Ce qui se passe en Guinée est très intéressant pour nous autres mauritaniens. A plus d’un titre. En refusant le Premier ministre que Lansana Conté leur a choisi, les guinéens ont prouvé qu’ils sont en mesure de prendre en main leur destin. Sans avoir besoin d’être drainés par les politiques. On nous dira que derrière eux il y a les syndicats. Soit. L’important, c’est la prise de conscience dont a fait montre ce peuple qui, quarante neuf ans durant, a subi ses dirigeants avec leurs caprices et leurs folies. Aujourd’hui, les guinéens ont décidé tout simplement de se réveiller…
Nous autres mauritaniens, à défaut de nous réveiller comme beaucoup d’autres peuples, avions eu droit un certain 3 août à une sorte de réveil ‘gratuit’. Gratuit parce que n’ayant rompu aucun rêve concret pour ce pays. Ni de la part des réveilleurs, ni de la part des dormeurs. Le 3 août a surgi d’une sorte de vide qui n’avait pour contenu que la seule personne de Taya.
Avant cette date d’autres ‘réveils’, brutaux pour la plupart, nous avaient été infligés : 1978, 1984, 1989, 1991, 2003… pour ceux qui étaient là à chacune de ces dates. Pour ceux étaient là bien avant, sans doute le réveil de l’indépendance à dû être perturbé par la guerre du Sahara ou par quelques événements antérieures.
Notre impression de réveil est quand même intervenue dans la douceur. Et ce n’est que lorsque Eli Ould Mohamed Vall a décidé de fustiger un système auquel il a appartenu et qu’il a contribué à mettre en place vingt ans durant, que nous nous sommes crus réveillés pour de bon. Alors nous avons tout accepté : la concertation et ses décisions les plus impopulaires et les moins sures. La constitution et ses points les plus flous. La relative transparence des élections législatives et municipales.
Nous avons vraiment tout accepté. Tout supporté : les choix des membres du gouvernement, les nominations du mercredi, les scandales pardonnés…Et même les options de ceux qui prétendent pouvoir diriger mieux que quiconque ce pays trop compliqué. Leurs alliances et contre alliances. Y compris leur silence et leur passivité quand il ne le fallait pas.
A vingt six jours de l’heure de vérité, que risque-t-il de se passer ? Ceux qui jouent aux prophètes iront jusqu’à dire : beaucoup de choses. Ceux qui préfèrent patienter se garderont bien de s’aventurer dans la divination quitte à être traités d’incompétents. Ce qui est sûr, c’est que les acteurs de la transition, les autorités et le reste de la classe politique, ont tout intérêt à nous éviter le néant.
Passées les histoires des indépendants, de l’interférence des soldats, de ce fameux vote blanc, nos candidats devraient nous extirper des esprits l’esprit de corps qui anime beaucoup parmi eux. Etre président de la république doit transcender les anciennes relations louches et surtout les alliances ‘ethno-tribales’. La denrée électorale d’un candidat à la présidence ne doit pas être une tribu, une ethnie, un clan, une région...
Encore moins un peuple étranger ou une idéologie importée, ainsi que semblent le chercher certains candidats. Encore une fois, messieurs les candidats, faites le discernement entre les priorités pour un peuple. Entre l’unité nationale et une option diplomatique colorée d’idéologie contraire à nos intérêts, ne faites pas l’amalgame.
Nous n’avons pas besoin d’être comme les guinéens. Il se peut que nous les ayons inspirés d’ailleurs. Il se peut que nous leur ayons permis de comprendre qu’ils peuvent exiger de leur chef qu’il plie bagage. Seulement, il ne faut pas qu’ils fassent plus de pas que nous vers la liberté.
Avant le trois août, peut-être risquions-nous de faire ce que les guinéens sont en train de faire actuellement. Le blocage vécu par nos acteurs politiques, la précarité des conditions du travailleur mauritanien et des ‘électeurs des ghettos’ bien souvent achetés pour applaudir et pour aller accueillir les visiteurs officiels, les prisons qui se remplissaient de barbus…tout ceci était autant de facteurs favorables à un éclatement. Avec le trois août, la délivrance. Nous dit-on. Qu’apportera le 11mars ?
C’est seulement après cette date que nous saurons si nous étions dans un rêve ou dans cauchemar. C’est seulement après cette date que nous saurons si nous étions dans une illusion de réveil ou dans une réalité éblouissante. Pour le moment nous sommes dans le cheminement initiatique vers la rupture avec le passé. Y arriverons-nous ? Un trop plein de mauvaises habitudes qui s’appellent : tribalisme, régionalisme, sectarisme, ethnisme et surtout corruptions et détournements nous colle à la peau…
kissimousman@yahoo.fr
La Tribune (Nouakchott) N°336 du 13 février 2007
source : La Tribune (Mauritanie) via cridem
Nous autres mauritaniens, à défaut de nous réveiller comme beaucoup d’autres peuples, avions eu droit un certain 3 août à une sorte de réveil ‘gratuit’. Gratuit parce que n’ayant rompu aucun rêve concret pour ce pays. Ni de la part des réveilleurs, ni de la part des dormeurs. Le 3 août a surgi d’une sorte de vide qui n’avait pour contenu que la seule personne de Taya.
Avant cette date d’autres ‘réveils’, brutaux pour la plupart, nous avaient été infligés : 1978, 1984, 1989, 1991, 2003… pour ceux qui étaient là à chacune de ces dates. Pour ceux étaient là bien avant, sans doute le réveil de l’indépendance à dû être perturbé par la guerre du Sahara ou par quelques événements antérieures.
Notre impression de réveil est quand même intervenue dans la douceur. Et ce n’est que lorsque Eli Ould Mohamed Vall a décidé de fustiger un système auquel il a appartenu et qu’il a contribué à mettre en place vingt ans durant, que nous nous sommes crus réveillés pour de bon. Alors nous avons tout accepté : la concertation et ses décisions les plus impopulaires et les moins sures. La constitution et ses points les plus flous. La relative transparence des élections législatives et municipales.
Nous avons vraiment tout accepté. Tout supporté : les choix des membres du gouvernement, les nominations du mercredi, les scandales pardonnés…Et même les options de ceux qui prétendent pouvoir diriger mieux que quiconque ce pays trop compliqué. Leurs alliances et contre alliances. Y compris leur silence et leur passivité quand il ne le fallait pas.
A vingt six jours de l’heure de vérité, que risque-t-il de se passer ? Ceux qui jouent aux prophètes iront jusqu’à dire : beaucoup de choses. Ceux qui préfèrent patienter se garderont bien de s’aventurer dans la divination quitte à être traités d’incompétents. Ce qui est sûr, c’est que les acteurs de la transition, les autorités et le reste de la classe politique, ont tout intérêt à nous éviter le néant.
Passées les histoires des indépendants, de l’interférence des soldats, de ce fameux vote blanc, nos candidats devraient nous extirper des esprits l’esprit de corps qui anime beaucoup parmi eux. Etre président de la république doit transcender les anciennes relations louches et surtout les alliances ‘ethno-tribales’. La denrée électorale d’un candidat à la présidence ne doit pas être une tribu, une ethnie, un clan, une région...
Encore moins un peuple étranger ou une idéologie importée, ainsi que semblent le chercher certains candidats. Encore une fois, messieurs les candidats, faites le discernement entre les priorités pour un peuple. Entre l’unité nationale et une option diplomatique colorée d’idéologie contraire à nos intérêts, ne faites pas l’amalgame.
Nous n’avons pas besoin d’être comme les guinéens. Il se peut que nous les ayons inspirés d’ailleurs. Il se peut que nous leur ayons permis de comprendre qu’ils peuvent exiger de leur chef qu’il plie bagage. Seulement, il ne faut pas qu’ils fassent plus de pas que nous vers la liberté.
Avant le trois août, peut-être risquions-nous de faire ce que les guinéens sont en train de faire actuellement. Le blocage vécu par nos acteurs politiques, la précarité des conditions du travailleur mauritanien et des ‘électeurs des ghettos’ bien souvent achetés pour applaudir et pour aller accueillir les visiteurs officiels, les prisons qui se remplissaient de barbus…tout ceci était autant de facteurs favorables à un éclatement. Avec le trois août, la délivrance. Nous dit-on. Qu’apportera le 11mars ?
C’est seulement après cette date que nous saurons si nous étions dans un rêve ou dans cauchemar. C’est seulement après cette date que nous saurons si nous étions dans une illusion de réveil ou dans une réalité éblouissante. Pour le moment nous sommes dans le cheminement initiatique vers la rupture avec le passé. Y arriverons-nous ? Un trop plein de mauvaises habitudes qui s’appellent : tribalisme, régionalisme, sectarisme, ethnisme et surtout corruptions et détournements nous colle à la peau…
kissimousman@yahoo.fr
La Tribune (Nouakchott) N°336 du 13 février 2007
source : La Tribune (Mauritanie) via cridem