Aminata, a neuf ans. Elle est la quinzième fille d’une famille polygame de quinze enfants. D’un village reculé de la vallée du fleuve Sénégal, elle a été envoyée par sa mère à une de ses lointaines tantes résidant à Nouakchott. Comme toutes les filles placées, elle se réveille à six heures.
Pendant que les enfants de sa famille «adoptive » se préparent à aller à l’école, Aminata leur prépare à manger. Pendant qu’ils suivent les cours en classe, elle balaie, nettoie les carreaux, fait le linge et d’interminables aller retour entre la maison et la boutique. Quand les enfants de sa tante s’amusent, Aminata travaille. Quand ils regardent la télé, elle cuisine. La tante, son mari, ses enfants, les visiteurs…elle est au service de tous.
Tant qu’il y a une course ou un travail à faire, elle ne ferme pas l’œil. Aminata se réveille avant toute la famille et se couche la dernière. » Le salaire de Aminata : quelques forfaits versés à sa mère par sa tante.
La traite des personnes, selon le protocole de Palerme du 25 décembre 2005 est un «processus par lequel un enfant est recruté, déplacé de sa zone d'origine (à l'intérieur ou à l'extérieur d'un pays) vers une autre destination dans des conditions qui le transforment en valeur marchande ou à des fins d'exploitation ».
Victime de la traite
Aminata a été transférée d’un lieu (son village) vers un autre Nouakchott). (Le moyen utilisé : l’exploitation de sa condition d’enfant pauvre et vulnérable. La convention entre les parents de la fille placée et sa famille d’accueil est tacite. « Je vous donne ma fille et vous me versez une petite somme quand vous voulez. » Parfois, il n’y a aucune contrepartie. De pauvres familles livrent leurs fillettes qu’elles ne peuvent plus nourrir en espérant qu’elles vivront heureuses avec leurs patrons. Une sorte d’effroyable troc : l’esclavage à la place de la pauvreté matérielle.
Les parents des filles placées sont généralement «castés » ou descendants d’esclaves issus de milieux ruraux pauvres et vulnérables. En contrepartie de sommes modestes, Ils confient leurs filles aux familles supposées nanties et «nobles » des grands centres urbains.
Le sort fait aux filles placée est une infraction à la nouvelle loi portant incrimination et répression des pratiques esclavagistes. La fille placée, souvent mineure, est privée d’école. Elle travaille du lever au coucher du soleil. L’esclavage, ce n’est pas seulement dans le adwabas, les palmeraies ou derrière les troupeaux de chameaux. Parfois, le drame a lieu dans l’appartement des voisins.
Un drame « normal »
Le recours aux filles placées (violation de tous les droits de l’enfant) est tellement répandu en Mauritanie, tellement banalisé qu’une application effective de la loi enverrait de nombreuses « respectables » familles en cours d’assises. Le caractère privé du phénomène des filles placées est un obstacle à tout contrôle. A première vue, une fille placée est comme un enfant de la famille. Le drame qu’elle endure fait partie de la normalité ambiante.
Les filles domestiques, âgées généralement de 10 à 15 ans, sont privées de loisir, d’école et de l’affection de leurs parents. Cette misère affective, les pousse souvent, vers 14 ou 15 ans, dans les bras du jeune mécanicien ou menuisier du coin. La suite, c’est une grossesse précoce non désirée et leur renvoi au village d’origine où elles vont accoucher d’un mort né et d’une fistule obstétricale.
Au cours des plénière consacrées au projet de loi portant incrimination et répression des pratiques esclavagistes, les honorables députés ont demandé plus que le vote d’une loi. Ils ont plaidé pour des mesures économiques d’accompagnement et une sensibilisation de grande envergure visant le changement des mentalités. Avant de faire le voyage des adwabas, de la brousse lointaine pour la sensibilisation, les représentants du peuple, de la société civile et de l’Etat doivent jeter un coup d’œil chez leurs voisins. Histoire de voir s’il n’y a pas de petites esclaves qui y souffrent en silence.
Khalilou Diagana
khalioubi@yahoo.fr
Photo Nouakchott Info
Pendant que les enfants de sa famille «adoptive » se préparent à aller à l’école, Aminata leur prépare à manger. Pendant qu’ils suivent les cours en classe, elle balaie, nettoie les carreaux, fait le linge et d’interminables aller retour entre la maison et la boutique. Quand les enfants de sa tante s’amusent, Aminata travaille. Quand ils regardent la télé, elle cuisine. La tante, son mari, ses enfants, les visiteurs…elle est au service de tous.
Tant qu’il y a une course ou un travail à faire, elle ne ferme pas l’œil. Aminata se réveille avant toute la famille et se couche la dernière. » Le salaire de Aminata : quelques forfaits versés à sa mère par sa tante.
La traite des personnes, selon le protocole de Palerme du 25 décembre 2005 est un «processus par lequel un enfant est recruté, déplacé de sa zone d'origine (à l'intérieur ou à l'extérieur d'un pays) vers une autre destination dans des conditions qui le transforment en valeur marchande ou à des fins d'exploitation ».
Victime de la traite
Aminata a été transférée d’un lieu (son village) vers un autre Nouakchott). (Le moyen utilisé : l’exploitation de sa condition d’enfant pauvre et vulnérable. La convention entre les parents de la fille placée et sa famille d’accueil est tacite. « Je vous donne ma fille et vous me versez une petite somme quand vous voulez. » Parfois, il n’y a aucune contrepartie. De pauvres familles livrent leurs fillettes qu’elles ne peuvent plus nourrir en espérant qu’elles vivront heureuses avec leurs patrons. Une sorte d’effroyable troc : l’esclavage à la place de la pauvreté matérielle.
Les parents des filles placées sont généralement «castés » ou descendants d’esclaves issus de milieux ruraux pauvres et vulnérables. En contrepartie de sommes modestes, Ils confient leurs filles aux familles supposées nanties et «nobles » des grands centres urbains.
Le sort fait aux filles placée est une infraction à la nouvelle loi portant incrimination et répression des pratiques esclavagistes. La fille placée, souvent mineure, est privée d’école. Elle travaille du lever au coucher du soleil. L’esclavage, ce n’est pas seulement dans le adwabas, les palmeraies ou derrière les troupeaux de chameaux. Parfois, le drame a lieu dans l’appartement des voisins.
Un drame « normal »
Le recours aux filles placées (violation de tous les droits de l’enfant) est tellement répandu en Mauritanie, tellement banalisé qu’une application effective de la loi enverrait de nombreuses « respectables » familles en cours d’assises. Le caractère privé du phénomène des filles placées est un obstacle à tout contrôle. A première vue, une fille placée est comme un enfant de la famille. Le drame qu’elle endure fait partie de la normalité ambiante.
Les filles domestiques, âgées généralement de 10 à 15 ans, sont privées de loisir, d’école et de l’affection de leurs parents. Cette misère affective, les pousse souvent, vers 14 ou 15 ans, dans les bras du jeune mécanicien ou menuisier du coin. La suite, c’est une grossesse précoce non désirée et leur renvoi au village d’origine où elles vont accoucher d’un mort né et d’une fistule obstétricale.
Au cours des plénière consacrées au projet de loi portant incrimination et répression des pratiques esclavagistes, les honorables députés ont demandé plus que le vote d’une loi. Ils ont plaidé pour des mesures économiques d’accompagnement et une sensibilisation de grande envergure visant le changement des mentalités. Avant de faire le voyage des adwabas, de la brousse lointaine pour la sensibilisation, les représentants du peuple, de la société civile et de l’Etat doivent jeter un coup d’œil chez leurs voisins. Histoire de voir s’il n’y a pas de petites esclaves qui y souffrent en silence.
Khalilou Diagana
khalioubi@yahoo.fr
Photo Nouakchott Info