. Depuis, les liens avec la France insoumise (LFI) se sont consolidés. Mariama Dieng, cadre en France et proche d’Ousmane Sonko, a participé à l’organisation de la visite de Jean-Luc Mélenchon à Dakar, en mai, et œuvré à la venue d’Ayib Daffé, le secrétaire général du Pastef, aux universités d’été de LFI en août.
Jules Crétois (Dakar, correspondance)
Source : Le Monde - (Le 24 octobre 2024)