Abandonnés la semaine dernière par les autorités tunisiennes dans le désert à la frontière tuniso-libyenne, environ 650 migrants ont finalement été ramenés vers les villes de Médenine et Ben Guerdane, dans le sud de la Tunisie. Mais une centaine d'autres, abandonnés en petits groupes dans le désert algérien, ont toujours besoin d'une aide urgente. Deux corps ont été retrouvés dans le désert de Hazoua.
Plusieurs centaines de migrants, abandonnés dans une zone désertique à la frontière entre Tunisie et Libye la semaine dernière, ont été mis à l'abri, lundi 10 juillet, dans des villes du sud tunisien. "Environ 650 migrants qui se trouvaient à la frontière avec la Libye ont été transférés dans différentes villes", a déclaré à InfoMigrants Salsabil Chellali, responsable de l'ONG Human Rights Watch à Tunis.
Récupérés par les autorités tunisiennes, les exilés ont été transférés à Ben Guerdane, Tataouine et Médenine. "Un groupe se trouve à Médenine, au niveau d'un lycée gardé par les forces de sécurité", a précisé la responsable de HRW.
Un correspondant de l'AFP a vu arriver un autre contingent d'exilés à Ben Guerdane, hébergés là aussi dans un lycée sous contrôle des forces de sécurité. Une douzaine de personnes épuisées et déshydratées ont dû être hospitalisées dans cette ville, et d'autres ont été emmenées en autocars à Tataouine et Gabès, selon des médias locaux.
Jusqu'à présent, ces personnes, dont des femmes et des enfants, survivaient sans eau ni nourriture, dans la zone désertique, chassées par les autorités tunisiennes de la ville de Sfax.
Deux morts dans le désert algérien
Les ONG s'inquiètent désormais du sort de dizaines d'autres migrants repoussés de l’autre côté de la Tunisie, vers la frontière algérienne. Déjà deux corps ont été retrouvés dans cette zone. "Un premier corps a été récupéré il y a au moins dix jours dans le désert de Hazoua [tout près de la frontière algérienne, ndlr] et un autre hier soir", a déclaré mardi Nizar Skander porte-parole du tribunal de Tozeur, dans le sud-est de la Tunisie, instance qui a "ouvert une enquête pour mort douteuse".
"Il s'agissait de deux jeunes hommes. La protection civile est venue chercher celui qui a été retrouvé hier", a indiqué à l'AFP un témoin, un commerçant local qui a requis l'anonymat. Selon lui, "deux convois en une semaine ont été vus en train de déposer des migrants d'Afrique subsaharienne - au total une centaine [de personnes] - dans les environs de Hazoua".
"Beaucoup de ces migrants essayent de rejoindre les oasis où les habitants leur donnent de l'eau et de la nourriture", a ajouté ce témoin.
Environ 200 personnes toujours en attente d'aide
Selon HRW, ils seraient au moins 150 à 200 migrants quelque part dans le désert algérien, sans eau, ni nourriture. "C'est l'urgence du moment", a encore déclaré Salsabil Chellali de HRW. "Ces personnes risquent leur vie si elles ne sont pas immédiatement secourues".
Pour Alarm Phone aussi, leur vie est en jeu. "Ils n'ont toujours pas accès à la nourriture, à l'eau et à un abri et ils ont peur d'être arrêtés par la police et repoussés dans le désert", a tweeté le collectif lundi.
D'autres corps ont été aperçus dans le désert, selon des témoignages recueillis par le collectif. Sans qu'il ne soit possible de les déplacer ou de les localiser. "Beaucoup de migrants ne veulent pas rester en groupe pour être moins repérables. Et donc, certains ont pu se perdre... On craint vraiment le pire", a souligné Claire*, une membre d'Alarm phone jointe par InfoMigrants. "Certaines ONG se mobilisent dans la région de Tozeur comme le Croissant Rouge tunisien ou FTDES, mais personne n'a vraiment les moyens de retrouver des gens s'ils se perdent dans l'immensité du désert".
Les collectifs peinent aussi à garder contact avec eux. "On a eu des appels ces trois derniers jours mais aujourd'hui toutes ces personnes sont injoignables", continue Claire. Batteries déchargées ? Personnes hors réseau ? "On ne sait pas ce qu'il se passe".
"S'il vous plaît aidez-nous", a témoigné à l'AFP de son côté Mamadou, un Guinéen. "Si vous pouvez, envoyer la Croix rouge ici, aidez-nous sinon on va mourir, y a rien ici, y a pas à manger, y a pas d'eau". Lui et une trentaine de personnes se trouvent dans une zone désertique près du village algérien de Douar El Ma, à deux pas de la frontière tunisienne.
"Ils sont devenus fous"
Déjà régulières depuis le discours xénophobe du président tunisien en février dernier, les expulsions de Subsahariens ont redoublé à la suite du décès d’un Tunisien, mortellement agressé par des Africains subsahariens lors d'une rixe. Des dizaines d’exilés noirs avaient été chassés de Sfax, devenue le principal point de départ de l'immigration irrégulière vers l'Europe. Ils ont été conduits par les autorités, selon des ONG, vers des zones inhospitalières frontalières avec la Libye et l'Algérie.
Depuis la mort du Tunisien au début du mois de juillet, la ville est toujours en proie au chaos. Des dizaines de migrants ont été agressés par des jeunes Tunisiens et ont vu leurs maisons saccagées. "Ils sont tous devenus fous, et ils agressent des Subsahariens", a témoigné Mohamed*, un Gambien de 24 ans. "Les commerces refusent de nous vendre de la nourriture, je n'ai rien mangé depuis deux jours".
"Des Tunisiens sont entrés chez nous. Ils étaient équipés de bâtons et de machettes", a raconté de son côté Omar*, un autre Gambien, de 20 ans. "On est partis en courant, on avait peur car ils frappent les Noirs et volent leurs affaires. On peut aussi se faire tuer".
*Les prénoms ont été changés
Source : Info Migrants (France)
Plusieurs centaines de migrants, abandonnés dans une zone désertique à la frontière entre Tunisie et Libye la semaine dernière, ont été mis à l'abri, lundi 10 juillet, dans des villes du sud tunisien. "Environ 650 migrants qui se trouvaient à la frontière avec la Libye ont été transférés dans différentes villes", a déclaré à InfoMigrants Salsabil Chellali, responsable de l'ONG Human Rights Watch à Tunis.
Récupérés par les autorités tunisiennes, les exilés ont été transférés à Ben Guerdane, Tataouine et Médenine. "Un groupe se trouve à Médenine, au niveau d'un lycée gardé par les forces de sécurité", a précisé la responsable de HRW.
Un correspondant de l'AFP a vu arriver un autre contingent d'exilés à Ben Guerdane, hébergés là aussi dans un lycée sous contrôle des forces de sécurité. Une douzaine de personnes épuisées et déshydratées ont dû être hospitalisées dans cette ville, et d'autres ont été emmenées en autocars à Tataouine et Gabès, selon des médias locaux.
Jusqu'à présent, ces personnes, dont des femmes et des enfants, survivaient sans eau ni nourriture, dans la zone désertique, chassées par les autorités tunisiennes de la ville de Sfax.
Deux morts dans le désert algérien
Les ONG s'inquiètent désormais du sort de dizaines d'autres migrants repoussés de l’autre côté de la Tunisie, vers la frontière algérienne. Déjà deux corps ont été retrouvés dans cette zone. "Un premier corps a été récupéré il y a au moins dix jours dans le désert de Hazoua [tout près de la frontière algérienne, ndlr] et un autre hier soir", a déclaré mardi Nizar Skander porte-parole du tribunal de Tozeur, dans le sud-est de la Tunisie, instance qui a "ouvert une enquête pour mort douteuse".
"Il s'agissait de deux jeunes hommes. La protection civile est venue chercher celui qui a été retrouvé hier", a indiqué à l'AFP un témoin, un commerçant local qui a requis l'anonymat. Selon lui, "deux convois en une semaine ont été vus en train de déposer des migrants d'Afrique subsaharienne - au total une centaine [de personnes] - dans les environs de Hazoua".
"Beaucoup de ces migrants essayent de rejoindre les oasis où les habitants leur donnent de l'eau et de la nourriture", a ajouté ce témoin.
Environ 200 personnes toujours en attente d'aide
Selon HRW, ils seraient au moins 150 à 200 migrants quelque part dans le désert algérien, sans eau, ni nourriture. "C'est l'urgence du moment", a encore déclaré Salsabil Chellali de HRW. "Ces personnes risquent leur vie si elles ne sont pas immédiatement secourues".
Pour Alarm Phone aussi, leur vie est en jeu. "Ils n'ont toujours pas accès à la nourriture, à l'eau et à un abri et ils ont peur d'être arrêtés par la police et repoussés dans le désert", a tweeté le collectif lundi.
D'autres corps ont été aperçus dans le désert, selon des témoignages recueillis par le collectif. Sans qu'il ne soit possible de les déplacer ou de les localiser. "Beaucoup de migrants ne veulent pas rester en groupe pour être moins repérables. Et donc, certains ont pu se perdre... On craint vraiment le pire", a souligné Claire*, une membre d'Alarm phone jointe par InfoMigrants. "Certaines ONG se mobilisent dans la région de Tozeur comme le Croissant Rouge tunisien ou FTDES, mais personne n'a vraiment les moyens de retrouver des gens s'ils se perdent dans l'immensité du désert".
Les collectifs peinent aussi à garder contact avec eux. "On a eu des appels ces trois derniers jours mais aujourd'hui toutes ces personnes sont injoignables", continue Claire. Batteries déchargées ? Personnes hors réseau ? "On ne sait pas ce qu'il se passe".
"S'il vous plaît aidez-nous", a témoigné à l'AFP de son côté Mamadou, un Guinéen. "Si vous pouvez, envoyer la Croix rouge ici, aidez-nous sinon on va mourir, y a rien ici, y a pas à manger, y a pas d'eau". Lui et une trentaine de personnes se trouvent dans une zone désertique près du village algérien de Douar El Ma, à deux pas de la frontière tunisienne.
"Ils sont devenus fous"
Déjà régulières depuis le discours xénophobe du président tunisien en février dernier, les expulsions de Subsahariens ont redoublé à la suite du décès d’un Tunisien, mortellement agressé par des Africains subsahariens lors d'une rixe. Des dizaines d’exilés noirs avaient été chassés de Sfax, devenue le principal point de départ de l'immigration irrégulière vers l'Europe. Ils ont été conduits par les autorités, selon des ONG, vers des zones inhospitalières frontalières avec la Libye et l'Algérie.
Depuis la mort du Tunisien au début du mois de juillet, la ville est toujours en proie au chaos. Des dizaines de migrants ont été agressés par des jeunes Tunisiens et ont vu leurs maisons saccagées. "Ils sont tous devenus fous, et ils agressent des Subsahariens", a témoigné Mohamed*, un Gambien de 24 ans. "Les commerces refusent de nous vendre de la nourriture, je n'ai rien mangé depuis deux jours".
"Des Tunisiens sont entrés chez nous. Ils étaient équipés de bâtons et de machettes", a raconté de son côté Omar*, un autre Gambien, de 20 ans. "On est partis en courant, on avait peur car ils frappent les Noirs et volent leurs affaires. On peut aussi se faire tuer".
*Les prénoms ont été changés
Source : Info Migrants (France)