L'annulation du Dakar 2008 est un coup dur pour la Mauritanie, le pays pivot de la compétition. "Nous regrettons cette décision. C'est une triste nouvelle", a déclaré l'ambassadeur de Mauritanie en France, vendredi 4 janvier.
De fait, le coup est rude. D'abord pour l'économie de ce pays désertique, deux fois plus vaste que la France, qui figure parmi les plus pauvres de la planète. Ses richesses se résument à peu de chose : des mines de phosphate, un peu de pétrole (récemment découvert), des ressources halieutiques, des dattes et du bétail...
Difficiles à évaluer avec précision, les retombées du Dakar pour l'économie sont loin d'être nulles. "Qu'il s'agisse de l'achat du carburant ou du paiement des taxes locales, le manque à gagner pour l'économie doit être proche de 2 millions d'euros", estime Sidi Ould Kleib, un homme d'affaires de Nouakchott, la capitale, actif dans le tourisme.
Mais c'est surtout l'image du pays à l'extérieur qui risque d'être durablement ternie par l'annulation de l'épreuve décidée par la société Amaury Sport Organisation (ASO) sous la pression des autorités françaises. La Mauritanie va rejoindre, pour un temps inconnu, la cohorte des pays où, pour reprendre les mots du Quai d'Orsay, "il est fortement déconseillé de se rendre". Les 4 000 hommes - dont une moitié de militaires - qu'avaient promis de déployer les autorités mauritaniennes pour sécuriser la compétition n'auront pas suffi à apaiser les craintes de Paris.
A l'origine de ses craintes, l'assassinat, le 24 décembre 2007, de quatre touristes français par un groupe armé. Dans un premier temps, les autorités mauritaniennes avaient évoqué la thèse d'un crime crapuleux, puis avaient annoncé avoir identifié deux des trois assaillants comme étant proches de la branche maghrébine d'Al-Qaida. Quelques jours plus tard, Nouakchott changeait de version et affirmait ne plus écarter l'hypothèse d'une "criminalité frontalière". Trois jours de plus et, dans une autre région du pays, trois militaires mauritaniens étaient abattus à leur tour par un commando d'inconnus.
Paradoxalement, la dégradation de l'image de marque de la Mauritanie intervient alors que le pays, en mars 2007, s'est offert une alternance par les urnes, inhabituelle dans le monde arabo-musulman.
L'histoire avait commencé avec le renversement, en 2005, par une junte militaire du régime autoritaire du président Ould Taya. Ses tombeurs avaient promis de rendre le pouvoir aux civils dès que possible. Personne n'avait pris au sérieux l'engagement qui, pourtant, allait être tenu. A l'issue d'une campagne électorale et d'un scrutin globalement "libre et honnête", le chef de la junte, le colonel Ely Ould Mohamed Vall, quittait le pouvoir, début 2007, pour le confier au vainqueur de l'élection présidentielle, un civil, Sidi Ould Cheikh Abdallahi. C'est cette avancée que l'annulation du Dakar 2008 risque de faire oublier.
Jean-Pierre Tuquoi
Source: lemonde.fr
(M)
De fait, le coup est rude. D'abord pour l'économie de ce pays désertique, deux fois plus vaste que la France, qui figure parmi les plus pauvres de la planète. Ses richesses se résument à peu de chose : des mines de phosphate, un peu de pétrole (récemment découvert), des ressources halieutiques, des dattes et du bétail...
Difficiles à évaluer avec précision, les retombées du Dakar pour l'économie sont loin d'être nulles. "Qu'il s'agisse de l'achat du carburant ou du paiement des taxes locales, le manque à gagner pour l'économie doit être proche de 2 millions d'euros", estime Sidi Ould Kleib, un homme d'affaires de Nouakchott, la capitale, actif dans le tourisme.
Mais c'est surtout l'image du pays à l'extérieur qui risque d'être durablement ternie par l'annulation de l'épreuve décidée par la société Amaury Sport Organisation (ASO) sous la pression des autorités françaises. La Mauritanie va rejoindre, pour un temps inconnu, la cohorte des pays où, pour reprendre les mots du Quai d'Orsay, "il est fortement déconseillé de se rendre". Les 4 000 hommes - dont une moitié de militaires - qu'avaient promis de déployer les autorités mauritaniennes pour sécuriser la compétition n'auront pas suffi à apaiser les craintes de Paris.
A l'origine de ses craintes, l'assassinat, le 24 décembre 2007, de quatre touristes français par un groupe armé. Dans un premier temps, les autorités mauritaniennes avaient évoqué la thèse d'un crime crapuleux, puis avaient annoncé avoir identifié deux des trois assaillants comme étant proches de la branche maghrébine d'Al-Qaida. Quelques jours plus tard, Nouakchott changeait de version et affirmait ne plus écarter l'hypothèse d'une "criminalité frontalière". Trois jours de plus et, dans une autre région du pays, trois militaires mauritaniens étaient abattus à leur tour par un commando d'inconnus.
Paradoxalement, la dégradation de l'image de marque de la Mauritanie intervient alors que le pays, en mars 2007, s'est offert une alternance par les urnes, inhabituelle dans le monde arabo-musulman.
L'histoire avait commencé avec le renversement, en 2005, par une junte militaire du régime autoritaire du président Ould Taya. Ses tombeurs avaient promis de rendre le pouvoir aux civils dès que possible. Personne n'avait pris au sérieux l'engagement qui, pourtant, allait être tenu. A l'issue d'une campagne électorale et d'un scrutin globalement "libre et honnête", le chef de la junte, le colonel Ely Ould Mohamed Vall, quittait le pouvoir, début 2007, pour le confier au vainqueur de l'élection présidentielle, un civil, Sidi Ould Cheikh Abdallahi. C'est cette avancée que l'annulation du Dakar 2008 risque de faire oublier.
Jean-Pierre Tuquoi
Source: lemonde.fr
(M)