Le département de la Défense américain veut créer un commandement unifié pour l’Afrique. L’USAfricom (ou Africom) serait destiné à coordonner les activités militaires et sécuritaires des États-Unis sur le continent.
Vu de l’Union africaine, l’histoire de l’Africa Command sur le continent commence par « une erreur stratégique ». Selon une source proche de la Commission, ni l’UA, ni les Etats n’ont été consultés avant le lancement du projet américain, inspiré par « la reconnaissance du rôle clé joué par l’Afrique et les 53 nations qui la composent », précise le Pentagone.
Un projet va à contre-courant de la tendance africaine actuelle
S’il n’y a pas de position officielle de l’UA sur la question, celle-ci n’ayant jamais été soulevée en assemblée ou en Conseil des ministres, en coulisse, les critiques ne sont pas épargnées à l’Africom. La méthode est jugée cavalière, et le propos anachronique. « Il y a une incompréhension de ce qui se passe actuellement en Afrique.
Le projet va à contre-courant de la tendance actuelle qui veut que les Africains règlent eux mêmes les problèmes du continent. La priorité de l’Afrique, c’est la mise en place de la force en attente, du système continental d’alerte rapide, ou encore du Conseil des sages », souligne un proche de la Commission qui ajoute : « Ce n’est pas à l’heure où le président Konaré demande le démantèlement des bases françaises en Afrique que nous allons accueillir une base américaine. »
Le message à l’égard de la France vaudrait donc aussi pour les Etats-Unis. « Nous sommes là avant tout pour écouter et soutenir. » Avec ce discours attentionné, le général américain William Ward, en charge de l’ Africa Command, a tenté, le 8 novembre dernier, de rectifier le tir. C’était la première visite à l’UA de l’officier, dont le Sénat américain a confirmé la nomination en septembre.
Pas de base, mais des bureaux selon le général Ward
A cette occasion, le président de la Commission de l’UA, Alpha Oumar Konaré, a demandé que « l’Afrique soit consultée en entité et non individuellement ». Il a recommandé aussi que l’Africom « œuvre d’une manière pacifique, tout en respectant les droits de l’Homme et la souveraineté des pays africains ».
Pas de base, mais des bureaux selon le général Ward, l’US Africom, en réunissant des expertises de plusieurs départements, travaillerait plus « intelligemment », plus « efficacement » et ajouterait de la « valeur ajoutée à l’actuelle coopération militaire ». Ce qui ne signifie en aucune façon un changement de politique étrangère puisque « le département d’Etat restera aux commandes ».
De même qu’il y a un commandement Europe (ndlr : dont dépendent actuellement la majorité des pays africains) ou encore un commandement Pacifique, il y aura un commandement Afrique, qui « n’implique en aucune façon une militarisation du continent, ou l’acheminement de troupes supplémentaires ».
Récemment, les autorités américaines ont précisé que l’équipe de l’Africom, basée temporairement en Allemagne, cherchera des bureaux, et non une base militaire pour s’installer. « C’est une réorganisation bureaucratique.
Si nous nous étions mieux exprimés au début, il n’y aurait pas eu toutes ces incompréhensions », souligne le porte-parole de l’Africom, Eric Elliot. Ce serait donc les mêmes opérations qu’auparavant, mieux coordonnées...L’argument laisse sceptique.
« Les Américains sont déjà présents à Djibouti avec leur base ; en Ethiopie, avec le contre-terrorisme. Quel est pour l’Afrique l’avantage d’avoir une base américaine sur le continent ? », s’interrogent certains à l’UA. « Cela signifie- t-il un appui direct à l’UA lorsque par exemple nous nous déployons en Somalie ? ». Pas forcément car, selon le général Ward, l’implication des Etats-Unis dans les opérations de maintien de la paix ne dépend pas de l’Africa Command, mais du département d’Etat.
A part le Liberia, aucun hôte ne s’est déclaré
A part le Liberia, aucun hôte ne s’est déclaré L’administration Bush a-t-elle surestimé les liens, parfois étroits, qu’elle entretient avec des pays comme l’Ethiopie ou encore le Nigeria ? Toujours est-il que l’Africom peine à trouver un hôte en Afrique. « George W. Bush n’est pas populaire en Afrique, à cause de la guerre en Irak, entre autre. Le gouvernement qui accepterait aurait sans doute des problèmes avec sa population », estime-t-on à la Commission.
Les autorités américaines précisent que le Maroc, l’Algérie, le Kenya, Djibouti, entre autres, n’ont été approchés que pour des clarifications sur l’Africa Command et non pour des demandes d’hébergement. Exception en Afrique, le Liberia, qui a des liens historiques forts avec les Etats-Unis, a proposé d’héberger l’Africom.
Une éventualité que le département d’Etat dit étudier. Récemment, la secrétaire d’Etat américaine, Condoleezza Rice, a passé une journée à Addis Abeba. Elle a rencontré Alpha Oumar Konaré, et a tenu trois réunions successives sur les conflits en RD Congo, en Somalie, et sur les difficultés de l’accord Nord-Sud au Soudan.
Sur la Somalie, la sous-secrétaire d’Etat, Jendayi Frazer, avait fait avant elle le déplacement. Ce déploiement diplomatique ne suffira sans doute pas à convaincre les pays africains de l’intérêt de la proposition américaine.
« Bush a été mal conseillé, cela rappelle le projet de Grand Moyen-Orient qui a fini dans les cartons », juge-t-on à l’UA avant d’ajouter : « Dans un an, l’administration américaine changera et il y a fort à parier que l’Africom connaîtra le même sort ».
Virginie Gomez pour Linternationalmagazine.com
Vu de l’Union africaine, l’histoire de l’Africa Command sur le continent commence par « une erreur stratégique ». Selon une source proche de la Commission, ni l’UA, ni les Etats n’ont été consultés avant le lancement du projet américain, inspiré par « la reconnaissance du rôle clé joué par l’Afrique et les 53 nations qui la composent », précise le Pentagone.
Un projet va à contre-courant de la tendance africaine actuelle
S’il n’y a pas de position officielle de l’UA sur la question, celle-ci n’ayant jamais été soulevée en assemblée ou en Conseil des ministres, en coulisse, les critiques ne sont pas épargnées à l’Africom. La méthode est jugée cavalière, et le propos anachronique. « Il y a une incompréhension de ce qui se passe actuellement en Afrique.
Le projet va à contre-courant de la tendance actuelle qui veut que les Africains règlent eux mêmes les problèmes du continent. La priorité de l’Afrique, c’est la mise en place de la force en attente, du système continental d’alerte rapide, ou encore du Conseil des sages », souligne un proche de la Commission qui ajoute : « Ce n’est pas à l’heure où le président Konaré demande le démantèlement des bases françaises en Afrique que nous allons accueillir une base américaine. »
Le message à l’égard de la France vaudrait donc aussi pour les Etats-Unis. « Nous sommes là avant tout pour écouter et soutenir. » Avec ce discours attentionné, le général américain William Ward, en charge de l’ Africa Command, a tenté, le 8 novembre dernier, de rectifier le tir. C’était la première visite à l’UA de l’officier, dont le Sénat américain a confirmé la nomination en septembre.
Pas de base, mais des bureaux selon le général Ward
A cette occasion, le président de la Commission de l’UA, Alpha Oumar Konaré, a demandé que « l’Afrique soit consultée en entité et non individuellement ». Il a recommandé aussi que l’Africom « œuvre d’une manière pacifique, tout en respectant les droits de l’Homme et la souveraineté des pays africains ».
Pas de base, mais des bureaux selon le général Ward, l’US Africom, en réunissant des expertises de plusieurs départements, travaillerait plus « intelligemment », plus « efficacement » et ajouterait de la « valeur ajoutée à l’actuelle coopération militaire ». Ce qui ne signifie en aucune façon un changement de politique étrangère puisque « le département d’Etat restera aux commandes ».
De même qu’il y a un commandement Europe (ndlr : dont dépendent actuellement la majorité des pays africains) ou encore un commandement Pacifique, il y aura un commandement Afrique, qui « n’implique en aucune façon une militarisation du continent, ou l’acheminement de troupes supplémentaires ».
Récemment, les autorités américaines ont précisé que l’équipe de l’Africom, basée temporairement en Allemagne, cherchera des bureaux, et non une base militaire pour s’installer. « C’est une réorganisation bureaucratique.
Si nous nous étions mieux exprimés au début, il n’y aurait pas eu toutes ces incompréhensions », souligne le porte-parole de l’Africom, Eric Elliot. Ce serait donc les mêmes opérations qu’auparavant, mieux coordonnées...L’argument laisse sceptique.
« Les Américains sont déjà présents à Djibouti avec leur base ; en Ethiopie, avec le contre-terrorisme. Quel est pour l’Afrique l’avantage d’avoir une base américaine sur le continent ? », s’interrogent certains à l’UA. « Cela signifie- t-il un appui direct à l’UA lorsque par exemple nous nous déployons en Somalie ? ». Pas forcément car, selon le général Ward, l’implication des Etats-Unis dans les opérations de maintien de la paix ne dépend pas de l’Africa Command, mais du département d’Etat.
A part le Liberia, aucun hôte ne s’est déclaré
A part le Liberia, aucun hôte ne s’est déclaré L’administration Bush a-t-elle surestimé les liens, parfois étroits, qu’elle entretient avec des pays comme l’Ethiopie ou encore le Nigeria ? Toujours est-il que l’Africom peine à trouver un hôte en Afrique. « George W. Bush n’est pas populaire en Afrique, à cause de la guerre en Irak, entre autre. Le gouvernement qui accepterait aurait sans doute des problèmes avec sa population », estime-t-on à la Commission.
Les autorités américaines précisent que le Maroc, l’Algérie, le Kenya, Djibouti, entre autres, n’ont été approchés que pour des clarifications sur l’Africa Command et non pour des demandes d’hébergement. Exception en Afrique, le Liberia, qui a des liens historiques forts avec les Etats-Unis, a proposé d’héberger l’Africom.
Une éventualité que le département d’Etat dit étudier. Récemment, la secrétaire d’Etat américaine, Condoleezza Rice, a passé une journée à Addis Abeba. Elle a rencontré Alpha Oumar Konaré, et a tenu trois réunions successives sur les conflits en RD Congo, en Somalie, et sur les difficultés de l’accord Nord-Sud au Soudan.
Sur la Somalie, la sous-secrétaire d’Etat, Jendayi Frazer, avait fait avant elle le déplacement. Ce déploiement diplomatique ne suffira sans doute pas à convaincre les pays africains de l’intérêt de la proposition américaine.
« Bush a été mal conseillé, cela rappelle le projet de Grand Moyen-Orient qui a fini dans les cartons », juge-t-on à l’UA avant d’ajouter : « Dans un an, l’administration américaine changera et il y a fort à parier que l’Africom connaîtra le même sort ».
Virginie Gomez pour Linternationalmagazine.com