Candidature de Mouhamed Khouna Ould Haidalla :Attention à « Grab.2 »

Au cours d’une conférence de presse organisée mercredi 27 décembre 2006 à son domicile, l’ancien Chef du CMSN (Comité Militaire pour le Salut National), Chef de l’Etat (1980-1984), M. Mohamed Khouna Ould Haidalla, a annoncé en grande pompe et sous les « You You » de ses partisans, sa candidature aux élections présidentielles de mars 2007.

C’était en présence de quelques figures politiques, comme Ghassem Ould Bellal du Renouveau Démocratique, Dahane Ould Taleb Ethmlane du PAD, Diabira Maroufa, Baba Ould Sidi Abdalla (ancien Commissaire de l’OMVS), Cheikh Ould Horma du RMP-Temam, entre autres. Face aux caméras de télévision et les flashs des journalistes-reporter, le candidat Haïdalla déclamera sa candidature en arabe et en français. Mais les chances de Ould Haïdalla en 2007 seront-elles les mêmes qu’en 2003 ?


Ceux qui l’avaient réclamé en 2003, se rappelaient pourtant que l’homme était arrivé au pouvoir par un coup d’Etat en 1979, avant de sombrer en 1984 par un putsch fomenté par son Premier ministre, un certain Maaouiya Ould Sid’Ahmed Taya, qui gouvernera ce pays pendant 21 ans.



Le règne de Haïdalla a été dominé par la terreur et l’embrigadement des masses, mais les nostalgiques de cette ère se rappellent de son intransigeance pour le respect de l’Etat et de ses symboles ainsi que sur l’indépendance nationale qui vaudront à la Mauritanie d’être restée longtemps loin du diktat des institutions de Brettons Wood. Il croupira six ans en taule avant d’être libéré en 1990. Il restera treize années, loin des turpitudes politiques. Aussi, sa candidature aux présidentielles de 2003 tomba comme une revanche annonciatrice sur son ancien tombeur.

A l’époque, il était perçu par nombre d’observateurs et d’hommes politiques comme le « Sauveur de la Mauritanie, l’acteur le mieux placé pour battre Ould Taya ». Sa candidature bénéficiera de soutiens de taille, comme celui de l’UFP, des mouvements islamistes et de groupes négro-africains. Autour de lui, émergeront des leaders politiques d’envergure, comme Ismaïl Ould Amar, Ould Breidelil, Ould Horma, Braika Ould M’Bareck, Diop Moustapha, et toute l’organisation Conscience et Résistance.


Sa candidature, annoncée trois mois avant les élections, fait des vagues. Un gigantesque meeting est organisé au stade de la capitale avec affluence record, ce qui le créditait d’avance, d’une forte majorité aux suffrages. Haïdalla faisait peur…

Le pouvoir qui s’apprêtait à jouer à la transparence, le prenait de plus en plus au sérieux. Comme on pouvait le craindre, Ould Haïdalla fut interpellé par les services de la sécurité de l’Etat… moins de 24 heures avant les élections.

Le lendemain, il fut libéré, le temps que le vote ait lieu, avant qu’il ne soit interpellé de nouveau avec ses collaborateurs. L’effet recherché par les services de l’ordre était ainsi obtenu. Il fallait le discréditer aux yeux de l’opinion, en lui collant une grave accusation. Celle-ci tombe sous le titre passe-partout utilisé dans toutes les affaires politiques scabreuses, « connivences avec des forces extérieures dans le but de renverser le pouvoir constitutionnel ». Accusation bateau, avec un surtitre digne des films de James Bond ou de Frank Sinatra « Grab.1 ». Brrr !


Malgré tout, Ould Haïdalla obtiendra 12% des suffrages exprimés, le plus grand score après celui de Ould Taya, malgré la fraude massive qui avait émaillé les élections. Il était le mieux classé parmi les outsiders, recueillant à lui seul plus que n’avaient obtenu les autres candidats, Ahmed Daddah, Messaoud Ould Belkheïr…et leur machine politique.


Mais lors de ce scrutin présidentiel disputé sous l’ère Ould Taya (2003), Ould Haïdala avait bénéficié de circonstances extraordinaires, notamment des soutiens politiques de taille au sein d’une Coalition pour une Alternance Pacifique (CAP) qui devait le porter au Palais présidentiel. Mais par delà cet appui inconditionnel, Ould Haïdalla bénéficiait surtout d’une conjoncture politique marquée par le déclin d’un pouvoir autocratique qui avait essuyé deux coups d’Etat successifs, dont la plus sanglante est celle du 8 juin 2003.


Mais en 2007, la donne changera indibutablement. Son programme politique de transition à l’époque ne tient plus la route, le CMJD lui ayant piqué la recette. D’autre part, les forces politiques qui le soutenaient, l’UFP, les négro-africains et les islamistes notamment, sont engagées ailleurs. L’apport de Temam et de Sawab, sans député et sans conseil municipal, ne lui sera d’aucun secours en matière de voix. Les Mauritaniens en ont surtout marre des militaires. Ils estiment que 28 ans de pouvoir de l’armée et de ses hommes suffisent largement. Ils ont envie de voir d’autres visages, d’autres manières de gouverner et d’appréhender l’avenir de la Mauritanie.

D’ailleurs, le candidat Haïdalla ne craint-il pas un «Grab.2 » ?


Cheikh Aïdara
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