Le festival Gorée diaspora a pour thème : «Exil et mémoire», pourquoi ce choix ?
"Exil et mémoire" pour deux raisons principales. La première, c’est qu’on s’inscrit dans le cadre du Gorée diaspora festival dont le thème général est : la diaspora. La deuxième raison c’est que tous ces thèmes, l’exil, la mémoire, la diaspora, l’émigration et l’identité sont d’actualité et font l’objet de débat. C’est le cas ici au Sénégal avec la question de l’émigration clandestine, qui est un thème très présent en Afrique, comme en France.
C’est donc un thème universel, c’est ce qu’on a voulu dire à travers ces films. Toutes ces thématiques existent en Afrique mais aussi partout dans le monde, avec la mondialisation. C’est pour cela qu’on a un film turc qui nous parle de la condition des turques en Allemagne (« De l’autre côté » de Fatih Akin), celui d’une exilée iranienne, Marjane Satrapi, qui nous raconte son parcours de jeune exilée iranienne. On a aussi un film brésilien...Et cela se voit à travers les débats que ces thèmes intéressent tout le monde.
Sur quoi vous vous êtes basé pour faire le choix de ces films ?
L’idée de la programmation c’était d’avoir des films qui ont comme point commun de dire les choses sur l’exil, l’immigration, l’identité...et ce, quelque soit la manière, c’est-à-dire que ce soit de la comédie ou un film plus "sérieux". L’essentiel c’est que le film s’inscrit dans le cadre que je viens d’énoncer.
Ensuite, l’idée c’était d’avoir des films sénégalais comme on est au Sénégal, africains puisqu’on est en Afrique, et d’élargir aussi à d’autres horizons pour montrer l’universalité de ces thèmes. Le tout accompagné d’un panachage de films récents. On a présenté des films inédits. C’est le cas de "Persepolis", un film sorti en France cet été. Celui de "Retour à Gorée" avec Youssou Ndour qui n’a encore jamais été montré. A cela s’ajoutent des films qui ont marqué bien que n’étant pas récent : "Indigènes" pour la thématique des Tirailleurs sénégalais, ou encore "Little Sénégal", un film important par rapport à Gorée...
Peut-on savoir le coût global dégagé pour ce festival ?
De façon estimative, le budget dégagé pour ce festival se situe entre 70 et 90 mille Euros.
Et de manière générale, quel est le montant alloué cette année au Cinéma sénégalais ?
Il n’est pas possible de donner un montant global, parce qu’il y a plusieurs sources, directes ou indirectes. Notre démarche ne s’inscrit pas dans le schéma de l’aide financière massive. Tout d’abord, nous appuyons la formation. Il s’agit davantage d’une question d’expertise, d’une aide et d’un appui au bon endroit avec de bonnes personnes. Cette aide à la formation est surtout destinée aux jeunes pour qu’ils se perfectionnent, émergent et prennent le relais.
Nous les envoyons dans des écoles de formation en France pour des stages pratiques et professionnels. Nous avons un petit volet de bourse de stage qui est destiné à ça. Par ailleurs, nous proposons des formations sur place.
Et puis, depuis trois ans, nous avons mis en place un cycle de formation destiné à sept voire huit réalisateurs au maximum. Il s’agit de formations pratiques, élaborées sur-mesure et encadrées par des professionnels. Elle consistent souvent à tourner, à faire tourner et à produire des films.
C’est le cas des deux films présentés dans le cadre de rencontre jeunes talents à Gorée : "le revers de l’exil" Fabakary Coly et "entre mère et mer" de Moussa Seydy. Ces deux films sont financés par la coopération française. Ils ont été tournés par quatre jeunes réalisateurs sénégalais encadrés par Samba Felix Ndiaye. On est dans cet esprit-là pour la formation.
Ensuite il y a un volet aide aux festivals. L’Ambassade de France ou le ministère à Paris aide tous les festivals qui existent au Sénégal. Par exemple le festival Image et vie qui tient en juin. Celui du film de quartier en décembre.
Enfin, il y a l’aide à la diffusion et à la production qui concerne des projets de film africains ou sénégalais. Pour le Sénégal, ces quatre dernières années, une vingtaine de films ont été aidés à la production pour un montant global d’environ un million d’euros.
Cela fait beaucoup de projets. Nous sommes à la fin l’année, pouvez-vous dès à présent tirer un bilan des actions menées dans le cadre de la coopération française en matière d’appui cinématographique au Sénégal ?
Nous ne raisonnons pas de la sorte. Mais nous avons des satisfactions telles que ces rencontres de Gorée qui sont une première. Certaines séances ont fait le plein. Et puis, il y avait une belle rencontre avec Sotigui Kouyaté. A cela s’ajoute la présence d’une dizaine d’invités prestigieux, des acteurs, des réalisateurs importants du cinéma contemporain sénégalais. Il y avait une grosse affluence pour ces rendez-vous là. De même que l’ouverture au Palais du Gouverneur où 500 personnes ont fait face à l’écran. C’est rare au Sénégal. C’est pourquoi je considère que l’objectif est atteint. Pour la formation vous avez vu vous-même des films tournés dans le cadre de la formation, je pense que ça tenait la route.
Au sujet de l’appui aux jeunes réalisateurs, pouvez vous nous décliner les critères de sélection concernant la formation ? Qu’en est-il pour la production ?
Concernant la formation c’est simple. Nous sommes dans une logique d’aide aux jeunes générations émergentes ayant une facilité de tourner en numérique. En effet, l’arrivée du numérique a facilité l’accès au cinéma. Il est désormais possible faire un film avec une caméra Dv et un banc de montage numérique qui est un ordinateur et un logiciel. L’outil est accessible contrairement à l’époque où on utilisait uniquement le super 16 et le 35 millimètres. Mais en même temps c’est un danger car on perd en terme d’exigence de formation et de qualité.
Et çà c’est important de le dire. Je crois que les formations sont utiles et c’est dans ce sens qu’elles sont orientées. Les jeunes doivent s’inscrire dans cette démarche de qualité. Parce qu’il ne suffit pas simplement de s’armer de caméra Dv et d’aller prendre des images. Un film se construit, s’écrit, et se monte. Le montage, c’est aussi une écriture, une grammaire du cinéma qu’il faut maîtriser. Un film est une histoire qui se raconte. Il faut que les jeunes soient dans cette optique là, qu’ils aient déjà un pied dans le cinéma. On ne peut pas prendre des jeunes qui ne démarrent de rien. Il faut passer d’abord par une école. Nous sélectionnons des jeunes professionnels, des gens qui se sont déjà tracés une trajectoire. C’est les deux critères essentiels.
Vous pensez que la jeune génération est assez « osée » pour renouveler le répertoire de films sénégalais ?
Je les encourage à prendre des risques, à oser et à dire des choses intéressantes et nouvelles, et non à faire un film pour en faire. L’outil est accessible, avec le numérique il y a plein de sujets de société. Je parle du documentaire parce que la fiction est plus lourde, plus ambitieuse et plus complexe. Mais le documentaire est là pour traduire le réel, ce qui se passe autour de nous. Ils doivent nous dire des choses que nous n’avons pas encore vues et entendues. C’est cela aussi l’intérêt du cinéma : apporter quelque chose de nouveau sur la forme ou le fond. Et non faire un film pour dire ce qui a été déjà dit.
Concernant la fiction peut-on avoir votre point de vue sur la différence de la production entre les jeunes et les « anciennes » générations au Sénégal ?
Je n’ai pas de point de vue personnel. Mais je trouve qu’il y a des tendances qui émergent. Et pas forcément au Sénégal. Par exemple cette année au Fespaco, des films très intéressants ont été présentés. Ces films ont un véritable avenir commercial et sont susceptibles de trouver un public chez eux. C’est le cas de « Il va pleuvoir sur Conakry ».
Aujourd’hui, il n’existe presque plus de salle de cinéma au Sénégal. Qu’est-ce la coopération française a fait pour combler de vide ?
Il y a eu un projet assez lourd qui s’appelle « Africa cinéma » sur toute l’Afrique subsaharienne. Il était impulsé par le ministère des affaires étrangères, par la coopération française. Il consistait à encourager, aider financièrement la distribution des films et la projection en salle. Le projet vient d’être relancé, il a existé pendant trois à quatre ans. Nous avons fait un bilan et essayé de le réajuster. C’était très lourd et il n’y avait pas de dynamique réelle de diffusion et de distribution des films. C’est difficile de porter à bout des bras un système qui finalement n’existe pas. Malheureusement on ne peut pas le faire exister à nous tout seul. Nous avons rectifié un peu les choses sur un dispositif plus léger. "Africa Paradis" par exemple enchaîne une sortie commerciale au Sénégal qui est aidée par la coopération française.
Source: grioo
(M)
"Exil et mémoire" pour deux raisons principales. La première, c’est qu’on s’inscrit dans le cadre du Gorée diaspora festival dont le thème général est : la diaspora. La deuxième raison c’est que tous ces thèmes, l’exil, la mémoire, la diaspora, l’émigration et l’identité sont d’actualité et font l’objet de débat. C’est le cas ici au Sénégal avec la question de l’émigration clandestine, qui est un thème très présent en Afrique, comme en France.
C’est donc un thème universel, c’est ce qu’on a voulu dire à travers ces films. Toutes ces thématiques existent en Afrique mais aussi partout dans le monde, avec la mondialisation. C’est pour cela qu’on a un film turc qui nous parle de la condition des turques en Allemagne (« De l’autre côté » de Fatih Akin), celui d’une exilée iranienne, Marjane Satrapi, qui nous raconte son parcours de jeune exilée iranienne. On a aussi un film brésilien...Et cela se voit à travers les débats que ces thèmes intéressent tout le monde.
Sur quoi vous vous êtes basé pour faire le choix de ces films ?
L’idée de la programmation c’était d’avoir des films qui ont comme point commun de dire les choses sur l’exil, l’immigration, l’identité...et ce, quelque soit la manière, c’est-à-dire que ce soit de la comédie ou un film plus "sérieux". L’essentiel c’est que le film s’inscrit dans le cadre que je viens d’énoncer.
Ensuite, l’idée c’était d’avoir des films sénégalais comme on est au Sénégal, africains puisqu’on est en Afrique, et d’élargir aussi à d’autres horizons pour montrer l’universalité de ces thèmes. Le tout accompagné d’un panachage de films récents. On a présenté des films inédits. C’est le cas de "Persepolis", un film sorti en France cet été. Celui de "Retour à Gorée" avec Youssou Ndour qui n’a encore jamais été montré. A cela s’ajoutent des films qui ont marqué bien que n’étant pas récent : "Indigènes" pour la thématique des Tirailleurs sénégalais, ou encore "Little Sénégal", un film important par rapport à Gorée...
Peut-on savoir le coût global dégagé pour ce festival ?
De façon estimative, le budget dégagé pour ce festival se situe entre 70 et 90 mille Euros.
Et de manière générale, quel est le montant alloué cette année au Cinéma sénégalais ?
Il n’est pas possible de donner un montant global, parce qu’il y a plusieurs sources, directes ou indirectes. Notre démarche ne s’inscrit pas dans le schéma de l’aide financière massive. Tout d’abord, nous appuyons la formation. Il s’agit davantage d’une question d’expertise, d’une aide et d’un appui au bon endroit avec de bonnes personnes. Cette aide à la formation est surtout destinée aux jeunes pour qu’ils se perfectionnent, émergent et prennent le relais.
Nous les envoyons dans des écoles de formation en France pour des stages pratiques et professionnels. Nous avons un petit volet de bourse de stage qui est destiné à ça. Par ailleurs, nous proposons des formations sur place.
Et puis, depuis trois ans, nous avons mis en place un cycle de formation destiné à sept voire huit réalisateurs au maximum. Il s’agit de formations pratiques, élaborées sur-mesure et encadrées par des professionnels. Elle consistent souvent à tourner, à faire tourner et à produire des films.
C’est le cas des deux films présentés dans le cadre de rencontre jeunes talents à Gorée : "le revers de l’exil" Fabakary Coly et "entre mère et mer" de Moussa Seydy. Ces deux films sont financés par la coopération française. Ils ont été tournés par quatre jeunes réalisateurs sénégalais encadrés par Samba Felix Ndiaye. On est dans cet esprit-là pour la formation.
Ensuite il y a un volet aide aux festivals. L’Ambassade de France ou le ministère à Paris aide tous les festivals qui existent au Sénégal. Par exemple le festival Image et vie qui tient en juin. Celui du film de quartier en décembre.
Enfin, il y a l’aide à la diffusion et à la production qui concerne des projets de film africains ou sénégalais. Pour le Sénégal, ces quatre dernières années, une vingtaine de films ont été aidés à la production pour un montant global d’environ un million d’euros.
Cela fait beaucoup de projets. Nous sommes à la fin l’année, pouvez-vous dès à présent tirer un bilan des actions menées dans le cadre de la coopération française en matière d’appui cinématographique au Sénégal ?
Nous ne raisonnons pas de la sorte. Mais nous avons des satisfactions telles que ces rencontres de Gorée qui sont une première. Certaines séances ont fait le plein. Et puis, il y avait une belle rencontre avec Sotigui Kouyaté. A cela s’ajoute la présence d’une dizaine d’invités prestigieux, des acteurs, des réalisateurs importants du cinéma contemporain sénégalais. Il y avait une grosse affluence pour ces rendez-vous là. De même que l’ouverture au Palais du Gouverneur où 500 personnes ont fait face à l’écran. C’est rare au Sénégal. C’est pourquoi je considère que l’objectif est atteint. Pour la formation vous avez vu vous-même des films tournés dans le cadre de la formation, je pense que ça tenait la route.
Au sujet de l’appui aux jeunes réalisateurs, pouvez vous nous décliner les critères de sélection concernant la formation ? Qu’en est-il pour la production ?
Concernant la formation c’est simple. Nous sommes dans une logique d’aide aux jeunes générations émergentes ayant une facilité de tourner en numérique. En effet, l’arrivée du numérique a facilité l’accès au cinéma. Il est désormais possible faire un film avec une caméra Dv et un banc de montage numérique qui est un ordinateur et un logiciel. L’outil est accessible contrairement à l’époque où on utilisait uniquement le super 16 et le 35 millimètres. Mais en même temps c’est un danger car on perd en terme d’exigence de formation et de qualité.
Et çà c’est important de le dire. Je crois que les formations sont utiles et c’est dans ce sens qu’elles sont orientées. Les jeunes doivent s’inscrire dans cette démarche de qualité. Parce qu’il ne suffit pas simplement de s’armer de caméra Dv et d’aller prendre des images. Un film se construit, s’écrit, et se monte. Le montage, c’est aussi une écriture, une grammaire du cinéma qu’il faut maîtriser. Un film est une histoire qui se raconte. Il faut que les jeunes soient dans cette optique là, qu’ils aient déjà un pied dans le cinéma. On ne peut pas prendre des jeunes qui ne démarrent de rien. Il faut passer d’abord par une école. Nous sélectionnons des jeunes professionnels, des gens qui se sont déjà tracés une trajectoire. C’est les deux critères essentiels.
Vous pensez que la jeune génération est assez « osée » pour renouveler le répertoire de films sénégalais ?
Je les encourage à prendre des risques, à oser et à dire des choses intéressantes et nouvelles, et non à faire un film pour en faire. L’outil est accessible, avec le numérique il y a plein de sujets de société. Je parle du documentaire parce que la fiction est plus lourde, plus ambitieuse et plus complexe. Mais le documentaire est là pour traduire le réel, ce qui se passe autour de nous. Ils doivent nous dire des choses que nous n’avons pas encore vues et entendues. C’est cela aussi l’intérêt du cinéma : apporter quelque chose de nouveau sur la forme ou le fond. Et non faire un film pour dire ce qui a été déjà dit.
Concernant la fiction peut-on avoir votre point de vue sur la différence de la production entre les jeunes et les « anciennes » générations au Sénégal ?
Je n’ai pas de point de vue personnel. Mais je trouve qu’il y a des tendances qui émergent. Et pas forcément au Sénégal. Par exemple cette année au Fespaco, des films très intéressants ont été présentés. Ces films ont un véritable avenir commercial et sont susceptibles de trouver un public chez eux. C’est le cas de « Il va pleuvoir sur Conakry ».
Aujourd’hui, il n’existe presque plus de salle de cinéma au Sénégal. Qu’est-ce la coopération française a fait pour combler de vide ?
Il y a eu un projet assez lourd qui s’appelle « Africa cinéma » sur toute l’Afrique subsaharienne. Il était impulsé par le ministère des affaires étrangères, par la coopération française. Il consistait à encourager, aider financièrement la distribution des films et la projection en salle. Le projet vient d’être relancé, il a existé pendant trois à quatre ans. Nous avons fait un bilan et essayé de le réajuster. C’était très lourd et il n’y avait pas de dynamique réelle de diffusion et de distribution des films. C’est difficile de porter à bout des bras un système qui finalement n’existe pas. Malheureusement on ne peut pas le faire exister à nous tout seul. Nous avons rectifié un peu les choses sur un dispositif plus léger. "Africa Paradis" par exemple enchaîne une sortie commerciale au Sénégal qui est aidée par la coopération française.
Source: grioo
(M)