L'importance de la gestion des ressources en eau n'est pas à démontrer dans un pays désertique comme la Mauritanie. Mais l'actualité a révélé de façon dramatique un autre aspect du problème de l'eau : à la crainte de la sécheresse a succédé l'inondation. Ces deux problèmes ne sont pas contradictoires, et paradoxalement on peut même les rencontrer simultanément en raison de l'irrégularité des précipitations. C'est ainsi qu'on observait fin août à la fois un déficit pluviométrique par rapport à la moyenne saisonnière, se traduisant par une insuffisance des pâturages, et des pluies concentrées et brutales entraînant des inondations.
Durant la nuit du 7 août 2007, des pluies diluviennes ont provoqué de graves inondations dans la ville de Tintane, dans la région d'Hodh El Chargui au sud-est de la Mauritanie. Plusieurs personnes y ont trouvé la mort, plusieurs milliers de personnes ont été déplacées, et les principales infrastructures de la ville ont subi des dommages importants.
Le maire estime à 3500 le nombre de familles sinistrées. Le nombre de personnes encore sur place fin août est relativement faible, car nombreux sont ceux qui ont rejoint des parents ou amis qui les hébergent en attendant la décrue. De nombreuses tentes du désert, des Khaïma, sont plantées le long de la route.
Si beaucoup ont évacué la ville inondée, d'autres ont fait le chemin en sens inverse. Pourquoi ? Les nouveaux venus ont l'espoir de se faire passer pour des sinistrés afin de profiter des aides et obtenir une indemnisation. Les autorités conscientes du problème travaillent à répertorier et à identifier les véritables sinistrés, et à les distinguer de ceux qui cherchent à tirer profit du malheur des autres.
La ville est convenablement ravitaillée et une grande tente du Programme alimentaire mondial distribue de la nourriture : de ce point de vue la situation semble pleinement maîtrisée. En revanche, l'essentiel de la ville demeure inaccessible avec plus d'un mètre d'eau. Cette présence d'eau sale et stagnante, conjuguée aux fortes températures, fait craindre le développement de maladies parasitaires et une dégradation des conditions sanitaires.
Reconstruction
Les dégâts matériels sont importants et une grande partie des équipements publics ont disparu. Seules 3 écoles sur 8 subsistent. L'heure est déjà à la reconstruction. Un terrain a été dégagé et des engins de chantier sont déjà présents. La reconstruction a lieu non plus au creux de la vallée, mais quelques dizaines de mètres plus haut, par conséquent dans une zone qui ne sera plus exposée au risque d'inondation. Des plans standards ont été retenus. Il faudra s'assurer que la nécessité d'une reconstruction accélérée pour permettre le retour des habitants et le redémarrage des activités ne va pas provoquer une mauvaise qualité de conception et de réalisation des constructions elles-mêmes comme du plan d'urbanisme d'ensemble.
La Banque mondiale est restée en retrait au plus fort de la crise, faisant confiance pour l'aide humanitaire d'urgence au gouvernement, aux ONG et aux autres institutions mieux équipées qu'elles dans ce domaine. C'est maintenant qu'elle va s'impliquer, alors que l'intérêt médiatique retombe mais que les effets de l'inondation demeurent. Elle va participer à la recherche d'une solution de long terme et au financement de la reconstruction de la ville. Elle va aussi, au-delà du cas de Tintane, lancer un diagnostic des régions exposées à un risque d'inondation, afin de tirer les leçons de la crise et d'éviter qu'une telle situation ne se reproduise ailleurs.
Visite sur le terrain
Une mission de supervision du Programme de développement urbain menée par Eustache Ouayoro, Directeur sectoriel eau, assainissement et services urbains pour l'Afrique francophone, s'est déroulée du 25 au 30 août 2007. L'ampleur de inondation de la ville de Tintane ont imposé cette destination comme incontournable dans le programme de la mission de supervision.
La mission a également visité des infrastructures de gestion de l'eau : station de pompage, digue, réseau de distribution. Se pose alors la question de la domestication, du stockage et de la lutte contre le gaspillage d'une ressource surabondante ou qui fait cruellement défaut selon les saisons. Souvent une demande solvable existe, mais l'offre ne peut y répondre. Les pertes techniques dues aux fuites du réseau, multipliées par les pertes commerciales dues à une incapacité à collecter la totalité des sommes dues, peuvent réduire de moitié les recettes de la Société nationale de l'eau, et sa mauvaise gestion affecte ainsi sa capacité à investir.
Décentralisation
En outre, la mission a visité le quartier d'El Mina à Nouakchott, la source d'Idini, les villes de Rosso, Aleg et Kiffa. Le programme était serré de manière à présenter un maximum de réalités de terrain et à aborder une variété de thèmes, comme la décentralisation.
La rencontre avec les maires a été l'occasion de voir à l'œuvre le processus de décentralisation que la Banque mondiale soutient. Les maires ont un rôle essentiel à jouer, ils sont à l'écoute de la population et identifient les besoins. Cette bonne connaissance des enjeux locaux en fait des interlocuteurs de référence. L'efficacité des projets peut être augmentée en les impliquant davantage dans la conception et la réalisation des actions. C'est là que le processus de décentralisation trouve tout son sens. C'est un mouvement très positif à condition de veiller à ce que cela ne signifie pas une diminution de la solidarité nationale et un accroissement des inégalités régionales. La mission a pu constater également une certaine faiblesse dans les capacités de gestion locale, par exemple dans l'usage de l'informatique : appui et formation sont nécessaires.
Article écrit par Nicolas Caudal, Responsable du suivi-évaluation des projets
Source: reliefweb
(M)
Durant la nuit du 7 août 2007, des pluies diluviennes ont provoqué de graves inondations dans la ville de Tintane, dans la région d'Hodh El Chargui au sud-est de la Mauritanie. Plusieurs personnes y ont trouvé la mort, plusieurs milliers de personnes ont été déplacées, et les principales infrastructures de la ville ont subi des dommages importants.
Le maire estime à 3500 le nombre de familles sinistrées. Le nombre de personnes encore sur place fin août est relativement faible, car nombreux sont ceux qui ont rejoint des parents ou amis qui les hébergent en attendant la décrue. De nombreuses tentes du désert, des Khaïma, sont plantées le long de la route.
Si beaucoup ont évacué la ville inondée, d'autres ont fait le chemin en sens inverse. Pourquoi ? Les nouveaux venus ont l'espoir de se faire passer pour des sinistrés afin de profiter des aides et obtenir une indemnisation. Les autorités conscientes du problème travaillent à répertorier et à identifier les véritables sinistrés, et à les distinguer de ceux qui cherchent à tirer profit du malheur des autres.
La ville est convenablement ravitaillée et une grande tente du Programme alimentaire mondial distribue de la nourriture : de ce point de vue la situation semble pleinement maîtrisée. En revanche, l'essentiel de la ville demeure inaccessible avec plus d'un mètre d'eau. Cette présence d'eau sale et stagnante, conjuguée aux fortes températures, fait craindre le développement de maladies parasitaires et une dégradation des conditions sanitaires.
Reconstruction
Les dégâts matériels sont importants et une grande partie des équipements publics ont disparu. Seules 3 écoles sur 8 subsistent. L'heure est déjà à la reconstruction. Un terrain a été dégagé et des engins de chantier sont déjà présents. La reconstruction a lieu non plus au creux de la vallée, mais quelques dizaines de mètres plus haut, par conséquent dans une zone qui ne sera plus exposée au risque d'inondation. Des plans standards ont été retenus. Il faudra s'assurer que la nécessité d'une reconstruction accélérée pour permettre le retour des habitants et le redémarrage des activités ne va pas provoquer une mauvaise qualité de conception et de réalisation des constructions elles-mêmes comme du plan d'urbanisme d'ensemble.
La Banque mondiale est restée en retrait au plus fort de la crise, faisant confiance pour l'aide humanitaire d'urgence au gouvernement, aux ONG et aux autres institutions mieux équipées qu'elles dans ce domaine. C'est maintenant qu'elle va s'impliquer, alors que l'intérêt médiatique retombe mais que les effets de l'inondation demeurent. Elle va participer à la recherche d'une solution de long terme et au financement de la reconstruction de la ville. Elle va aussi, au-delà du cas de Tintane, lancer un diagnostic des régions exposées à un risque d'inondation, afin de tirer les leçons de la crise et d'éviter qu'une telle situation ne se reproduise ailleurs.
Visite sur le terrain
Une mission de supervision du Programme de développement urbain menée par Eustache Ouayoro, Directeur sectoriel eau, assainissement et services urbains pour l'Afrique francophone, s'est déroulée du 25 au 30 août 2007. L'ampleur de inondation de la ville de Tintane ont imposé cette destination comme incontournable dans le programme de la mission de supervision.
La mission a également visité des infrastructures de gestion de l'eau : station de pompage, digue, réseau de distribution. Se pose alors la question de la domestication, du stockage et de la lutte contre le gaspillage d'une ressource surabondante ou qui fait cruellement défaut selon les saisons. Souvent une demande solvable existe, mais l'offre ne peut y répondre. Les pertes techniques dues aux fuites du réseau, multipliées par les pertes commerciales dues à une incapacité à collecter la totalité des sommes dues, peuvent réduire de moitié les recettes de la Société nationale de l'eau, et sa mauvaise gestion affecte ainsi sa capacité à investir.
Décentralisation
En outre, la mission a visité le quartier d'El Mina à Nouakchott, la source d'Idini, les villes de Rosso, Aleg et Kiffa. Le programme était serré de manière à présenter un maximum de réalités de terrain et à aborder une variété de thèmes, comme la décentralisation.
La rencontre avec les maires a été l'occasion de voir à l'œuvre le processus de décentralisation que la Banque mondiale soutient. Les maires ont un rôle essentiel à jouer, ils sont à l'écoute de la population et identifient les besoins. Cette bonne connaissance des enjeux locaux en fait des interlocuteurs de référence. L'efficacité des projets peut être augmentée en les impliquant davantage dans la conception et la réalisation des actions. C'est là que le processus de décentralisation trouve tout son sens. C'est un mouvement très positif à condition de veiller à ce que cela ne signifie pas une diminution de la solidarité nationale et un accroissement des inégalités régionales. La mission a pu constater également une certaine faiblesse dans les capacités de gestion locale, par exemple dans l'usage de l'informatique : appui et formation sont nécessaires.
Article écrit par Nicolas Caudal, Responsable du suivi-évaluation des projets
Source: reliefweb
(M)