Après les «représentantes» des femmes auxquelles il avait consacré quelques heures, le général Ould Abdel Aziz a reçu, cette semaine, un parterre d’hommes d’affaires, dans la salle de réunion de la présidence. Ils étaient tous là, armateurs, banquiers, commerçants, importateurs, consignataires, assis les uns à côté des autres, souriant à la caméra qui balayait la salle et, visiblement, heureux d’être reçus par le nouvel homme fort du moment.
Après l’avoir été par tous ceux qui l’ont précédé. Tous, ou presque, ont demandé la parole. Tous, ou presque, auraient dû se taire. Aucun, à part, peut-être, un ou deux, n’a posé les problèmes qui plombent les affaires dans le pays. Et qui se nomment instabilité politique, insécurité, absence de justice, corruption, incompétence et incurie de l’administration.
Les intervenants ont tressé des lauriers à notre «guide éclairé», comme ils l’avaient déjà fait à Ould Taya, à Ely et à Sidioca, donné l’impression qu’ils se délectaient de sa présence, et loué son action, ô combien salvatrice, pour la Mauritanie.
La ficelle était tellement grosse que même le général esquissait de petits sourires en coin. Il les connaît bien. Il les a déjà entendus dire la même chose et il est persuadé qu’ils la répéteront, devant son successeur.
Sous d’autres cieux, les hommes et femmes d’affaires traitent l’Etat comme un partenaire et ne s’avilissent pas de la sorte. Mais en Mauritanie, c’est de l’Etat qu’ils ont tout obtenu: licences libres, bateaux, devises, banques (en faillite, il est vrai), sociétés, facilités diverses et marchés de gré à gré. Ils sont donc obligés de s’aplatir devant le pouvoir, quel qu’il soit. Qui ne leur a jamais tenu rigueur d’avoir pillé les ressources, fraudé le fisc, corrompu les fonctionnaires, transféré des richesses à l’extérieur. Douteuses accointances.
Certes, il existe une petite minorité, consciente de sa mission, qui investit dans le pays, fait de l’humanitaire en aidant et en soignant les pauvres. Mais elle n’est que l’arbre qui cache la forêt. La jungle infernale qui s’étale depuis plus de trente ans, à l’ombre de tous les régimes. Il serait, cependant, injuste de faire porter à notre «classe économique» la responsabilité de tous nos échecs.
Notre classe politique, elle, n’est pas seulement responsable, elle est également coupable. D’opportunisme, d’absence de principes et de visions, de légèreté, de complicité malsaine avec le pouvoir. Sous Ould Taya, pendant la transition, avec Sidioca et depuis le 06 août dernier, elle n’a eu de cesse d’accumuler les preuves de son incapacité. Sinon comment expliquer que dans un pays au bord de la rupture, au ban de la communauté internationale, menacé de sanctions, sa classe politique se révèle à ce point déficiente, qu’elle n’arrive pas à s’asseoir autour d’une table?
Pour, au moins, constater son désaccord. Certes, les positions semblent, a priori, inconciliables. Le HCE ne voulant pas entendre parler de Sidi, ce dernier se dit prêt à tout pour faire échouer le putsch. Le RFD fait désormais cavalier seul et voudrait bouter aussi bien Sidioca que les militaires hors de l’arène. Le peuple, lui, s’il avait la possibilité de choisir librement, aurait certainement voulu renvoyer tout ce beau monde dos à dos.
L’occasion rêvée d’opérer, enfin, la mue politique tant attendue. Mais, entre le rêve et la réalité, il y a encore ce «beau monde» avec lequel il faudrait compter, quelque temps…
Ahmed Ould Cheikh
Le Calame
Après l’avoir été par tous ceux qui l’ont précédé. Tous, ou presque, ont demandé la parole. Tous, ou presque, auraient dû se taire. Aucun, à part, peut-être, un ou deux, n’a posé les problèmes qui plombent les affaires dans le pays. Et qui se nomment instabilité politique, insécurité, absence de justice, corruption, incompétence et incurie de l’administration.
Les intervenants ont tressé des lauriers à notre «guide éclairé», comme ils l’avaient déjà fait à Ould Taya, à Ely et à Sidioca, donné l’impression qu’ils se délectaient de sa présence, et loué son action, ô combien salvatrice, pour la Mauritanie.
La ficelle était tellement grosse que même le général esquissait de petits sourires en coin. Il les connaît bien. Il les a déjà entendus dire la même chose et il est persuadé qu’ils la répéteront, devant son successeur.
Sous d’autres cieux, les hommes et femmes d’affaires traitent l’Etat comme un partenaire et ne s’avilissent pas de la sorte. Mais en Mauritanie, c’est de l’Etat qu’ils ont tout obtenu: licences libres, bateaux, devises, banques (en faillite, il est vrai), sociétés, facilités diverses et marchés de gré à gré. Ils sont donc obligés de s’aplatir devant le pouvoir, quel qu’il soit. Qui ne leur a jamais tenu rigueur d’avoir pillé les ressources, fraudé le fisc, corrompu les fonctionnaires, transféré des richesses à l’extérieur. Douteuses accointances.
Certes, il existe une petite minorité, consciente de sa mission, qui investit dans le pays, fait de l’humanitaire en aidant et en soignant les pauvres. Mais elle n’est que l’arbre qui cache la forêt. La jungle infernale qui s’étale depuis plus de trente ans, à l’ombre de tous les régimes. Il serait, cependant, injuste de faire porter à notre «classe économique» la responsabilité de tous nos échecs.
Notre classe politique, elle, n’est pas seulement responsable, elle est également coupable. D’opportunisme, d’absence de principes et de visions, de légèreté, de complicité malsaine avec le pouvoir. Sous Ould Taya, pendant la transition, avec Sidioca et depuis le 06 août dernier, elle n’a eu de cesse d’accumuler les preuves de son incapacité. Sinon comment expliquer que dans un pays au bord de la rupture, au ban de la communauté internationale, menacé de sanctions, sa classe politique se révèle à ce point déficiente, qu’elle n’arrive pas à s’asseoir autour d’une table?
Pour, au moins, constater son désaccord. Certes, les positions semblent, a priori, inconciliables. Le HCE ne voulant pas entendre parler de Sidi, ce dernier se dit prêt à tout pour faire échouer le putsch. Le RFD fait désormais cavalier seul et voudrait bouter aussi bien Sidioca que les militaires hors de l’arène. Le peuple, lui, s’il avait la possibilité de choisir librement, aurait certainement voulu renvoyer tout ce beau monde dos à dos.
L’occasion rêvée d’opérer, enfin, la mue politique tant attendue. Mais, entre le rêve et la réalité, il y a encore ce «beau monde» avec lequel il faudrait compter, quelque temps…
Ahmed Ould Cheikh
Le Calame