La création d'un tribunal spécial pour faire juger au Sénégal pour crimes contre l'humanité l'ex-président tchadien Hissène Habré marque une étape importante vers un procès attendu de longue date alors que la défense de M. Habré dénonce "une violation du droit international".
"Nous nous acheminons directement vers l'ouverture de l'instruction et avec l'instruction commence le procès. Nous allons commencer à parler de recrutement de juges pour mettre en place les chambres spéciales et commencer le travail", a déclaré mercredi soir à Dakar la ministre sénégalaise de la Justice Aminata Touré.
Mme Touré venait de signer avec l'Union africaine (UA) l'accord sur la création de "chambres africaines extraordinaires au sein des juridictions sénégalaises" pour juger M. Habré, accusé de crimes contre l'humanité, crimes de guerre et torture, et réfugié à Dakar depuis sa chute en 1990 après huit ans au pouvoir (1982-1990).
Cet accord, qui marque la dernière ligne droite vers un procès à Dakar de l'ex-dirigeant tchadien après plusieurs années de tergiversations, prévoit quatre chambres spéciales: deux pour l'instruction et l'accusation, une Cour d'assises et une Cour d'appel. Elles seront formées de juges africains et sénégalais nommés par l'UA.
"Nous devons démontrer que nous sommes capables d'exercer ce niveau de responsabilité qui consiste à lier l'acte à nos engagements (...). Nous avons perdu beaucoup de temps", a indiqué Aminata Touré.
L'accord a été salué par le ministre tchadien de la Justice, Abdoulaye Sabour Fadoul, qui a évoqué "une grande joie pour tous les Tchadiens".
"Enfin les choses sérieuses peuvent commencer (...) C'est la première fois depuis plus de 20 ans que des actes concrets sont posés dans cette affaire", a-t-il dit à l'AFP.
"Violation du droit international"
La défense de l'ex-dirigeant tchadien conteste le processus judiciaire.
L'accord entre le Sénégal et l'UA "viole le droit international" et est "parfaitement illégal. Aucune structure (de justice internationale) n'a été créée de cette manière" car "une intervention de l'ONU" est toujours nécessaire, "l'UA n'a pas qualité pour rendre la justice et donner un mandat à un pays pour juger", a affirmé Me François Serres, un des avocats de M. Habré.
Selon Me Serres, cet accord "viole l'arrêt rendu par la Cour de justice de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao) pour trois raisons". "Il remet en cause les principe de l'autorité de la chose jugée et de non rétroactivité du droit pénal. La Cour de la Cédéao avait également estimé que l'UA n'a pas compétence pour exercer la justice", a-t-il ajouté, en indiquant se "réserver le droit de saisir à nouveau" cette juridiction ouest-africaine.
La Cour de la Cédéao avait estimé le 19 novembre 2010 que le Sénégal seul ne pouvait juger M. Habré, préconisant la création d'un tribunal spécial.
A travers deux jugements, en novembre 2005 et en mars 2011, la justice sénégalaise s'était déclarée incompétente pour juger Hissène Habré.
Un autre problème à régler est le financement du procès.
"Nous pensons que le budget pourra être mobilisé. Nous démarrons avec les ressources dont nous disposons", a affirmé Aminata Touré, sans préciser de montant.
Le budget du procès avait été évalué à 8,6 millions d'euros devant provenir de plusieurs contributeurs: Tchad, Union européenne, Belgique, Pays-Bas, UA, Allemagne, France et Luxembourg mais cet argent "promis n'existe plus", avait récemment déclaré à Dakar Reed Brody, conseiller juridique de Human Rights Watch (HRW).
Le Sénégal avait été mandaté en juillet 2006 par l'UA pour juger M. Habré mais l'ancien président sénégalais, Abdoulaye Wade, n'a jamais organisé de procès.
Son successeur, Macky Sall, qui a pris ses fonctions en avril, a exclu d'extrader Hissène Habré en Belgique et s'était engagé à organiser un procès, mettant fin à une controverse sur les procès de dirigeants africains hors d'Afrique.
La Belgique avait saisi en février 2009 la Cour internationale de justice (CIJ) de La Haye, qui a ordonné en juillet à Dakar de poursuivre "sans aucun autre délai" Hissène Habré ou de l'extrader.
Par Malick Rokhy BÂ
Source: AFP
"Nous nous acheminons directement vers l'ouverture de l'instruction et avec l'instruction commence le procès. Nous allons commencer à parler de recrutement de juges pour mettre en place les chambres spéciales et commencer le travail", a déclaré mercredi soir à Dakar la ministre sénégalaise de la Justice Aminata Touré.
Mme Touré venait de signer avec l'Union africaine (UA) l'accord sur la création de "chambres africaines extraordinaires au sein des juridictions sénégalaises" pour juger M. Habré, accusé de crimes contre l'humanité, crimes de guerre et torture, et réfugié à Dakar depuis sa chute en 1990 après huit ans au pouvoir (1982-1990).
Cet accord, qui marque la dernière ligne droite vers un procès à Dakar de l'ex-dirigeant tchadien après plusieurs années de tergiversations, prévoit quatre chambres spéciales: deux pour l'instruction et l'accusation, une Cour d'assises et une Cour d'appel. Elles seront formées de juges africains et sénégalais nommés par l'UA.
"Nous devons démontrer que nous sommes capables d'exercer ce niveau de responsabilité qui consiste à lier l'acte à nos engagements (...). Nous avons perdu beaucoup de temps", a indiqué Aminata Touré.
L'accord a été salué par le ministre tchadien de la Justice, Abdoulaye Sabour Fadoul, qui a évoqué "une grande joie pour tous les Tchadiens".
"Enfin les choses sérieuses peuvent commencer (...) C'est la première fois depuis plus de 20 ans que des actes concrets sont posés dans cette affaire", a-t-il dit à l'AFP.
"Violation du droit international"
La défense de l'ex-dirigeant tchadien conteste le processus judiciaire.
L'accord entre le Sénégal et l'UA "viole le droit international" et est "parfaitement illégal. Aucune structure (de justice internationale) n'a été créée de cette manière" car "une intervention de l'ONU" est toujours nécessaire, "l'UA n'a pas qualité pour rendre la justice et donner un mandat à un pays pour juger", a affirmé Me François Serres, un des avocats de M. Habré.
Selon Me Serres, cet accord "viole l'arrêt rendu par la Cour de justice de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao) pour trois raisons". "Il remet en cause les principe de l'autorité de la chose jugée et de non rétroactivité du droit pénal. La Cour de la Cédéao avait également estimé que l'UA n'a pas compétence pour exercer la justice", a-t-il ajouté, en indiquant se "réserver le droit de saisir à nouveau" cette juridiction ouest-africaine.
La Cour de la Cédéao avait estimé le 19 novembre 2010 que le Sénégal seul ne pouvait juger M. Habré, préconisant la création d'un tribunal spécial.
A travers deux jugements, en novembre 2005 et en mars 2011, la justice sénégalaise s'était déclarée incompétente pour juger Hissène Habré.
Un autre problème à régler est le financement du procès.
"Nous pensons que le budget pourra être mobilisé. Nous démarrons avec les ressources dont nous disposons", a affirmé Aminata Touré, sans préciser de montant.
Le budget du procès avait été évalué à 8,6 millions d'euros devant provenir de plusieurs contributeurs: Tchad, Union européenne, Belgique, Pays-Bas, UA, Allemagne, France et Luxembourg mais cet argent "promis n'existe plus", avait récemment déclaré à Dakar Reed Brody, conseiller juridique de Human Rights Watch (HRW).
Le Sénégal avait été mandaté en juillet 2006 par l'UA pour juger M. Habré mais l'ancien président sénégalais, Abdoulaye Wade, n'a jamais organisé de procès.
Son successeur, Macky Sall, qui a pris ses fonctions en avril, a exclu d'extrader Hissène Habré en Belgique et s'était engagé à organiser un procès, mettant fin à une controverse sur les procès de dirigeants africains hors d'Afrique.
La Belgique avait saisi en février 2009 la Cour internationale de justice (CIJ) de La Haye, qui a ordonné en juillet à Dakar de poursuivre "sans aucun autre délai" Hissène Habré ou de l'extrader.
Par Malick Rokhy BÂ
Source: AFP