MAURITANIE : A QUAND LA FIN DE L'ESCLAVAGE ?

MAURITANIE : A QUAND LA FIN DE L'ESCLAVAGE ?
(Afrique Education du 01 au 31 juillet 2006)
Les résultats du référendum sur une nouvelle Constitution ont été largement positifs pour le pouvoir de transition du président Ely Ould Mohamed Vall. Avec un taux de participation de 76,51% pour un oui massif de 96,97%, ce référendum - il n'y a rien à dire - est un plébiscite. Dans la capitale Nouakchott, par exemple, qui a connu une participation de 77,3%, un niveau particulièrement remarquable, le oui a drainé 95,27% de votants contre 2,93% seulement de non et 1,8% de bulletins nuls.

Chose notable : alors que des bruits de bottes se propageaient, dans le pays, quelques jours seulement avant la date de cet important scrutin, rumeurs confirmées par des arrestations de personnalités militaires et civiles proches de l'ancien président Maaouiya Ould Sid Ahmed Taya actuellement en exil volontaire dans le Golfe Persique, le vote a finalement eu lieu dans de très bonnes conditions, sans incident, ni problèmes matériels ou de procédure. Aucun coup de feu n'a été tiré et la sortie en masse des électeurs, ce dimanche 25 juin, montre bien que le peuple mauritanien soutient les réformes d'Ely Ould Mohamed Vall et qu'il est prêt à les avaliser.

Cette nouvelle Constitution, qui a reçu l'approbation de la quasi-totalité de la classe politique et des ONG locales, vise à mettre fin à « plus de 20 ans de pouvoir despotique », selon une expression utilisée par le pouvoir de transition en place. Parmi les nouvelles dispositions constitutionnelles, figure la limite du mandat présidentiel à cinq ans, renouvelable une seule fois. L'ancienne Constitution ne posait pas de limite au nombre de mandats. Le nouveau texte prévoit également que le président fera le serment « au nom d'Allah, de ne point prendre ni soutenir une initiative qui pourrait conduire à la révision » de ces dispositions. Cette loi fondamentale instaure, enfin, un régime de type présidentiel, qui octroie au chef de l'Etat d'importantes prérogatives dont la désignation du premier ministre, mais donne au parlement le droit de voter la défiance ou la censure du gouvernement.

Tout le mal qu'on peut souhaiter au colonel Ely Ould Mohamed Vall, c'est de ne pas ressembler à son frère d'armes centrafricain, le général François Bozizé. Venu pour réaliser une transition et organiser une présidentielle transparente à laquelle il ne devait pas prendre part, il a finalement pris goût au pouvoir, et s'est imposé à la tête du pays par la force, au prix d'une élection tellement controversée que tout candidat qui se présentait contre lui à cette présidentielle, devait préalablement avoir son aval avant d'obtenir le quitus de la Commission nationale chargée d'organiser les élections. C'est par ce raccourci qu'il a réussi à évincer Ange Félix Patassé qui, chassé par les armes deux années plus tôt, n'a pas eu le feu vert de François Bozizé pour se mesurer à lui. Après avoir grossièrement truqué cette présidentielle, Bozizé a cru que le fait qu'il se fasse « élire démocratiquement » de cette manière, allait faire revenir en masse, les bailleurs de fonds dans son pays. Une erreur monumentale. Il récolte aujourd'hui ce qu'il a semé, et selon les connaisseurs de la sous-région de l'Afrique centrale, il n'est pas exclu qu'il tombe avant même son principal protecteur, le Tchadien Idriss Déby, lui-même, empêtré dans d'inextricables difficultés..

Les amis d'Ely Ould Mohamed Vall doivent lui conseiller de suivre plutôt l'exemple du Malien Amadou Toumani Touré, qui est finalement revenu au pouvoir de manière fort démocratique, après l'avoir volontairement abandonné au terme d'une transition de neuf mois.

Toutefois, le colonel Vall ne doit pas faire le travail à moitié. Son bilan serait diversement apprécié s'il contournait l'épineux problème de l'esclavage. Je l'ai entendu dire sur une radio internationale que ce mal social a déjà, plusieurs fois, été aboli. S'il a, certes, été aboli dans les textes, l'esclavage - il le sait bien - est resté ancré dans les mœurs et les comportements des Mauritaniens dits supérieurs : les Maures. C'est inacceptable. Et c'est d'autant plus fâcheux que c'est l'un des points (vraiment) noirs qui assombrit le bilan jusque-là plutôt flatteur du successeur de Taya. A lui de prendre ce taureau par les cornes s'il veut graver son nom en lettres d'or dans l'histoire non seulement de la Mauritanie mais aussi de tout le continent africain. C'est le mal que nous lui souhaitons.