Diplomatie : n.f., science, pratique des relations internationales.
Démocratie : n.f., doctrine politique d’après laquelle la souveraineté doit appartenir à l’ensemble des citoyens.
Le pauvre peuple mauritanien se prépare à voter pour la seconde fois en un mois, après une longue campagne électorale et des résultats mitigés entre les pôles du mal et les forces du changement. Un vote qui déterminera le futur locataire de la maison brune de Nouakchott. En cette période difficile, le peuple est soumis à des épreuves qui détermineront la survie de l’État de droit en Mauritanie, c’est à lui seul que revient l’avenir des futures générations.
Vous vous demandez certainement pourquoi je fais référence à deux définitions du dictionnaire : la diplomatie et la démocratie. Une qui figure dans l’un de mes articles publié le 31 juillet 2006 et l’autre vient de s’ajouter à la liste des mots clefs que nos chers dirigeants utilisent souvent mais oublient délibérément le sens. Alors, en cette période critique de l’histoire du CMJD les deux mots féminins, diplomatie et démocratie, se conjuguent simultanément et, sont associés aux résultats du scrutin de vote du 25 mars prochain.
Pour récompenser les efforts des campagnes d’élections et les résultats du 1er tour du scrutin présidentiel, le gouvernement ‘transitoire’ du CMJD, qui n’a pas froid aux yeux, vient d’augmenter les effectifs du ministère des Affaires étrangères à 76 diplomates destinés aux ambassades à l’étranger. En regardant scrupuleusement les profils de ces personnes nommées, une semaine avant le second tour, on peut remarquer que :
· 30-36 personnes sont originaires de Trarza. Un message clair aux habitants de la 6e région qui ont voté contre Sidi Ould Cheikh Abdallahi que les récompenses et avantages sociaux ne seront pas destinés au partisans d’Ahmed Ould Daddah ni les autres candidats malheureux du 1er tour.
· 10-15 personnes sont originaires de Mederidra et des environs, un message subtil aux habitants de ce village des ténèbres que ceux qui ne sont pas du clan de Sidi Ould Cheikh Abdallahi resteront dans la pauvreté et la misère.
· L’Est de la Mauritanie ainsi que l’Adrar ont été quasiment exclus de ces nominations gracieuses. Les partisans des deux régions partageront les postes ministérielles et les postes clés du gouvernement après les résultats du second tour. Quelques négro-mauritaniens (6) et un haratin ont eu la chance de figurer sur la liste des nominations, mais leur présence pose beaucoup de questions quant à leurs appartenances idéologiques et le rôle qu’ils ont joué durant la campagne électorale.
Beaucoup de jeunes universitaires de Nouakchott se questionnent : comment ces inconnus et étrangers à la diplomatie (dont certains n’ont même pas terminé leurs études primaires, d’autres sont des criminels notoires, des cousins de (..), d’autres qui ne parlent aucunes langues –même pas correctement une des langues vernaculaires du pays) deviennent des conseillers et employés dans nos ambassades à l’étranger? Ce qu’ils ignorent c’est que nous n’avons pas d’ambassade à l’étranger, nous avons des boîtes de commerce et des incompétents qui touchent des sommes faramineuses sans fournir le moindre effort.
Le gouvernement de Ould Boubacar, administrateur sortant des grandes écoles françaises, n’a jusqu'à présent pas compris que l’État n’est pas une manne pour une famille, une tribu ou une région. En nommant ces 76 personnes, il vient de solidifier l’échec économique d’un pays qui vit jusqu’à présent grâce à l’aide extérieure. Chacun de ces employés inutiles aura un salaire mensuel équivalent à 5000 $US, plus son déplacement ainsi que celui de sa famille, la scolarisation de ses enfants et les soins médicaux. Ils coûteront au minimum, sans compter les dépenses de leur famille et les autres frais supplémentaires 380 000 $US/ an au budget de l’État. D’où le CMJD et son gouvernement prendront-ils tout cet argent?
Donc, le message est clair et précis : votez Sidi Ould Cheikh Abdallahi, si vous voulez avoir une part dans le futur gouvernement (ce qui n’est pas certain), si vous voulez assurer la survie de vos familles et de votre entourage.
La conscience d’une société malade
Je me demande toujours si les membres du gouvernement mauritanien comprennent bien la signification de gestion de l’État. J’ai des problèmes à comprendre comment ces diplômés ‘des grandes écoles’, comme ils le prétendent, n’arrivent pas à gérer une population de 3 millions d’habitants. Je me demande avec raison, comment ces employés perçoivent leurs salaires sans se poser la moindre question sur l’effort fourni pour l’avoir.
Le silence et l’acceptation tacite que la société engage envers les voleurs de ses biens expliquent l’état mental de celle-ci. L’ignorance de la quasi-totalité des habitants de l’Est, la fourberie des gens du Sud et la tartuferie des gens du Nord, démontrent le comportement de la société vis-à-vis du phénomène du détournement des biens publics. Aucune mère, aucun père, aucune famille ne posent la question à son fils, à son frère, à sa sœur, ou cousin(e) d’où viennent ces biens et comment il (elle) a pu les avoirs, par contre, ils l’encouragent et se demandant même comment il n’arrive pas à être comme tel (le)?
Notre peuple, produit de notre ‘société malade’ sans conscience, n’a aucune trace dans l’histoire humaine, et le pire est, que ‘le produit mauritanien’ qu’on envoie à l’étranger est souvent désastreux et incapable de se tenir debout, plutôt que de se dissimuler dans une autre société, dans un autre pays ou tout simplement retourner en Mauritanie. Notre conscience de groupe n’arrive pas à faire la différence entre le denier public et l’argent d’autrui, je fais allusion ici au vol et détournement qui se déroulent au sein des personnes d’une même famille ou tribu.
L’interprétation du discours est la partie essentielle d’une communication au sein d’une société. Le discours religieux dans notre société est l’exemple d’une ‘société malade’ ignorant les principes de sa propre religion qu’elle interprète à sa guise. Nos religieux (Imams, Savants, etc.) sont les premiers responsables de la fausse interprétation religieuse, certains parmi eux encouragent les détournements. Même si nous supposons qu’ils ne détournent pas les biens publics ils n’en parlent que rarement dans leurs discours de prêche, de plus, ils ne montrent pas du doigt les voleurs pour ne pas dire qu’ils mangent souvent avec eux dans ‘la même assiette’.
Le mal, le bon, ‘Hallal’, ‘Haram’, sont des expressions utilisées à tort et à travers par les religieux, mais dans un contexte limité par le temps et le lieu. Les biens publics sont ‘Hallal’ quand un fils, un cousin, un proche ou un allié les détournent. Par contre, si c’est un inconnu du cercle familial ou tribal, les détournements deviennent automatiquement ‘Haram’.
Le principe du détournement des deniers publics est simple et la formule est claire : on doit avoir notre part à n’importe quel prix. Les tribus se précipitent pour rencontrer le président et font des cérémonies d’accueil, en contrepartie, ils obtiennent la nomination de l’un des leurs à un poste, une fois dans le poste la personne promue doit récompenser sa tribu pour l’effort indéniable.
CMJD n’est pas neutre
Les médias acclament la neutralité du CMJD, mais les gestes de ce dernier démontrent qu’il est loin de la neutralité et ne peut pas être qualifié d’impartialité dans le processus démocratique qu’il a promu. Le choix de candidatures de Sidi Ould Cheikh Abdallahi et de Zeine Ould Zeidane, etc., est une preuve de l’ingérence des militaires dans le jeu de la ‘démocratie’. Le premier étant gravement malade et physiquement inapte à diriger un gouvernement ou un pays, le second a été créé de toute pièce pour attirer le vote de certains mécontents à l’Est et de barrer le passage à tout candidat qui espéra des votes à l’Est, d’ailleurs le soutien du deuxième au premier rentre évidement dans la stratégie que les militaires ont prescrit pour le second tour. Le ralliement des anciens membres du gouvernement de Ould Taya à Ould Cheikh Abdallahi est une autre preuve du canevas préétablis par le CMJD pour sauvegarder le pouvoir et se protéger contre le changement imposant.
La neutralité dans le processus actuel est un jeu de casse-tête que les observateurs étrangers n’arrivent pas à comprendre. La complexité de la société mauritanienne et la mentalité du peuple est une énigme qu’un citoyen mauritanien n’arrive pas à cerner. Malgré cela, certains indices font preuve de la manipulation des votes et de la pression qui ont été utilisées contre les citoyens.
À la veille du scrutin du 1er tour : la quasi-totalité du transport public (privé) à Nouakchott destiné aux quartiers populaires a été loué (confisqué) par des représentants de Sidi Ould Cheikh Abdallahi pour empêcher la population de ses quartiers de se déplacer vers les bureaux de vote et éliminer toute possibilité de vote pour ses adversaires.
La machine tribale de l’ancien parti au pouvoir (PRDS) a été mise en marche pour acheter les cartes de votes et les documents d’identités des individus dont les chefs de tribus ont des soupçons sur leur vote.
Des militaires ont participé ouvertement à la compagne pour Sidi Ould Cheikh Abdallahi, malgré que les lois interdisent leur présence dans les bureaux de campagne ou toutes formes de manifestations politiques.
Des représentants choisis délibérément pour parler aux médias à l’ouverture des bureaux, alors que la manipulation des votes se fait à la fin de la journée et après le départ des observateurs étrangers.
Les militaires votent sans pièce d’identité et dans tous les bureaux.
Il est de la naïveté politique de croire que les membres du CMJD vont céder le pouvoir à un candidat qui risque de nuire à leurs intérêts ou de démolir le statut qu’ils ont construit avant et après le 3 août 2005. C’est voir même si le coup d’état organisé et orchestré par Ely Ould Mohamed Vall et son cousin Ould Abdel Aziz (ou l’inverse) et la candidature d’un homme malade, en occurrence Ould Cheikh Abdallahi, est une stratégie à cour terme pour le retour éventuel du premier au pouvoir par les ‘urnes’. L’exemple de ‘ATT’ au Mali est un modèle de rêve pour les colonels en Mauritanie et l’accueil accordé au chef du CMJD en France est un appui direct de la droite française pour son geste salvateur et signe de sa bénédiction dans la sous région.
Comme je l’ai dit et je le répète encore une fois, la démocratie ne se boit pas et ne se mange pas, la vérité est difficile et même amère, mais nous ne possédons que les armes de nos idées. Nous sommes confrontés à une ‘société malade’ qui atteint un seuil critique dans le désespoir. Nos intellectuels ont une part de responsabilité, peut-être même une grosse part et l’espoir de la voir changer est un rêve qui peut se réaliser avec la volonté de tous, si et seulement si la minorité persiste et s’entête. Quelque soit la forme que prend un militaire au pouvoir : CMSN, CMRN, PRDS, CMJD, PRDR, Mithaq, ZZ, le peuple peut se tromper une fois, deux fois mais pas éternellement.
Montréal, le 20 mars 2007
Moustapha Ould Abderahim Ould Ibn Mogdad