Ladji Traoré, le Secrétaire Général de l'Alliance Populaire Progressiste, sera l'invité de la radio africaine le jeudi 22 février à 9h GMT (10 h à Paris).
L’émission sera consacrée aux élections présidentielles en Mauritanie.
Ladji est né en 1937. C’est incontestablement, l’un des plus grands syndicalistes que la Mauritanie ait connu.
Dans les années 60, étudiant à Toulouse et responsable de la coordination de la FEANF1, activiste du PAI2, il est de tous les combats pour la liberté. Très ancré à gauche, ni pro soviétique, ni pro chinois, sa fierté est d’avoir serré la main à Mao.
En 1964 déjà, il met son expérience des luttes pour l’indépendance des pays africains à profit et fonde un comité de soutien pour la libération de la Palestine.
L’homme est audacieux. Début 1966, la Mauritanie vivait sa première guerre civile. C’est le moment peu opportun qu’il choisit pour rentrer clandestinement au pays et effectuer, à sa propre initiative, une mission d’observation pour le compte du PAI. Ses anciens amis ne veulent plus le voir de peur de s’attirer des ennuis.
Il embarque à bord d’un camion de transport de marchandises, arrêté tard dans la nuit par un poste de contrôle situé à une vingtaine de kilomètres de Nouakchott. Si près du but, Il fausse compagnie aux policiers en pleine nuit pour assister au discours de Mokhtar Ould Daddah, dont il fut l’un des principaux opposants. Ce qui lui valut plusieurs séjours en prison.
Il est le fondateur de l’association Yelinkaare pour la promotion de la langue et de la culture Soninké. Qui ne fut reconnue qu’un an après l’ARPRIM, l’Association pour la Renaissance du Pulaar. Les autorités étaient loin de se douter que Ladji était dans toutes les associations pour la reconnaissance de nos langues nationales.
L’anecdote qui suit montre que l'homme n'est pas rancunier. Sollicité par la Première Dame , Mariem Daddah, qui ne connaissait rien de ses rapports avec le pouvoir, il participe à l’organisation de la journée de la femme et rameute à Nouakchott de grandes personnalités. La manifestation fut fort bien réussie. A tel point que madame Daddah demanda à ce qu'il soit décoré. Les autorités la prennent alors carrément pour une folle. Une médaille pour leur ennemi juré, jamais de la vie !
Il est aussi très respectueux de ses adversaires politiques. Il eut un entretien très cordial avec Mokhtar ould Daddah, quelque temps avant la disparition de celui-ci.
Sa hardiesse, sa soif de justice et d’égalité entre tous les hommes est peut-être le legg moral de son ancêtre, un vaillant soldat soninké de l’armée du roi du Wassoulou : Samory Touré, redoutable guerrier et grand résistant guinéen à la pénétration française.
Cette Guinée vit en 1962 la mue brutale en dictateur sanguinaire de Sékou Touré. Ironie du sort, ce dernier, bourreau de son peuple, se réclame petit-fils de Samory le libérateur.
Bien que le siège du PAI soit à Conakry, c’est sans hésitation que Ladji et une poignée de compagnons de lutte rédigèrent une déclaration condamnant les agissements du despote mal éclairé. La sanction fut immédiate : le PAI est banni, il trouve refuge au Mali.
Il faudrait un livre pour rappeler le parcours de cet homme aux jeunes générations qui n'ont connu que les comités militaires.
Ladji sort de la clandestinité en 1991 après l'adoption de la constitution instaurant le multipartisme et une pseudo démocratie. Il s'impose rapidement et à partir de cet instant, sa trajectoire politique se confondra avec celle de son ami et fidèle compagnon Messaoud Ould Boulkheir, le Président de l'APP et grand favori aux prochaines élections présidentielles de mars 2007.
Quand on l’interroge sur la résolution adoptée par la classe politique mauritanienne sur le Darfour, il acquiesce qu’elle est timide et trop consensulle. il n’est pas étonné que le Président de la République , le Colonel Ely Ould Mohamed Vall, ait évoqué l’éventualité d’un rétablissement des relations diplomatiques avec le Soudan. Exclusion, racisme, esclavage : voilà trois fléaux, communs aux deux pays, sciemment occultés par les autorités du CMJD3 pendant la période de transition.
Il rassérène que la Mauritanie doit pleinement jouer son rôle de trait d’union entre le monde arabe et africain.
Rappelons-nous, en 2001, quand monsieur El Wafi, aujourd’hui membre de l’ONE4, déclarait sur la chaîne El jazeera que
les noirs de Mauritanie descendent tous des "Tirailleurs Sénégalais" que les Français ont emmenés avec eux pour coloniser le pays,
la réponse du doyen fut prompte et nette: « Mohamed Wafi de la tribu Laghlal Khilly peut-il à ce point être ignorant jusqu'à ses propres racines? ...Il est un raciste notoire et aussi un esclavagiste impénitent. Mais rien n'y fait, la Mauritanie restera terre de rencontres, de passages, de métissages, d'échanges ».
Il est pour la rupture des relations diplomatiques avec Israël et la réintégration de la CEDEAO. Deux thèmes de politique extérieure que le Colonel Ely Ould Mohamed Vall a censuré des présidentielles de mars 2007 lors de son discours du 27 janvier dont l’objet était, paradoxalement, la réaffirmation de sa neutralité.
Mais Ladji, et encore moins l’APP, n’entendent pas se faire dicter leur conduite par le Président de la République.
Après plus de 5 kilomètres de marche dans Paris qui le menèrent à la rue des Ecoles, le doyen se précipite pour rependre l’ouvrage de Ibrahima LY, « Noctuelles de larmes » et un entretien de Joseph Ki Zerbo, qui fut son professeur.
Malgré cette longue marche, il effectue un sprint de trente mètres dans le métro pour rattraper un ascenseur. Quel est le secret de cette belle forme physique à 70 ans ? La course à pied dans les rues de Nouakchott, la marche.
Bonne tournée en Europe à notre doyen avant d’entamer une campagne où le débat d’idées est encore absent. Le défilement des comités de soutien aux candidats comble-t-il ce vide ? On peut largement en douter. Le seul soutien qui vaille sera celui de l’électeur.
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1 FEANF : Fédération des Etudiants Africains Noirs en France
2 PAI : Parti Africain pour l'Indépendance
3 CMJD: Comité Militaire pour la Justice et la Démocratie
4 ONE : Observatoire National des Elections
Ciré KANE
L’émission sera consacrée aux élections présidentielles en Mauritanie.
Ladji est né en 1937. C’est incontestablement, l’un des plus grands syndicalistes que la Mauritanie ait connu.
Dans les années 60, étudiant à Toulouse et responsable de la coordination de la FEANF1, activiste du PAI2, il est de tous les combats pour la liberté. Très ancré à gauche, ni pro soviétique, ni pro chinois, sa fierté est d’avoir serré la main à Mao.
En 1964 déjà, il met son expérience des luttes pour l’indépendance des pays africains à profit et fonde un comité de soutien pour la libération de la Palestine.
L’homme est audacieux. Début 1966, la Mauritanie vivait sa première guerre civile. C’est le moment peu opportun qu’il choisit pour rentrer clandestinement au pays et effectuer, à sa propre initiative, une mission d’observation pour le compte du PAI. Ses anciens amis ne veulent plus le voir de peur de s’attirer des ennuis.
Il embarque à bord d’un camion de transport de marchandises, arrêté tard dans la nuit par un poste de contrôle situé à une vingtaine de kilomètres de Nouakchott. Si près du but, Il fausse compagnie aux policiers en pleine nuit pour assister au discours de Mokhtar Ould Daddah, dont il fut l’un des principaux opposants. Ce qui lui valut plusieurs séjours en prison.
Il est le fondateur de l’association Yelinkaare pour la promotion de la langue et de la culture Soninké. Qui ne fut reconnue qu’un an après l’ARPRIM, l’Association pour la Renaissance du Pulaar. Les autorités étaient loin de se douter que Ladji était dans toutes les associations pour la reconnaissance de nos langues nationales.
L’anecdote qui suit montre que l'homme n'est pas rancunier. Sollicité par la Première Dame , Mariem Daddah, qui ne connaissait rien de ses rapports avec le pouvoir, il participe à l’organisation de la journée de la femme et rameute à Nouakchott de grandes personnalités. La manifestation fut fort bien réussie. A tel point que madame Daddah demanda à ce qu'il soit décoré. Les autorités la prennent alors carrément pour une folle. Une médaille pour leur ennemi juré, jamais de la vie !
Il est aussi très respectueux de ses adversaires politiques. Il eut un entretien très cordial avec Mokhtar ould Daddah, quelque temps avant la disparition de celui-ci.
Sa hardiesse, sa soif de justice et d’égalité entre tous les hommes est peut-être le legg moral de son ancêtre, un vaillant soldat soninké de l’armée du roi du Wassoulou : Samory Touré, redoutable guerrier et grand résistant guinéen à la pénétration française.
Cette Guinée vit en 1962 la mue brutale en dictateur sanguinaire de Sékou Touré. Ironie du sort, ce dernier, bourreau de son peuple, se réclame petit-fils de Samory le libérateur.
Bien que le siège du PAI soit à Conakry, c’est sans hésitation que Ladji et une poignée de compagnons de lutte rédigèrent une déclaration condamnant les agissements du despote mal éclairé. La sanction fut immédiate : le PAI est banni, il trouve refuge au Mali.
Il faudrait un livre pour rappeler le parcours de cet homme aux jeunes générations qui n'ont connu que les comités militaires.
Ladji sort de la clandestinité en 1991 après l'adoption de la constitution instaurant le multipartisme et une pseudo démocratie. Il s'impose rapidement et à partir de cet instant, sa trajectoire politique se confondra avec celle de son ami et fidèle compagnon Messaoud Ould Boulkheir, le Président de l'APP et grand favori aux prochaines élections présidentielles de mars 2007.
Quand on l’interroge sur la résolution adoptée par la classe politique mauritanienne sur le Darfour, il acquiesce qu’elle est timide et trop consensulle. il n’est pas étonné que le Président de la République , le Colonel Ely Ould Mohamed Vall, ait évoqué l’éventualité d’un rétablissement des relations diplomatiques avec le Soudan. Exclusion, racisme, esclavage : voilà trois fléaux, communs aux deux pays, sciemment occultés par les autorités du CMJD3 pendant la période de transition.
Il rassérène que la Mauritanie doit pleinement jouer son rôle de trait d’union entre le monde arabe et africain.
Rappelons-nous, en 2001, quand monsieur El Wafi, aujourd’hui membre de l’ONE4, déclarait sur la chaîne El jazeera que
les noirs de Mauritanie descendent tous des "Tirailleurs Sénégalais" que les Français ont emmenés avec eux pour coloniser le pays,
la réponse du doyen fut prompte et nette: « Mohamed Wafi de la tribu Laghlal Khilly peut-il à ce point être ignorant jusqu'à ses propres racines? ...Il est un raciste notoire et aussi un esclavagiste impénitent. Mais rien n'y fait, la Mauritanie restera terre de rencontres, de passages, de métissages, d'échanges ».
Il est pour la rupture des relations diplomatiques avec Israël et la réintégration de la CEDEAO. Deux thèmes de politique extérieure que le Colonel Ely Ould Mohamed Vall a censuré des présidentielles de mars 2007 lors de son discours du 27 janvier dont l’objet était, paradoxalement, la réaffirmation de sa neutralité.
Mais Ladji, et encore moins l’APP, n’entendent pas se faire dicter leur conduite par le Président de la République.
Après plus de 5 kilomètres de marche dans Paris qui le menèrent à la rue des Ecoles, le doyen se précipite pour rependre l’ouvrage de Ibrahima LY, « Noctuelles de larmes » et un entretien de Joseph Ki Zerbo, qui fut son professeur.
Malgré cette longue marche, il effectue un sprint de trente mètres dans le métro pour rattraper un ascenseur. Quel est le secret de cette belle forme physique à 70 ans ? La course à pied dans les rues de Nouakchott, la marche.
Bonne tournée en Europe à notre doyen avant d’entamer une campagne où le débat d’idées est encore absent. Le défilement des comités de soutien aux candidats comble-t-il ce vide ? On peut largement en douter. Le seul soutien qui vaille sera celui de l’électeur.
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1 FEANF : Fédération des Etudiants Africains Noirs en France
2 PAI : Parti Africain pour l'Indépendance
3 CMJD: Comité Militaire pour la Justice et la Démocratie
4 ONE : Observatoire National des Elections
Ciré KANE