Mr O/ Louly lors de la manif du 23 avril à paris pour le retour des désportés
"Le 28 novembre n'est pas une fête nationale"Le 28 novembre, ce double anniversaire contradictoire d'indépendance et de pendaison, survient dans ce moment particulier de la transition en cours comme pour nous rappeler l'essentiel.
La nuit du 28 novembre 1990, dans laquelle 28 militaires Negro-mauritaniens ont été pendus à Inal, ne résume pas seulement toute la gravité de la purge raciste qui s'est opérée au sein de l'institution militaire à cette époque. Elle exprime les véritables proportions du désastre humain que nous lègue le régime déchu. Elle symbolise finalement tout son passif humanitaire.
Les Mauritaniens ne sont donc pas tous en fête ce 28 novembre, beaucoup sont en deuil. C'est qu'il faut finalement reconnaître que le 28 novembre n'est pas, ou n'est plus, une fête nationale.
A y voir d'ailleurs de plus près et en abandonnant l'espace d'un moment le complexe du chauvinisme, on peut dire que l'indépendance politique du 28 novembre 1960 n'avait rien de véritablement grandiose. Elle n'est en aucun cas comparable à l'insupportable mémoire d'innocents horriblement pendus la même date 30 ans plus tard à Inal.
Cet anniversaire est donc survenu en ce moment précis de la transition pour nous rappeler qu'on n'a pas le droit de nous laisser séduire aujourd'hui par la transparence des élections et la neutralité de l'Administration, au point d'oublier l'essentiel de ce que les militaires nous promettaient hier, c'est-à-dire la Justice et la Démocratie.
Comment raisonnablement parler de démocratie quand des dizaines de milliers de citoyens mauritaniens, victimes de déportations sanglantes, sont sciemment écartés du jeu et maintenus au-delà des frontières. De quelle Justice pourrait-on nous vanter tant que ces citoyens, principales victimes du régime déchu, ne sont pas rétablis dans leurs droits? Quelle est aussi cette justice qui maintient des mois durant des citoyens dans des prisons nauséabondes, sans accusation précise et sans procès à l'horizon ? Comme s'il suffisait de décréter une amnistie à chaque fois que la situation devient insoutenable.
La transparence des élections et la neutralité de l'administration sont importantes, mais elles ne répondent pas à la nécessité réelle d'une véritable démocratisation du pays intégrant tous les citoyens mauritaniens sur un même pied d'égalité. Elles répondent encore moins à l'aspiration profonde à la justice que ressentent les victimes et leurs familles.
C'est le lieu de rappeler que la transparence des élections et la neutralité de l'administration sont des moyens techniques au service de la finalité que constitue la démocratisation du pays. Réduire cette noble finalité à sa seule dimension technique, c'est finalement en trahir l'esprit et le principe.
La technique est pour la démocratie ce que le corps est pour l'être humain, alors que le principe de gouverner le peuple avec son consentement est pour elle ce que l'âme est pour le genre humain. C'est dire qu'une démocratie seulement technique est un corps sans âme, un corps finalement sans vie. C'est une apparence dépourvue de son essence.
Les militaires ont donc bien avancé dans la fabrication du corps démocratique, mais ils peinent à y insuffler l'âme. Il faut en être conscient et agir en sorte pour éviter de nous retrouver au bout de cette longue transition avec un cadavre mort-né.
Il faut aussi que le souffle arrive à temps. Je reconnais ici au CMJD que son édifice, encore en construction, a déjà permis au peuple d'introduire au parlement des députés de valeur. C'est donc à ceux-la, et aux élus qui les suivront, qu'incombe le devoir de correctement parachever la démocratisation.
Tant que la Démocratie est globalement réduite à la technique, tant que la justice n'est pas encore rétablie, tant que l'anniversaire du 28 novembre n'est pas encore normalisé, il restera plus digne de faire preuve d'un peu moins d'insolence et de ne pas trop seulement voir la date du 28 novembre comme un heureux souvenir d'indépendance.
Amicalement,
Mohamed Aly
source : Mohamed Aly
La nuit du 28 novembre 1990, dans laquelle 28 militaires Negro-mauritaniens ont été pendus à Inal, ne résume pas seulement toute la gravité de la purge raciste qui s'est opérée au sein de l'institution militaire à cette époque. Elle exprime les véritables proportions du désastre humain que nous lègue le régime déchu. Elle symbolise finalement tout son passif humanitaire.
Les Mauritaniens ne sont donc pas tous en fête ce 28 novembre, beaucoup sont en deuil. C'est qu'il faut finalement reconnaître que le 28 novembre n'est pas, ou n'est plus, une fête nationale.
A y voir d'ailleurs de plus près et en abandonnant l'espace d'un moment le complexe du chauvinisme, on peut dire que l'indépendance politique du 28 novembre 1960 n'avait rien de véritablement grandiose. Elle n'est en aucun cas comparable à l'insupportable mémoire d'innocents horriblement pendus la même date 30 ans plus tard à Inal.
Cet anniversaire est donc survenu en ce moment précis de la transition pour nous rappeler qu'on n'a pas le droit de nous laisser séduire aujourd'hui par la transparence des élections et la neutralité de l'Administration, au point d'oublier l'essentiel de ce que les militaires nous promettaient hier, c'est-à-dire la Justice et la Démocratie.
Comment raisonnablement parler de démocratie quand des dizaines de milliers de citoyens mauritaniens, victimes de déportations sanglantes, sont sciemment écartés du jeu et maintenus au-delà des frontières. De quelle Justice pourrait-on nous vanter tant que ces citoyens, principales victimes du régime déchu, ne sont pas rétablis dans leurs droits? Quelle est aussi cette justice qui maintient des mois durant des citoyens dans des prisons nauséabondes, sans accusation précise et sans procès à l'horizon ? Comme s'il suffisait de décréter une amnistie à chaque fois que la situation devient insoutenable.
La transparence des élections et la neutralité de l'administration sont importantes, mais elles ne répondent pas à la nécessité réelle d'une véritable démocratisation du pays intégrant tous les citoyens mauritaniens sur un même pied d'égalité. Elles répondent encore moins à l'aspiration profonde à la justice que ressentent les victimes et leurs familles.
C'est le lieu de rappeler que la transparence des élections et la neutralité de l'administration sont des moyens techniques au service de la finalité que constitue la démocratisation du pays. Réduire cette noble finalité à sa seule dimension technique, c'est finalement en trahir l'esprit et le principe.
La technique est pour la démocratie ce que le corps est pour l'être humain, alors que le principe de gouverner le peuple avec son consentement est pour elle ce que l'âme est pour le genre humain. C'est dire qu'une démocratie seulement technique est un corps sans âme, un corps finalement sans vie. C'est une apparence dépourvue de son essence.
Les militaires ont donc bien avancé dans la fabrication du corps démocratique, mais ils peinent à y insuffler l'âme. Il faut en être conscient et agir en sorte pour éviter de nous retrouver au bout de cette longue transition avec un cadavre mort-né.
Il faut aussi que le souffle arrive à temps. Je reconnais ici au CMJD que son édifice, encore en construction, a déjà permis au peuple d'introduire au parlement des députés de valeur. C'est donc à ceux-la, et aux élus qui les suivront, qu'incombe le devoir de correctement parachever la démocratisation.
Tant que la Démocratie est globalement réduite à la technique, tant que la justice n'est pas encore rétablie, tant que l'anniversaire du 28 novembre n'est pas encore normalisé, il restera plus digne de faire preuve d'un peu moins d'insolence et de ne pas trop seulement voir la date du 28 novembre comme un heureux souvenir d'indépendance.
Amicalement,
Mohamed Aly
source : Mohamed Aly