«Sans une juste réparation pour les victimes du passif humanitaire, il sera difficile de parler de cohabitation nationale

En marge de la première réunion du bureau politique de l’AJD/MR, mouvance politique née de la fusion entre l’Alliance pour la Justice et la Démocratie et le Mouvement pour le Renouveau, une conférence de presse a été animée, vendredi 7 septembre 2007 au siège du parti sis à l’îlot K de Nouakchott, par le président du regroupement et candidat à la dernière présidentielle de mars 2007, M.Ibrahima Moctar Sarr.

La salle de conférence de l’AJD/MR était remplie au trois quart par les militants du parti qui accompagnaient certains passages de leur leader par de bruyants applaudissements, en présence du bureau politique et de quelques représentants de parti conviés à la rencontre.

D’emblée, Sarr Ibrahima parlera de première rencontre historique de son parti qui marque le coup d’envoi de ses activités, après le Congrès extraordinaire des 18 et 19 août qui avait consacré la naissance de l’AJD/MR et son intronisation à la tête de la formation politique que d’aucuns traitent déjà de parti des «Lekwar», malgré la présence de la composante arabe aussi bien au niveau des hautes instances que de la base.

Ainsi, le discours de l’AJD ancienne formule, devra être revu, selon le nouveau président, compte tenu du nouveau climat politique qui règne. Situant son action dans le camp de l’opposition démocratique new look, celle qui inscrit son action, non plus dans une logique de confrontation, mais de complémentarité et de dialogue, l’AJD manifeste son ardent désir de contribuer à l’édification d’une Mauritanie juste, une Mauritanie de dialogue constructif et de concertation.

«Nous avons jusque-là plutôt insisté sur ce qui nous divise, il est temps de nous tourner vers ce qui nous unit » dira Sarr, pour qui la consolidation de l’unité nationale et la cohabitation entre les différentes composantes de la population, passera inéluctablement par le règlement définitif du passif humanitaire.

«Sans une juste réparation des torts commis, et qui forment ce qu’on appelle le passif humanitaire, il sera difficile de parler de cohabitation nationale » soulignera-t-il. Trois axes constituent selon Sarr Ibrahima, les incontournables dans toute politique de réconciliation, le problème de l’identité nationale, le partage du pouvoir et des richesses, et une vision globale du développement.

Le règlement du passif humanitaire devra passer, selon lui, par l’identification des crimes et de leurs auteurs, puis l’organisation d’une sorte de Vérité et réconciliation qui devra déboucher sur un pardon accordé par les victimes. «Il n’appartient pas à l’Etat de se substituer à ces derniers et d’accorder l’amnistie aux auteurs de violation de droits de l’homme » ajoutera-t-il.

D’après Sarr, qui n’a pas oublié le réflexe du journaliste qu’il est, la presse a un grand rôle à jouer dans la consolidation de l’unité nationale et la réconciliation, loin des positions partisanes et sectaristes qui peuvent conduire à l’implosion. Pour lui la Mauritanie a la capacité de trouver, entre les exemples sud africains et marocains, sa propre voie pour panser les blessures du passé. Peuvent l’y aider, le patrimoine commun que ses composantes partagent, l’Islam et l’histoire qui ont produit un brassage et un métissage culturel à nul autre pareil.

Selon lui le problème de l’identité nationale de la Mauritanie doit définitivement être tranché. «La Mauritanie n’est pas un pays arabe, ni un pays arabe africain, comme l’Algérie, le Maroc, la Tunisie ou l’Egypte, c’est un pays arabe et négro-africain, où les deux composantes sont condamnées à vivre côte-à-côte » soulignera Sarr qui trouve que c’est ce qui fait la particularité de la Mauritanie et sa richesse, un pays train d’union et passerelle entre ces deux mondes.

Parlant du partage du pouvoir, Sarr trouve que de la même manière que l’Etat se préoccupe des dosages tribalo-régionalistes lors de ses nominations, il doit aussi se soucier d’équilibrer lors de la désignations dans les hautes fonctions de responsabilités entre les deux grandes composantes de la Nation, les Arabes et les Négro-africains. Selon lui, la communauté noire est sous-représentée, suscitant une frustration au sein d’une grande partie de la population. C’est la même logique, relève-t-il, dans le partage des richesses, 80% des ressources nationales étant détenues par une poignée d’individus, sinon deux ou trois familles.

L’AJD/MR, comme les autres partis de l’opposition, n’est pas non plus, selon Sarr, inactif dans la gestion du dossier des déportés, comme il n’est pas non plus absent dans la solidarité aux victimes des inondations de Tintane et des autres localités sinistrées du pays.

Cheikh Aïdara

Source: CRIDEM 11 septembre 2007

(M)