L’Athénée Libertaire, espace socioculturel situé au cœur de Bordeaux, a accueilli mardi soir Odile Tobner, auteur d’un nouvel ouvrage traitant de l’idéologie négrophophe en Hexagone.
Paru fin 2007 aux éditions Les Arènes (Paris), « Du racisme en France – Quatre siècles de négrophobie», a retenu l’attention de la cinquantaine de personnes mobilisées pour la circonstance.
«C’est un livre qui n’a pas été médiatisé. Pour le faire connaître, il faut s’appuyer sur des groupes militants pour proposer des présentations publiques », explique Odile Tobner, affirmant que dans la plupart de grands journaux français, cette publication est l’objet d’une « censure par le silence ».
«Ca ne leur plaît pas », soutient l’écrivaine française, également connue depuis 2005 comme présidente de «Survie», une association œuvrant pour les droits de l’homme et surtout pour l’assainissement des relations entre la France et l’Afrique.
Son ouvrage est en effet une critique sans concession d’un phénomène séculaire qui tend à se banaliser et à se développer avec la caution de certains intellectuels et hommes d’État, «alors qu’ailleurs, il a été plus franchement identifié et combattu».
La couverture annonce le ton avec les photographies de neuf personnalités que l’auteur place au cœur de la construction et de la promotion des préjugés nourris depuis quatre siècles contre les noirs, qu’ils soient Africains ou Antillais.
Odile Tobner évoque par exemple Montesquieu, surprenant quelques admirateurs qui estiment aujourd’hui que la pensée de ce spécialiste du droit est mal connue ou mal étudiée dans la plupart des institutions universitaires ou scolaires où son œuvre est au programme.
Sa théorie des climats, développée dans « L’Esprit des lois » a particulièrement intrigué l’auditoire. En soutenant que « les peuples des pays chauds sont timides, comme les vieillards le sont ; [et que] ceux des pays froids sont courageux, comme le sont les jeunes gens », Montesquieu s’illustre, d’après Tobner, comme le «père du racisme scientiste».
Odile Tobner dévoile aussi le racisme de Charles De Gaulle, s’étonnant que le nom de cette figure historique de la France ait été attribué à des rues et à des avenues dans des capitales africaines.
L’écrivaine engagée cite également Hélène Carrère d’Encausse (historienne académicienne), Alain Finkielkraut (agrégé de lettres modernes), Georges Frêche (président socialiste de la communauté d’agglomération de Marseille), Pascal Sevran (producteur et animateur d’émissions sur les chaînes de service public), Nicolas Sarkozy (chef d’Etat), etc.
En ce qui concerne le président français, « Du racisme en France – Quatre siècles de négrophobie » revisite son discours du 26 juillet 2007 à l’université Cheik Anta Diop de Dakar.
Odile Tobner souligne que la France a montré, à cette occasion, «une sorte de quintessence du paternalisme raciste qui l’imprègne !».
«Tout comme Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy utilise, pour attiser la xénophobie, l’évocation d’un parasitisme purement fantasmatique, puisque c’est cette population qui, sur des critères racistes, est notoirement discriminée à l’emploi, écartée de la promotion sociale et réduite aux tâches les plus dures et les plus mal payées », commente-t-elle plus loin.
Dans la plupart des cas, l’auteur donne des références et des détails troublants, refusant l’explication tautologique souvent donnée selon laquelle «si quelqu’un n’est pas raciste, ses propos ne sont pas racistes».
Bon sujet de réflexion pour les étudiants de l’Institut d’études politiques de Bordeaux qu’Odile Tobner, épouse de feu Mongo Béti (écrivain camerounais), a rencontré mercredi.
Après Paris en janvier et Bordeaux cette semaine, l’ouvrage de 308 pages (19,80 euros, environ 13 000 FCFA) sera présenté dans plusieurs autres villes françaises.
L’étape bordelaise, qui a permis à l’auteur de dédicacer plusieurs exemplaires, a été organisée par la section locale de « Survie », dirigée par le politologue togolais Comi Toulabor.
Les débats étaient coordonnés par le Sénégalais Thierno Diaw, membre cette association.
Source: APA
(M)