L’Alliance pour la Justice et la Démocratie/Mouvement pour la Rénovation (AJD/Mr), le parti au nom duquel je suis élue députée à l’Assemblée nationale en Mauritanie, est connu pour avoir comme cheval de bataille la résolution de ce que nous appelons « la question nationale ».
Celle-ci s’articule autour de la difficile cohabitation entre la communauté arabe, qui contrôle l’essentiel des leviers du pouvoir politique et économique, et la communauté négro-africaine. Elle soulève également le problème de la pleine reconnaissance de nos cultures négro-africaines marginalisées par le fait même du système, et la place qu’occupent nos langues dans les médias et dans l’Education nationale. Enfin, elle soulève la terrible question sociétale que nous avons déjà évoquée dans une autre contribution : l’esclavage et les inégalités sociales encore vivaces dans notre pays.
C’est donc la question de l’identité du mauritanien et la place de la Mauritanie à cheval entre le monde arabe et le monde noir qui est la quintessence même de cette question. Car c’est la mauritanité même des noirs en Mauritanie, et l’appartenance de notre pays aussi au monde africain qui sont posées.
Nous autres noirs de Mauritanie, sommes en permanence questionnés dans notre nationalité sur la terre de nos ancêtres. Les déportations de mauritaniens noirs au Sénégal et au Mali, le génocide qui en a suivi par l’extermination de noirs dans le sud du pays et dans l’armée, ont été utilisés comme des instruments de de-négrification par le dictateur Ould Taya, pour tenter d’arabiser totalement le pays.
Aujourd’hui encore, c’est une autre forme de génocide qui est en cours d’exécution en Mauritanie : un génocide symbolique, qu’un de mes camarades de parti a appelé à juste titre « le génocide biométrique ». Je voudrais ici que les parlementaires que vous êtes en preniez la pleine conscience, afin que vous ne puissiez pas dire que vous ne saviez pas ; d’autant que l’Union européenne est un partenaire privilégié de la Mauritanie.
En effet mes chers confrères, depuis 2011 l’Etat mauritanien procède à l’enrôlement biométrique de ses citoyens afin de sécuriser et viabiliser les pièces d’état-civil. Si le projet est louable dans son principe, la tournure qu’il a prise est tout simplement dangereuse. Car cet enrôlement tente, par différents prétextes, de reprendre le vieux projet de diminuer le poids démographique des populations négro-africaines. Nombre de négro-africains à l’intérieur du pays n’arrivent encore pas à s’enrôler.
Mais la situation de la diaspora mauritanienne, notamment en Europe est encore plus effrayante. En France par exemple, où la grande majorité des mauritaniens sont noirs, l’état exige pour recenser ses propres citoyens, de présenter un titre de séjour octroyé par l’Etat français. Alors que l’ambassade de Mauritanie à Paris, en raison de son statut d’exterritorialité est un territoire mauritanien, on y demande à des mauritaniens de justifier de leur identité en présentant des papiers français...
Les mauritaniens de l’étranger sont naturellement opposés à cette mesure aussi ridicule qu’injuste. Mais l’état mauritanien, en dépit des promesses du président de la République, persiste dans cette attitude qui aurait pu paraître insensée si elle n’avait pour sens justement de bannir de la mauritanité des milliers de mauritaniens. Le plus terrible c’est que ceux-ci risquent de devenir apatrides, s’ils n’arrivaient pas à s’enrôler. Je rappelle que le droit international interdit à un pays de transformer son propre citoyen en apatride. Et c’est pourtant ce qui est entrain de se passer. Il est donc important que vous le sachiez et que vous apportiez votre soutien à mes compatriotes qui sont enfermés par leur propre gouvernement dans cette énigme.
Je vous remercie.
Sawdatou Mamadou WANE
Députée
Mauritanie
Source: ajd/mr
Celle-ci s’articule autour de la difficile cohabitation entre la communauté arabe, qui contrôle l’essentiel des leviers du pouvoir politique et économique, et la communauté négro-africaine. Elle soulève également le problème de la pleine reconnaissance de nos cultures négro-africaines marginalisées par le fait même du système, et la place qu’occupent nos langues dans les médias et dans l’Education nationale. Enfin, elle soulève la terrible question sociétale que nous avons déjà évoquée dans une autre contribution : l’esclavage et les inégalités sociales encore vivaces dans notre pays.
C’est donc la question de l’identité du mauritanien et la place de la Mauritanie à cheval entre le monde arabe et le monde noir qui est la quintessence même de cette question. Car c’est la mauritanité même des noirs en Mauritanie, et l’appartenance de notre pays aussi au monde africain qui sont posées.
Nous autres noirs de Mauritanie, sommes en permanence questionnés dans notre nationalité sur la terre de nos ancêtres. Les déportations de mauritaniens noirs au Sénégal et au Mali, le génocide qui en a suivi par l’extermination de noirs dans le sud du pays et dans l’armée, ont été utilisés comme des instruments de de-négrification par le dictateur Ould Taya, pour tenter d’arabiser totalement le pays.
Aujourd’hui encore, c’est une autre forme de génocide qui est en cours d’exécution en Mauritanie : un génocide symbolique, qu’un de mes camarades de parti a appelé à juste titre « le génocide biométrique ». Je voudrais ici que les parlementaires que vous êtes en preniez la pleine conscience, afin que vous ne puissiez pas dire que vous ne saviez pas ; d’autant que l’Union européenne est un partenaire privilégié de la Mauritanie.
En effet mes chers confrères, depuis 2011 l’Etat mauritanien procède à l’enrôlement biométrique de ses citoyens afin de sécuriser et viabiliser les pièces d’état-civil. Si le projet est louable dans son principe, la tournure qu’il a prise est tout simplement dangereuse. Car cet enrôlement tente, par différents prétextes, de reprendre le vieux projet de diminuer le poids démographique des populations négro-africaines. Nombre de négro-africains à l’intérieur du pays n’arrivent encore pas à s’enrôler.
Mais la situation de la diaspora mauritanienne, notamment en Europe est encore plus effrayante. En France par exemple, où la grande majorité des mauritaniens sont noirs, l’état exige pour recenser ses propres citoyens, de présenter un titre de séjour octroyé par l’Etat français. Alors que l’ambassade de Mauritanie à Paris, en raison de son statut d’exterritorialité est un territoire mauritanien, on y demande à des mauritaniens de justifier de leur identité en présentant des papiers français...
Les mauritaniens de l’étranger sont naturellement opposés à cette mesure aussi ridicule qu’injuste. Mais l’état mauritanien, en dépit des promesses du président de la République, persiste dans cette attitude qui aurait pu paraître insensée si elle n’avait pour sens justement de bannir de la mauritanité des milliers de mauritaniens. Le plus terrible c’est que ceux-ci risquent de devenir apatrides, s’ils n’arrivaient pas à s’enrôler. Je rappelle que le droit international interdit à un pays de transformer son propre citoyen en apatride. Et c’est pourtant ce qui est entrain de se passer. Il est donc important que vous le sachiez et que vous apportiez votre soutien à mes compatriotes qui sont enfermés par leur propre gouvernement dans cette énigme.
Je vous remercie.
Sawdatou Mamadou WANE
Députée
Mauritanie
Source: ajd/mr