Personnalités et anonymes se sont réunies dimanche au stade de Fort-de-France pour des obsèques nationales en forme d'hommage culturel à Aimé Césaire.
Ni discours politique, ni cérémonie religieuse, mais des textes et des chants : l'hommage chaleureux de la Martinique à son "papa" a été rythmé par de nombreux applaudissements
Beaucoup étaient venus en famille, la plupart vêtus en noir et blanc, certains même en costume traditionnel. Sous un ciel menaçant, des milliers de Martiniquais ont assisté dimanche dans les tribunes du stade de Dillon, à Fort-de-France, aux obsèques nationales de leur "papa", décédé jeudi à l'âge de 94 ans.
Des obsèques en forme d'"hommage culturel", car la famille ne voulait ni cérémonie religieuse ni discours politique de la part du président et des très nombreuses personnalités politiques présentes (plusieurs ministres -dont Christine Albanel, Rama Yade et Michèle Alliot-Marie-, François Bayrou, Ségolène Royal, François Hollande, Laurent Fabius, Lionel Jospin...). C'est donc de l'aéroport, à son arrivée, que Nicolas Sarkozy a rendu hommage à "ce grand homme tellement attaché à sa terre natale", "un sage". "Tous les Français se sentent aujourd'hui Martiniquais dans leur coeur", a-t-il dit (voir la vidéo).
Des textes et des chants
L'hommage de la Nation à un écrivain est exceptionnel. Seuls trois d'entre eux ont eu depuis le XIXe siècle cet honneur : Victor Hugo, Paul Valéry, et Colette. Un grand portrait du poète de la négritude, "prototype de la dignité humaine" (selon le mot d'André Breton), ainsi que des extraits de son oeuvre, ont été exposés dans le stade, qui vibrait régulièrement aux ovations du public.
Une plaque de céramique portant le nom d'"Aimé Césaire (1913-2008)" et les mots "Liberté, identité, responsabilité, fraternité", avait été posée sur le fauteuil destiné au président de la République. Durant l'hommage, des textes d'Aimé Césaire - "Et les chiens se taisaient", "Calendrier lagunaire"...- ont été lus par des comédiens antillais et africains et des chants ont été repris par la foule. L'un des plus proches compagnons de Césaire, Pierre Aliker, âgé de 101 ans, a salué "le meilleur des fils de la Martinique" au début de l'hommage, revenant sur son combat contre la colonisation et le racisme sous toutes ses formes. Tonnerre d'applaudissements.
Applaudissements toujours au moment où le cercueil a quitté le stade pour être acheminé, sous le soleil revenu et sous les chants de milliers de personnes toujours vêtues blanc, vers le cimetière La Joyau. Au point que la procession devait parfois s'arrêter pour se frayer un passage vers le cimetière.
Aimé Césaire avait choisi lui-même le poème qu'il souhaitait que l'on inscrivît sur sa tombe. Extrait de son recueil "Moi, laminaire" (1982), "Calendrier lagunaire" s'achève par ces vers :
"La pression atmosphérique ou plutôt l'historique
Agrandit démesurément mes maux
Même si elle rend somptueux certains de mes mots".
Source: tf1
(M)