Un marché de Nouakchott.
Mohammed Ould Youba habite à Nouakchott depuis toujours mais jamais il n’avait constaté autant d’agressions et de bagarres à couteaux tirés que ces dernières années. Ces violences sont devenues monnaie courante dans la capitale mauritanienne. Et devant l’immobilisme des autorités, ce passionné d’informatique s’efforce désormais de mettre en place des projets ludiques à destination des jeunes afin de les détourner de cette violence.
Mohammed Ould Youba possède une entreprise d’informatique à Nouakchott. Il travaille également pour une ONG humanitaire. Il est à l’origine de la création du réseau social mauritanien Facerim.
Les attaques au couteau, mais aussi les viols et les enlèvements sont malheureusement devenus "à la mode" à Nouakchott. Il ne se passe pas un jour sans que l’on nous rapporte l’agression d’un ami au couteau, le viol d’une connaissance sous la menace d’une arme. La délinquance a pris des proportions alarmantes dans certains quartiers, notamment Neteg, Kouva, Basra et Arafat.
Le lauréat du concours photo mis en place par Mohammed Ould Youba recevant son prix, un mouton, à l’occasion de la fête de l’Aïd.
Le port du couteau est perçu comme naturel en Mauritanie. Les gens l’utilisent pour les tâches quotidiennes, réparer une voiture, égorger un mouton, etc. Vous en trouvez donc très facilement et de tous les calibres dans les épiceries. Depuis quelques temps cependant, cette arme circule de plus en plus parmi les plus jeunes qui n’hésitent pas à en faire usage pour se bagarrer.
Je suis tombé des nues, il y a quelques semaines, quand mon épouse m’a dit que mon fils de 18 ans avait brandi un couteau face à son petit frère parce qu’il ne le laissait pas jouer à la PlayStation. Je n’ai jamais appris à mes enfants la violence, mais ils sont influencés par leurs camardes de classe qui jouent les Rambo avec des couteaux tous plus long les uns que les autres.
Les colonnes de la presse locale mauritanienne sont remplies de faits divers liés à la détention d’armes blanches - bien souvent il s’agit de banales disputes qui se terminent dans le sang. Sur les deux derniers mois, les journaux de la capitale ont rapporté au moins une vingtaine de délits à l’arme blanche.
Début juillet, c’est un client qui a poignardé le gérant d’une boutique à quatre reprises, au motif que ce dernier refusait de lui servir un paquet d’arachide. Le 15 août, c’est un chanteur local, Bassirou Wanbine, qui est décédé après avoir reçu un coup de couteau en pleine poitrine alors qu’il essayait de s’interposer entre son frère et un voisin au cours d’une bagarre.
Cette utilisation galopante du couteau intervient dans un contexte d’augmentation de l’insécurité dans la capitale mauritanienne. Pendant le premier semestre 2013, les autorités ont dénombré plus de 1700 délits comprenant vols, viols et meurtres, à Nouakchott.
"Il faut monter des projets pour permettre aux jeunes de canaliser leur énergie"
Mohammed Ould Youba possède une entreprise d’informatique à Nouakchott. Il travaille également pour une ONG humanitaire. Il est à l’origine de la création du réseau social mauritanien Facerim.
Les attaques au couteau, mais aussi les viols et les enlèvements sont malheureusement devenus "à la mode" à Nouakchott. Il ne se passe pas un jour sans que l’on nous rapporte l’agression d’un ami au couteau, le viol d’une connaissance sous la menace d’une arme. La délinquance a pris des proportions alarmantes dans certains quartiers, notamment Neteg, Kouva, Basra et Arafat.
Le lauréat du concours photo mis en place par Mohammed Ould Youba recevant son prix, un mouton, à l’occasion de la fête de l’Aïd.
Le port du couteau est perçu comme naturel en Mauritanie. Les gens l’utilisent pour les tâches quotidiennes, réparer une voiture, égorger un mouton, etc. Vous en trouvez donc très facilement et de tous les calibres dans les épiceries. Depuis quelques temps cependant, cette arme circule de plus en plus parmi les plus jeunes qui n’hésitent pas à en faire usage pour se bagarrer.
Je suis tombé des nues, il y a quelques semaines, quand mon épouse m’a dit que mon fils de 18 ans avait brandi un couteau face à son petit frère parce qu’il ne le laissait pas jouer à la PlayStation. Je n’ai jamais appris à mes enfants la violence, mais ils sont influencés par leurs camardes de classe qui jouent les Rambo avec des couteaux tous plus long les uns que les autres.
Cette recrudescence de la violence a commencé après le coup d’État de 2008. Les nouvelles autorités avaient décidé de créer un nouveau corps de sécurité, le Groupement spécial de la sécurité routière (GSSR), chargé de patrouiller dans les rues de la ville en lieu et place de la police, qui avait mauvaise réputation suite à des affaires de corruption. Les éléments du GSSR se sont révélés inefficaces contre la délinquance car ils ne sont pas armés, contrairement à la police qui avait quand même un pouvoir de dissuasion. Devant cette criminalité galopante, les autorités ont récemment décidé d’armer certaines de ces unités.
"L’essentiel est d’occuper ces jeunes"
Les autorités n’ont pas mis en place des structures de loisirs et d’éducation pour occuper les jeunes. Nous sommes actuellement en période de vacances et nos enfants n’ont rien d’autre à faire que traîner dans les rues. Les voir mourir comme ça sans raison m’attriste.
Il ne faut pas être fataliste devant ce phénomène. En tout cas, je refuse de rester les bras croisés. J’essaye à mon modeste niveau d’occuper les jeunes désœuvrés pour qu’ils ne basculent pas dans la délinquance. J’ai par exemple organisé un concours photo à l’occasion de la fête de l’Aïd el Fitr, début août. J’ai demandé à des jeunes de prendre des photos de leur quartier et de les poster sur le réseau social local. J’ai été dans les quartiers pour les rencontrer, je me suis rendu sur les terrains de foot, de basket, dans tous les endroits où ils sont susceptibles de se rassembler. J’ai au final reçu plus de 600 candidatures et le gagnant, choisi par les internautes, a reçu un mouton en guise de prix.
Il ne s’agit là que d’une idée parmi d’autres, l’essentiel étant d’occuper ces jeunes. Avant j’avais une salle de karaté, ce qui me permettait de les aider à canaliser leur énergie. Mais je n’ai plus beaucoup de temps libre actuellement. J’essaye toutefois de leur donner des cours d’informatique, de leur apprendre comment créer un site Web, une application. J’ai récemment commandé en Allemagne un logiciel de musique assistée par ordinateur pour le mettre à disposition des jeunes rappeurs. Mon objectif, c’est de les amener à écrire des textes qui ne portent pas de discours de haine et n’appellent pas à la violence, parce que malheureusement c’est ce qui est en vogue actuellement.
J’essaye actuellement de monter un projet artistique dans lequel le couteau serait utilisé autrement que pour poignarder son frère ! Je profite d’ailleurs de cette tribune pour lancer un appel aux idées et je suis ouvert à toutes les suggestions.