Premières élections depuis le coup d'Etat militaire d'août 2005, les législatives et municipales du 19 novembre en Mauritanie autorisent pour la première fois les candidats indépendants et font une large place aux femmes. Jusqu'à présent, la campagne se déroule dans le calme et… en musique.
SYFIA - La campagne pour les élections législatives et municipales de dimanche prochain se termine dans le calme en Mauritanie où aucun incident grave n'est à déplorer. Elle est même moins animée que celles des années Ould Taya, l'ancien chef de l'Etat, renversé par les militaires le 3 août 2005, où l’on ‘cadeautait’ les électeurs avec des billets de banque. ‘Depuis l’arrivée des militaires, on ne voit plus faire ce clientélisme politique avec les deniers publics’, remarque Marième mint Bobe, candidate indépendante à Arafat, dans la banlieue de Nouakchott. Le gouvernement a, en effet, limité à 6 millions de Ouigouya (18 000 €) les dépenses autorisées pour la campagne électorale. C'est donc surtout la musique, omniprésente sous les tentes où les gens viennent danser, qui marque cette campagne. En point d'orgue, le concert de Youssou Ndour, le 12 novembre au stade olympique, financé par un homme d'affaires, Ahmed Hamza, candidat du Rassemblement des forces démocratiques (Rfd).
Ce n'est pas la seule nouveauté de ces scrutins par lesquels la junte militaire au pouvoir souhaite remettre le pouvoir aux civils. Outre les 25 formations politiques qui participent à ces élections se présentent aussi de nombreux candidats qui n'ont pas d'étiquettes politiques. Ainsi sur les 1 664 listes de candidats - 1 222 pour les municipales et 444 pour les législatives - 600 sont celles d'indépendants : barons de l'ancien régime, hommes d'affaires et islamistes modérés à qui les régimes précédents avaient toujours interdit de créer un parti.
Ces candidatures indépendantes, le régime déchu de Ould Taya n'en voulait pas, l'opposition de l'époque non plus, car, selon elle, ‘elles encouragent le tribalisme, le régionalisme et elles menacent la démocratie’. Les militaires les ont instituées malgré l'opposition des partis qui ont, dans un premier temps, soupçonné le Comité militaire pour la justice et la démocratie (Cmjd), qui dirige actuellement le pays, de les avoir autorisées pour écarter les partis du pouvoir.
Pour mettre fin à la controverse, le chef de l'Etat, Ely Ould Mouhamed Vall, a réaffirmé, le 26 octobre, la neutralité des militaires. ‘Nous n'avons pas pris le pouvoir pour y rester, ni pour le donner à quelqu'un de l'opposition ou de l'ancien régime…’, a-t-il déclaré. Le commissaire européen chargé du développement, Louis Michel, en visite, fin octobre, en Mauritanie, avait lui aussi déclaré que ‘les partis politiques n'ont pas le monopole de la représentation citoyenne. Il est difficile de ne pas accepter les candidatures indépendantes.’
La multiplicité des candidats pose cependant un problème à la Haute autorité de la presse et de l’audiovisuel (Hapa), nouvellement créée en Mauritanie, qui attribue aux candidats des temps d'antenne à la radio et à la télévision nationale. Elle a demandé aux indépendants de se regrouper par affinités, car elle ne peut trouver des créneaux pour tous.
La polémique autour des candidatures indépendantes a presque relégué au second plan l’autre innovation de ces scrutins : l'arrivée massive des femmes sur les listes de candidats. Pour être valides, les listes doivent compter au moins 20 % de femmes. Depuis le 4 novembre, début de la campagne électorale, les femmes rivalisent d'ardeur avec les hommes pour inciter les 1,1 million d'électeurs à voter pour elles. Elles sont soutenues par la Gtz, l’Agence de coopération allemande, qui a réalisé un film pour les y aider. ‘20 % de femmes et même plus’, ‘Votez pour elles’ : tels sont les slogans qui reviennent dans ce film, chantés dans toutes les langues mauritaniennes. A Nouakchott, la capitale, des tentes sont dressées le long des avenues et devant les maisons. Des femmes font campagne tout en servant du thé sans arrêt aux passants.
Ces élections de dimanche seront attentivement surveillées par la communauté internationale qui a, jusqu'à présent, délivré un satisfecit à la junte militaire. Elles constituent le premier test d'un retour à la démocratie avant l'élection présidentielle de mars 2007.
Boubacar SYLLA
SYFIA - La campagne pour les élections législatives et municipales de dimanche prochain se termine dans le calme en Mauritanie où aucun incident grave n'est à déplorer. Elle est même moins animée que celles des années Ould Taya, l'ancien chef de l'Etat, renversé par les militaires le 3 août 2005, où l’on ‘cadeautait’ les électeurs avec des billets de banque. ‘Depuis l’arrivée des militaires, on ne voit plus faire ce clientélisme politique avec les deniers publics’, remarque Marième mint Bobe, candidate indépendante à Arafat, dans la banlieue de Nouakchott. Le gouvernement a, en effet, limité à 6 millions de Ouigouya (18 000 €) les dépenses autorisées pour la campagne électorale. C'est donc surtout la musique, omniprésente sous les tentes où les gens viennent danser, qui marque cette campagne. En point d'orgue, le concert de Youssou Ndour, le 12 novembre au stade olympique, financé par un homme d'affaires, Ahmed Hamza, candidat du Rassemblement des forces démocratiques (Rfd).
Ce n'est pas la seule nouveauté de ces scrutins par lesquels la junte militaire au pouvoir souhaite remettre le pouvoir aux civils. Outre les 25 formations politiques qui participent à ces élections se présentent aussi de nombreux candidats qui n'ont pas d'étiquettes politiques. Ainsi sur les 1 664 listes de candidats - 1 222 pour les municipales et 444 pour les législatives - 600 sont celles d'indépendants : barons de l'ancien régime, hommes d'affaires et islamistes modérés à qui les régimes précédents avaient toujours interdit de créer un parti.
Ces candidatures indépendantes, le régime déchu de Ould Taya n'en voulait pas, l'opposition de l'époque non plus, car, selon elle, ‘elles encouragent le tribalisme, le régionalisme et elles menacent la démocratie’. Les militaires les ont instituées malgré l'opposition des partis qui ont, dans un premier temps, soupçonné le Comité militaire pour la justice et la démocratie (Cmjd), qui dirige actuellement le pays, de les avoir autorisées pour écarter les partis du pouvoir.
Pour mettre fin à la controverse, le chef de l'Etat, Ely Ould Mouhamed Vall, a réaffirmé, le 26 octobre, la neutralité des militaires. ‘Nous n'avons pas pris le pouvoir pour y rester, ni pour le donner à quelqu'un de l'opposition ou de l'ancien régime…’, a-t-il déclaré. Le commissaire européen chargé du développement, Louis Michel, en visite, fin octobre, en Mauritanie, avait lui aussi déclaré que ‘les partis politiques n'ont pas le monopole de la représentation citoyenne. Il est difficile de ne pas accepter les candidatures indépendantes.’
La multiplicité des candidats pose cependant un problème à la Haute autorité de la presse et de l’audiovisuel (Hapa), nouvellement créée en Mauritanie, qui attribue aux candidats des temps d'antenne à la radio et à la télévision nationale. Elle a demandé aux indépendants de se regrouper par affinités, car elle ne peut trouver des créneaux pour tous.
La polémique autour des candidatures indépendantes a presque relégué au second plan l’autre innovation de ces scrutins : l'arrivée massive des femmes sur les listes de candidats. Pour être valides, les listes doivent compter au moins 20 % de femmes. Depuis le 4 novembre, début de la campagne électorale, les femmes rivalisent d'ardeur avec les hommes pour inciter les 1,1 million d'électeurs à voter pour elles. Elles sont soutenues par la Gtz, l’Agence de coopération allemande, qui a réalisé un film pour les y aider. ‘20 % de femmes et même plus’, ‘Votez pour elles’ : tels sont les slogans qui reviennent dans ce film, chantés dans toutes les langues mauritaniennes. A Nouakchott, la capitale, des tentes sont dressées le long des avenues et devant les maisons. Des femmes font campagne tout en servant du thé sans arrêt aux passants.
Ces élections de dimanche seront attentivement surveillées par la communauté internationale qui a, jusqu'à présent, délivré un satisfecit à la junte militaire. Elles constituent le premier test d'un retour à la démocratie avant l'élection présidentielle de mars 2007.
Boubacar SYLLA