Mauritanie . On redoute une percée des partis religieux aux élections générales de ce dimanche, qui marquent le retour à la démocratie après le coup d’État de 2005.
Nouakchott (Mauritanie),
correspondance particulière.
Portés par une sono assourdissante, des chants a cappella résonnent dans le quartier du marché de Toujounine, dans la banlieue est de Nouakchott, la capitale mauritanienne. De temps en temps des orateurs se succèdent au micro pour vanter les mérites de leur camp. Entassées sous l’unique tente dressée pour l’occasion, 200 personnes écoutent religieusement. « Nous sommes les Réformateurs centristes, les plus propres et les plus aptes à changer ce pays », martèle un jeune homme à la barbe fournie. Les Réformateurs centristes constituent le principal mouvement islamiste mauritanien, un groupe à mi-chemin entre les Frères musulmans égyptiens et le PJD marocain.
Officiellement non reconnus, les Réformateurs n’auraient pas dû être présents aux élections municipales et législatives de dimanche, si les autorités ne leur avaient, malgré elles, ouvert la voie en permettant à des listes indépendantes de briguer les suffrages au cours de ce double scrutin censé marquer la première étape du retour vers des institutions civiles en Mauritanie après le coup d’État qui a renversé, voici un peu plus d’un an le régime controversé du président Maaouiya Ould Taya au pouvoir pendant vingt ans.
un miracle pour éviter la débâcle
Avec deux listes, El Emel (Espoir) pour les municipales et El Moustaqbal (l’Avenir) pour les législatives, à laquelle s’ajoute une liste nationale présentée par le truchement d’un petit parti nationaliste arabe allié, les islamistes sont présents dans la quasi-totalité des wilayas (régions) - 12 sur 13 pour les municipales et 10 sur 13 pour les législatives. Ont-ils pour autant des chances réelles d’envoyer des députés à la future Assemblée nationale ou de prendre le contrôle de quelques municipalités ?
Si cela ne tenait qu’aux moyens affichés durant la campagne, il n’y a pas de doute qu’il faudrait un miracle pour que les islamistes évitent la débâcle. Peu de points de campagne visibles dans les rues, là où leurs concurrents en ont dressé jusqu’à plus possible. Pas de convois sillonnant le pays, alors que les autres ne cessent de se livrer à des marathons interminables. Pas de cadeaux ni d’argent distribués, alors que nombre de leurs rivaux multiplient les gestes de générosité, comme Ahmed Hamza, ce proche d’Ahmed-Ould Daddah, chef de file de l’ancienne opposition à Ould Taya, qui dimanche dernier offrait à ses partisans, dans un stade de Nouakchott, un méga concert gratuit de la star sénégalaise Youssou Ndour.
les militants font du porte-à-porte
« Nous sommes un mouvement d’action. Le bruit n’est pas notre credo », résume une jeune militante islamiste. En fait, la discrétion des Réformateurs est tout sauf involontaire. Forts d’un ancrage au sein de la petite bourgeoise commerçante, sans parler des soutiens étrangers dont une rumeur tenace les accuse, ils ne sont certainement pas les plus mal dotés en moyens parmi les candidats en lice ce dimanche en Mauritanie. En lieu et place de shows et spectacles de toute sorte, méthode commune à tous leurs concurrents, les islamistes ont opté pour une campagne de proximité.
Sillonnant les rues et les places publiques, leurs militants font aussi beaucoup de porte à porte. « Ils n’ont pas attendu les élections pour aller auprès des gens, à la différence des autres partis politiques qui, eux, ne manifestent leur intérêt aux populations qu’à l’approche des élections », explique Hindou Bint Aînina, rédactrice en chef du Calame, le grand journal indépendant du pays : « Grâce à leurs innombrables mosquées et associations humanitaires, ils ont toujours entretenu un contact permanent avec les populations. En plus, leur discours, sans langue de bois, simple et direct et qui insiste beaucoup sur l’égalité et la justice, est celui qui plaît à beaucoup de Mauritaniens », explique la journaliste.
Selon Mohamed Ould Ahmed, politologue à l’université de Nouakchott, les scores éventuels des islamistes dépendraient des situations. « À l’intérieur du pays, leurs chances pourraient être limitées, en raison de la prégnance des structures traditionnelles comme la tribu, mais aussi des confréries soufies qui, malgré leur recul dans certaines zones, conservent encore une certaine influence dans quelques régions du pays, dont l’Est, grand réservoir de voix. En revanche, en milieu urbain ils pourraient bien arracher quelques mairies, et envoyer des députés à l’Assemblée - nationale. Dans des villes comme Nouakchott et Nouadhibou, les deux grandes villes du pays où ils disposent d’une présence ancienne, cela est presque une certitude », explique l’universitaire. Selon lui, l’unique inconnue serait le nombre de leurs élus.
Lemine Ould M. Salem
Nouakchott (Mauritanie),
correspondance particulière.
Portés par une sono assourdissante, des chants a cappella résonnent dans le quartier du marché de Toujounine, dans la banlieue est de Nouakchott, la capitale mauritanienne. De temps en temps des orateurs se succèdent au micro pour vanter les mérites de leur camp. Entassées sous l’unique tente dressée pour l’occasion, 200 personnes écoutent religieusement. « Nous sommes les Réformateurs centristes, les plus propres et les plus aptes à changer ce pays », martèle un jeune homme à la barbe fournie. Les Réformateurs centristes constituent le principal mouvement islamiste mauritanien, un groupe à mi-chemin entre les Frères musulmans égyptiens et le PJD marocain.
Officiellement non reconnus, les Réformateurs n’auraient pas dû être présents aux élections municipales et législatives de dimanche, si les autorités ne leur avaient, malgré elles, ouvert la voie en permettant à des listes indépendantes de briguer les suffrages au cours de ce double scrutin censé marquer la première étape du retour vers des institutions civiles en Mauritanie après le coup d’État qui a renversé, voici un peu plus d’un an le régime controversé du président Maaouiya Ould Taya au pouvoir pendant vingt ans.
un miracle pour éviter la débâcle
Avec deux listes, El Emel (Espoir) pour les municipales et El Moustaqbal (l’Avenir) pour les législatives, à laquelle s’ajoute une liste nationale présentée par le truchement d’un petit parti nationaliste arabe allié, les islamistes sont présents dans la quasi-totalité des wilayas (régions) - 12 sur 13 pour les municipales et 10 sur 13 pour les législatives. Ont-ils pour autant des chances réelles d’envoyer des députés à la future Assemblée nationale ou de prendre le contrôle de quelques municipalités ?
Si cela ne tenait qu’aux moyens affichés durant la campagne, il n’y a pas de doute qu’il faudrait un miracle pour que les islamistes évitent la débâcle. Peu de points de campagne visibles dans les rues, là où leurs concurrents en ont dressé jusqu’à plus possible. Pas de convois sillonnant le pays, alors que les autres ne cessent de se livrer à des marathons interminables. Pas de cadeaux ni d’argent distribués, alors que nombre de leurs rivaux multiplient les gestes de générosité, comme Ahmed Hamza, ce proche d’Ahmed-Ould Daddah, chef de file de l’ancienne opposition à Ould Taya, qui dimanche dernier offrait à ses partisans, dans un stade de Nouakchott, un méga concert gratuit de la star sénégalaise Youssou Ndour.
les militants font du porte-à-porte
« Nous sommes un mouvement d’action. Le bruit n’est pas notre credo », résume une jeune militante islamiste. En fait, la discrétion des Réformateurs est tout sauf involontaire. Forts d’un ancrage au sein de la petite bourgeoise commerçante, sans parler des soutiens étrangers dont une rumeur tenace les accuse, ils ne sont certainement pas les plus mal dotés en moyens parmi les candidats en lice ce dimanche en Mauritanie. En lieu et place de shows et spectacles de toute sorte, méthode commune à tous leurs concurrents, les islamistes ont opté pour une campagne de proximité.
Sillonnant les rues et les places publiques, leurs militants font aussi beaucoup de porte à porte. « Ils n’ont pas attendu les élections pour aller auprès des gens, à la différence des autres partis politiques qui, eux, ne manifestent leur intérêt aux populations qu’à l’approche des élections », explique Hindou Bint Aînina, rédactrice en chef du Calame, le grand journal indépendant du pays : « Grâce à leurs innombrables mosquées et associations humanitaires, ils ont toujours entretenu un contact permanent avec les populations. En plus, leur discours, sans langue de bois, simple et direct et qui insiste beaucoup sur l’égalité et la justice, est celui qui plaît à beaucoup de Mauritaniens », explique la journaliste.
Selon Mohamed Ould Ahmed, politologue à l’université de Nouakchott, les scores éventuels des islamistes dépendraient des situations. « À l’intérieur du pays, leurs chances pourraient être limitées, en raison de la prégnance des structures traditionnelles comme la tribu, mais aussi des confréries soufies qui, malgré leur recul dans certaines zones, conservent encore une certaine influence dans quelques régions du pays, dont l’Est, grand réservoir de voix. En revanche, en milieu urbain ils pourraient bien arracher quelques mairies, et envoyer des députés à l’Assemblée - nationale. Dans des villes comme Nouakchott et Nouadhibou, les deux grandes villes du pays où ils disposent d’une présence ancienne, cela est presque une certitude », explique l’universitaire. Selon lui, l’unique inconnue serait le nombre de leurs élus.
Lemine Ould M. Salem