Entre satisfaction et mutisme
Tant attendue par l’opinion publique, la composition du gouvernement a été rendue publique le samedi dernier et a porté le sceau du changement. Une équipe de technocrates, inconnus pour la plupart, qui suscite au sein de l’opinion négro-africaine des avis partagés entre ceux qui paraissent satisfaits et d’autres qui sont restés sur leur faim. D’autant plus que dans cet attelage gouvernemental, selon les observateurs, la répartition ethnico communautaire des portefeuilles ministériels est restée la même à une exception près, la baisse du quota réservé au Halpulaar.La nomination de Yall Zakaria Alassane au poste de ministre de l’Intérieur et celui de Corréra Issagha à la tête du ministère de l’Agriculture et de l’élevage ont recueilli des avis favorables au sein de la communauté Halpulaar. Cette communauté, qui réclamait davantage de portefeuilles ministériels, a vu son quota réduit. La nomination de l’ancien gouverneur de l’Inchiri, du Tagant, du Hodh El Gharbi constitue tout un symbole. En effet, depuis 21 ans, aucun halpulaar n’a pas occupé ce poste. Le dernier occupant de ce poste n’est autre que le colonel Anne Amadou Babaly. Ould Taya n’a jamais voulu confier ce poste stratégique dans le paysage sécuritaire mauritanien à un halpulaar - après, dit-on, le refus du colonel Anne de procéder à la neutralisation des auteurs du manifeste du négro mauritanien opprimé. Le Colonel Anne sera limogé et remplacé par Gabriel Cymper qui planifiera les pires exactions à l’encontre de la frange la plus importante numériquement de la communauté négro africaine de Mauritanie. Le premier flic de la République n’est autre que le petit frère du prédécesseur de Anne au ministère de l’intérieur, en l’occurrence le Colonel Yall Abdoulaye. Yall Zakaria Alassane aura à gérer le processus de retour des réfugiés mauritaniens vivant au Sénégal et au Mali. L’arrivée de Corréra Issagha au ministère de l’Agriculture et de l’élevage constitue une juste récompense pour ce professeur des lettres à la retraite et fidèle parmi les fidèles de Messaoud Ould Boulkheïr. Natif de Maghama et issu d’une famille maraboutique, Corréra est censé connaître parfaitement les questions agricoles. En 1997 en effet, il a été vice-président de la coordination des cadres représentant les exploitants agricoles au sein du projet Maghama Décrue. Écrivain de renom, il est l’auteur d’un classique (Samba Guéladio: l’épopée peulh du Fuuta Toro) paru en décembre 1992 aux éditions IFAN de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar. La promotion d’un cadre wolof, Ba Madine, promu ministre de l'Artisanat et du Tourisme, s’est effectuée au détriment de la communauté Halpulaar, jusque la détentrice de trois portefeuilles ministériels. Après le limogeage fracassant de Thiam Samba du secrétariat d’État au budget en 1987, les wolof ont été les grands oubliés de l’ère Ould Taya et de la transition. Leurs incessantes revendications ont fini par payer. Quant au quota réservé aux Soninkés, il n’a pas évolué. Pour ce premier gouvernement de l’ère Sidi, on a nommé par défaut un sarakollé du Guidimakha au rang de ministre des pêches. Son appartenance familiale (il est le frère du directeur général de la Mauripost et du député Soumaré Oumar, chef de file des contestataires au sein du Sénat), a prévalu plus dans la balance qu’autre chose.
THIAM MAMADOU
Source: calame