C’est quand même fort de café ! Après avoir détourné le regard face à la révolte légitime d’une jeunesse qui pose les vraies questions, on voudrait nous présenter comme une révolution politique ce qui au fond, n’est rien d’autre qu’un banal accord élitiste consacrant la gestion et le partage du pouvoir, si ce n’est la sécurisation des carrières et des parcours politiques.
Il n’est pas question pour moi de contester les quelques avancées qu’on peut noter ici et là sur la gestion des processus électoraux compris dans cet accord. Mais au-delà d’un certain nombre de points très discutables sur le principe, comme l’interdiction des candidatures indépendantes, qui pour moi est une réduction de la liberté politique des citoyens et le renforcement du régime des partis (le grand défaut de la 4ème République en France), la question à se poser dans cet accord, c’est encore une fois celle de la hiérarchie des priorités. A-t-on dans cet accord, mis le focus sur les vrais problèmes qui tenaillent le pays ? Mis a part le timide rappel dans la constitution du caractère multiculturel de la Mauritanie, déjà présent dans la constitution de juillet 1991 de Ould TAYA, où est passé l’officialisation des autres langues nationales ; revendication qui fait écho à la vraie question de la reconnaissance de leurs locuteurs comme mauritaniens à part entière ? Dans cette période troublée, où le jeune Lamine Mangane a payé de sa vie la confusion volontairement entretenue sur la mauritanité des négro-africains, c’eut été un signe de bonne foi politique pour le pouvoir que de le réaffirmer, ou pour l’opposition que de le réclamer. Mais c’est vrai que dans un accord de type élitiste, au courage nul n’est tenu…Quant à la référence au rejet de l’esclavage dans la constitution, je ne vois vraiment pas quelle nouvelle ardeur elle apporte à l’abolitionnisme, là où la superposition des lois se heurte en permanence au mépris des autorités locales et à l’indifférence du pouvoir central.
On a donc là un accord entre l’opposition et le pouvoir qui, de mon de vue, se détourne expressément de la question essentielle de l’heure ; celle qu’on effleure prudemment dans le préambule du texte, sous le doux euphémisme d’« unité nationale ». Et ce, alors même qu’aujourd’hui comme hier, mais aujourd’hui plus qu’hier, ce qui menace dangereusement la stabilité du pays, voire sa survie, c’est précisément que certaines composantes de son peuple se sentent exclues de la pleine citoyenneté et de la promesse égalitariste de l’état républicain. Aujourd’hui plus qu’hier, une certaine jeunesse, débarrassée de la frilosité légendaire d’une certaine intelligentsia négro-africaine rompue aux arcanes de l’allégeance facile, a décidé qu’elle ne ferait pas faux bond à l’Histoire, dans ce rendez-vous de toute façon incontournable. Elle a décidé que la mauritanité, sempiternel alibi à l’exclusion, ne ferait pas plus recette que l’ivoirité, dont on sait malgré son échec, la teneur de la facture humanitaire et politique laissée aux ivoiriens.
Et la classe politique mauritanienne réunie en conclave voudrait nous convaincre que ce débat-là ne méritait pas de figurer au menu de leurs discussions. Que la place des langues nationales dans les média d’Etat n’est pas un sujet important pour eux. Que la reconnaissance et le renforcement d’ONGs de lutte contre le phénomène anachronique de l’esclavage ne fait pas débat, dans un pays où malgré tout on a pensé bon de graver dans le marbre constitutionnel le rejet de l’esclavage. Je pense que le problème de la Mauritanie ce n’est même pas qu’elle marche sur sa tête, c’est qu’elle marche tout simplement sans tête !
Bocar Oumar BA,
Strasbourg (France)
Source: Bocar BA
Il n’est pas question pour moi de contester les quelques avancées qu’on peut noter ici et là sur la gestion des processus électoraux compris dans cet accord. Mais au-delà d’un certain nombre de points très discutables sur le principe, comme l’interdiction des candidatures indépendantes, qui pour moi est une réduction de la liberté politique des citoyens et le renforcement du régime des partis (le grand défaut de la 4ème République en France), la question à se poser dans cet accord, c’est encore une fois celle de la hiérarchie des priorités. A-t-on dans cet accord, mis le focus sur les vrais problèmes qui tenaillent le pays ? Mis a part le timide rappel dans la constitution du caractère multiculturel de la Mauritanie, déjà présent dans la constitution de juillet 1991 de Ould TAYA, où est passé l’officialisation des autres langues nationales ; revendication qui fait écho à la vraie question de la reconnaissance de leurs locuteurs comme mauritaniens à part entière ? Dans cette période troublée, où le jeune Lamine Mangane a payé de sa vie la confusion volontairement entretenue sur la mauritanité des négro-africains, c’eut été un signe de bonne foi politique pour le pouvoir que de le réaffirmer, ou pour l’opposition que de le réclamer. Mais c’est vrai que dans un accord de type élitiste, au courage nul n’est tenu…Quant à la référence au rejet de l’esclavage dans la constitution, je ne vois vraiment pas quelle nouvelle ardeur elle apporte à l’abolitionnisme, là où la superposition des lois se heurte en permanence au mépris des autorités locales et à l’indifférence du pouvoir central.
On a donc là un accord entre l’opposition et le pouvoir qui, de mon de vue, se détourne expressément de la question essentielle de l’heure ; celle qu’on effleure prudemment dans le préambule du texte, sous le doux euphémisme d’« unité nationale ». Et ce, alors même qu’aujourd’hui comme hier, mais aujourd’hui plus qu’hier, ce qui menace dangereusement la stabilité du pays, voire sa survie, c’est précisément que certaines composantes de son peuple se sentent exclues de la pleine citoyenneté et de la promesse égalitariste de l’état républicain. Aujourd’hui plus qu’hier, une certaine jeunesse, débarrassée de la frilosité légendaire d’une certaine intelligentsia négro-africaine rompue aux arcanes de l’allégeance facile, a décidé qu’elle ne ferait pas faux bond à l’Histoire, dans ce rendez-vous de toute façon incontournable. Elle a décidé que la mauritanité, sempiternel alibi à l’exclusion, ne ferait pas plus recette que l’ivoirité, dont on sait malgré son échec, la teneur de la facture humanitaire et politique laissée aux ivoiriens.
Et la classe politique mauritanienne réunie en conclave voudrait nous convaincre que ce débat-là ne méritait pas de figurer au menu de leurs discussions. Que la place des langues nationales dans les média d’Etat n’est pas un sujet important pour eux. Que la reconnaissance et le renforcement d’ONGs de lutte contre le phénomène anachronique de l’esclavage ne fait pas débat, dans un pays où malgré tout on a pensé bon de graver dans le marbre constitutionnel le rejet de l’esclavage. Je pense que le problème de la Mauritanie ce n’est même pas qu’elle marche sur sa tête, c’est qu’elle marche tout simplement sans tête !
Bocar Oumar BA,
Strasbourg (France)
Source: Bocar BA