« …le dialogue est une nouvelle forme de civilisation »
Au Mouvement pour la Refondation, cela l’est déjà. Le président KANE Hamidou Baba l’a répété et martelé : « pour le MPR, le dialogue est une nouvelle forme de civilisation ». Je serai tenté de parler de civilisation revisitée. Si l’Afrique actuelle est dominée par les dictatures et les lois du plus fort très souvent maquillées en lois de la majorité, nul ne nous apprend que nos peuples d’antan ont toujours été gouvernés par la force de la sagesse et du consensus. Allah n’a-t-il pas enjoint le prophète Mohammed (saws) de consulter son peuple « en toute chose ». La démocratie ne peut être exclusivement définie à partir d’un prisme occidental de conception de la gouvernance. La gouvernance par une majorité ne doit nullement vouloir dire l’exclusion de la « minorité » des affaires de la cité. A défaut de force de la sagesse chère à notre civilisation, nos gouvernants ne devraient-ils pas s’appliquer la sagesse à la force dont ils sont détenteurs ? Mais aussi, être « minoritaire » ne peut être prétexte de démission ou de refuge dans la contestation systématique. D’abord l’intérêt de la nation avant les intérêts égoïstes des partis et de leurs hommes. L’inscription du MPR dans la majorité ne s’inscrit que dans cette logique d’une nouvelle forme de civilisation politique. Le manque de maturité démocratique de nos femmes et de nos hommes a fini de convaincre le MPR de la nécessité de redéfinir les rapports entre majorité et « minorité » à travers un dialogue une gestion consensuels mais critiques, en lieu et place d’une confrontation systématique par une opposition frontale dans laquelle notre peuple ne se reconnaîtrait pas et ne serait que perdant. Conscient de la fragilité institutionnelle de notre pays et des dangers qui le guettent, le Mpr, par cette logique, luttera de toutes ses forces pour éviter au pays le chaos et l’anarchie.
C’est en ce sens que dès mars 2010, après avoir constaté le blocage systématique du pays par un refus de part et d’autre de l’application des accords de Dakar, le Président KANE Hamidou Baba a pris son bâton de pèlerin pour sillonner tous les états majors politiques sans exclusive en appelant au respect des engagements. Certains partis, se considérant poids lourds de l’arène et de la majorité, se complaisaient dans un statut quo qui n’arrangeait que leurs statuts égoïstes au détriment des souffrances du peuple. De l’autre bord, une certaine opposition lorgnant du côté du printemps arabe, confondait patate et pomme de terre. Au moment où cette opposition réclamait l’application stricte des accords de Dakar, en parallèle, elle s’appliquait malignement à les violer en exigeant un dialogue exclusif avec le chef de l’état Mohamed Ould Abdel Aziz. L’accord de Dakar exige explicitement un dialogue inclusif de toutes les forces politiques. Cela veut tout simplement dire que toutes les organisations politiques et de la société civile, reconnues ou non par le pouvoir, doivent s’asseoir autour d’une table. Pourquoi alors cette opposition ne voulait parler qu’au Président de la république et même pas au partis de la majorité ? D’autre part en nous servant le plat très mal cuit du préalable de l’ouverture des médias à l’opposition, elle oublie tout simplement que ce qu’elle veut comme préalable peut et doit être posé et discuté dans le cadre de ce dialogue. Plus mauvaise volonté que cette opposition, tu meurs.
Un dialogue a eu lieu. Bien sûr un dialogue à minima. A minima aussi bien dans la forme que dans le fond. Un dialogue auquel ne croyait et ne croit encore qu’une partie de la majorité et une autre infime partie de l’opposition. Ce dialogue a accouché d’avancées non négligeables en matière institutionnelle. Mais qui dit avancées, dit forcément insuffisances. Et elles sont encore malheureusement beaucoup plus importantes que les avancées obtenues. Mais ne portent la responsabilité de ces insuffisances que ceux qui y sont allés sans y croire, ceux-là qui n’y sont allés que suite aux ordres du « chef » et qui n’y ont travaillé qu’à minima, et bien sûr aussi les autres de l’opposition qui refusent de s’y joindre pour des raisons non avouées et sûrement inavouables.
Et pourtant, c’est en ce moment de notre histoire que le pays a beaucoup plus besoin de gestion consensuelle de ses affaires. En ce moment de notre histoire où les consciences se libèrent, en ce moment de notre histoire où les opprimés font entendre leurs voix, c’est en ce moment qu’il faut éviter le chaos. Les frustrations qui s’expriment légitimement et pacifiquement dans la rue ne doivent être ni réprimées ni ignorées. Au contraire, elles doivent être soutenues par un dialogue franc et sincère. Notre génération n’a pas créé l’esclavage, mais l’esclavage existe en nous, notre génération n’a pas créé le racisme et les discriminations, mais notre pays vit d’une manière éhontée ces tares d’un autre âge. La honte, ce n’est pas de dénoncer ces fléaux, la honte, c’est de les laisser se perpétuer en ne faisant rien qui concourt à les éradiquer. Ternir l’image de la Mauritanie, contrairement à ce que soutenait un certain Ould Taya, ce n’est pas de défendre l’esclave à la Commission des Nations Unies pour les Droits de l’homme, ternir l’image de notre pays, c’est de s’atteler à nier l’évidence de l’existence et de la persistance de cette honte nationale dont nous ne sommes pas les créateurs mais dont nous seront toujours comptables devant les hommes et devant l’Eternel. La honte, c’est les accumulations honteuses de richesses volées quand la majorité de notre peuple meurt de faim. La honte, c’est cette école du 21e siècle qui ne produit que des chômeurs improductifs. Notre échec lamentable, c’est quand nous n’avons de réponse à donner à nos enfants qui nous demandent une meilleure école que la répression et la prison.
Quand nos concitoyens sont réfugiés sous d’autres cieux, quand la plus part d’entre eux ne vivent que de l’aumône d’autres peuples sénégalais et maliens pas plus nantis que nous, quand ceux d’entre eux qui reviennent ne retrouvent jamais leurs toits et leurs terres, quand les aides destinés aux pauvres affamés sont détournés par les riches pour s’enrichir encore un peu plus, quand notre plus grand projet agricole ne se résume qu’à la création de « paysans sans terres » par la spoliation des terres fertiles de nos agriculteurs, quand les victimes des années de braise n’arrivent à retrouver ni leurs emplois ni d’autres formes de droits, alors, avouons que, au-delà des préoccupations égoïstes d’accès au pouvoir des partis politiques, nous avons énormément de choses à discuter entre nous.
Evidemment, nous avons énormément de choses à discuter entre nous, surtout quand en criant sur tous les toits que le pouvoir est illégitime et que son sport le plus favori est la violation de la constitution, notre opposition dite radicale n’a d’autres plats à nous servir que de nous appeler à piétiner et à écraser cette même constitution en dégageant le président Aziz par des moyens qu’elle a condamnés il y a de cela seulement quelques mois. Quand notre chère opposition dénonce à juste raison la gestion opaque du dossier du passif humanitaire et les conditions humiliantes et dégradantes du retour de nos déportés, à juste raison aussi, nous applaudissons. Mais quand la grande marche organisée ce 12 mars 2012 n’a surtout servi qu’à recycler des criminels potentiels qui ont crié haut et fort qu’il n’y a jamais eu de déportations et d’assassinats dans ce pays, et que ce pays n’a jamais connu d’esclavage, alors appelons notre opposition à se ressaisir, et là, peut-être à travers un dialogue national, une demande d’explication est plus que justifiée. Si l’appel à une destitution antidémocratique du pouvoir est condamnable, le recyclage des charcutiers de notre unité nationale est un crime. La fin ne justifie pas toujours les moyens.
Le printemps arabe est arabe. En Mauritanie, le printemps ne sera pas arabe, il sera esclave, harratine, négro-mauritanien et… arabe. Notre printemps sera fait de révolte, non de l’opposition contre le pouvoir, mais des esclaves contre les esclavagistes, des paysans sans terres contre les spoliateurs, des discriminés contre les discriminants, des déportés contre les occupants de leurs terres et de leurs maisons, des victimes du passif contre les criminels aux cols blancs. C’est pourquoi le dialogue est plus que nécessaire. Si non, le printemps mauritanien ne sera que le printemps du chaos et de l’anarchie, le printemps du peuple révolté contre le peuple. Malheureusement, nos politiques sont sourds et aveugles, notre pouvoir partisan et injuste, notre opposition égoïste et tricheuse.
Nous ne disons pas qu’il faut escamoter les règles d’accès au pouvoir, il faudrait d’ailleurs un consensus beaucoup plus large que l’actuel pour garantir des élections libres et transparentes dans notre pays. Un consensus des règles électorales dans lequel ne font pas partie les ténors de l’opposition, n’en est pas un, car il restera inapplicable. Alors un nouveau dialogue s’impose de soi. Un dialogue qui ne sera ni celui exclusif avec Aziz comme réclamé par l’opposition, ni celui que définit Ahmed Daddah avec ceux qu’il appelle « l’opposition démocratique », mais un dialogue franc et inclusif avec toutes les forces politiques sans exclusive, allant de l’Upr au mouvement Touche Pas à Ma Nationalité.
Et cette fois-ci, notre échec le plus lamentable, ne sera que quand nous dirons à la face du monde que nous ne savons pas nous parler.
Amadou Alpha BA
Chargé de mission auprès de la Présidence du Mouvement Pour la Refondation (MPR)
Source: Ba Alpha Amadou
Au Mouvement pour la Refondation, cela l’est déjà. Le président KANE Hamidou Baba l’a répété et martelé : « pour le MPR, le dialogue est une nouvelle forme de civilisation ». Je serai tenté de parler de civilisation revisitée. Si l’Afrique actuelle est dominée par les dictatures et les lois du plus fort très souvent maquillées en lois de la majorité, nul ne nous apprend que nos peuples d’antan ont toujours été gouvernés par la force de la sagesse et du consensus. Allah n’a-t-il pas enjoint le prophète Mohammed (saws) de consulter son peuple « en toute chose ». La démocratie ne peut être exclusivement définie à partir d’un prisme occidental de conception de la gouvernance. La gouvernance par une majorité ne doit nullement vouloir dire l’exclusion de la « minorité » des affaires de la cité. A défaut de force de la sagesse chère à notre civilisation, nos gouvernants ne devraient-ils pas s’appliquer la sagesse à la force dont ils sont détenteurs ? Mais aussi, être « minoritaire » ne peut être prétexte de démission ou de refuge dans la contestation systématique. D’abord l’intérêt de la nation avant les intérêts égoïstes des partis et de leurs hommes. L’inscription du MPR dans la majorité ne s’inscrit que dans cette logique d’une nouvelle forme de civilisation politique. Le manque de maturité démocratique de nos femmes et de nos hommes a fini de convaincre le MPR de la nécessité de redéfinir les rapports entre majorité et « minorité » à travers un dialogue une gestion consensuels mais critiques, en lieu et place d’une confrontation systématique par une opposition frontale dans laquelle notre peuple ne se reconnaîtrait pas et ne serait que perdant. Conscient de la fragilité institutionnelle de notre pays et des dangers qui le guettent, le Mpr, par cette logique, luttera de toutes ses forces pour éviter au pays le chaos et l’anarchie.
C’est en ce sens que dès mars 2010, après avoir constaté le blocage systématique du pays par un refus de part et d’autre de l’application des accords de Dakar, le Président KANE Hamidou Baba a pris son bâton de pèlerin pour sillonner tous les états majors politiques sans exclusive en appelant au respect des engagements. Certains partis, se considérant poids lourds de l’arène et de la majorité, se complaisaient dans un statut quo qui n’arrangeait que leurs statuts égoïstes au détriment des souffrances du peuple. De l’autre bord, une certaine opposition lorgnant du côté du printemps arabe, confondait patate et pomme de terre. Au moment où cette opposition réclamait l’application stricte des accords de Dakar, en parallèle, elle s’appliquait malignement à les violer en exigeant un dialogue exclusif avec le chef de l’état Mohamed Ould Abdel Aziz. L’accord de Dakar exige explicitement un dialogue inclusif de toutes les forces politiques. Cela veut tout simplement dire que toutes les organisations politiques et de la société civile, reconnues ou non par le pouvoir, doivent s’asseoir autour d’une table. Pourquoi alors cette opposition ne voulait parler qu’au Président de la république et même pas au partis de la majorité ? D’autre part en nous servant le plat très mal cuit du préalable de l’ouverture des médias à l’opposition, elle oublie tout simplement que ce qu’elle veut comme préalable peut et doit être posé et discuté dans le cadre de ce dialogue. Plus mauvaise volonté que cette opposition, tu meurs.
Un dialogue a eu lieu. Bien sûr un dialogue à minima. A minima aussi bien dans la forme que dans le fond. Un dialogue auquel ne croyait et ne croit encore qu’une partie de la majorité et une autre infime partie de l’opposition. Ce dialogue a accouché d’avancées non négligeables en matière institutionnelle. Mais qui dit avancées, dit forcément insuffisances. Et elles sont encore malheureusement beaucoup plus importantes que les avancées obtenues. Mais ne portent la responsabilité de ces insuffisances que ceux qui y sont allés sans y croire, ceux-là qui n’y sont allés que suite aux ordres du « chef » et qui n’y ont travaillé qu’à minima, et bien sûr aussi les autres de l’opposition qui refusent de s’y joindre pour des raisons non avouées et sûrement inavouables.
Et pourtant, c’est en ce moment de notre histoire que le pays a beaucoup plus besoin de gestion consensuelle de ses affaires. En ce moment de notre histoire où les consciences se libèrent, en ce moment de notre histoire où les opprimés font entendre leurs voix, c’est en ce moment qu’il faut éviter le chaos. Les frustrations qui s’expriment légitimement et pacifiquement dans la rue ne doivent être ni réprimées ni ignorées. Au contraire, elles doivent être soutenues par un dialogue franc et sincère. Notre génération n’a pas créé l’esclavage, mais l’esclavage existe en nous, notre génération n’a pas créé le racisme et les discriminations, mais notre pays vit d’une manière éhontée ces tares d’un autre âge. La honte, ce n’est pas de dénoncer ces fléaux, la honte, c’est de les laisser se perpétuer en ne faisant rien qui concourt à les éradiquer. Ternir l’image de la Mauritanie, contrairement à ce que soutenait un certain Ould Taya, ce n’est pas de défendre l’esclave à la Commission des Nations Unies pour les Droits de l’homme, ternir l’image de notre pays, c’est de s’atteler à nier l’évidence de l’existence et de la persistance de cette honte nationale dont nous ne sommes pas les créateurs mais dont nous seront toujours comptables devant les hommes et devant l’Eternel. La honte, c’est les accumulations honteuses de richesses volées quand la majorité de notre peuple meurt de faim. La honte, c’est cette école du 21e siècle qui ne produit que des chômeurs improductifs. Notre échec lamentable, c’est quand nous n’avons de réponse à donner à nos enfants qui nous demandent une meilleure école que la répression et la prison.
Quand nos concitoyens sont réfugiés sous d’autres cieux, quand la plus part d’entre eux ne vivent que de l’aumône d’autres peuples sénégalais et maliens pas plus nantis que nous, quand ceux d’entre eux qui reviennent ne retrouvent jamais leurs toits et leurs terres, quand les aides destinés aux pauvres affamés sont détournés par les riches pour s’enrichir encore un peu plus, quand notre plus grand projet agricole ne se résume qu’à la création de « paysans sans terres » par la spoliation des terres fertiles de nos agriculteurs, quand les victimes des années de braise n’arrivent à retrouver ni leurs emplois ni d’autres formes de droits, alors, avouons que, au-delà des préoccupations égoïstes d’accès au pouvoir des partis politiques, nous avons énormément de choses à discuter entre nous.
Evidemment, nous avons énormément de choses à discuter entre nous, surtout quand en criant sur tous les toits que le pouvoir est illégitime et que son sport le plus favori est la violation de la constitution, notre opposition dite radicale n’a d’autres plats à nous servir que de nous appeler à piétiner et à écraser cette même constitution en dégageant le président Aziz par des moyens qu’elle a condamnés il y a de cela seulement quelques mois. Quand notre chère opposition dénonce à juste raison la gestion opaque du dossier du passif humanitaire et les conditions humiliantes et dégradantes du retour de nos déportés, à juste raison aussi, nous applaudissons. Mais quand la grande marche organisée ce 12 mars 2012 n’a surtout servi qu’à recycler des criminels potentiels qui ont crié haut et fort qu’il n’y a jamais eu de déportations et d’assassinats dans ce pays, et que ce pays n’a jamais connu d’esclavage, alors appelons notre opposition à se ressaisir, et là, peut-être à travers un dialogue national, une demande d’explication est plus que justifiée. Si l’appel à une destitution antidémocratique du pouvoir est condamnable, le recyclage des charcutiers de notre unité nationale est un crime. La fin ne justifie pas toujours les moyens.
Le printemps arabe est arabe. En Mauritanie, le printemps ne sera pas arabe, il sera esclave, harratine, négro-mauritanien et… arabe. Notre printemps sera fait de révolte, non de l’opposition contre le pouvoir, mais des esclaves contre les esclavagistes, des paysans sans terres contre les spoliateurs, des discriminés contre les discriminants, des déportés contre les occupants de leurs terres et de leurs maisons, des victimes du passif contre les criminels aux cols blancs. C’est pourquoi le dialogue est plus que nécessaire. Si non, le printemps mauritanien ne sera que le printemps du chaos et de l’anarchie, le printemps du peuple révolté contre le peuple. Malheureusement, nos politiques sont sourds et aveugles, notre pouvoir partisan et injuste, notre opposition égoïste et tricheuse.
Nous ne disons pas qu’il faut escamoter les règles d’accès au pouvoir, il faudrait d’ailleurs un consensus beaucoup plus large que l’actuel pour garantir des élections libres et transparentes dans notre pays. Un consensus des règles électorales dans lequel ne font pas partie les ténors de l’opposition, n’en est pas un, car il restera inapplicable. Alors un nouveau dialogue s’impose de soi. Un dialogue qui ne sera ni celui exclusif avec Aziz comme réclamé par l’opposition, ni celui que définit Ahmed Daddah avec ceux qu’il appelle « l’opposition démocratique », mais un dialogue franc et inclusif avec toutes les forces politiques sans exclusive, allant de l’Upr au mouvement Touche Pas à Ma Nationalité.
Et cette fois-ci, notre échec le plus lamentable, ne sera que quand nous dirons à la face du monde que nous ne savons pas nous parler.
Amadou Alpha BA
Chargé de mission auprès de la Présidence du Mouvement Pour la Refondation (MPR)
Source: Ba Alpha Amadou