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Le bureau exécutif de l'AVOMM

"L'important n'est pas ce qu'on fait de nous, mais ce que nous faisons nous-mêmes de ce qu'on a fait de nous." Jean-Paul Sartre

"L'Association d'aides aux veuves et aux orphelins de mauritanie (AVOMM) qui nous rassemble, a été créée le 25/12/95 à PARIS par d'ex-militaires mauritaniens ayant fui la terreur, l'oppression, la barbarie du colonel Mawiya o/ sid'ahmed Taya ......
Ces rescapés des geôles de ould Taya, et de l'arbitraire, décidèrent, pour ne jamais oublier ce qui leur est arrivé, pour garder aussi la mémoire des centaines de martyrs, de venir en aide aux veuves, aux orphelins mais aussi d'engager le combat contre l'impunité décrétée par le pouvoir de Mauritanie."
E-mail : avommavomm@yahoo.fr

Bureau exécutif

*Ousmane SARR, président
*Demba Niang, secrétaire général
*Secrétaire général Adjt; Demba Fall
*Alousseyni SY, Chargé des relations extérieures
*Mme Rougui Dia, trésorière
*Chargé de l’organisation Mariame Diop
*adjoint Ngolo Diarra
*Mme Mireille Hamelin, chargée de la communication
*Chargé de mission Bathily Amadou Birama
Conseillers:
*Kane Harouna
*Hamdou Rabby SY










AVOMM

OUSMANE SARR, PRESIDENT DE L'ASSOCIATION D'AIDE AUX VEUVES ET ORPHELINS DES MILITAIRES MAURITANIENS : ‘NOUS TENONS VALL POUR RESPONSABLE DES EXECUTIONS ET DES DEPORTATIONS PERPETREES PAR LA POLICE MAURITANIENNE’


OUSMANE SARR, PRESIDENT DE L'ASSOCIATION D'AIDE AUX VEUVES ET ORPHELINS DES MILITAIRES MAURITANIENS : ‘NOUS TENONS VALL POUR RESPONSABLE DES EXECUTIONS ET DES DEPORTATIONS PERPETREES PAR LA POLICE MAURITANIENNE’
Après le débat sur l’extradition ou non de Habré, ira-t-on encore vers un autre mandat d’arrêt international délivré par la justice belge et concernant un président africain ? Tout porte à le croire. Le président de l’Association des veuves et orphelins des militaires de Mauritanie, auteur de la plainte contre Maaouiya Ould Taya, soutient avoir réuni toutes les preuves. Ousmane Sarr confie, dans l’entretien qu’il nous a accordé, qu’il a été entendu par le procureur fédéral de Bruxelles et que la plainte portée contre son président Maaouiya Ould Taya a été jugé recevable. L’ancien prisonnier du bagne de Walata est, également, revenu sur quelques aspects de la torture perpétrée en Mauritanie. Pour accuser Ely Ould Vall d’être un des principaux maillons de la chaîne responsable des massacres des négro-mauritaniens.

Wal Fadjri : Vous avez porté plainte contre l’ancien président Ould Taya. Où est-ce que vous en êtes avec cette plainte ?

Ousmane SARR :
C’est une plainte qui a été jugé recevable. Le procureur fédéral nous a reçus récemment à Bruxelles. Il y a bon espoir qu’on soit entendu au niveau de la justice. Le procureur nous a dit qu’il va mettre en place une commission de magistrats pour étudier tout cela. Il envisage d’envoyer une commission rogatoire en Mauritanie pour recueillir des éléments d’appréciation. Après tout cela, il étudiera la question du mandat d’arrêt international du président Taya. L’espoir est permis, même si l’on sait que les chefs d’Etat africains n’acceptent pas facilement que leurs homologues soient jugés hors d’Afrique. Mais nous, nous sommes en Europe et Taya est au Qatar. Peut-être qu’il n’aura pas à avoir affaire avec l’Union africaine. C’est un encouragement pour nous à persévérer dans la voie de la poursuite de tous les tortionnaires, à commencer par Taya.

Wal Fadjri :
Quels sont les chefs d’accusation ?

Ousmane SARR:
Les chefs d’accusation, c’est crime de torture et crime contre l’humanité. Nous avons des preuves sur les massacres et les tortures qui ont eu lieu. Nous avons recueilli des renseignements et des vécus personnels. J’ai été condamné à 20 ans de travaux forcés. J’ai fait le bagne de Walata. Les militants négro-africains ont été massacrés et / ou torturés. Certains, qui ont vécu des choses beaucoup plus atroces, sont encore ici (en France, Ndlr). Des témoins vivants existent. En Mauritanie, on en dénombre par milliers. Dans les camps de réfugiés au Sénégal et au Mali, ce sont aussi des milliers qui ont apporté leur témoignages. Nous espérons que la Mauritanie et la communauté internationale ne laisseront pas passer des crimes impunis.

Wal Fadjri :
Pourquoi n’avez-vous pas porté plainte en Mauritanie ?

Ousmane SARR : On aurait bien voulu le faire, mais le régime ne veut pas…

Wal Fadjri : Avez-vous essayé ?

Ousmane SARR: Mais la première déclaration de Ely Ould Vall, c’est de dire qu’il n’acceptera pas qu’on porte plainte contre Ould Taya. Il a ajouté qu’il rappellera à l’ordre quiconque tentera de le faire. Et quand on connaît la barbarie de la police mauritanienne commandée en son temps par Ely Ould Vall, on le prend au mot. Nous avons vécu la torture sous Ely Ould Vall. Nous avons vécu les nuits sans sommeil de Walata etc. Quand un maître tortionnaire de la trempe d’Ely Ould Vall vous dit qu’il va vous rappeler à l’ordre, nous, nous savons ce que cela veut dire. Peut-être d’autres peuvent lui accorder le bénéfice du doute, mais nous, nous savons qui est Ely Ould Vall. Donc il n’y a pas de possibilité pour nous, à l’heure actuelle de porter plainte. Mais nous aimerions le faire. D’ailleurs nous attendons cet instant avec plaisir parce que ce que nous aimerions le plus au monde, c’est que justice soit rendue en Mauritanie pour ceux qui y sont impunément et injustement morts.

Wal Fadjri : Où est-ce que vous en êtes également avec le capitaine Mauritanien condamné par contumace par la justice française en 2005 ?

Ousmane SARR :
La plainte contre le capitaine Ely Ould Dah est partie de notre association. Il a été condamné à dix ans de réclusion criminelle, même si c’est par contumace. Mais cela fait du bien. C’était le 1er juin 2005. Un mois après, Taya chutait de son piédestal. Ely Ould Dah est un tortionnaire qui a massacré, torturé. Il a fait beaucoup de mal à la communauté négro-mauritanienne dans les casernes. Justement son jugement et sa condamnation par la justice française sont à rapporter dans le dossier du Colonel Taya parce qu’il était dans le bureau de renseignement militaire. Donc il savait et rendait compte au Chef d’état major et à Maaouiya Ould Taya.

Wal Fadjri : Savez-vous comment a-t-il pu s’échapper à la justice ?

Ousmane SARR:
Il semble qu’il a bénéficié de beaucoup de complicités des autorités françaises à l’époque. On ne peut pas comprendre qu’un pays aussi puissant que la France puisse laisser Ely Ould Dah qui était là en stage, mis sous surveillance policière, sortir des frontières françaises comme cela. Ce n’est pas possible ! Il y a eu la complicité de la France qui voulait, un peu, calmer le jeu face à l’arrogance de Ould Taya qui avait renvoyé les coopérants militaires français. Il ne voulait plus entendre le jugement de Ely Ould Dah. Et la France a fermé les yeux. Nous avons protesté contre la fuite de Ely Ould Dah. Nous avons marché de la place Trocadéro à l’ambassade de la Mauritanie en France. Nous avons écrit, dénoncé avec l’appui de toutes les organisations internationales comme la Fidh, Ldh, Agir ensemble. Mais quand on est faible et issu d’un petit pays de trois millions d’habitants, vu d’ici, c’est un peu marginal malheureusement. Car beaucoup de gens ne savent pas que tous les peuples du monde se valent, que tous les peuples aspirent à la liberté, à la démocratie et à la justice. A l’époque, on n’avait pas été entendu.

Wal Fadjri :
Parlons de l'association que vous présidez. De quoi s’occupe l’Association des veuves et orphelins militaires de Mauritanie (Avomm) ?

Ousmane SARR :
C’est une association qui a été créée en 1994 pour lutter contre l’impunité en Mauritanie. C’est l’Associations d’aide aux veuves et orphelins militaires de Mauritanie qui a porté plainte contre Ould Taya en Belgique en profitant de la loi dite de compétence universelle. Dans ce cadre, nous voulons sensibiliser l’opinion internationale sur la nécessité de poursuivre les criminels qui ont massacré les militaires négro-mauritaniens, ceux qui les ont déportés impunément depuis 1991. L’Avomm fait aussi de l’humanitaire. Nous avons profité de cette rencontre (réunion tenue le 1er juillet dernier à Mantes-La-Jolie, Ndlr) pour lancer la campagne dénommée ‘Caravane de santé’. Cette caravane de santé vise les populations réfugiées au Sénégal et en Mauritanie. Nous pensons que ce sont des populations qui ne vivent pas chez elles, qui sont nécessiteuses et qui attendent beaucoup de nous. Durant cette rencontre, nous avons invité tous les partis politiques, les organisations de la société civile. Certains conseillers municipaux de l’Ump et du Ps de Mantes-La-Jolie ont pris part à notre rencontre.

Wal Fadjri :
Cette association des orphelins et des veuves dont vous venez de parler regroupe-t-elle seulement des victimes militaires du régime de Ould Taya ?

Ousmane SARR:
Ces orphelins et veuves sont ceux qui ont perdu les leurs par la volonté du régime de Taya de purger la composante négro-africaine de la Mauritanie. Cette chasse à l’homme noir a eu lieu dans la vallée du fleuve Sénégal, dans toutes les régions du pays. Mais ce qui frappe, c’est que cela a eu lieu aussi dans les casernes militaires. Le régime ne peut ignorer cet état de fait. Il ne peut pas dire qu’il ne savait pas. Massacrer impunément des militaires noirs était béni des autorités d’alors. Donc Ould Taya est comptable de cette barbarie.

Wal Fadjri :
Quel est le nombre de ces veuves et orphelins ?

Ousmane SARR
:C’est un nombre important. Vous me permettrez de rappeler que nous faisons également du parrainage des orphelins. Nous avons parrainé six cent orphelins de militaires. La composante civile n’est pas prise en compte parce qu’il est plus difficile de recenser les civiles qui ont été massacrés à travers tout le pays. Au moins sur le plan militaire - l’association a été créée par d’anciens militaires - nous avons pu recenser pour connaître exactement le nombre d’orphelins et de veuves qui doivent être à peu près 2000. Car les six cents que j’ai donnés tantôt ont été dénombrés lors d’une seule opération annuelle de recensement. Et l’on sait qu’on est loin d’avoir atteint tous les orphelins et veuves.

Wal Fadjri :
Sur quoi vos actions humanitaires insistent-elles pour venir en aide à vos populations cibles ?

Ousmane SARR :
La plupart des victimes militaires étaient des pères de famille mariés qui avaient deux à quatre femmes avec beaucoup d’enfants. Et vous savez les conséquences qui découlent de la mort d’un père de famille qui disposait d’un salaire. Tout d’un coup, après son assassinat, la famille plonge dans le besoin. Ce sont de familles tout entières qui avaient besoin de soutien de la communauté. Le propre d’un régime de dictature, c’est après qu'avoir massacré les pères de famille, il continue à ignorer ces familles. On empêche ses membres de s’exprimer, de travailler. On les classe comme étant des gens qui sont opposés au pouvoir. Ce qui les appauvrit davantage et les met dans une situation de nécessité. Pour le moment, nous en sommes au parrainage et à l’appui à des organisation humanitaires qui sont sur place. Notre appui est surtout médical et concerne les besoins élémentaires des populations.

Wal Fadjri :
Comment arrivez-vous à convoyer vos dons ?

Ousmane SARR :
Nous avons en Mauritanie le collectif des veuves, le collectif des rescapés militaires. Nous travaillons essentiellement avec ces structures, mais surtout avec le collectif des veuves en ce qui concerne le parrainage. Nous envoyons des dons à ces collectifs qui sont chargés de la distribution. C’est ainsi que nous sommes arrivés à contourner l’obstacle constitué par le régime de Ould Taya. Tout cela se faisait dans la discrétion totale. Maintenant qu’Ould Taya a été destitué, nous pensons qu’il faut amplifier le mouvement parce que ces orphelins existent toujours. La volonté des gouvernants actuels de maintenir le cap en ce qui concerne la répression des Noirs et le refus de reconnaissance des crimes nous poussent à la prudence et à continuer nos actions pour soutenir les veuves, les orphelins et l’existence de cette catastrophe que l’on appelle pudiquement ‘passif humanitaire’. Mais notre souhait, c’est de pouvoir participer directement quand la situation mauritanienne s’éclaircira.

Wal Fadjri :
Le président Ould Vall a donné des assurances en ce qui concerne l’approfondissement de la démocratie. Il dit que la question des réfugiés doit être traitée par le gouvernement qui va être démocratiquement élu. Quel est votre sentiment par rapport à cela ?

Ousmane SARR :
En tant que président de l’association des veuves et orphelins des militaires mauritaniens, ce qui nous intéresse dans l’avènement de Ould Vall, c’est la reconnaissance du passif humanitaire. Dans la répression du régime de Ould Taya, Ely Mohammed Ould Vall a une très grande responsabilité. Pourquoi ? Parce que simplement, il était le directeur de la police, le chef de la sûreté nationale. Des meurtres ont été commis. Nous le tenons responsable des exécutions et des déportations perpétrées par la police nationale. D’autres ont eu lieu dans les commissariats. Il a été pendant deux décennies directeur de la sûreté nationale. Donc, il ne peut pas dire qu’il ne savait pas. Ses récentes réactions durant sa tournée dans la vallée du fleuve disant qu’il n’y a pas de racisme en Mauritanie, qu’il n’y avait de composante arabe, maure ou noire, nous donne envie de lui poser des questions. Il doit rendre compte de ce qui s’est passé en matière de violation des droits de l’homme dont il était l’un des acteurs essentiels. Il n’était pas sans savoir que des meurtres ont été commis, que des exécutions ont été commises par ses propres hommes qu’il commandait et qui lui rendaient compte. Il voyait le chef de l’Etat (Maaouiya Ould Taya, Ndlr) continuellement. Pendant vingt ans, il n’a rien dit ni levé son petit doigt. Alors, quand il dit qu’il n’y a pas de racisme en Mauritanie, que les Mauritaniens ne connaissent pas cela, comment qualifie-t-il alors ceux qui ont été exécutés, ceux qui ont été déportés qui sont presque tous des Haal Pulaar ? Et ceux qui ont massacré sont des maures. Ce sont des militaires et des policiers maures qui ont exécuté. Et lui, Ely Ould Vall, était dans la chaîne de commandement. Nous l’attendons sur ce terrain là. Maintenant qu’il y ait démocratisation, on veut bien l’entendre. Mais nous nous portons franchement sur la lutte contre l’impunité. C’est cela qui nous concerne. Qu’il y ait changement ou pas, qu’il y ait Ely Ould Vall ou un autre, nous continuerons à lutter pour le jugement des tortionnaires en Mauritanie. C’est ce qui nous importe.

Wal Fadjri : Pourquoi ne lui accordez-vous pas un préjugé favorable étant donné que l’on pourrait interpréter son coup d’Etat, salué par une bonne partie de la communauté internationale, comme un moyen pouvant, peut-être, mettre fin à cette impunité ?

Ousmane SARR:
Le coup d’Etat a été salué par la communauté internationale. Nous avons aussi quelque part salué ce coup d’Etat parce que nous espérions que Ely Ould Vall serait à même de comprendre la situation dans laquelle nous vivons. Puisqu’il est largement responsable dans ce qui s’est passé (les massacres des négros mauritaniens, Ndlr), il pouvait s’adresser à la Nation pour faire son mea culpa et expliquer le pourquoi et le comment. En ce moment, on pourrait le comprendre ; mais comprendre n’est pas forcément pardonner. Mais depuis qu’il est au pouvoir, il se raidit chaque fois qu’on lui parle de droits de l’homme, de racisme, d’esclavage. Si nous avons décidé de suivre la plainte déposée en Belgique, c’est parce que Ely Oud Vall a dit qu’il n’acceptera jamais que Taya soit poursuivi en Mauritanie. Cela veut dire qu’il se reconnaît dans ce régime de Taya, qu’il sait, connaît sa responsabilité dans ce qui s’est passé. Quand il traite des réfugiés mauritaniens au Sénégal d’aventuriers, cela veut dire que Ely Ould Vall n’est pas prêt à faire le pas dans la bonne direction, de comprendre que quelque chose s’est passé d’inacceptable dans ce pays.

Wal Fadjri :
Mais il a lancé un appel à tous les partis clandestins ainsi qu’aux réfugiés politiques pour rentrer au pays. N’est-ce pas un geste ?


Ousmane SARR :
Un geste ? Je ne sais pas la lecture que j’en fais. Comme je l’ai dit, il a été pendant vingt ans directeur de la sûreté. Il sait que la communauté internationale le regarde, que le régime de Taya devait l'emporter lui, Ely, ses biens et ses richesses mal acquis. Quand il prend sur lui la responsabilité de renverser Ould Taya, c’est pour sauver sa peau, mais pas pour sauver la Mauritanie. Tout le monde sait qu’il a fait partie de l’un des plus riches de la Mauritanie. Il n’est pas venu à la Amadou Toumani Touré. Ce n’est pas Amadou Toumani Touré, mais quelqu’un qui a massacré des innocents. Même s’il dit qu’il ne veut pas qu’on lui parle de racisme, Ely Ould Vall est un raciste à cause de son parcours dans la sûreté nationale. C’est pourquoi nous disons que nous avons besoin de quelqu’un qui va sauver la Mauritanie. Depuis qu’il est là, il ne profère que des injures à l’endroit des victimes. La priorité pour la Mauritanie, c’est le règlement de la cohabitation entre maures et négro-africains.

Propos recueillis à Paris par Moustapha BARRY


Jeudi 13 Juillet 2006 - 23:25
Jeudi 13 Juillet 2006 - 23:35
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