Réaction à la tribune parue dans Sud Quotidien en date du 5 avril 2006
Ecrivant à son ancien compagnon d’armes le Colonel Ely Ould Mohamed Vall, le Lieutenant de Vaisseau Mustapha Diop s’exprime dans la veine épistolaire du sentiment. Il tient un discours si persuasif qu’il peinerait à toute âme sensible d’y plonger sans conséquence. Puisse-t-il être entendu, là où nos proses de militants échouent à emporter l’adhésion du Prince.
Hélas, il n’est pas besoin d’être calviniste genevois pour se le rappeler : l’on ne prête qu’aux riches. Or, Mustapha Diop porte peu dans sa musette ; pour l’avoir fouillée - non sans mal, tant il se méfie des politiciens – j’y ai entrevu des trésors de loyauté, des certitudes morales et une capacité étonnante à changer de vie, de se mettre en danger, d’un coup, avec la lucidité de la rançon induite. Les esprits chagrins disent qu’il « démarre au quart de tour » ; je ne sais conduire une voiture et ignorait, donc, le secret de la comparaison. Récemment, un ami m’expliqua que ce genre de chauffeur peut vous entraîner dans le précipice si vous lui manquez de respect. Là, j’ai reconnu mon Mustapha et compris pourquoi il s’est réfugié en civilisation hexagonale. En Mauritanie, il ne fait pas bon la sincérité.
Voici le capital social de Mustapha Diop. C’est beaucoup, à nos yeux, nous autres amoureux de Kant et de Spinoza. Mais, en face, autour du Président du Conseil Militaire, s’agite toute une ruche boutiquière dont le putsch du 3 août a secoué les étals. Elle se reconstitue et reconquiert ses passe-droit. D’éthique et d’Impératif Catégorique, elle ignore la valeur. Les moins vicieux chuchoteront au Prince : « ton ami délire ; il a le mal du pays, ne l’écoute pas, il se lassera de radoter et rentrera dans le troupeau ».
Le plus édifiant dans l’histoire, la supputation rétrospective nous l’enseigne. Et si le coup d’Etat avait échoué, qui, aujourd’hui, se battrait pour Ely Ould Mohamed Vall, ses camarades de détention et leurs familles ?
a) Je vois Mustapha Diop, l’adolescent de Paris, courant les rendez-vous politiques et de presse, de métro en métro, avec la rage de convaincre et la cigarette mordue à l’envers. Nous sommes quelques centaines d’extrémistes apatrides et aventuriers, à lui prêter main forte, rivés, jour et nuit, à nos téléphones et claviers. A Dakar, les déportés manifestent, contre la dictature, devant l’ambassade de Mauritanie.
b) J’imagine, à Nouakchott, les communiqués des partis qui dénoncent les changement par la force et renouvellent l’appel au dialogue. La foule, le bon peuple en transe, brandit les portraits de Ould Taya et réclame la potence pour les renégats. Parmi les marcheurs suant sous le soleil d’août, je reconnais tous les conseillers de l’actuel Chef de l’Etat, ses ambassadeurs et l’ensemble de son gouvernement excepté, peut-être, le Ministre de la Justice.
Si le Président du Conseil Militaire ne méditait ces hypothèses, la correspondance de Mustapha Diop lui ôte, désormais, le recours à la défausse du « je ne croyais pas ». A présent, il sait. En politique, la conscience du péril exclut l’exonération.
Abdel Nasser Ould Othman Sid’Ahmed Yessa
Juriste, réfugié politique en France, porte-parole du mouvement d’opposition radicale Conscience et Résistance.
Ecrivant à son ancien compagnon d’armes le Colonel Ely Ould Mohamed Vall, le Lieutenant de Vaisseau Mustapha Diop s’exprime dans la veine épistolaire du sentiment. Il tient un discours si persuasif qu’il peinerait à toute âme sensible d’y plonger sans conséquence. Puisse-t-il être entendu, là où nos proses de militants échouent à emporter l’adhésion du Prince.
Hélas, il n’est pas besoin d’être calviniste genevois pour se le rappeler : l’on ne prête qu’aux riches. Or, Mustapha Diop porte peu dans sa musette ; pour l’avoir fouillée - non sans mal, tant il se méfie des politiciens – j’y ai entrevu des trésors de loyauté, des certitudes morales et une capacité étonnante à changer de vie, de se mettre en danger, d’un coup, avec la lucidité de la rançon induite. Les esprits chagrins disent qu’il « démarre au quart de tour » ; je ne sais conduire une voiture et ignorait, donc, le secret de la comparaison. Récemment, un ami m’expliqua que ce genre de chauffeur peut vous entraîner dans le précipice si vous lui manquez de respect. Là, j’ai reconnu mon Mustapha et compris pourquoi il s’est réfugié en civilisation hexagonale. En Mauritanie, il ne fait pas bon la sincérité.
Voici le capital social de Mustapha Diop. C’est beaucoup, à nos yeux, nous autres amoureux de Kant et de Spinoza. Mais, en face, autour du Président du Conseil Militaire, s’agite toute une ruche boutiquière dont le putsch du 3 août a secoué les étals. Elle se reconstitue et reconquiert ses passe-droit. D’éthique et d’Impératif Catégorique, elle ignore la valeur. Les moins vicieux chuchoteront au Prince : « ton ami délire ; il a le mal du pays, ne l’écoute pas, il se lassera de radoter et rentrera dans le troupeau ».
Le plus édifiant dans l’histoire, la supputation rétrospective nous l’enseigne. Et si le coup d’Etat avait échoué, qui, aujourd’hui, se battrait pour Ely Ould Mohamed Vall, ses camarades de détention et leurs familles ?
a) Je vois Mustapha Diop, l’adolescent de Paris, courant les rendez-vous politiques et de presse, de métro en métro, avec la rage de convaincre et la cigarette mordue à l’envers. Nous sommes quelques centaines d’extrémistes apatrides et aventuriers, à lui prêter main forte, rivés, jour et nuit, à nos téléphones et claviers. A Dakar, les déportés manifestent, contre la dictature, devant l’ambassade de Mauritanie.
b) J’imagine, à Nouakchott, les communiqués des partis qui dénoncent les changement par la force et renouvellent l’appel au dialogue. La foule, le bon peuple en transe, brandit les portraits de Ould Taya et réclame la potence pour les renégats. Parmi les marcheurs suant sous le soleil d’août, je reconnais tous les conseillers de l’actuel Chef de l’Etat, ses ambassadeurs et l’ensemble de son gouvernement excepté, peut-être, le Ministre de la Justice.
Si le Président du Conseil Militaire ne méditait ces hypothèses, la correspondance de Mustapha Diop lui ôte, désormais, le recours à la défausse du « je ne croyais pas ». A présent, il sait. En politique, la conscience du péril exclut l’exonération.
Abdel Nasser Ould Othman Sid’Ahmed Yessa
Juriste, réfugié politique en France, porte-parole du mouvement d’opposition radicale Conscience et Résistance.