Toutes les fonctions publiques ont cette mauvaise réputation auprès de leurs contribuables, d’être «paresseuses», «payées à ne rien faire», «désagréables». Ces épithètes s’appliqueraient bien à tous les pays du monde dans une plus ou moins grande mesure. Tous ? Non. Car un pays résiste encore et toujours aux vagues incessantes de la modernité, de l’ambition et de l’éveil, où l’administration fonctionne à un rythme proche de l’inertie.
Lent recensement - Centre de recensement du Ksar. Ibrahim arrive pour se faire recenser, aux alentours de 13h. «Une formalité» pense-t-il, surtout qu’aux dires de l’agence nationale de recensement pour la sécurisation des titres, «la majorité de la population a été recensée». Une quinzaine de personnes à peine devant lui quand après avoir été déclaré apte à être recensé par la commission départementale de cinq individus, il se dirige vers le bureau de recensement. «L’affaire d’une heure et demi» pense-t-il. Il en sortira quatre heures plus tard ! Quatre heures pour recenser 15 personnes. C’est que aussi la dame chargée du recensement s’interrompt toutes les dix minutes pour aller rendre visite à sa collègue du bureau des passeports à quelques mètres, quand ce n’est pas cette dernière qui vient l’interrompre dans ses opérations de prise d’empreintes ou de photo. En moyenne, elle peut passer jusqu’à 15 minutes pour le recensement d’un individu, alors qu’au vu de la procédure, 3 sont largement suffisantes avec un peu plus de conscience professionnelle, et de respect de l’autre.
Les citoyens venus se faire recenser ? A eux de prendre leur mal en patience. L’un d’entre eux, poliment, tente de ramener la gente dame à son occupation administrative: cohorte de bons mots s’en suivent, et des regards qui paralyseraient un cobra. «Si tu ne peux pas attendre, dégage !» conclut-elle
Ce genre de scène vous en rencontrerez quotidiennement si vous vous promenez dans les couloirs jaunis et poussiéreux des structures administratives de Nouakchott. Le contribuable doit la boucler devant l’incompétence de fonctionnaires placés là pour des considérations familiales et tribales. Au risque de voir son service retardé ou égaré, si par exemple vous vous présentez à une mairie locale et que vous ne vous pliez littéralement pas (ou ne pliez pas un billet) pour demander un service qu’on vous doit.
Mais les risques les plus graves encourus par les contribuables sont dans les structures d’utilité publiques, liées à la santé ou l’éducation. Comme la faculté de médecine sensée être le socle du renouveau de la médecine mauritanienne.
Silence ! On arabise- «La faculté de médecine ? Il n’en sortira que des assassins» lâche sèchement une ancienne sage-femme.
Des médecins étrangers, notamment maghrébins, ont été importés à grands renforts de devises, et qui ont dispensé des cours en français à … des arabophones… qui ont suivi «trois mois de cours de langue ; période après laquelle je vous assure qu’aucun des élèves n’a capté quoi que ce soit» affirme une des professeures de langues qui dispensaient des cours.
Que sont-ils sensés lire ? Que sont-ils sensés comprendre ? On enfonce la population dans des risques de mort (littéralement) pour caresser dans le sens du poil des fanatiques complexés de l’arabité. C’est cet analphabétisme qui a causé la mort d’enfants dans les hodhs, suite à «l’affaire des vaccins» qui aurait valu son ministère à Bâ El Housseinou récemment : Une dame, infirmière, aurait «mal lu» les étiquettes. «En fait elle savait difficilement lire» rétorque un proche du dossier, au ministère de la Santé.
«Mais c’est tout le ministère de la Santé, comme celui de l’éducation nationale d’ailleurs, qui est sclérosé. Et dans ces conditions, un ministère ne peut en rien assumer quoi que ce soit dans ses actions, car c’est toute la chaîne des ressources humaines qu’il faut changer !» continue l’ancien médecin.
Le professeur Sid’Ahmed Ould Mogueya, Doyen de la Faculté de Médecine au cœur de multiples scandales, et qui mène la baguette, en refusant tout établissement d’enseignement para-médical, veille, lui entre autres fonctionnaires d’un état qui ne se voile plus dans sa politique d’exclusion administrative, à refonder tous les arcs de la fonction publique sur des bases ethnique et tribale.
La génération d’après- Jouxtant la faculté de médecine l’école nationale d’administration, de journalisme et de la magistrature (ENAJM), trace lui aussi les sillons arabes de la prochaine génération de l’administration publique mauritanienne. En lisant la liste des promotions sortantes, on en reçoit confirmation : comme chaque jeudi à la sortie du conseil des ministres, les «ould» occupent toutes les lignes.
«Une politique qui ne pourra pas aller bien loin de toute façon. Ça durera le temps de l’actuel état en place. Au vu de ce qui s’est passé au Soudan, de ce qui s’est passé à côté de nous, au Mali, avec les populations du Nord, les politiques d’exclusion de toute une frange de la population ne peuvent perdurer. Au pire ça débouche sur des scissions géographiques quand l’une des composantes est convaincue que la communauté au pouvoir ne lui donnera jamais sa part de destin» affirme fermement Abdoul Birane Wane, professeur de géographie et accessoirement, coordinateur du mouvement TPMN.
Ministères et secrétaires- Ici on touche aux rotules de l'administration publique mauritanienne : pas la peine d'appeler entre 8h et 10h du matin, vous joindrez rarement un individu apte à vous orienter vers le service demain. En vous y présentant directement, avec beaucoup beaucoup de chance, vous serez accueillis et dirigés vers la source de la collectivité qui vous intéresse.
Si vous êtes moyennement chanceux, la personne ne sera pas là et se présentera une demi-heure plus tard; et si vous n’avez pas du tout de bol, vous trouverez la personne, mais elle daignera à peine entendre votre demande, occupée à récurer molaires et incisives…
Et là, soit vous adoptez la pensée bouddhiste et immergez dans votre mer intérieure, soit le " kani " vous monte aux narines et c’est parti pour des invectives en règles qui ne feront nullement aboutir votre requête. Nos points d’accueil ou secrétariats sont emplis de gens dont on se demande la nature de leurs fonctions effectives, si ce n’est le récurage en règle de leurs molaires, ou la lecture moribonde d’un vieux canard.
Ibrahim Mariam Diallo
Source: noorinfo
Lent recensement - Centre de recensement du Ksar. Ibrahim arrive pour se faire recenser, aux alentours de 13h. «Une formalité» pense-t-il, surtout qu’aux dires de l’agence nationale de recensement pour la sécurisation des titres, «la majorité de la population a été recensée». Une quinzaine de personnes à peine devant lui quand après avoir été déclaré apte à être recensé par la commission départementale de cinq individus, il se dirige vers le bureau de recensement. «L’affaire d’une heure et demi» pense-t-il. Il en sortira quatre heures plus tard ! Quatre heures pour recenser 15 personnes. C’est que aussi la dame chargée du recensement s’interrompt toutes les dix minutes pour aller rendre visite à sa collègue du bureau des passeports à quelques mètres, quand ce n’est pas cette dernière qui vient l’interrompre dans ses opérations de prise d’empreintes ou de photo. En moyenne, elle peut passer jusqu’à 15 minutes pour le recensement d’un individu, alors qu’au vu de la procédure, 3 sont largement suffisantes avec un peu plus de conscience professionnelle, et de respect de l’autre.
Les citoyens venus se faire recenser ? A eux de prendre leur mal en patience. L’un d’entre eux, poliment, tente de ramener la gente dame à son occupation administrative: cohorte de bons mots s’en suivent, et des regards qui paralyseraient un cobra. «Si tu ne peux pas attendre, dégage !» conclut-elle
Ce genre de scène vous en rencontrerez quotidiennement si vous vous promenez dans les couloirs jaunis et poussiéreux des structures administratives de Nouakchott. Le contribuable doit la boucler devant l’incompétence de fonctionnaires placés là pour des considérations familiales et tribales. Au risque de voir son service retardé ou égaré, si par exemple vous vous présentez à une mairie locale et que vous ne vous pliez littéralement pas (ou ne pliez pas un billet) pour demander un service qu’on vous doit.
Mais les risques les plus graves encourus par les contribuables sont dans les structures d’utilité publiques, liées à la santé ou l’éducation. Comme la faculté de médecine sensée être le socle du renouveau de la médecine mauritanienne.
Silence ! On arabise- «La faculté de médecine ? Il n’en sortira que des assassins» lâche sèchement une ancienne sage-femme.
Des médecins étrangers, notamment maghrébins, ont été importés à grands renforts de devises, et qui ont dispensé des cours en français à … des arabophones… qui ont suivi «trois mois de cours de langue ; période après laquelle je vous assure qu’aucun des élèves n’a capté quoi que ce soit» affirme une des professeures de langues qui dispensaient des cours.
Que sont-ils sensés lire ? Que sont-ils sensés comprendre ? On enfonce la population dans des risques de mort (littéralement) pour caresser dans le sens du poil des fanatiques complexés de l’arabité. C’est cet analphabétisme qui a causé la mort d’enfants dans les hodhs, suite à «l’affaire des vaccins» qui aurait valu son ministère à Bâ El Housseinou récemment : Une dame, infirmière, aurait «mal lu» les étiquettes. «En fait elle savait difficilement lire» rétorque un proche du dossier, au ministère de la Santé.
«Mais c’est tout le ministère de la Santé, comme celui de l’éducation nationale d’ailleurs, qui est sclérosé. Et dans ces conditions, un ministère ne peut en rien assumer quoi que ce soit dans ses actions, car c’est toute la chaîne des ressources humaines qu’il faut changer !» continue l’ancien médecin.
Le professeur Sid’Ahmed Ould Mogueya, Doyen de la Faculté de Médecine au cœur de multiples scandales, et qui mène la baguette, en refusant tout établissement d’enseignement para-médical, veille, lui entre autres fonctionnaires d’un état qui ne se voile plus dans sa politique d’exclusion administrative, à refonder tous les arcs de la fonction publique sur des bases ethnique et tribale.
La génération d’après- Jouxtant la faculté de médecine l’école nationale d’administration, de journalisme et de la magistrature (ENAJM), trace lui aussi les sillons arabes de la prochaine génération de l’administration publique mauritanienne. En lisant la liste des promotions sortantes, on en reçoit confirmation : comme chaque jeudi à la sortie du conseil des ministres, les «ould» occupent toutes les lignes.
«Une politique qui ne pourra pas aller bien loin de toute façon. Ça durera le temps de l’actuel état en place. Au vu de ce qui s’est passé au Soudan, de ce qui s’est passé à côté de nous, au Mali, avec les populations du Nord, les politiques d’exclusion de toute une frange de la population ne peuvent perdurer. Au pire ça débouche sur des scissions géographiques quand l’une des composantes est convaincue que la communauté au pouvoir ne lui donnera jamais sa part de destin» affirme fermement Abdoul Birane Wane, professeur de géographie et accessoirement, coordinateur du mouvement TPMN.
Ministères et secrétaires- Ici on touche aux rotules de l'administration publique mauritanienne : pas la peine d'appeler entre 8h et 10h du matin, vous joindrez rarement un individu apte à vous orienter vers le service demain. En vous y présentant directement, avec beaucoup beaucoup de chance, vous serez accueillis et dirigés vers la source de la collectivité qui vous intéresse.
Si vous êtes moyennement chanceux, la personne ne sera pas là et se présentera une demi-heure plus tard; et si vous n’avez pas du tout de bol, vous trouverez la personne, mais elle daignera à peine entendre votre demande, occupée à récurer molaires et incisives…
Et là, soit vous adoptez la pensée bouddhiste et immergez dans votre mer intérieure, soit le " kani " vous monte aux narines et c’est parti pour des invectives en règles qui ne feront nullement aboutir votre requête. Nos points d’accueil ou secrétariats sont emplis de gens dont on se demande la nature de leurs fonctions effectives, si ce n’est le récurage en règle de leurs molaires, ou la lecture moribonde d’un vieux canard.
Ibrahim Mariam Diallo
Source: noorinfo