Dès le 18 juin 2006, les services de sécurité mauritaniens procédaient à l’interpellation de quelques partisans présumés du Chef de l’Etat déchu, le Colonel Ould Sid’Ahmed Taya, presque tous des membres de sa tribu.
Le mardi 18 juillet 2006, à la surprise générale, l’un des conjurés, le Colonel Sidi Mohamed Ould Vaïda recouvre la liberté ; le même jour, les 5 autres sont déférées devant la justice et se retrouvent dans la prison civile de Nouakchott, au motif de « tentatives d’atteinte à l’ordre constitutionnel » (sic).
La qualification comporte de quoi susciter la consternation, si l’on se rappelle que les actes reprochés devaient survenir avant le référendum du 25 juin révolu. Cette rétroactivité du chef d’accusation relève d’un amateurisme dont le Parquet semble coutumier dans un pays où, en dépit du putsch salutaire du 3 août 2005, tant de juges vendent le verdict et autant d’auteurs de tortures dirigent les commissariats.
Jusqu’ici, les enquêteurs ne parviennent pas à connaître toutes les ramifications du projet de coup d’état militaire. Il est juste établi, avec certitude, l’intention, par les futurs putschistes, d’éliminer, avant le début des opérations, le Colonel Mohamed Ould Abdel Aziz, Commandant du Bataillon de Sécurité Présidentielle (BASEP), l’un des artisans de la chute de Ould Sid’Ahmed Taya, il y a un peu moins d’un an.
L’aspect le plus étrange de la situation réside dans la formidable force de frappe matérielle des proches de Ould Taya, qui ne se privent, jusque aux portes de la Prison Civile, d’en étaler l’envergure.
Depuis le déferrement des détenus, l'espace jouxtant l'Etat-Major de la gendarmerie ne désemplit, le soir. Les parents des prisonniers s'y donnent rendez-vous, au crépuscule, font arroser le sol brûlant en cette saison et y étalent nattes, tapis et moquettes. Le thé, les boissons et le méchoui sont distribués aux 5 conjurés, un traitement jamais consenti à un hôte des geôles mauritaniennes, surtout pas ces dernières années.
Ahmed Ould Sidi Baba, armateur en faillite et Président du parti du Rassemblement pour la Démocratie et l’Unité (RDU) Khaddad Ould Mokhtar, entrepreneur prospère, se sont partagé les tâches, afin de venir en aide aux prisonniers et empêcher, ainsi, toute démoralisation de leur camp : le premier multiplie les tentatives de provoquer, dans l’opinion, un courant de compassion et de faveur, notamment grâce aux journaux ; le second défraye toute l’entreprise ; de surcroît, il veille à mobiliser la Tribu et y insuffler les réflexes de solidarité active. Leurs deux épouses – Fatimetou Mint Sidha et sa soeur Safiya – encadrent les rassemblements quotidiens, rameutent les cousines, font passer les messages confidentiels et gèrent la logistique du spectacle.
Les rassemblement qui s'organisent chaque soir devant la Prison Civile attirent de plus en plus de gens, la curiosité et l'oisiveté des Nouakchottois aidant, surtout en période de vacances. Généralement, les badauds viennent y éprouver, de visu, la fragilité de toutes choses, dans la vie d’ici-bas, un exercice assez courant dans la spiritualité islamique.
Ce regain de visibilité, d’une tribu que les mauritaniens chargent trop commodément de toutes leurs impuissances et faillites, intervient alors que des voix, nombreuses, parmi ses notables, appellent à ne plus prendre le risque d’une identification au Colonel Ould Taya, sous peine de compromettre les vies et biens de toute la communauté. Certains, persuadés d’avoir perdu tout avenir de domination dans le pays, transportent leurs activités et résidence principale, en Arabie Saoudite, à Dubaï et au Maroc.
Dans l’ensemble, même si la probabilité d’un retour au pouvoir du dictateur s’amenuise, le statu quo au sein du monde des affaires, des forces armées et de sécurité entretient une potentialité insurrectionnelle qu’il importe de ne pas négliger. Au risque d’exposer la Mauritanie à la restauration de l’autoritarisme, le Conseil Militaire pour la Justice et la Démocratie (CMJD) et son gouvernement ont choisi d’éviter tout apurement des comptes ; le passif, déjà lourd, s’alourdit d’autant. Les tortionnaires assurent la police ordinaire, occupent des bureaux ou commandent des troupes tandis que les concussionnaires, faussaires et leurs complices tiennent encore étal sur la voie publique. Le changement en Mauritanie s’apparente, de plus en plus, à un équilibre précaire, d’où le dilemme, toujours irrésolu par les dirigeants de la transition: assainir nous mettrait en danger, laisser faire nourrit nos ennemis. Que faire, se demandait Lénine ?
Depuis le déferrement des détenus, l'espace jouxtant l'Etat-Major de la gendarmerie ne désemplit, le soir. Les parents des prisonniers s'y donnent rendez-vous, au crépuscule, font arroser le sol brûlant en cette saison et y étalent nattes, tapis et moquettes. Le thé, les boissons et le méchoui sont distribués aux 5 conjurés, un traitement jamais consenti à un hôte des geôles mauritaniennes, surtout pas ces dernières années.
Ahmed Ould Sidi Baba, armateur en faillite et Président du parti du Rassemblement pour la Démocratie et l’Unité (RDU) Khaddad Ould Mokhtar, entrepreneur prospère, se sont partagé les tâches, afin de venir en aide aux prisonniers et empêcher, ainsi, toute démoralisation de leur camp : le premier multiplie les tentatives de provoquer, dans l’opinion, un courant de compassion et de faveur, notamment grâce aux journaux ; le second défraye toute l’entreprise ; de surcroît, il veille à mobiliser la Tribu et y insuffler les réflexes de solidarité active. Leurs deux épouses – Fatimetou Mint Sidha et sa soeur Safiya – encadrent les rassemblements quotidiens, rameutent les cousines, font passer les messages confidentiels et gèrent la logistique du spectacle.
Les rassemblement qui s'organisent chaque soir devant la Prison Civile attirent de plus en plus de gens, la curiosité et l'oisiveté des Nouakchottois aidant, surtout en période de vacances. Généralement, les badauds viennent y éprouver, de visu, la fragilité de toutes choses, dans la vie d’ici-bas, un exercice assez courant dans la spiritualité islamique.
Ce regain de visibilité, d’une tribu que les mauritaniens chargent trop commodément de toutes leurs impuissances et faillites, intervient alors que des voix, nombreuses, parmi ses notables, appellent à ne plus prendre le risque d’une identification au Colonel Ould Taya, sous peine de compromettre les vies et biens de toute la communauté. Certains, persuadés d’avoir perdu tout avenir de domination dans le pays, transportent leurs activités et résidence principale, en Arabie Saoudite, à Dubaï et au Maroc.
Dans l’ensemble, même si la probabilité d’un retour au pouvoir du dictateur s’amenuise, le statu quo au sein du monde des affaires, des forces armées et de sécurité entretient une potentialité insurrectionnelle qu’il importe de ne pas négliger. Au risque d’exposer la Mauritanie à la restauration de l’autoritarisme, le Conseil Militaire pour la Justice et la Démocratie (CMJD) et son gouvernement ont choisi d’éviter tout apurement des comptes ; le passif, déjà lourd, s’alourdit d’autant. Les tortionnaires assurent la police ordinaire, occupent des bureaux ou commandent des troupes tandis que les concussionnaires, faussaires et leurs complices tiennent encore étal sur la voie publique. Le changement en Mauritanie s’apparente, de plus en plus, à un équilibre précaire, d’où le dilemme, toujours irrésolu par les dirigeants de la transition: assainir nous mettrait en danger, laisser faire nourrit nos ennemis. Que faire, se demandait Lénine ?