Maitre Cheikh Sall est l’avocat de Ibrahima Moctar Sarr, auteur de la plainte contre Taghadoumy. Il a réagi au verdict de la cour correctionnelle de Nouakchott.
Le verdict rendu par la cour correctionnelle dans l’affaire Hanevy a été jugé curieux par plusieurs observateurs. Pourquoi à votre avis ?
Parce qu’il y a beaucoup de « non dit » dans cette affaire. Avant d’en arriver au verdict lui-même, il faut remarquer que les choses curieuses ont émaillé ce dossier jusqu’au rendu de la décision. Tenez par exemple, que signifie le report d’une audience uniquement parce que la partie civile n’a pas comparu ?
C’est du tâtonnement procédural : la partie civile est partie jointe au parquet. En matière pénale, c’est le parquet qui met en mouvement l’action publique, donc détermine les chefs d’inculpation et poursuit le délinquant. Du moment où ce parquet est présent, que signifie donc le report pour motif d’absence de la partie civile.
Il y a là une manière indirecte de minimisation du parquet par le juge. Le plus curieux étant l’acharnement du Président de cette cour pour faire déplacer Monsieur Sarr Ibrahima, alors qu’aucun texte ne le lui autorise et puis mon client est bien partie civile pas autre chose.
Pour « sanctionner la partie civile » le juge a tout simplement choisi de l’ignorer tant pour écouter ses arguments que dans le prononcé du verdict et il y’ a là une manière directe de minimisation du rôle de l’avocat.
Quant au verdict, il est plus que curieux, il est plutôt contradictoire et incohérent, si l’on s’en tient aux premières interprétations, notamment celle de l’un des avocat de Hanefy qui s’est félicité du fait que le juge ait ignoré les autres délits pour « vide juridique en matière de publication en ligne ».
C’est encore là du tâtonnement, mais textuel cette fois-ci : comment peut-on soutenir, après lecture de l’article 32 de la loi sur la liberté de la presse, que la publication en ligne n’est pas sanctionnée chez nous. Ce texte dit clairement «...ou par tout moyen de communication audio-visuel… ». Le seul problème avec Internet c’est d’identifier l’auteur de l’infraction et c’est là où nous avons besoin d’une loi permettant d’user des moyens techniques (adresses IP etc..) pour découvrir l’auteur d’une infraction (généralement diffamatoire). Dans ce dossier l’auteur était connu.
Que l’on vienne donc nous convaincre que la publication par internet ne rentre pas dans la rubrique définie par l’article 32 précité ou que Internet n’est pas un moyen de communication parmi les plus performants aujourd’hui ?
Ensuite, le verdict est contradictoire s’il condamne pour atteinte aux bonnes mœurs sur la base de publication sur internet et refuse de condamner pour diffamation sur la base d’absence de textes sanctionnant la publication en ligne. Hanefy devrait, sur la base de cette logique être tout simplement libéré car tout ce qu’il a fait, c’était par voie de publication sur le net. Un tel verdict est enfin dangereux, car il signifiera que désormais les diffamateurs peuvent agir en toute impunité pourvu qu’ils passent par le net.
Hanevy a été condamné à six mois de prison sur la base d’une disposition du code pénal pour atteinte aux bonnes mœurs. Ya-t-il dans ce code une disposition réprimant la diffamation ?
Le code pénal comprend bien des dispositions réprimant la diffamation mais il s’agit là d’une loi générale dont l’application devient secondaire face à la loi sur la liberté de la presse qui est elle spéciale : en droit, le spécial l’emporte sur le général.
Vous vous êtes joint à l’appel du parquet. Qu’attendez-vous de cet appel ?
Nous avons demandé dès le début de cette affaire des choses bien simples et nous continuerons de les demander devant la Cour d’Appel : Taqadoumy doit avancer les preuves de ses allégations, comme ils prétendent en détenir, au cas échéant, la justice doit obliger ces personnes à présenter des excuses et admettre que leur acharnement contre notre client est gratuit. Au mieux nous souhaiterions que les véritables instigateurs de la campagne cynique enclenchée contre notre client en pleine période électorale, aient le courage de se montrer.
La loi portant liberté de la presse comporte-t-elle des dispositions permettant de l’étendre à la presse électronique ?
Lisez donc attentivement l’article 32 de la Loi sur la liberté de la presse, il est édifiant ! Ecoutez, la confusion provient du fait que notre pays n’a pas promulgué une loi spéciale consacrant les droits et obligations liés à Internet, comme en France. Ces droits et obligations sont aujourd’hui multiples, vous n’êtes pas sans ignorer que vous pouvez désormais acheter vendre, souscrire des abonnements, authentifier une signature, le tout par internet.
Vous n’êtes pas non plus sans ignorer que ce sont là des modes de preuves admis dans certains pays. En Mauritanie, nous n’en sommes pas encore arrivés là, mais par contre s’il s’agit de diffamation, pourvu que l’auteur soi...
source : Quotidien de Nouakchott
Le verdict rendu par la cour correctionnelle dans l’affaire Hanevy a été jugé curieux par plusieurs observateurs. Pourquoi à votre avis ?
Parce qu’il y a beaucoup de « non dit » dans cette affaire. Avant d’en arriver au verdict lui-même, il faut remarquer que les choses curieuses ont émaillé ce dossier jusqu’au rendu de la décision. Tenez par exemple, que signifie le report d’une audience uniquement parce que la partie civile n’a pas comparu ?
C’est du tâtonnement procédural : la partie civile est partie jointe au parquet. En matière pénale, c’est le parquet qui met en mouvement l’action publique, donc détermine les chefs d’inculpation et poursuit le délinquant. Du moment où ce parquet est présent, que signifie donc le report pour motif d’absence de la partie civile.
Il y a là une manière indirecte de minimisation du parquet par le juge. Le plus curieux étant l’acharnement du Président de cette cour pour faire déplacer Monsieur Sarr Ibrahima, alors qu’aucun texte ne le lui autorise et puis mon client est bien partie civile pas autre chose.
Pour « sanctionner la partie civile » le juge a tout simplement choisi de l’ignorer tant pour écouter ses arguments que dans le prononcé du verdict et il y’ a là une manière directe de minimisation du rôle de l’avocat.
Quant au verdict, il est plus que curieux, il est plutôt contradictoire et incohérent, si l’on s’en tient aux premières interprétations, notamment celle de l’un des avocat de Hanefy qui s’est félicité du fait que le juge ait ignoré les autres délits pour « vide juridique en matière de publication en ligne ».
C’est encore là du tâtonnement, mais textuel cette fois-ci : comment peut-on soutenir, après lecture de l’article 32 de la loi sur la liberté de la presse, que la publication en ligne n’est pas sanctionnée chez nous. Ce texte dit clairement «...ou par tout moyen de communication audio-visuel… ». Le seul problème avec Internet c’est d’identifier l’auteur de l’infraction et c’est là où nous avons besoin d’une loi permettant d’user des moyens techniques (adresses IP etc..) pour découvrir l’auteur d’une infraction (généralement diffamatoire). Dans ce dossier l’auteur était connu.
Que l’on vienne donc nous convaincre que la publication par internet ne rentre pas dans la rubrique définie par l’article 32 précité ou que Internet n’est pas un moyen de communication parmi les plus performants aujourd’hui ?
Ensuite, le verdict est contradictoire s’il condamne pour atteinte aux bonnes mœurs sur la base de publication sur internet et refuse de condamner pour diffamation sur la base d’absence de textes sanctionnant la publication en ligne. Hanefy devrait, sur la base de cette logique être tout simplement libéré car tout ce qu’il a fait, c’était par voie de publication sur le net. Un tel verdict est enfin dangereux, car il signifiera que désormais les diffamateurs peuvent agir en toute impunité pourvu qu’ils passent par le net.
Hanevy a été condamné à six mois de prison sur la base d’une disposition du code pénal pour atteinte aux bonnes mœurs. Ya-t-il dans ce code une disposition réprimant la diffamation ?
Le code pénal comprend bien des dispositions réprimant la diffamation mais il s’agit là d’une loi générale dont l’application devient secondaire face à la loi sur la liberté de la presse qui est elle spéciale : en droit, le spécial l’emporte sur le général.
Vous vous êtes joint à l’appel du parquet. Qu’attendez-vous de cet appel ?
Nous avons demandé dès le début de cette affaire des choses bien simples et nous continuerons de les demander devant la Cour d’Appel : Taqadoumy doit avancer les preuves de ses allégations, comme ils prétendent en détenir, au cas échéant, la justice doit obliger ces personnes à présenter des excuses et admettre que leur acharnement contre notre client est gratuit. Au mieux nous souhaiterions que les véritables instigateurs de la campagne cynique enclenchée contre notre client en pleine période électorale, aient le courage de se montrer.
La loi portant liberté de la presse comporte-t-elle des dispositions permettant de l’étendre à la presse électronique ?
Lisez donc attentivement l’article 32 de la Loi sur la liberté de la presse, il est édifiant ! Ecoutez, la confusion provient du fait que notre pays n’a pas promulgué une loi spéciale consacrant les droits et obligations liés à Internet, comme en France. Ces droits et obligations sont aujourd’hui multiples, vous n’êtes pas sans ignorer que vous pouvez désormais acheter vendre, souscrire des abonnements, authentifier une signature, le tout par internet.
Vous n’êtes pas non plus sans ignorer que ce sont là des modes de preuves admis dans certains pays. En Mauritanie, nous n’en sommes pas encore arrivés là, mais par contre s’il s’agit de diffamation, pourvu que l’auteur soi...
source : Quotidien de Nouakchott