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Le bureau exécutif de l'AVOMM

"L'important n'est pas ce qu'on fait de nous, mais ce que nous faisons nous-mêmes de ce qu'on a fait de nous." Jean-Paul Sartre

"L'Association d'aides aux veuves et aux orphelins de mauritanie (AVOMM) qui nous rassemble, a été créée le 25/12/95 à PARIS par d'ex-militaires mauritaniens ayant fui la terreur, l'oppression, la barbarie du colonel Mawiya o/ sid'ahmed Taya ......
Ces rescapés des geôles de ould Taya, et de l'arbitraire, décidèrent, pour ne jamais oublier ce qui leur est arrivé, pour garder aussi la mémoire des centaines de martyrs, de venir en aide aux veuves, aux orphelins mais aussi d'engager le combat contre l'impunité décrétée par le pouvoir de Mauritanie."
E-mail : avommavomm@yahoo.fr

Bureau exécutif

*Ousmane SARR, président
*Demba Niang, secrétaire général
*Secrétaire général Adjt; Demba Fall
*Alousseyni SY, Chargé des relations extérieures
*Mme Rougui Dia, trésorière
*Chargé de l’organisation Mariame Diop
*adjoint Ngolo Diarra
*Mme Mireille Hamelin, chargée de la communication
*Chargé de mission Bathily Amadou Birama
Conseillers:
*Kane Harouna
*Hamdou Rabby SY










AVOMM

L'intervention d'Ousmane DIAGANA, le 21 septembre 2013 à la journée de l'Ajd/Mr (1ère partie)


L'intervention d'Ousmane DIAGANA, le 21 septembre 2013 à la journée de l'Ajd/Mr (1ère partie)
Thème I : AJD/MR : Histoire d'un jeune parti dans un paysage politique en perpétuelle reconfiguration.

Animateur : Ousmane DIAGANA, Secrétaire National des Relations Extérieures de l’AJD/MR.


L’Alliance pour la Justice et la Démocratie/Mouvement pour la Rénovation (AJD/MR) fait partie des tout jeunes partis (par l’âge et non par l’audience) du paysage politique mauritanien, née, il y a 6 ans, au lendemain de l’élection présidentielle de 2007. Aussi, avant de démontrer qu’elle évolue dans un paysage politique en perpétuelle recomposition et/ou reconfiguration (II), il n’est pas inutile de commencer par l’histoire de ce jeune parti (I).

I)     AJD/MR : histoire d’un jeune parti…… : des soutiens à une candidature à la création d’un parti

A l’origine de la création de l’AJD/MR, il y a la volonté, la détermination de femmes et de d’hommes appartenant ou non à des partis et/ou organisations politiques, révolté(e)s par un demi-siècle d’injustices, de marginalisation, de discriminations, de racisme d’Etat, de mépris de la part des pouvoirs publics d’une partie de la composante nationale : la composante noire mauritanienne.

Et mus par une intention commune de lutter contre ces fléaux, à travers la résolution de la question de la cohabitation entre nos différentes composantes, ces femmes et ces hommes ont décidé ensemble, en 2007, de soutenir un candidat, Ibrahima Moctar SARR, parmi la vingtaine qui s’était lancée dans la course pour le fauteuil présidentiel. A  leurs yeux, c’était le meilleur défenseur de leurs préoccupations.

A) Les soutiens à la candidature de SARR

Cette candidature avait soulevé un enthousiasme et un espoir énormes au sein de la communauté négro-mauritanienne qui connaissait les convictions de l’homme et sa détermination à les défendre contre vents et marée. Elle a été initiée par un mouvement (1), appuyé par un autre (2) et amplifié dans le monde à travers des comités de soutien (3).
           
1°)  Le Mouvement pour la Réconciliation Nationale (M.R.N.), initiateur de cette candidature

Quelques mois avant l’élection présidentielle de 2007, précisément le 30 décembre 2006, avec l’Alliance pour la Justice et la Démocratie (AJD) de Ahmedou Cheikhou CISSE dit Modi CISSE, le Collectif pour le Changement et l’Alternance (CCA) de Ahmadou Tidiane DIOP et certains amis indépendants dirigés par Ibrahima SARR, est créé un nouveau mouvement politique : le Mouvement pour la Réconciliation Nationale (M.R.N.).
Dans sa déclaration de naissance, le nouveau mouvement dresse un diagnostic objectif, non complaisant du pays et affiche une volonté d’action et de changement.

Un diagnostic objectif, non complaisant, une volonté d’action et de changement

Après avoir brossé un tableau peu reluisant de la situation politique de notre pays et l’avoir comparée à de « terribles chaines qui nous paralysent depuis l’indépendance et qui nous empêchent de vivre dans la justice et dans l’égalité, dans la dignité et le développement harmonieux de toute notre société »[1], le MRN dresse, sans complaisance, ce diagnostic: « Ces chaînes qui s’appellent racisme, esclavagisme, tribalisme, régionalisme, népotisme favorisent le génocide, l’exclusion, le monopole, l’intolérance et l’impunité.

Il décide de prendre ses responsabilités : « Il nous appartient aujourd’hui de nous approprier la volonté de rectifier le tir, en redressant les torts, en levant les malentendus, en réconciliant les mauritaniens aujourd’hui divisés par tant d’années de dictature, de négation, d’exclusion et de monolithisme économique et politique »[2]. Pour ce faire, le M.R.N. se fixe des objectifs, une méthode et affirme une conviction.

Des objectifs clairs, une méthode et une conviction

 Il s’est fixé, entre autres, comme objectifs : « d’abord d’éloigner de nous le spectre de la violence, les pesanteurs des rancœurs et la haine destructrice en pansant les plaies encore béantes de nos citoyens, de soigner, de donner à boire et à manger aux plus pauvres qui doivent également être vêtus et mis à l’abri des intempéries. Il s’agira ensuite d’organiser l’Etat de droit pour dispenser la justice et donner du travail à notre jeunesse qui désespère gravement ».

Pour y parvenir, une méthode : « avoir déjà rassemblé tous les mauritaniens, ceux de l’intérieur comme ceux de l’extérieur, chacun se sentant pleinement chez soi pour discuter, pour s’écouter afin de s’entendre sur l’essentiel : réparation, justice, réconciliation et développement ». Et une conviction : « Nous devons nous convaincre, que n’importe quel citoyen mauritanien peut prétendre à la magistrature suprême, qu’il vienne du SUD des confins du fleuve nourricier ou des hauteurs de l’ADRAR, qu’il vienne des HODH ou du centre, qu’il soit blanc, noir ou métis, peu importe! 

Il doit pouvoir porter ce programme et le mener à bien contre vents et marées. Il doit être libre de toute emprise, n’ayant été élu que par la volonté populaire »[3]

Nécessité de se lancer dans la compétition électorale

Pour réaliser ces objectifs, il faut un homme ou une femme convaincu(e) de ses objectifs et capable de les défendre, contre vents et marée dans la compétition électorale suprême à venir, à savoir l’élection présidentielle de mars 2007. Et le Mouvement d’annoncer : « Nous, Mouvement pour la Réconciliation Nationale ouvert à tous les mauritaniens sans exclusive, déclarons notre volonté de nous engager dans le cadre de la future élection présidentielle à faire émerger cet homme ou cette femme pour porter haut ce programme du Salut ». 

Par ailleurs, le Mouvement qui est déjà ouvert à tous les mauritaniens sans exclusive lance un appel à toutes les couches sociales en ces termes : « Nous lançons un appel à notre jeunesse encore propre de tout sentiment malsain pour se joindre à nous. Nous exhortons nos braves femmes et filles à barrer la route à tous les corrupteurs, les pilleurs de deniers publics qui veulent acheter la conscience des électeurs ». 

Et il invite « nos travailleurs et nos intellectuels, pour qu’ils jouent enfin le rôle qu’on a toujours attendu d’eux, ici et maintenant, où le destin d’une nation inachevée est à la croisée des chemins ». 

Enfin, le Mouvement annonce clairement, et sans ambages, sa volonté de participer à la prochaine élection présidentielle : « Le Mouvement pour la Réconciliation Nationale fera connaître très prochainement son candidat, nous vous invitons à venir participer à ce choix ». 

Et on connaît la suite. Ibrahima Moctar SARR sera choisi par le M.R.N comme leur candidat à l’élection présidentielle de mars 2007.

2°) L’appui politique et multidimensionnel des FLAM/Rénovation

Bien avant le M.R.N., les FLAM/Rénovation avaient vu le jour, le 15 février 2006, suite à des divergences d’appréciation d’avec les FLAM après le congrès de Cincinnati en 2005. Ses objectifs étaient identiques à celles du M.R.N. En effet, dans leur déclaration de naissance, elles affirment : « Considérant notre volonté indéfectible de prendre en charge les problèmes fondamentaux de la cohabitation, de l'esclavage, du retour organisé des déportés, du passif humanitaire…et conscients du refus obstiné du Comité Militaire pour la Justice et la Démocratie (CMJD) d'engager un processus de règlement définitif juste et équitable de ces questions douloureuses ». Et elles poursuivent : « Nous, signataires de la présente déclaration, réalistes et conscients de la nécessité de plus d'engagement, de plus de détermination et de plus de courage dans le combat que nous menons pour une Mauritanie juste et égalitaire dans laquelle seraient bannis à jamais l'injustice, le racisme, l'esclavage, le tribalisme, la dictature et le népotisme ; »[4], et réaffirment leur volonté sincère de travailler avec les acteurs politiques et sociaux sans exclusive, pour le progrès, le bien-être, la justice et la démocratie en Mauritanie.

Mémorandum des FLAM/R

Le diagnostic fait par le M.R.N, le 30 décembre 2006, est en tous points, identique à celui des FLAM/Rénovation dans leur mémorandum du 7 mai 2006. En faisant le constat d’une crise profonde et multiforme, elles dénoncent le régime du parti unique suivi d’un quart de siècle de régimes d’exception et de pouvoirs personnels ayant privé « notre peuple de toute perspective de liberté, de justice et de démocratie ». Par ailleurs, selon le même mémorandum, « la  gestion patrimonialiste, népotiste, et souvent raciste des institutions et des biens de la République a créé une fracture entre nos différentes composantes nationales ». Et  il poursuit : « l’unité nationale n’a jamais été aussi menacée qu’au cours des vingt dernières années que durât le régime déchu! Notre pays a vécu les heures les plus sombres de son histoire post-indépendance : assassinats et purges racistes au sein des forces armées, pogroms contre les négro-africains, déportations à la faveur du conflit de 1989,… »

Le mémorandum prône la réconciliation nationale nécessaire à travers un pacte. Cette réconciliation requiert d’abord  « la manifestation de la vérité et l’établissement de la justice sans complaisance aucune, mais aussi sans haine ni esprit de vengeance. Elle exige que la lumière, toute la lumière, soit faite sur ce qui s’est passé, dans le double objectif de réparer et de pardonner ».

Pour ce mouvement politique, « La réconciliation nationale exige aussi un débat franc et ouvert sur le principe du partage du pouvoir entre nos composantes nationales. Sans une réconciliation du peuple avec lui-même, tout régime qui sera issu des élections en mars 2007 sera fragilisé. Elle demande un minimum de volonté de travailler à la gestion pacifique des différends persistants. Elle exige que les mauritaniens dans leur grande majorité acceptent la responsabilité morale et politique de nourrir une culture de tolérance et de la différence dans la complémentarité avec comme objectif premier la restauration de la volonté du vivre ensemble »[5].

FLAM/R, CFCD et candidature d’I.M.S.

En intégrant la Coalition des Forces du Changement Démocratique (CFCD), le 28 août 2006, les FLAM/Rénovation avaient l’intention de soutenir en son sein le candidat qui prendrait en charge, au mieux, ses préoccupations. Au sein de ce groupe politique, elles hésitaient entre l’UFP, l’APP, le RFD et Hatem qui semblaient chacun, sincère dans son engagement à consolider l’unité nationale à travers le retour des déportés et le règlement du passif humanitaire. Mais le choix d’un parti pouvait paraître périlleux pour les FLAM/Rénovation qui souhaitaient garder des rapports de bon voisinage avec tous ses partenaires de la CFCD.

Lorsque la candidature d’Ibrahima Moctar SARR à l’élection présidentielle de mars 2007 a été proposée par le M.R.N., les responsables des FLAM/Rénovation y trouvaient un triple intérêt pour le soutenir :

- D’abord la proximité idéologique, les garanties offertes par le candidat qui semble le mieux qualifié pour  s’attaquer à l’ensemble de ses préoccupations politiques, notamment la prise en charge de la question de la cohabitation à travers des réformes institutionnelles ; son passé politique, son engagement pour la promotion des langues et cultures nationales, etc… en font le candidat idéal.

- Ensuite, le choix de SARR qui n’est pas membre de la CFCD évitait aux FLAM/Rénovation de frustrer l’un ou l’autre parti de cette Coalition qui n’aurait pas été adoubé.

- Enfin, les FLAM/Rénovation avaient pour ambition de se muer en parti politique autour des idées de réconciliation nationale. Un des noms qui circulaient entre certains de ses membres, c’est le P.R.N : Parti de la Réconciliation Nationale.

Donc, dans ces circonstances, le choix du candidat du Mouvement pour la Réconciliation Nationale s’imposait de fait. Et les FLAM/Rénovation ont décidé de s’engager dans la bataille présidentielle aux côtés du candidat en y prenant une part très active : plusieurs cadres de cette mouvance politique se sont rendus en Mauritanie pour battre campagne à ses côtés, sans compter l’apport financier comme le feront également les différents comités de soutien.

3°) L’apport des différents Comités de soutien de par le monde

Dès l’annonce de la candidature de SARR, des comités de soutien se sont mis en place à travers le monde : en Mauritanie, en Afrique, notamment au Sénégal, au Mali, en Europe, notamment en France, en Belgique, aux Pays-Bas, en Espagne ou en Italie et en Amérique. Ces comités ont joué un rôle important dans la victoire du candidat aussi bien en matière de sensibilisation dans les diasporas qu’en Mauritanie. Ils ont incité les citoyens à s’inscrire massivement sur les listes électorales et à voter pour le candidat et ils ont levé des fonds pour contribuer au financement de sa campagne.

Nous citons à titre d’exemples symboliques deux comités de soutien dans la diaspora :

- Aux Etats-Unis, la Fédération des comités de soutien à la candidature d’Ibrahima Moctar SARR au niveau des USA (FECOMS) composée de différentes sections dont celles de Cincinnati, de Columbus, de New-York, etc…

- En France, le Comité de soutien à la candidature d’Ibrahima SARR composé de personnes de tous horizons avec comme Président Mamadou Samba DIOP dit Murtudo, Baaba Leñol. Ce comité est créé le mercredi 14 février 2007 à Paris suite à une consultation et l’approfondissement des grandes idées autour de la candidature du MRN. Il était composé entre autres de Haby Zakaria KONTE, Moulaye DIOUM, Mouhamadou BA et Dr Ousmane Cherif TOURE.

D’après Ousmane Cherif, ce comité soutient Ibrahima SARR car il est le mieux placé pour traiter les questions relatives au passif humanitaire, aux déportés, aux expropriations de terres, aux violations des droits de l’Homme, et il apparaît urgent, aux yeux du comité, d’aider le candidat à aller en avant pour faire valoir la nécessité de réconcilier le pays par la résolution des problèmes.

La conclusion qui s’impose, c’est que tous les soutiens de SARR pour l’élection présidentielle de mars 2007 étaient mus par un fil conducteur : la Réconciliation Nationale sur la base de la justice, de la vérité et de l’indemnisation correcte et digne des victimes.

Grâce du travail herculéen de ces pionniers, de ces différents soutiens politiques et associatifs de par le monde, la candidature de SARR a suscité un grand enthousiasme et une forte adhésion. La suite, on la connaît, une vraie surprise. Avec près de 8%, il se hisse en 5ème position sur 19 candidats en compétition.

Fort de ses résultats de 2007, et avec ses soutiens, le candidat Ibrahima Moctar SARR décide de créer un nouveau Parti politique unitaire : L’Alliance pour la Justice et la Démocratie/Mouvement pour la Rénovation (AJD/MR).

B) La naissance de l’AJD/MR

Les 17-18 août 2007, à l’ancienne maison des jeunes de Nouakchott, s’est ouvert le congrès extraordinaire de l’AJD dénommé, pour la circonstance, Congrès de la Réconciliation nationale. Durant deux jours, les représentants de l’A.J.D., du Collectif pour le Changement et l’Alternance (C.C.A.), des FLAM/Rénovation et des Indépendants regroupés autour de SARR, organisés en ateliers, commissions et sous-commissions, ont planché sur les textes fondateurs d’un nouveau parti politique (Statuts, Déclaration de Politique Générale) et prennent plusieurs résolutions relatives à la situation nationale et internationale.

Et à l’issue de ces deux jours de fructueux échanges, ils décident de créer une nouvelle entité politique : l’AJD/MR qui prône, entre autres,  « une Mauritanie égalitaire et unie dans la diversité », « la réconciliation comme préalable à l’unité nationale », « l’abolition factuelle de l’esclavage », « une cohabitation respectueuse de nos différences », « un retour digne des déportés et un règlement juste du passif humanitaire », « le partage du pouvoir », « l’officialisation des langues nationales ».

La naissance de ce parti s’est faite dans un contexte où la classe politique mauritanienne a connu une nouvelle configuration et une recomposition dictée par les résultats de l’élection présidentielle de 2007. C’est ainsi que l’AJD/MR va évoluer dans un paysage politique en perpétuelle recomposition et/ou reconfiguration.

II) AJD/MR dans un paysage politique en perpétuelle reconfiguration et/ ou recomposition

Selon le dictionnaire de la langue française d’Alain REY, Le Robert, la configuration est « un ensemble organisé d’éléments »

Recomposition : accord entre plusieurs personnes qui acceptent de transiger sur leurs prétentions respectives. Synonyme= reconstitution. Exemple donné par le dictionnaire est : « recomposition du paysage politique ».

Dans cette partie, nous utiliserons le terme de « recomposition » à chaque fois qu’une coalition est créée sur la base de la signature d’un accord. On parlera de reconfiguration dans les autres circonstances.

Nous utilisons d’autant plus aisément le terme de « recomposition » qu’un des candidats à l’élection présidentielle de 2007 en a fait le vœu pour la classe politique. Ici, nous examinerons la « perpétuelle recomposition/reconfiguration ? » du paysage politique mauritanien d’avant l’élection présidentielle de 2007 à ce 21 septembre 2013. Comment l’AJD/MR se positionne-t-elle dans ce paysage politique se positionne-t-elle dans ces recompositions ? Participe-t-elle à ces recompositions/reconfigurations ? Comment les apprécie-t-elle ?

A)   Avant, pendant et après l’élection présidentielle de 2007

Le paysage politique mauritanien a connu plusieurs recompositions bien avant l’élection présidentielle de 2007 (1), lors de l’élection, entre le premier et le deuxième tour, nous assistons à une reconfiguration/recomposition (2). Mais c’est surtout après la victoire de Sidi Ould Cheikh Abdallahi que cette celle-ci s’accélère, avec ou sans l’AJD/MR (3). 
                       
1°) Avant l’élection présidentielle de 2007

Naissance de la CFCD

Pour contrecarrer le retour de l’ancien régime, onze partis politiques de l’ancienne opposition démocratique à Ould Taya ont décidé, le 29 juin 2006, de créer une grande coalition: c’est l’une des plus importantes recompositions après le coup d’état du 3 août 2005. Elle comprend le RFD, l’UFP, l’APP, HATEM, RD, FP, PUDS, Réformistes centristes, SAWAB, RPM-Temam et MDD. Ils seront rejoints plus tard par les FLAM/Rénovation qui y adhéreront.

« Cette coalition se veut une alliance politique destinée à promouvoir une véritable alternative de changement qui réponde aux aspirations du peuple mauritanien à l'unité nationale, à la justice sociale et à la répartition équitable des ressources nationales" [6]. La coalition prévoit de mettre en place deux commissions : l’une chargé d’élaborer un programme de gouvernement,  l'autre de préconiser les formules ou règles d'alliance  électorales et d'un code de bonne conduite entre les partis et la coalition.

De son côté, « Sidi Ould Cheikh Abdallahi, candidat indépendant à l’élection présidentielle mauritanienne du 11 mars 2007, plaide en faveur d’une "recomposition" du paysage politique national à l’occasion des élections législatives et municipales du 19 novembre prochain, dans une déclaration rendue publique vendredi …Il exhorte les partis politiques, les candidats indépendants et la Société civile "à trouver une formule de concertation susceptible d’assurer la stabilité aux institutions démocratiques issues des élections"  »[7]

Naissance de la Coalition Al Mithaq

En face, des indépendants et une vingtaine de partis politiques issus de l’ancienne majorité, dont le PRDR, le RDU, l’UDP, l’UNDD, l’UPSD, l’UPC, l’UCD, le PMDE, etc…entendent l’appel du Candidat Sidioca et créent une autre coalition : Al Mithaq « Le pacte ». But : soutenir sa candidature.

C’est dans ce contexte de bipolarisation des forces politiques coalisées dans des blocs opposées que se tiendra l’élection présidentielle de 2007.
2°) Lors de l’élection présidentielle de 2007
  • Au premier tour,
Al Mithaq soutient Sidi Ould Cheikh Abdallahi

Aucun leader n’ayant eu l’ambition de se présenter à cette compétence, la coalition a fait un choix unanime de soutenir Sidioca dès le 1er tour. Avec un camp unitaire et rassemblé, ils espéraient l’emporter au premier tour.

La CFCD va en ordre dispersé

En face, les leaders de la CFCD ont présenté plusieurs candidats : Ahmed Ould Daddah, Messaoud Ould Boulkheir, Mohamed Ould Maouloud et Saleh Ould Hanana. Une telle pluralité de candidature était de nature à fragiliser l’ancienne opposition.

Ibrahima SARR, président du MRN se lance dans la course

Soutenu par l’AJD, le CCA, les Indépendants, les FLAM/Rénovation et divers comités de soutien, il ne fait partie d’aucune des deux coalitions opposées.
  • Au second tour,
Divergences au sein de la CFCD

Malgré « les formules ou règles d'alliance  électorales et d'un code de bonne conduite [préconisés] entre les partis et la coalition »[8], l’APP, pourtant membre de cette coalition choisit de soutenir Sidioca au grand dam d’Ahmed Ould Daddah. Ce dernier sera tout de même soutenu par tous les partis de la coalition.

Ibrahima SARR choisit le candidat de la CFCD

Après avoir discuté et rediscuté avec les deux candidats restés en lice, Ibrahima Moctar SARR qui n’avait que « son programme à vendre au plus offrant », se rangera finalement du côté d’Ahmed Ould Daddah, candidat de la CFCD.

Sidioca engrange des soutiens de taille

En plus d’Al Mithaq (Coalition de 25 partis), Sidioca a obtenu le soutien de Zein Ould Zeidane, arrivé 3ème et Messaoud Ould Boulkheir et de l’APP, arrivé en 4ème position. Ces deux derniers soutiens, fortement négociés, détermineront le résultat du second tour : Sidioca l’emporte avec 52%.
                       
3°) Après la victoire de Sidioca
  • Avant la formation du gouvernement
Les soutiens d’Ahmed Ould Daddah réclament un gouvernement d’unité nationale

Un groupe formé de dix partis politiques qui ont soutenu la candidature d'Ahmed Ould Daddah pendant les élections présidentielles a tenu une conférence de presse, lundi 9 avril, pour réclamer la formation d'un gouvernement d'unité nationale de vaste coalition, et qui prenne en compte tous les partis de la législature. Et dans une déclaration faite au nom de tous les partis impliqués, Ibrahima Moctar SARR a affirmé qu'un « tel Gouvernement aurait pour objectif de soutenir le président nouvellement élu, Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi, dans la résolution des problèmes majeurs du pays, dont le retour des réfugiés, l'éradication de l'esclavage, le respect des libertés publiques, etc »[9]. Ils « estiment que des solutions viables et crédibles peuvent être trouvées en réunissant les efforts de tous les mauritaniens »[10].

La coalition Al Mithaq s’oppose à un gouvernement d’unité nationale

Même si Sidioca était sensible à cette formule de gouvernement d’unité nationale, il s’est laissé convaincre par ses soutiens de la première heure : Al Mithaq qui n’en voulait pas[11].
  • A la formation du Gouvernement
Nomination de Zein Ould Zeidane comme Premier ministre

Par décret, en date du 20 avril 2007, Zein Ould Zeidane sera nommé Premier ministre[12] en remerciement de son soutien d’entre les deux tours ; et le 28 avril, il forme son gouvernement[13].

APP dans le nouveau gouvernement 

Comme suite à leur accord électoral d’entre les deux tours, Messaoud Ould Boulkheir occupe le perchoir pendant que quatre portefeuilles ministériels échoient à son parti : il s’agit de l’Eau, de l’énergie, de l’agriculture et du cheptel, et de la jeunesse et des sports[14]. Cette entrée du gouvernement de l’APP signe son départ de l’opposition : va-t-on vers une reconfiguration de la classe politique, notamment au sein de la majorité ?

Mécontentement de la coalition Al Mithaq oubliée

Malgré leur soutien de la première heure, les indépendants et la coalition Al Mithaq ont été oubliés car on ne voulait pas des « Roumouz El vassad ». Ils reprochent au Président Sidioca de n’avoir pas mis en place un gouvernement politique à la place des technocrates choisis. De plus, cette coalition était jalouse du sort faite à APP qu’elle qualifie de parti d’opposition. Devant cette bronca de ses amis, un autre groupe de partis rejoint la majorité

Constitution de la coalition Al Wihda et ralliement à la majorité : nouvelle recomposition ?

Le 20 juin 2007, plusieurs partis, dont le FP, le RD, le RPM, le PUDS, le PMDE-Verts, Sawab, l’UDN et le PTUN forment le courant « Al Wihda »  car ils ont constaté « que la situation politique est catastrophique et que rien ne va plus politiquement et économiquement et que les choses ne cessent de se dégrader. A partir de ce constat, nous avons donc pris l’initiative de créer ce courant politique afin de colmater les brèches d’une majorité présidentielle qui risque de devenir un parti-Etat et une opposition inexistante voire en passe de dormir sur ses deux lauriers avec la loi qui lui a été donnée"[15].

Le 27 juin 2007, « Le regroupement du courant des partis d'"Al Wihda" a annoncé ce mercredi, dans un communiqué, son ralliement à ce qu'il a appelé "la majorité issue du 2ème tour de l'élection présidentielle du 25 mars 2007".[16]

Ils ont décidé ce choix « après leur rencontre avec le Président de la République et les explications étayées qui leur a été faite et qui dénotent d'une connaissance approfondie par le Chef de l'Etat de la situation et des problèmes du pays et des exigences du changement à tous les niveaux »[17]...

Naissance d’une nouvelle coalition plus large : Mithaq El Wihda : recomposition ou reconfiguration au sein de la majorité ?

Lors d’une assemblée constitutive, tenue le soir du 29 février  à Nouakchott, les vingt présidents de partis de la majorité présidentielle ont adopté à l’unanimité les textes et règlements de la plus grande coalition de l’histoire politique du pays : Mithaq El Wihda. Ensuite, dimanche 2 mars 2008, la même assemblée de chefs de partis a élu, à l majorité absolue la direction centrale de cette énième coalition. Un bureau de 9 membres : sa direction est assurée par le PRDR, les autres membres du bureau ont été attribués au RPM-Temam, à l’UCD, El Bedil, Libéraux Démocrates Mauritaniens, au CPM, à l’UNDD de Tidiane KOITA et au RD[18]. Cette coalition « réitère son adhésion à la substance des réformes dont les grandes lignes ont été formulées dans le programme du Président de la République »[19]. Mais elle dénonce dans une déclaration « l’atomisation du paysage politique, le succès refroidi d’une majorité de plus en plus complexe, une opposition qui, ne tenant plus son rôle, brouille les lignes de démarcation à l’exercice démocratique d’une part, et d’autre part la dégradation ininterrompue des conditions de vie des populations et le sentiment omniprésent de l’insécurité »[20]. Et la nouvelle coalition estime que le Président de la République se doit d’apporter les correctifs que dicte la situation actuelle du pays.

Cette coalition constitue, sans conteste, une recomposition de la classe politique avec l’adoption de leurs textes réglementaires ; mais en même temps, une forme de reconfiguration interne s’opère à l’intérieur de la majorité. En effet, ce pôle du Mithaq El Wihda inquiète APP, membre de la majorité dont la légitimité est de plus en plus contestée par les premiers soutiens (Mithaq) et ceux de la 25ème heure (El Wihda).

Mais elle inquiète également l’opposition à Sidioca, notamment les participationnistes. Mithaq el Wihda s’en prend à l’opposition « qui, ne tenant plus son rôle, brouille les lignes de démarcation à l’exercice démocratique ».

A peine dix jours après sa création, cette nouvelle coalition, réclame, le 9 mars 2008, la démission du gouvernement Zein Ould Zeidane formé en avril 2007[21]. Et à l’intérieur de cette nouvelle majorité recomposée et reconfigurée, le PNDD-ADIL de Yahya Ould Waghef, Ministre Secrétaire Général de la Présidence de la république, est une cible privilégiée du Mithaq El Wihda. Selon, le Président de la Coalition, Ghrini, « la marginalisation des partis politiques a commencé depuis la période de transition, mais elle s’est enracinée durement après l’élection présidentielle». Ce qui a produit, poursuit-il, un gouvernement qu’on ne peut qualifier ni d’union nationale, ni de majorité politique, ni de technocrates. Un gouvernement, dit-il, dans lequel une seule formation politique est représentée, et cette formation politique (l’APP) est, bizarrement, de l’opposition »[22].

Enfin, « une guerre intestinale s’est déclenchée au sein des formations de la majorité depuis que des rumeurs ont circulé faisant état d’un prochain remaniement ministériel. Il faut noter ici que les partis de Mithaq El Wihda ne jouissent pas d’une grande présentation dans le gouvernement. Et si le PRDR a soutenu le candidat des Indépendants dans le deuxième tour, les autres partis ont choisi de soutenir le camp adverse lors de ce deuxième tour. Ils ont dû changer de couleurs et soutenir le candidat Ould Cheikh Abdellahi, devenu, déjà, Président de la République »[23].

Nouvelle recomposition : naissance d’une autre Coordination de la Majorité :

A peine, un mois et demi après la création du Mithaq El Wihda, voilà que d’autres partis de la majorité ou leurs soutiens, décident, le 19 avril 2008, de créer la "Coordination des Partis de la Majorité présidentielle", regroupant le Parti du pacte national pour la démocratie et le développement (PNDD-ADIL), la coalition Mithaq El Wihda de 25 partis politiques, APP, UDP, Fadila, Sawab et PLEJ. L’objectif de cette CMP est clairement défini par les signataires d’une déclaration : « nous, partis et coalition, signataires de la présente déclaration, décidons aujourd'hui de coordonner nos efforts afin d'apporter un soutien stable et efficace à l'action du président de la République, dans un cadre approprié susceptible de créer les meilleures conditions pour la réussite des réformes promises »[24].

En réalité, cette nouvelle CMP n’est pas très favorable au gouvernement d’Ould Zeidane. Et la Coalition Mithaq El Wihda avait commencé à s’en prendre également au PNDD-ADIL qu’elle trouvait dangereuse pour elle. Cette alliance/recomposition circonstancielle permet à Waghef de faire d’une pierre deux coups : faire taire le mécontentement de cet allié encombrant et ingérable, en même temps, affirmer la suprématie du PNDD-ADIL sur les autres composantes de la majorité recomposée.

Bien qu’adhérente de la CMP, la Coalition Mithaq El Wihda mécontent de son absence au gouvernement continue de faire pression sur le Président pour qu’il change de Premier Ministre, et mette en place un gouvernement politique. Ils auront gain de cause, moins d’un mois après la naissance de cette grande nouvelle coalition présidentielle.

Yahya Ould Waghef, Premier ministre à la place d’Ould Zeidane

Par décret en date du 6 mai 2008, Yahya Ould Waghef  est nommé Premier ministre. Aussitôt, d’intenses tractations eurent lieu pour former le gouvernement que le Président voudrait le plus ouvert possible.

Tractations de Waghef pour former un gouvernement élargi à l’opposition

Dès le lendemain de sa nomination, d’intenses tractations politiques sont menées pour former le gouvernement. En effet, « le nouveau premier ministre mauritanien, Yahya Ould Ahmed El Waghef, multiplie les contacts et semble ratisser large pour constituer un gouvernement le plus consensuel possible »[25]. Le Premier ministre a reçu « des représentants de la coordination du Mithaq Al Wihda (Charte de l’Union) constituée de partis de la Majorité présidentielle »[26] qui réclamaient leur entrée au gouvernement. Le temps tant attendu est enfin arrivé pour ces vieux leaders de l’ère Taya.

Il élargira par ailleurs ses consultations à l’opposition : « Il a également reçu les présidents des 5 formations de l’opposition, notamment le Rassemblement des forces démocratiques (RFD) d’Ahmed Ould Daddah, l’Union des forces du progrès (UFP), le parti HATEM, l’Alliance pour la justice et la démocratie (AJD) d’Ibrahima Sarr et le parti TAWASSOUL (mouvance islamiste) »[27]. Par la suite, « les dirigeants de l’opposition ont été reçus collectivement mais les chefs de l’UFP et de TAWASSOUL ont bénéficié par la suite d’audiences individuelles avec le premier ministre »[28].

AJD/MR refuse d’entrer dans un gouvernement sans en discuter les conditions

Le Premier ministre a reçu Ibrahima Moctar SARR, Président de l’AJD/MR pour proposer à son parti d’entrer au gouvernement.

Bien qu’une délibération du Bureau politique et du Conseil national de l’AJD/MR fusse favorable à cette participation gouvernementale, le Premier ministre, qui a pris le temps de discuter et de convenir des conditions de participation de l’UFP et de Tawassoul, n’a pas eu les mêmes égards pour Ibrahima SARR. Alors que celui-ci lui annonçait l’accord de principe de son parti, le premier ministre a opposé un refus méprisant à l’idée de SARR de discuter les conditions de la participation de son parti à ce gouvernement dit d’ouverture, en ces termes : « M. SARR, il n’y a rien à négocier, je vous invite simplement à venir accompagner la mise en œuvre du programme du président de la République »[29]. Dans ces conditions, l’AJD/MR a préféré rester dans l’opposition. Ce gouvernement se fera donc sans la participation d’AJD/MR, du RFD, du HATEM et du MDD.  En revanche, Tawassoul et l’UFP seront cooptés.


A suivre

Source:  ajd/mr

[1] Déclaration de naissance du Mouvement pour la Réconciliation Nationale (M.R.N.), Nouakchott, 30 décembre 2006.
[2]  Ibidem.
[3]  Ibidem.
[4] Déclaration de naissance des FLAM/Rénovation, Paris, le 15 février 2006.
[5] Mémorandum des FLAM/Rénovation, Paris, 7 mai 2006.
[6] AMI, 29 juin 2006
[7] Pana, 15 septembre 2006
[8] AMI, 29 juin 2006
[9] Mauritanie-web.com, PANA, 10 avril 2007
[10] Ibid,
[11] Ibid,
[12] Alakhbar, 22 avril 2007
[13] Mohamed yahya Ould Abdel Weddoud, Magharebia, Nouuakchott, 1er mai 2007
[14] Mohamed yahya Ould Abdel Weddoud, Magharebia, Nouuakchott, 1er mai 2007
[15] Mohamed Ould Khattat, Nouakchott Info, 20 juin 2007.
[16] AMI, Nouakchott, 27 juin 2007
[17] Ibidem
[18] AMI, Nouakchott, 2 mars 2008.
[19] Ibidem.
[20] Ibidem.
[21] PANA, Nouakchott, via Mauritanie-web, 9 mars 2008.
[22] Mechri Ould Rabbany, La Tribune n° 390, 15 mars 2008.
[23] Ibidem.
[24] Mohamed Ould Khattat, Nouakchott Info Quotidien, n° 1467, lundi 21 avril 2008, p. 3.
[25] APA, Nouakchott, Mauritanie, le 8 mai 2008.
[26] APA, Ibidem.
[27] Ibidem.
[28] Ibidem.
[29] Entretien SARR-Waghef en vue de la formation d’un gouvernement élargi à l’opposition.

 
Mardi 24 Septembre 2013 - 20:17
Mardi 24 Septembre 2013 - 20:31
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