Lors de sa désormais traditionnelle " Rencontre avec le Peuple ", le Président de la République a annoncé, à Atar, que " le règlement du passif humanitaire est clos ". Plus récemment, le Conseil des ministres a ordonné la régularisation des fonctionnaires et agents de la fonction publique victimes des évènements de 1989. Votre organisation compte beaucoup de policiers radiés. A votre avis, ces décisions closent-elles ce qu'on appelé le "passif humanitaire " ?
- Non, ces deux décisions relatives à la liquidation du recensement des fonctionnaires agents de l'Etat et fonctionnaires de police, radiés en 1989 et recensés en janvier 2010, ne constituent pas la phase ultime du processus de règlement du passif humanitaire. Il est curieux, pour nous, que le Président Mohamed Ould Abdel et les responsables des départements ministériels en charge des dossiers des victimes continuent à proclamer que le passif humanitaire est liquidé, avec cette mesure prise au Conseil des ministres du 20 Septembre 2012.
Que reste-t-il donc à faire ?
- Le COVIRE, en son bureau renouvelé le 18 février 2012, après expiration du précédent mandat, n'a cessé de rappeler, dans ces différents communiqués, ses revendications. Le 8 Novembre 2008, le Président Mohamed Ould Abdel Aziz, suite à une audience accordée au COVIRE, sur quatre points principaux de doléances - devoirs de vérité, justice, réparation et mémoire - s'était engagé à prendre en charge les devoirs de réparation et de mémoire. Je pense que cette option n'était pas limitative mais découlait d'une analyse exigeant une stratégie spécifique, vu la sensibilité du problème. Le Président a toujours affirmé, en outre et devant chaque délégation du COVIRE, que les mesures engagées étaient une aide sociale, pour soulager les souffrances des veuves et des orphelins. Comment, aujourd'hui, ce geste dit de générosité peut-il être commuté en règlement définitif, juste et équitable du passif humanitaire ? Même si nous restons dans la logique des mesures entreprises par le pouvoir, nous disons que la forme de règlement des dossiers des militaires n'est pas conforme à celle des civils et policiers qui vient d'être annoncée. Est-il possible d'arriver à un résultat cohérent et acceptable, en laissant chaque département agir selon sa propre logique de règlement, sans concertation avec les victimes ?
Je note bien que des pas ont été accomplis. Mais, aujourd'hui, le processus du règlement du passif, celui de l'insertion des déportés/réfugiés revenant au pays, ou bien, encore, le dossier de l'esclavage se trouvent grippés par le choix des pouvoirs publics de prendre, comme interlocuteurs, des dissidents du COVIRE, des éléments non-représentatifs des réfugiés et d'IRA-Mauritanie. Cette politique ne contribue pas à la paix sociale. Le respect du choix des organisations est indispensable, pour la crédibilité des solutions. Les faveurs accordées par les pouvoirs publics à des dissidents suscités de toutes pièces, relèvent d'une stratégie visant à fragiliser le front des revendications et à cautionner des règlements émiettés des problèmes relatifs aux violations des droits humains. Ceci est inacceptable en démocratie.
Le COVIRE usera de tous les moyens à sa portée, pour faire entendre sa voix. J'espère que, sans perdre de temps, les autorités comprendront où se situe l'intérêt de la Mauritanie. Je dis que cette question du Passif doit être étudiée selon les mécanismes de la justice transitionnelle et sur la base des recommandations des journées nationales de concertation et de mobilisation pour le retour des déportés et le règlement du passif humanitaire des 20, 21 et 22 Novembre 2007. Des consultations nationales doivent être menées, s'entendre sur une structure autonome et indépendante de gestion, informer l'opinion nationale sur l'intensité des dérives qui ont été commises, mener des investigations et enquêtes sur la période sombre de notre histoire et sensibiliser sur la nécessité d'une solution inclusive et globale, tant pour l'unité nationale que pour la cohésion sociale.
Les mesures déjà adoptées, relatives au retour organisé, l'installation, le début d'insertion des déportés enrôlés au Sénégal et le processus du règlement du passif humanitaire, contribueront, objectivement, à un climat favorable au dialogue, pour aboutir à des résultats concrets et durables. Mais il reste du chemin à parcourir.
Pensez-vous qu'avec le règlement décidé, de façon cavalière, par le pouvoir, la Mauritanie est définitivement à l'abri de tels évènements ? Sinon que faudrait-il faire pour en éloigner le spectre ?
- Le règlement unilatéral ne peut pas absoudre les crimes commis, valider un pardon imposé, moins encore nous mettre à l'abri de récidives éventuelles. Exempts de tout esprit de haine et de vindicte, nous devons lutter, farouchement, contre l'impunité, l'oubli et la banalisation de ce qui est passé. Aucune solution ne peut être pérenne, sans la volonté, préalable, de redonner dignité aux victimes, individuellement, et de combler le déficit d'épanouissement et de développement des couches exclues et défavorisées. Nous ne devons pas avoir peur d'aborder notre passé, aussi douloureux soit il ! Les solutions justes doivent être la volonté tous. L'islam réfute l'absolutisme et l'intolérance.
Les présumés tortionnaires et criminels doivent être à l'avant-garde de la recherche d'une solution inclusive et pérenne.
Les évènements qui se passent autour de nous doivent nous édifier et nous amener à résorber nos différends par le dialogue, pour nous dispenser d'autres voies qui pourraient être douloureuses.
PROPOS RECUEILLIS PAR DALAY LAM
Le Calame
Source : Kassataya
- Non, ces deux décisions relatives à la liquidation du recensement des fonctionnaires agents de l'Etat et fonctionnaires de police, radiés en 1989 et recensés en janvier 2010, ne constituent pas la phase ultime du processus de règlement du passif humanitaire. Il est curieux, pour nous, que le Président Mohamed Ould Abdel et les responsables des départements ministériels en charge des dossiers des victimes continuent à proclamer que le passif humanitaire est liquidé, avec cette mesure prise au Conseil des ministres du 20 Septembre 2012.
Que reste-t-il donc à faire ?
- Le COVIRE, en son bureau renouvelé le 18 février 2012, après expiration du précédent mandat, n'a cessé de rappeler, dans ces différents communiqués, ses revendications. Le 8 Novembre 2008, le Président Mohamed Ould Abdel Aziz, suite à une audience accordée au COVIRE, sur quatre points principaux de doléances - devoirs de vérité, justice, réparation et mémoire - s'était engagé à prendre en charge les devoirs de réparation et de mémoire. Je pense que cette option n'était pas limitative mais découlait d'une analyse exigeant une stratégie spécifique, vu la sensibilité du problème. Le Président a toujours affirmé, en outre et devant chaque délégation du COVIRE, que les mesures engagées étaient une aide sociale, pour soulager les souffrances des veuves et des orphelins. Comment, aujourd'hui, ce geste dit de générosité peut-il être commuté en règlement définitif, juste et équitable du passif humanitaire ? Même si nous restons dans la logique des mesures entreprises par le pouvoir, nous disons que la forme de règlement des dossiers des militaires n'est pas conforme à celle des civils et policiers qui vient d'être annoncée. Est-il possible d'arriver à un résultat cohérent et acceptable, en laissant chaque département agir selon sa propre logique de règlement, sans concertation avec les victimes ?
Je note bien que des pas ont été accomplis. Mais, aujourd'hui, le processus du règlement du passif, celui de l'insertion des déportés/réfugiés revenant au pays, ou bien, encore, le dossier de l'esclavage se trouvent grippés par le choix des pouvoirs publics de prendre, comme interlocuteurs, des dissidents du COVIRE, des éléments non-représentatifs des réfugiés et d'IRA-Mauritanie. Cette politique ne contribue pas à la paix sociale. Le respect du choix des organisations est indispensable, pour la crédibilité des solutions. Les faveurs accordées par les pouvoirs publics à des dissidents suscités de toutes pièces, relèvent d'une stratégie visant à fragiliser le front des revendications et à cautionner des règlements émiettés des problèmes relatifs aux violations des droits humains. Ceci est inacceptable en démocratie.
Le COVIRE usera de tous les moyens à sa portée, pour faire entendre sa voix. J'espère que, sans perdre de temps, les autorités comprendront où se situe l'intérêt de la Mauritanie. Je dis que cette question du Passif doit être étudiée selon les mécanismes de la justice transitionnelle et sur la base des recommandations des journées nationales de concertation et de mobilisation pour le retour des déportés et le règlement du passif humanitaire des 20, 21 et 22 Novembre 2007. Des consultations nationales doivent être menées, s'entendre sur une structure autonome et indépendante de gestion, informer l'opinion nationale sur l'intensité des dérives qui ont été commises, mener des investigations et enquêtes sur la période sombre de notre histoire et sensibiliser sur la nécessité d'une solution inclusive et globale, tant pour l'unité nationale que pour la cohésion sociale.
Les mesures déjà adoptées, relatives au retour organisé, l'installation, le début d'insertion des déportés enrôlés au Sénégal et le processus du règlement du passif humanitaire, contribueront, objectivement, à un climat favorable au dialogue, pour aboutir à des résultats concrets et durables. Mais il reste du chemin à parcourir.
Pensez-vous qu'avec le règlement décidé, de façon cavalière, par le pouvoir, la Mauritanie est définitivement à l'abri de tels évènements ? Sinon que faudrait-il faire pour en éloigner le spectre ?
- Le règlement unilatéral ne peut pas absoudre les crimes commis, valider un pardon imposé, moins encore nous mettre à l'abri de récidives éventuelles. Exempts de tout esprit de haine et de vindicte, nous devons lutter, farouchement, contre l'impunité, l'oubli et la banalisation de ce qui est passé. Aucune solution ne peut être pérenne, sans la volonté, préalable, de redonner dignité aux victimes, individuellement, et de combler le déficit d'épanouissement et de développement des couches exclues et défavorisées. Nous ne devons pas avoir peur d'aborder notre passé, aussi douloureux soit il ! Les solutions justes doivent être la volonté tous. L'islam réfute l'absolutisme et l'intolérance.
Les présumés tortionnaires et criminels doivent être à l'avant-garde de la recherche d'une solution inclusive et pérenne.
Les évènements qui se passent autour de nous doivent nous édifier et nous amener à résorber nos différends par le dialogue, pour nous dispenser d'autres voies qui pourraient être douloureuses.
PROPOS RECUEILLIS PAR DALAY LAM
Le Calame
Source : Kassataya