Biram Ould Dah : «Boidiel Ould Hoummeid et Messaoud Ould Boulkheir sont dans le camp qui s’oppose à l’émancipation des haratines»

Le leader de l’organisation IRA semble avoir décidé de compter ses amis. Et manifestement MM Boidiel Ould Hoummeid et Messaoud Ould Boulkheir n’en sont pas. En vérité, le premier n’a jamais vraiment été en odeur de sainteté auprès de M. Biram Ould Dah.

Le principal tort de M. Ould Hoummeid : avoir longtemps frayé avec le dictateur Ould Taya que le leader de IRA vilipende chaque fois que l’occasion lui est donnée. Que Boidiel Ould Hoummeid ait choisi de se rapprocher de M. Mohamed Ould Abdel Aziz -que M. Biram Ould Dah s’est juré de faire partir du pouvoir- n’a pas arrangé les choses.

Ce qui est en revanche – presque – nouveau, c’est l’attitude de M. Biram Ould Dah envers M. Ould Boulkheir, président de l’Assemblée Nationale et leader emblématique de la lutte pour la libération des haratines en Mauritanie. Jusqu’ici, M. Biram Ould Dah a soigneusement évité d’attaquer frontalement son ainé. Sans doute parce qu’en son for intérieur, le leader abolitionniste caressait l’espoir de voir M. Ould Boulkheir l’adouber comme héritier en lui léguant le leadership et le fonds de commerce de la lutte pour l’émancipation des haratines. Mais dans un entretien avec KASSATAYA, M. Ould Dah dit considérer que « Boidiel Ould Hoummeid et Messaoud ould Boulkheir sont dans le camp qui s’oppose à l’émancipation des haratines ». Pourquoi un tel revirement ?

D’abord parce qu’engoncé dans son fauteuil de président de l’Assemblée Nationale et rattrapé par le poids de l’âge, M. Ould Boulkheir n’a plus sa verve d’antan. Le combat pour l’éradication de l’esclavage en a souffert au point d’être désormais porté par de nouvelles figures dont le discours rencontre oreille attentive auprès des couches haratines. Fort de sa popularité notamment chez les jeunes haratines et négro-africains, M. Biram Ould Dah a probablement pensé pouvoir se défaire de la présence tutélaire de M. Ould Boulkheir.

Ensuite, comme M Boidiel Ould Hoummeid, M. Messaoud Ould Boulkheir s’est rapproché du pouvoir et ne rate aucune occasion de tirer sur ses anciens amis de l’opposition. Le président de l’Assemblée Nationale appartient à cette opposition que le pouvoir mauritanien qualifie de « responsable » parce qu’elle avait accepté de dialoguer notamment en participant aux discussions organisées en septembre et octobre 2011 par le pouvoir. Le processus avait alors été boycotté par la Coordination de l’Opposition Démocratique qui, depuis, inscrit son action dans la confrontation radicale que prône aussi M. Biram Ould Dah.

Pour finir, le leader de IRA ne fait plus mystère de ses ambitions politiques. C’est ainsi que dans son entretien avec KASSATAYA, il confie que « Nous [IRA] ne sommes pas seulement une organisation de défense des droits de l’homme. Nous ne sommes pas neutres. Je récuse cette dogmatisation qui voudrait que les militants des droits de l’homme tournent le dos à la politique ». Fort de cette conviction, M. Biram Ould Dah a appelé à la création d’un conseil national de transition (CNT) un peu comme les révolutions arabes en ont produit. Parce que dans son combat pour faire tomber le régime de M. Ould Abdel Aziz, M. Biram Ould Dah s’est forgé une autre certitude : les partis politiques sont disqualifiés parce qu'ils « n’ont pas joué leur rôle ». Suffisant pour en conclure qu’il y a une place vacante à prendre. Y compris en envoyant M. Ould Boulkheir à la retraite en même temps que son allié, le président M. Ould Abdel Aziz ?

Abdoulaye DIAGANA


Source: Kassataya