A Monsieur le Ministre de l’Intérieur et de la Décentralisation
Objet : Enrôlement des populations
Monsieur le Ministre,
Dans un Pays qui a été marqué, dans un passé récent par une politique d’exclusion et de discrimination, dont la manifestation criminelle suprême, fut la déportation de dizaines de milliers de citoyens, dans la violence et l’humiliation, au seul prétexte qu’ils ne sont pas arabo-berbères donc pas Mauritaniens, nous venons, par la présente lettre, attirer votre attention sur les conditions déplorables dans lesquelles se déroulent les opérations d’enrôlement des populations sur le Registre d’Etat Civil dans les Moughataa du District de Nouakchott.
Nous avions, à l’époque, lors du démarrage de cette opération et à travers une pétition et des canaux divers, souligné notre préoccupation quant aux conditions opaques dans lesquelles s’effectue le recensement. Notre inquiétude était grande car la composition des membres des Centres d’Accueil des Citoyens (CAC) ne reflétait pas la Mauritanie plurielle. En effet, sur les 54 membres devant diriger les opérations dans les différentes moughattas du pays, on note avec regret, seulement 4 citoyens négro-mauritaniens. il nous parait important de rappeler à l’attention des pouvoirs publics que pour entamer avec des chances de succès notre nécessaire réconciliation, pour l’émergence d’une Nation mauritanienne riche de nos diversités, tous les espaces de vie et de travail doivent être partagés. A cela s’ajoute l’absence de textes clairs et précis expliquant et réglementant le processus de cet enrôlement.
Malheureusement, le démarrage laborieux de cette opération à Nouakchott confirme nos craintes. De toutes parts, des plaintes des populations qui expriment leurs ressentiments et inquiétudes sont signalées quant à :
- l’attitude peu responsable des personnes chargées de cet enrôlement, qui agissent selon leur désir et à la tête de la personne qui se présente pour le recensement. Ils agissent comme de véritables comités de contrôle de la mauritanité qui rappelle les procédés de contrôle de l’ivoirité.
- le caractère provocateur des questions posées est notoire. Il s’agit de questions du genre : Etes-vous Peul ou Haal pulaar ? citez les quartiers de telle ville ? citez les noms des maires, sénateurs de telle localité ? ce qui, de notre avis, ne répond à aucune procédure légale, d’autant plus qu’il n’est pas de la mission de cette commission d’enquêter, encore moins de statuer sur la mauritanité (nationalité) de quelqu’un, qui reste du ressort de la justice.
- Le refus de recenser les personnes (surtout) les femmes mariées à des Mauritaniens depuis plus de vingt ans et qui ont acquis la nationalité selon les textes qui étaient en vigueur. Aujourd’hui, on veut leur appliquer le nouveau code de la nationalité alors que le principe de la rétroactivité dans ce cas n’est pas prévu par la loi.
- le fait de lier l’enrôlement des personnes adultes (plus de 45 ans) à l’enrôlement de leurs parents (père) ou la délivrance, le cas échéant, d’un certificat de décès est inadmissible parce que violant le droit et la liberté du citoyen de choisir librement sa nationalité.
Ce comportement inadmissible incite certains citoyens à déclarer le décès de leurs parents vivants pour pouvoir se recenser eux mêmes étant donné que leurs parents sont d’un âge très avancé ou vivent dans des zones enclavées.
Cette situation est d’autant plus grave qu’elle vise plus particulièrement, la composante négro-mauritanienne uniquement.
Par ailleurs, l’absence d’informations sur la procédure ouvre la voie au déchainement des passions, à la corruption et au passe-droit ; sans oublier la paralysie générale dans laquelle se trouvent tous ceux qui n’ont pas de pièces d’état civil ou dont les pièces ont expiré et qui doivent attendre obligatoirement que leurs parents soient recensés, alors que ces derniers se trouvent dans des lieux inaccessibles ;
Pour toutes ces raisons, et compte tenu du caractère discriminatoire de cette opération à l’égard de certaines composantes ethniques (principalement la composante négro- mauritanienne), faisant de cette opération qui devrait être citoyenne, un enjeu de division avec des relents sectaires, nous demandons :
- la vulgarisation des textes qui régissent l’enrôlement pour permettre à tous les citoyens de connaître leurs droits,
- la suspension pure et simple de cette opération en attendant la clarification du processus,
- l’ouverture d’un dialogue franc entre les principaux acteurs : société civile, partis politiques et administration pour redéfinir les conditions de l’enrôlement,
- le respect de la diversité dans le choix des responsables de cette opération.
Comptant sur votre compréhension, nous vous prions de recevoir, Monsieur le Ministre, nos meilleures salutations.
Les signataires :
Forum des Organisations Nationales des Droits Humains (FONADH)
1. Association des Femmes Chefs de familles (AFCF),
2. Association Mauritanienne des Droits cde l’Homme (AMDH),
3. Association Mauritanienne pour la Promotion de la Langue et de la Culture SOONINKE (AMPLCS),
4. Association pour la Renaissance du Pulaar en RIM (ARPRIM),
5. Association pour le Renforcement de la Démocratie et de l’Education Citoyenne (ARDEC),
6. Comité de Solidarité avec les Victimes des Violations des Droits Humains en Mauritanie(CSVVDHM),
7. Groupes d’Etudes et de Recherches sur le Démocratie et le Développement Economique et Social (GERRDES),
8. Ligue Africaine des Droits de l’Homme (Section Mauritanie),
9. Ligue Mauritanienne des Droits de l’homme (LMDH),
10. Regroupement des Victimes des Evénements de 1989- 1991 (REVE),
11. Collectif des Veuves,
12. Collectif des Rescapés Militaires
13. SOS – Esclaves.
Réseau d’Organisations de la société Civile pour la Promotion de la Citoyenneté (RPC)
Publiez Ce Que Vous Payez (PCQVP)
Source: M. Sarr
Objet : Enrôlement des populations
Monsieur le Ministre,
Dans un Pays qui a été marqué, dans un passé récent par une politique d’exclusion et de discrimination, dont la manifestation criminelle suprême, fut la déportation de dizaines de milliers de citoyens, dans la violence et l’humiliation, au seul prétexte qu’ils ne sont pas arabo-berbères donc pas Mauritaniens, nous venons, par la présente lettre, attirer votre attention sur les conditions déplorables dans lesquelles se déroulent les opérations d’enrôlement des populations sur le Registre d’Etat Civil dans les Moughataa du District de Nouakchott.
Nous avions, à l’époque, lors du démarrage de cette opération et à travers une pétition et des canaux divers, souligné notre préoccupation quant aux conditions opaques dans lesquelles s’effectue le recensement. Notre inquiétude était grande car la composition des membres des Centres d’Accueil des Citoyens (CAC) ne reflétait pas la Mauritanie plurielle. En effet, sur les 54 membres devant diriger les opérations dans les différentes moughattas du pays, on note avec regret, seulement 4 citoyens négro-mauritaniens. il nous parait important de rappeler à l’attention des pouvoirs publics que pour entamer avec des chances de succès notre nécessaire réconciliation, pour l’émergence d’une Nation mauritanienne riche de nos diversités, tous les espaces de vie et de travail doivent être partagés. A cela s’ajoute l’absence de textes clairs et précis expliquant et réglementant le processus de cet enrôlement.
Malheureusement, le démarrage laborieux de cette opération à Nouakchott confirme nos craintes. De toutes parts, des plaintes des populations qui expriment leurs ressentiments et inquiétudes sont signalées quant à :
- l’attitude peu responsable des personnes chargées de cet enrôlement, qui agissent selon leur désir et à la tête de la personne qui se présente pour le recensement. Ils agissent comme de véritables comités de contrôle de la mauritanité qui rappelle les procédés de contrôle de l’ivoirité.
- le caractère provocateur des questions posées est notoire. Il s’agit de questions du genre : Etes-vous Peul ou Haal pulaar ? citez les quartiers de telle ville ? citez les noms des maires, sénateurs de telle localité ? ce qui, de notre avis, ne répond à aucune procédure légale, d’autant plus qu’il n’est pas de la mission de cette commission d’enquêter, encore moins de statuer sur la mauritanité (nationalité) de quelqu’un, qui reste du ressort de la justice.
- Le refus de recenser les personnes (surtout) les femmes mariées à des Mauritaniens depuis plus de vingt ans et qui ont acquis la nationalité selon les textes qui étaient en vigueur. Aujourd’hui, on veut leur appliquer le nouveau code de la nationalité alors que le principe de la rétroactivité dans ce cas n’est pas prévu par la loi.
- le fait de lier l’enrôlement des personnes adultes (plus de 45 ans) à l’enrôlement de leurs parents (père) ou la délivrance, le cas échéant, d’un certificat de décès est inadmissible parce que violant le droit et la liberté du citoyen de choisir librement sa nationalité.
Ce comportement inadmissible incite certains citoyens à déclarer le décès de leurs parents vivants pour pouvoir se recenser eux mêmes étant donné que leurs parents sont d’un âge très avancé ou vivent dans des zones enclavées.
Cette situation est d’autant plus grave qu’elle vise plus particulièrement, la composante négro-mauritanienne uniquement.
Par ailleurs, l’absence d’informations sur la procédure ouvre la voie au déchainement des passions, à la corruption et au passe-droit ; sans oublier la paralysie générale dans laquelle se trouvent tous ceux qui n’ont pas de pièces d’état civil ou dont les pièces ont expiré et qui doivent attendre obligatoirement que leurs parents soient recensés, alors que ces derniers se trouvent dans des lieux inaccessibles ;
Pour toutes ces raisons, et compte tenu du caractère discriminatoire de cette opération à l’égard de certaines composantes ethniques (principalement la composante négro- mauritanienne), faisant de cette opération qui devrait être citoyenne, un enjeu de division avec des relents sectaires, nous demandons :
- la vulgarisation des textes qui régissent l’enrôlement pour permettre à tous les citoyens de connaître leurs droits,
- la suspension pure et simple de cette opération en attendant la clarification du processus,
- l’ouverture d’un dialogue franc entre les principaux acteurs : société civile, partis politiques et administration pour redéfinir les conditions de l’enrôlement,
- le respect de la diversité dans le choix des responsables de cette opération.
Comptant sur votre compréhension, nous vous prions de recevoir, Monsieur le Ministre, nos meilleures salutations.
Les signataires :
Forum des Organisations Nationales des Droits Humains (FONADH)
1. Association des Femmes Chefs de familles (AFCF),
2. Association Mauritanienne des Droits cde l’Homme (AMDH),
3. Association Mauritanienne pour la Promotion de la Langue et de la Culture SOONINKE (AMPLCS),
4. Association pour la Renaissance du Pulaar en RIM (ARPRIM),
5. Association pour le Renforcement de la Démocratie et de l’Education Citoyenne (ARDEC),
6. Comité de Solidarité avec les Victimes des Violations des Droits Humains en Mauritanie(CSVVDHM),
7. Groupes d’Etudes et de Recherches sur le Démocratie et le Développement Economique et Social (GERRDES),
8. Ligue Africaine des Droits de l’Homme (Section Mauritanie),
9. Ligue Mauritanienne des Droits de l’homme (LMDH),
10. Regroupement des Victimes des Evénements de 1989- 1991 (REVE),
11. Collectif des Veuves,
12. Collectif des Rescapés Militaires
13. SOS – Esclaves.
Réseau d’Organisations de la société Civile pour la Promotion de la Citoyenneté (RPC)
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Source: M. Sarr