Ce qui aura attiré le plus l’attention dans le discours du chef de l’Etat, présidant à l’ouverture du sixième congrès des maires, c’est cette histoire de « vote de rejet ». Une idée qu’il a développée avec force arguments. La perspective d’un ‘match nul’ à l’issue et des deux mi-temps et des ‘tirs aux buts’, avec comme possibilité ‘la mort subite’ infligée constitutionnellement à tous les protagonistes.
La logique d’Eli va-t-elle être suivie par les masses ? Ou alors, les politiques vont-ils trouver le moyen d’esquiver ce que certains parmi eux considèrent déjà comme un putsch constitutionnel ? Pendant que les rumeurs des salons sur une rallonge du ‘mandat des militaires se faisaient une espèce de crédibilité à travers les colonnes des journaux, personne presque ne s’attendait à ce que la réaction officielle aux supputations du genre « partiront, partiront pas » à propos des militaires et de leur gouvernement de transition soit celle-ci : " Si vous ne désirez aucune des candidatures, ni au premier, ni au deuxième tour, vous pouvez les refuser par votre vote blanc."
L’invitation au rejet des vingt candidats qui attendent encore le 9 février pour être fixés sur la recevabilité de leurs requêtes, à travers la liste définitive des candidats à la présidentielle, est d’autant plus surprenante qu’elle coïncide avec un nouveau climat de suspicion entre la classe politique et le CMJD.
Il y a d’abord cette lettre adressée par la CFCD à des structures comme la Commission européenne, la Commission africaine l’Organisation de la conférence islamique, la Ligue arabe et l’Organisation internationale de la francophonie.
Cette lettre accuse notamment les autorités d’interférence dans le jeu et de violation du principe de neutralité promise. Il y a ensuite la rumeur sur la prolongation de la période de transition. Laquelle prolongation va finir par être requise par un des candidats à la présidentielle en la personne Chbih Ould Cheikh Melaïnine qui d’ailleurs s’était retiré de la coalition. Sans compter la perte de vitesse de la Coalition remarquée à travers les sénatoriales et la naissance d’une force concurrente, le Mithaaq…
Ces situations sont-elles suffisantes pour rendre les candidats à la magistrature suprême indésirables aux yeux des colonels ? Certainement pas. Il doit y avoir autre chose. Ils sont 21 à solliciter le suffrage des mauritaniens le 11 mars. Certains n’ont pu s’empêcher d’afficher leurs ambitions pour la Mauritanie : rompre avec Israël, réintégrer la CEDEAO, penser un statut de l'armée, entre autres questions sensibles.
Le colonel Eli Ould Mohamed Val les dissuade de s’y aventurer… « Les options diplomatiques d’un pays ne sont pas une affaire électorale avec laquelle on tente d’attirer des électeurs de ghettos politiques… »
Sur ce premier point quelle va être la réaction des fondateurs de la CFCD qui avaient marché pour soutenir le peuple libanais en proie aux feux de l’entité sioniste ? Eux qui avaient demandé à l’époque au CMJD de rompre les relations diplomatiques avec Israël, seront-ils d’accord que l’option pour une relation aussi étroite avec ‘l’ennemi’ de la nation arabe soit une affaire ‘extra-électorale’ ?
Ou alors, ceux parmi eux qui ont ouvertement promis comme premier geste en cas de victoire de rompre les relations diplomatiques avec Israël auront-ils assez de discernement pour rétorquer que quiconque ambitionne de diriger un pays a, plus que le droit, le devoir d’inscrire dans son programme les options diplomatiques qu’il juge opportunes pour son pays et qu’il n’est nullement du ressort d’un pouvoir de transition de juger des promesses électorales d’un candidat dès lors que ce pouvoir a décidé de se tenir neutre dans le jeu qui va l’opposer à d’autres ?
A ceux qui ambitionnent de rectifier le tir d’Ould Taya qui a extrait la Mauritanie de la CEDEAO Eli a dit ceci : « La diplomatie mauritanienne au niveau de la sous région et du continent africain se gère en fonction de la réalité de notre pays et non des idéologies et des positions identitaires ou particularistes, nul n’a le droit de la remettre en cause d’une manière qui ne soit pas conforme à l’intérêt national. »
La démocratie en Mauritanie est d’abord une affaire identitaire. Tout comme la manière même de diriger ce pays. Les sphères de décisions sont le plus souvent occupées, fortuitement peut-être, selon l’appartenance tribale du chef. Les partis politiques sont le plus souvent fondés sur une humeur provoquée par la fibre communautaire. L’échiquier politique est établi selon un quota tacite : tant de ministres pour telle tribu, telle ethnie, telle région…
Bref, la Mauritanie a longtemps été prise en otage par les idéologies et les positions identitaires. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’elle a été retirée d’une structure d’intérêt économique comme la CEDEAO. Alors qui, parmi les 21 candidats, est prêt à revenir sur cette question qui fâche et face à laquelle beaucoup sont restés prudents ? Qu’est-ce qu’un retour dans la CEDEAO peut avoir de plus identitaire et de plus particulariste que le fait pour la Mauritanie d’être membre de l’OMVS, de l’OCI, de l’UMA, de l’OIF, de la Ligue Arabe, du Sin-çad ? Qu’est-ce qu’il n’y a pas d’ailleurs de particulariste dans tout ce qui s’est fait jusque-là pour la Mauritanie par ceux qui l’on dirigée?
L’avenir de l’armée ? « L’armée et le conseil militaire n’ont rien demandé à quiconque et personne n’a de propositions à leur faire. » D’autant plus vrai que c’est visiblement cette armée qui est toujours venue débloquer les situations pour ces politiques chaque fois qu’ils se sont sentis étouffés par le pouvoir…Tous les coups d’Etats réussis ont été salués par le peuple avec la bénédiction des politiques. 1984, 2005, y compris le tout premier, celui de 1978. Même celui du 8 juin 2003 aurait été applaudi si Ould Taya n’en était pas sorti vainqueur…C’est comme si l’armée était plus capable à décanter les blocages que l’opinion publique.
A ceux qui promettent « ceci ou cela », la réponse est très claire. Toutefois, elle procède d’une inquiétude certainement quant à la gestion que pourraient faire les futurs dirigeants de ce pays de dossiers très sensibles pouvant impliquer des officiers très importants. En effet, tout ce qui, à la faveur des journées de concertation d’octobre 2005, a été réservé au prochain gouvernement qui serait issu de l’après transition ne manquera pas de resurgir même si ce gouvernement-là cherche à l’oublier.
Alors, les promesses faites ça et là à l’armée ont tout l’air d’une garantie d’immunité, de protection, voire d’autoprotection contre d’autres coups de forces dont elle pourrait se rendre capable s’il arrivait que la machine ne tourne plus ni sous son contrôle, ni en sa faveur.
Si en fin de compte, en plus de la promesse du respect du calendrier électoral, il y a dans le discours du président du CMJD une tactique quelconque visant à faire échouer une ancienne opposition pas forcément prête à enterrer un certain passé une fois portée au sommet du pouvoir, il reste à se demander s’il est possible que parmi vingt ‘prétendants’ la Mauritanie n’arrive point a se faire choisir ‘un mari’.
Kissima-Tocka Diagana
tribune
source : flamnet
La logique d’Eli va-t-elle être suivie par les masses ? Ou alors, les politiques vont-ils trouver le moyen d’esquiver ce que certains parmi eux considèrent déjà comme un putsch constitutionnel ? Pendant que les rumeurs des salons sur une rallonge du ‘mandat des militaires se faisaient une espèce de crédibilité à travers les colonnes des journaux, personne presque ne s’attendait à ce que la réaction officielle aux supputations du genre « partiront, partiront pas » à propos des militaires et de leur gouvernement de transition soit celle-ci : " Si vous ne désirez aucune des candidatures, ni au premier, ni au deuxième tour, vous pouvez les refuser par votre vote blanc."
L’invitation au rejet des vingt candidats qui attendent encore le 9 février pour être fixés sur la recevabilité de leurs requêtes, à travers la liste définitive des candidats à la présidentielle, est d’autant plus surprenante qu’elle coïncide avec un nouveau climat de suspicion entre la classe politique et le CMJD.
Il y a d’abord cette lettre adressée par la CFCD à des structures comme la Commission européenne, la Commission africaine l’Organisation de la conférence islamique, la Ligue arabe et l’Organisation internationale de la francophonie.
Cette lettre accuse notamment les autorités d’interférence dans le jeu et de violation du principe de neutralité promise. Il y a ensuite la rumeur sur la prolongation de la période de transition. Laquelle prolongation va finir par être requise par un des candidats à la présidentielle en la personne Chbih Ould Cheikh Melaïnine qui d’ailleurs s’était retiré de la coalition. Sans compter la perte de vitesse de la Coalition remarquée à travers les sénatoriales et la naissance d’une force concurrente, le Mithaaq…
Ces situations sont-elles suffisantes pour rendre les candidats à la magistrature suprême indésirables aux yeux des colonels ? Certainement pas. Il doit y avoir autre chose. Ils sont 21 à solliciter le suffrage des mauritaniens le 11 mars. Certains n’ont pu s’empêcher d’afficher leurs ambitions pour la Mauritanie : rompre avec Israël, réintégrer la CEDEAO, penser un statut de l'armée, entre autres questions sensibles.
Le colonel Eli Ould Mohamed Val les dissuade de s’y aventurer… « Les options diplomatiques d’un pays ne sont pas une affaire électorale avec laquelle on tente d’attirer des électeurs de ghettos politiques… »
Sur ce premier point quelle va être la réaction des fondateurs de la CFCD qui avaient marché pour soutenir le peuple libanais en proie aux feux de l’entité sioniste ? Eux qui avaient demandé à l’époque au CMJD de rompre les relations diplomatiques avec Israël, seront-ils d’accord que l’option pour une relation aussi étroite avec ‘l’ennemi’ de la nation arabe soit une affaire ‘extra-électorale’ ?
Ou alors, ceux parmi eux qui ont ouvertement promis comme premier geste en cas de victoire de rompre les relations diplomatiques avec Israël auront-ils assez de discernement pour rétorquer que quiconque ambitionne de diriger un pays a, plus que le droit, le devoir d’inscrire dans son programme les options diplomatiques qu’il juge opportunes pour son pays et qu’il n’est nullement du ressort d’un pouvoir de transition de juger des promesses électorales d’un candidat dès lors que ce pouvoir a décidé de se tenir neutre dans le jeu qui va l’opposer à d’autres ?
A ceux qui ambitionnent de rectifier le tir d’Ould Taya qui a extrait la Mauritanie de la CEDEAO Eli a dit ceci : « La diplomatie mauritanienne au niveau de la sous région et du continent africain se gère en fonction de la réalité de notre pays et non des idéologies et des positions identitaires ou particularistes, nul n’a le droit de la remettre en cause d’une manière qui ne soit pas conforme à l’intérêt national. »
La démocratie en Mauritanie est d’abord une affaire identitaire. Tout comme la manière même de diriger ce pays. Les sphères de décisions sont le plus souvent occupées, fortuitement peut-être, selon l’appartenance tribale du chef. Les partis politiques sont le plus souvent fondés sur une humeur provoquée par la fibre communautaire. L’échiquier politique est établi selon un quota tacite : tant de ministres pour telle tribu, telle ethnie, telle région…
Bref, la Mauritanie a longtemps été prise en otage par les idéologies et les positions identitaires. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’elle a été retirée d’une structure d’intérêt économique comme la CEDEAO. Alors qui, parmi les 21 candidats, est prêt à revenir sur cette question qui fâche et face à laquelle beaucoup sont restés prudents ? Qu’est-ce qu’un retour dans la CEDEAO peut avoir de plus identitaire et de plus particulariste que le fait pour la Mauritanie d’être membre de l’OMVS, de l’OCI, de l’UMA, de l’OIF, de la Ligue Arabe, du Sin-çad ? Qu’est-ce qu’il n’y a pas d’ailleurs de particulariste dans tout ce qui s’est fait jusque-là pour la Mauritanie par ceux qui l’on dirigée?
L’avenir de l’armée ? « L’armée et le conseil militaire n’ont rien demandé à quiconque et personne n’a de propositions à leur faire. » D’autant plus vrai que c’est visiblement cette armée qui est toujours venue débloquer les situations pour ces politiques chaque fois qu’ils se sont sentis étouffés par le pouvoir…Tous les coups d’Etats réussis ont été salués par le peuple avec la bénédiction des politiques. 1984, 2005, y compris le tout premier, celui de 1978. Même celui du 8 juin 2003 aurait été applaudi si Ould Taya n’en était pas sorti vainqueur…C’est comme si l’armée était plus capable à décanter les blocages que l’opinion publique.
A ceux qui promettent « ceci ou cela », la réponse est très claire. Toutefois, elle procède d’une inquiétude certainement quant à la gestion que pourraient faire les futurs dirigeants de ce pays de dossiers très sensibles pouvant impliquer des officiers très importants. En effet, tout ce qui, à la faveur des journées de concertation d’octobre 2005, a été réservé au prochain gouvernement qui serait issu de l’après transition ne manquera pas de resurgir même si ce gouvernement-là cherche à l’oublier.
Alors, les promesses faites ça et là à l’armée ont tout l’air d’une garantie d’immunité, de protection, voire d’autoprotection contre d’autres coups de forces dont elle pourrait se rendre capable s’il arrivait que la machine ne tourne plus ni sous son contrôle, ni en sa faveur.
Si en fin de compte, en plus de la promesse du respect du calendrier électoral, il y a dans le discours du président du CMJD une tactique quelconque visant à faire échouer une ancienne opposition pas forcément prête à enterrer un certain passé une fois portée au sommet du pouvoir, il reste à se demander s’il est possible que parmi vingt ‘prétendants’ la Mauritanie n’arrive point a se faire choisir ‘un mari’.
Kissima-Tocka Diagana
tribune
source : flamnet