L’Assemblée nationale nigérienne vient d’adopter « Pour l’honneur de la patrie » comme nouvel hymne national pour remplacer « La Nigérienne ».
Presque soixante-trois ans après la déclaration d’indépendance du pays d’Hamani Diori, douze ans après l’adoption de la loi fondamentale nigérienne actuelle et quatre ans après la mise en place d’un comité d’experts, les Parlementaires nigériens ont adopté, le 22 juin dernier, une loi modifiant l’article premier de la Constitution, dans le but d’intégrer le texte du nouvel hymne national « L’honneur de la patrie ».
Pourquoi un tel bouleversement, en dehors d’une période révolutionnaire et à un moment où les priorités des citoyens sont le rétablissement de la sécurité et le financement de l’Aïd el-Kebir ? Chacun lit, entre les vers devenus nationaux, des intentions politiques en prise avec l’actualité…
« Cri de guerre »
Décryptant l’appel à défendre la patrie au prix du sang, des sources parlementaires évoquent la pertinence de l’hymne, en pleine période de lutte contre des groupes jihadistes notamment liés à Al-Qaïda et à l’État islamique au grand Sahara (EIGS). Au début du processus légal de réécriture, le ministre de la Renaissance culturelle ne souhaitait-il pas « une sorte de cri de guerre » capable de toucher la « fibre patriotique » et de « galvaniser la population » ?
Toujours en rapport avec la conjoncture, mais dans une perspective plus historique, certains devinent, dans cette loi, la volonté de se démarquer de la France. C’est un ressortissant de l’ancienne puissance coloniale, Maurice Albert Thiriet, qui avait composé la Nigérienne de 1961. Pour les plus souverainistes, l’hymne postcolonial évoquait une « reconnaissance » de la « liberté nouvelle » qui frisait l’inféodation à un certain paternalisme.
« Dignité du peuple »
Au moment où les juntes sahéliennes voisines, nationalistes et panafricanistes, regardent d’un mauvais œil la présence, au Niger, de quelque 1 500 soldats français, il était temps pour le comité d’experts d’incarner, comme le dit le nouveau texte, « la vaillance et la persévérance et toutes les vertus de nos dignes aïeux, guerriers intrépides déterminés et fiers ». Une manière d’assainir la collaboration franco-nigérienne en modifiant la longueur focale historique…
« Conforme à la dignité du peuple », selon le ministre de la Culture, du Tourisme et de l’Artisanat, Mohamet Hamid, le nouvel hymne a été adopté à l’unanimité.
Si de nombreux hymnes nationaux semblent anachroniques – à commencer par la Marseillaise française et son « sang impur » dont elle souhaite abreuver les sillons –, les modifications de ces chants sont rarement anodines, comme en témoigne la récente actualité algérienne. La cheffe de la diplomatie française a jugé « à contre-temps » un récent décret étendant l’utilisation d’un couplet évoquant la France coloniale dans l’hymne national de l’Algérie…
Damien Glez
Source : Jeune Afrique
Presque soixante-trois ans après la déclaration d’indépendance du pays d’Hamani Diori, douze ans après l’adoption de la loi fondamentale nigérienne actuelle et quatre ans après la mise en place d’un comité d’experts, les Parlementaires nigériens ont adopté, le 22 juin dernier, une loi modifiant l’article premier de la Constitution, dans le but d’intégrer le texte du nouvel hymne national « L’honneur de la patrie ».
Pourquoi un tel bouleversement, en dehors d’une période révolutionnaire et à un moment où les priorités des citoyens sont le rétablissement de la sécurité et le financement de l’Aïd el-Kebir ? Chacun lit, entre les vers devenus nationaux, des intentions politiques en prise avec l’actualité…
« Cri de guerre »
Décryptant l’appel à défendre la patrie au prix du sang, des sources parlementaires évoquent la pertinence de l’hymne, en pleine période de lutte contre des groupes jihadistes notamment liés à Al-Qaïda et à l’État islamique au grand Sahara (EIGS). Au début du processus légal de réécriture, le ministre de la Renaissance culturelle ne souhaitait-il pas « une sorte de cri de guerre » capable de toucher la « fibre patriotique » et de « galvaniser la population » ?
Toujours en rapport avec la conjoncture, mais dans une perspective plus historique, certains devinent, dans cette loi, la volonté de se démarquer de la France. C’est un ressortissant de l’ancienne puissance coloniale, Maurice Albert Thiriet, qui avait composé la Nigérienne de 1961. Pour les plus souverainistes, l’hymne postcolonial évoquait une « reconnaissance » de la « liberté nouvelle » qui frisait l’inféodation à un certain paternalisme.
« Dignité du peuple »
Au moment où les juntes sahéliennes voisines, nationalistes et panafricanistes, regardent d’un mauvais œil la présence, au Niger, de quelque 1 500 soldats français, il était temps pour le comité d’experts d’incarner, comme le dit le nouveau texte, « la vaillance et la persévérance et toutes les vertus de nos dignes aïeux, guerriers intrépides déterminés et fiers ». Une manière d’assainir la collaboration franco-nigérienne en modifiant la longueur focale historique…
« Conforme à la dignité du peuple », selon le ministre de la Culture, du Tourisme et de l’Artisanat, Mohamet Hamid, le nouvel hymne a été adopté à l’unanimité.
Si de nombreux hymnes nationaux semblent anachroniques – à commencer par la Marseillaise française et son « sang impur » dont elle souhaite abreuver les sillons –, les modifications de ces chants sont rarement anodines, comme en témoigne la récente actualité algérienne. La cheffe de la diplomatie française a jugé « à contre-temps » un récent décret étendant l’utilisation d’un couplet évoquant la France coloniale dans l’hymne national de l’Algérie…
Damien Glez
Source : Jeune Afrique