Qui se souvient du 8 Juin 1976? De ces heures de panique totale dans une capitale ( Nouakchott) qui se découvrait vulnérable, pas assez protégée et plongée de force dans les réalités de la guerre du Sahara?
Qui se souvient des attaques de 1976 et 1977 contre le train minéralier de la SNIM et de l'agonie des conducteurs qui ont appelé à l'aide par radio mais que les troupes mauritaniennes n'ont pas pu rejoindre à temps?
Qui se souvient des attaques contre chinguetty, Inal etc...?
J'étais enfant à l'époque, grandissant dans un pays qui, envers et contre toutes les réalités de nos forces, avait déclaré, avec le Maroc et le soutien massif de la France, la guerre au Front Polisario.
Cette nuit du 8 Juin 1976, l'attaque massive des soldats sahraouis, menés par El Wali Moustapha Sayed, signait la fin d'un monde, celui de l'illusion collective d'une « guerre éclair », sans trop de pertes. El wali Moustapha Sayed perdra la vie cette nuit là. Ses hommes, battus, avaient alors décidé de laisser le corps de leur commandant sur place, ayant pris soin, avant, de le brûler pour rendre toute identification difficile par les autorités de NKTT.
A l'instar des nouakchottois, le président Mokhtar ould DADDAH, découvrait, abasourdi, que les sahraouis, non seulement démontraient leurs capacités offensives à des centaines de kilomètres de leurs bases arrières, mais, aussi, qu'ils pouvaient frapper la capitale politique.
Il aura fallu plusieurs minutes, ce soir là, pour évacuer le président que ses proches pressaient de partir pour éviter les bombardements, un président tétanisé et qui répétait en boucle « Mais comment peuvent ils nous attaquer? » ( version donnée par des hommes qui étaient avec le président ce soir là et qui ont requis l'anonymat).
Qui se souvient des morts, des disparus?
Qui se souvient que notre pays avait décidé, dans un aveuglement politique total, de s'engager sur la voie de la guerre, doté d'une armée à qui tout manquait : matériel, armement, nombres de soldats; des soldats qui ont combattu avec loyauté et rage, avec les peu de moyens possédés.
Qui se souvient des actes de bravoure de ces anonymes dont les noms ne figurent nulle part, dont aucun monument ne rappelle les souvenirs?
Qui se souvient de cette Mauritanie qui a « payé » des choix politiques difficilement explicables?
1975 / 1978 : 3 ans de calvaire pour notre pays en proie aux doutes. 3 longues années pour les mauritaniens, en particulier ceux dont des membres de leurs familles avaient choisi de partir au Sahara, rejoindre le Front Polisario : expéditions punitives, exécutions sauvages, passage à tabac.
Je fus moi même victime de ces vendettas : on m'a brisée la jambe dans la rue, on m'a insultée, on m'a crachée dessus. Au collège de Garçons ce furent 3 années de « caillassages »; on nous a confisqués nos papiers à mes frères et à moi, « coupables » d'avoir un membre de sa famille « traître ». Mais nous n'avons pas été tués...
3 longues années de souffrances pour les populations mauritaniennes.
3 longues années de désespoir et de peur, de deuils innombrables, de larmes.
Jusqu'au 10 Juillet 1978 où, à la radio, nous avons entendu le fameux communiqué numéro 1 qui nous annonçait le renversement de Mokhtar ould Daddah par de jeunes officiers qui avaient participé à la Guerre du Sahara et qui décrétaient un cessez le feu.
Ce coup d'état, premier d'une longue liste ( trop longue liste), marquait la fin d'un monde, celui du rêve des Indépendances. Il préfigurait ce que serait, dorénavant, le visage politique de notre pays, à savoir une armée contrôlant tout et s'étant accaparée le pouvoir politique.
Mais, nonobstant ce vol de notre démocratie, ce coup d'état du 10 Juillet 1978 se devait d'être : il a « sauvé » la Mauritanie de cette guerre interminable qui nous avait laminés économiquement.
Il a eu le mérite de dénoncer les dérives fin de règne de l'ancien régime de Mokhtar ould Daddah, le parti unique, la naissance d'une politique « raciale » dès la fin des années 60...
C'est pour cela que Moustapha ould Mohamed Saleck est à part dans les annales des relations tumultueuses entre armée et pouvoir. Pour ce 10 Juillet là. Juste ce jour là.
Après ce ne fut que dégringolade, confiscation du pouvoir, permanente, fermeture, années obscures, violences, armée s'auto désignant comme gardienne du temple politique, années de braise, déni de démocratie...
Mariem mint DERWICH
le 20/12/2012
Source: Kassataya
Qui se souvient des attaques de 1976 et 1977 contre le train minéralier de la SNIM et de l'agonie des conducteurs qui ont appelé à l'aide par radio mais que les troupes mauritaniennes n'ont pas pu rejoindre à temps?
Qui se souvient des attaques contre chinguetty, Inal etc...?
J'étais enfant à l'époque, grandissant dans un pays qui, envers et contre toutes les réalités de nos forces, avait déclaré, avec le Maroc et le soutien massif de la France, la guerre au Front Polisario.
Cette nuit du 8 Juin 1976, l'attaque massive des soldats sahraouis, menés par El Wali Moustapha Sayed, signait la fin d'un monde, celui de l'illusion collective d'une « guerre éclair », sans trop de pertes. El wali Moustapha Sayed perdra la vie cette nuit là. Ses hommes, battus, avaient alors décidé de laisser le corps de leur commandant sur place, ayant pris soin, avant, de le brûler pour rendre toute identification difficile par les autorités de NKTT.
A l'instar des nouakchottois, le président Mokhtar ould DADDAH, découvrait, abasourdi, que les sahraouis, non seulement démontraient leurs capacités offensives à des centaines de kilomètres de leurs bases arrières, mais, aussi, qu'ils pouvaient frapper la capitale politique.
Il aura fallu plusieurs minutes, ce soir là, pour évacuer le président que ses proches pressaient de partir pour éviter les bombardements, un président tétanisé et qui répétait en boucle « Mais comment peuvent ils nous attaquer? » ( version donnée par des hommes qui étaient avec le président ce soir là et qui ont requis l'anonymat).
Qui se souvient des morts, des disparus?
Qui se souvient que notre pays avait décidé, dans un aveuglement politique total, de s'engager sur la voie de la guerre, doté d'une armée à qui tout manquait : matériel, armement, nombres de soldats; des soldats qui ont combattu avec loyauté et rage, avec les peu de moyens possédés.
Qui se souvient des actes de bravoure de ces anonymes dont les noms ne figurent nulle part, dont aucun monument ne rappelle les souvenirs?
Qui se souvient de cette Mauritanie qui a « payé » des choix politiques difficilement explicables?
1975 / 1978 : 3 ans de calvaire pour notre pays en proie aux doutes. 3 longues années pour les mauritaniens, en particulier ceux dont des membres de leurs familles avaient choisi de partir au Sahara, rejoindre le Front Polisario : expéditions punitives, exécutions sauvages, passage à tabac.
Je fus moi même victime de ces vendettas : on m'a brisée la jambe dans la rue, on m'a insultée, on m'a crachée dessus. Au collège de Garçons ce furent 3 années de « caillassages »; on nous a confisqués nos papiers à mes frères et à moi, « coupables » d'avoir un membre de sa famille « traître ». Mais nous n'avons pas été tués...
3 longues années de souffrances pour les populations mauritaniennes.
3 longues années de désespoir et de peur, de deuils innombrables, de larmes.
Jusqu'au 10 Juillet 1978 où, à la radio, nous avons entendu le fameux communiqué numéro 1 qui nous annonçait le renversement de Mokhtar ould Daddah par de jeunes officiers qui avaient participé à la Guerre du Sahara et qui décrétaient un cessez le feu.
Ce coup d'état, premier d'une longue liste ( trop longue liste), marquait la fin d'un monde, celui du rêve des Indépendances. Il préfigurait ce que serait, dorénavant, le visage politique de notre pays, à savoir une armée contrôlant tout et s'étant accaparée le pouvoir politique.
Mais, nonobstant ce vol de notre démocratie, ce coup d'état du 10 Juillet 1978 se devait d'être : il a « sauvé » la Mauritanie de cette guerre interminable qui nous avait laminés économiquement.
Il a eu le mérite de dénoncer les dérives fin de règne de l'ancien régime de Mokhtar ould Daddah, le parti unique, la naissance d'une politique « raciale » dès la fin des années 60...
C'est pour cela que Moustapha ould Mohamed Saleck est à part dans les annales des relations tumultueuses entre armée et pouvoir. Pour ce 10 Juillet là. Juste ce jour là.
Après ce ne fut que dégringolade, confiscation du pouvoir, permanente, fermeture, années obscures, violences, armée s'auto désignant comme gardienne du temple politique, années de braise, déni de démocratie...
Mariem mint DERWICH
le 20/12/2012
Source: Kassataya