L’urgence nous prend à la gorge. Notre pays s’enfonce, dans l’indifférence quasi générale et la connivence d’une partie des élites, dans les sables mouvants du chaos.
Le recensement à vocation d’état-civil présenté par le pouvoir comme une panacée pour mettre fin au désordre administratif supposé régner en la matière, nous installera fatalement dans le tourbillon des incertitudes et les risques de confrontation identitaire. Car, c’est bien cela l’enjeu réel du processus engagé par le pouvoir.
Et c’est bien cela qui, seul, peut expliquer cette ambiance étrange qui règne autour de l’opération administrative la plus calamiteuse de l’histoire de ce pays qui en a vu pourtant bien d’autres…
Des dizaines de milliers de Hal pular, wolofs et soninkés, des milliers d’autres mauritaniens ou mauritaniennes aux noms à consonance « étrangère » sont d’ores et déjà soumis à la question, écartés avec mépris et voués à la dérive apatride dans leur propre pays par la stupidité d’obscurs petites mains chauvines, à l’œuvre dans l’ivresse immodérée de la toute puissance bureaucratique. S’il n’ya plus de bornes, il n’y a plus de limites…
Dans les « centres d’accueil citoyen » sont installés des comités ad hoc qui opèrent à la hache, à visage découvert, pour remettre systématiquement en cause la nationalité des négro-africains et installer ainsi la « vraie Mauritanie », une Mauritanie réduite à sa plus simple expression, la « Mauritanie Nouvelle » tant attendue par les thuriféraires du putschisme, singulièrement négro-africains, qui rasent désormais les murs, hagards, comme sonnés par l’ampleur de leur complicité au crime qui est là maintenant et qui se préparait depuis longtemps…
Où sont-ils donc qui nous avaient promis, à l’ombre de cette Mauritanie- là, la fin des ambigüités chauvines, l’instauration d’une ère d’égalité nationale et de paix civile, la refondation d’un Etat pour tous ? Une prière à Kaëdi pour des morts sans sépultures et voilà lâchée la machine de l’anesthésie générale qui autorise d’opérer sans coup férir la rupture d’identité de notre patrie…
J’ai été profondément blessé d’entendre poser à un cadre du pays, désemparé et honteux, la question de savoir « pourquoi tu ne parles pas arabe ». A cet autre vieillard, s’il avait des parentés au Sénégal, s’il se rendait souvent « dans ce pays étranger ». A un militaire de haut rang à la retraite de l’armée nationale, comment il a gagné ses galons et s’il connaissait le commandant Soueidatt. A une femme sexagénaire, où a été enterré son père. A un jeune, quels versets de Coran il récite.
A moi-même, si je connaissais « l’avocat Ould Abdel Kader, Immeuble El Mamy, à Nouakchott » et si ma langue était le poular…Il y’en a de bien plus tristes encore dans ce florilège indécent et qui désemparent et désorientent après des heures et des heures passées à attendre son tour… pour le purgatoire.
Cette opération de recensement apparaît bien comme un traquenard, un véritable acte de trahison de l’Etat à l’égard des citoyens humbles, et spécialement des négro-africains accourus par milliers pour ne pas être en reste, car depuis plus d’une vingtaine d’années, ils vivent en permanence sous la pression cauchemardesque des vexations et des rackets pour défaut de pièces d’état-civil, qu’ils en possèdent ou qu’ils les aient perdu, sur toutes les routes et tous les chemins vicinaux de ce pays. Ils se savent spécialement visés pour toute opération de ce genre, depuis plusieurs décennies.
Ils sont venus donc, munis des pièces d’état-civil valables, établis par leur administration nationale et locale. Mais, ce ne sont pas ces pièces qui sont à l’ordre du jour dans ces « centres d’accueil citoyens » ! Ce qui est à l’ordre du jour, c’est leur parcours personnel, leur identité profonde, leur mauritanité fatalement ambiguë, forcément douteuse.
Il ne s’agit pas comme l’impose le droit, d’une simple substitution de pièces nouvelles à de pièces anciennes comme ce fut le cas précédemment, lors de la délivrance des fameuses cartes d’identité infalsifiables à l’époque de M.Ould Taya, pour mettre fin à l’anarchie des pièces en carton jaune. Il s’agit maintenant d’une identification à forte teneur identitaire biaisée du pays.
Un calcul à somme forcément négative pour eux. Donc, dans cette logique, peu importe que le droit s’oppose à ce que de simples citoyens choisis suivant des critères illicites évidents, en raison de leur appartenance ethnique ou tribale, puissent se substituer aux seules autorités habilitées à mettre en cause la nationalité de n’importe lequel d’entre nous dans le cadre d’une opération nécessairement judiciaire.
L’esprit des lois a déserté ce pays, magistrats, policiers et autorités administratives régulières étant victimes de la même vindicte populiste pour laisser officier des groupes agissant désormais impunément, en nervis administratifs missionnaires.
Moi, j’ai honte surtout de ce silence assourdissant, accablant dans lequel se déploie à nouveau le rouleau compresseur de la bêtise, alimentée à feu vif par l’esprit d’improvisation et le laisser-aller des plus basses passions. Ceux, députés ou membres de la société civile, qui ont malgré tout protesté devant ce drame à ciel ouvert des communautés négro-africaines -qui n’ont, à ce jour, pas eu la justice qu’ils réclament suite aux crimes contre l’humanité dont ils furent victimes il y’a 20 ans- ne sont pas encore suffisamment audibles dans leur protestation ou le font, le plus souvent, dans la seule perspective des prochaines élections : le fichier qui en sera sorti sera-t-il ou non fiable ? Les inscriptions sont-elles transparentes etc. ?
Mais, là n’est pas, n’est plus le problème. Le vrai problème est de savoir si un recensement sur une base ethnique ou raciale est politiquement et moralement acceptable, en soi. D’évidence c’est non ! Pour notre sécurité commune, notre paix civile et pour l’unité de notre patrie, pendant qu’il est encore temps, il faut arrêter la machine à fabriquer la haine et la division.
Le monde dans lequel nous vivons n’est plus celui d’il y’a vingt ou trente ans, où l’on pouvait passer par pertes et profits politiques, l’anéantissement physique ou administratif des gens, en raison de leur peau, de leur langue, de leur religion ou de leurs opinions politiques. Notre époque est celle de l’indignation et de la résistance.
Pour les blessures faites à notre peuple, pour les risques très graves que fait peser cette parodie administrative à relents particularistes sur la pérennité et l’intégrité de notre Etat, Je proteste avec véhémence et réclame pour tous, le respect de la loi républicaine et de la dignité humaine !
Contact : ufpweb2@yahoo.fr
UFP
VIA CRIDEM
Le recensement à vocation d’état-civil présenté par le pouvoir comme une panacée pour mettre fin au désordre administratif supposé régner en la matière, nous installera fatalement dans le tourbillon des incertitudes et les risques de confrontation identitaire. Car, c’est bien cela l’enjeu réel du processus engagé par le pouvoir.
Et c’est bien cela qui, seul, peut expliquer cette ambiance étrange qui règne autour de l’opération administrative la plus calamiteuse de l’histoire de ce pays qui en a vu pourtant bien d’autres…
Des dizaines de milliers de Hal pular, wolofs et soninkés, des milliers d’autres mauritaniens ou mauritaniennes aux noms à consonance « étrangère » sont d’ores et déjà soumis à la question, écartés avec mépris et voués à la dérive apatride dans leur propre pays par la stupidité d’obscurs petites mains chauvines, à l’œuvre dans l’ivresse immodérée de la toute puissance bureaucratique. S’il n’ya plus de bornes, il n’y a plus de limites…
Dans les « centres d’accueil citoyen » sont installés des comités ad hoc qui opèrent à la hache, à visage découvert, pour remettre systématiquement en cause la nationalité des négro-africains et installer ainsi la « vraie Mauritanie », une Mauritanie réduite à sa plus simple expression, la « Mauritanie Nouvelle » tant attendue par les thuriféraires du putschisme, singulièrement négro-africains, qui rasent désormais les murs, hagards, comme sonnés par l’ampleur de leur complicité au crime qui est là maintenant et qui se préparait depuis longtemps…
Où sont-ils donc qui nous avaient promis, à l’ombre de cette Mauritanie- là, la fin des ambigüités chauvines, l’instauration d’une ère d’égalité nationale et de paix civile, la refondation d’un Etat pour tous ? Une prière à Kaëdi pour des morts sans sépultures et voilà lâchée la machine de l’anesthésie générale qui autorise d’opérer sans coup férir la rupture d’identité de notre patrie…
J’ai été profondément blessé d’entendre poser à un cadre du pays, désemparé et honteux, la question de savoir « pourquoi tu ne parles pas arabe ». A cet autre vieillard, s’il avait des parentés au Sénégal, s’il se rendait souvent « dans ce pays étranger ». A un militaire de haut rang à la retraite de l’armée nationale, comment il a gagné ses galons et s’il connaissait le commandant Soueidatt. A une femme sexagénaire, où a été enterré son père. A un jeune, quels versets de Coran il récite.
A moi-même, si je connaissais « l’avocat Ould Abdel Kader, Immeuble El Mamy, à Nouakchott » et si ma langue était le poular…Il y’en a de bien plus tristes encore dans ce florilège indécent et qui désemparent et désorientent après des heures et des heures passées à attendre son tour… pour le purgatoire.
Cette opération de recensement apparaît bien comme un traquenard, un véritable acte de trahison de l’Etat à l’égard des citoyens humbles, et spécialement des négro-africains accourus par milliers pour ne pas être en reste, car depuis plus d’une vingtaine d’années, ils vivent en permanence sous la pression cauchemardesque des vexations et des rackets pour défaut de pièces d’état-civil, qu’ils en possèdent ou qu’ils les aient perdu, sur toutes les routes et tous les chemins vicinaux de ce pays. Ils se savent spécialement visés pour toute opération de ce genre, depuis plusieurs décennies.
Ils sont venus donc, munis des pièces d’état-civil valables, établis par leur administration nationale et locale. Mais, ce ne sont pas ces pièces qui sont à l’ordre du jour dans ces « centres d’accueil citoyens » ! Ce qui est à l’ordre du jour, c’est leur parcours personnel, leur identité profonde, leur mauritanité fatalement ambiguë, forcément douteuse.
Il ne s’agit pas comme l’impose le droit, d’une simple substitution de pièces nouvelles à de pièces anciennes comme ce fut le cas précédemment, lors de la délivrance des fameuses cartes d’identité infalsifiables à l’époque de M.Ould Taya, pour mettre fin à l’anarchie des pièces en carton jaune. Il s’agit maintenant d’une identification à forte teneur identitaire biaisée du pays.
Un calcul à somme forcément négative pour eux. Donc, dans cette logique, peu importe que le droit s’oppose à ce que de simples citoyens choisis suivant des critères illicites évidents, en raison de leur appartenance ethnique ou tribale, puissent se substituer aux seules autorités habilitées à mettre en cause la nationalité de n’importe lequel d’entre nous dans le cadre d’une opération nécessairement judiciaire.
L’esprit des lois a déserté ce pays, magistrats, policiers et autorités administratives régulières étant victimes de la même vindicte populiste pour laisser officier des groupes agissant désormais impunément, en nervis administratifs missionnaires.
Moi, j’ai honte surtout de ce silence assourdissant, accablant dans lequel se déploie à nouveau le rouleau compresseur de la bêtise, alimentée à feu vif par l’esprit d’improvisation et le laisser-aller des plus basses passions. Ceux, députés ou membres de la société civile, qui ont malgré tout protesté devant ce drame à ciel ouvert des communautés négro-africaines -qui n’ont, à ce jour, pas eu la justice qu’ils réclament suite aux crimes contre l’humanité dont ils furent victimes il y’a 20 ans- ne sont pas encore suffisamment audibles dans leur protestation ou le font, le plus souvent, dans la seule perspective des prochaines élections : le fichier qui en sera sorti sera-t-il ou non fiable ? Les inscriptions sont-elles transparentes etc. ?
Mais, là n’est pas, n’est plus le problème. Le vrai problème est de savoir si un recensement sur une base ethnique ou raciale est politiquement et moralement acceptable, en soi. D’évidence c’est non ! Pour notre sécurité commune, notre paix civile et pour l’unité de notre patrie, pendant qu’il est encore temps, il faut arrêter la machine à fabriquer la haine et la division.
Le monde dans lequel nous vivons n’est plus celui d’il y’a vingt ou trente ans, où l’on pouvait passer par pertes et profits politiques, l’anéantissement physique ou administratif des gens, en raison de leur peau, de leur langue, de leur religion ou de leurs opinions politiques. Notre époque est celle de l’indignation et de la résistance.
Pour les blessures faites à notre peuple, pour les risques très graves que fait peser cette parodie administrative à relents particularistes sur la pérennité et l’intégrité de notre Etat, Je proteste avec véhémence et réclame pour tous, le respect de la loi républicaine et de la dignité humaine !
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