Alors que le Musée de l’immigration a ouvert ses portes dans une relative indifférence, il peut être intéressant de se pencher sur l’histoire de l’immigration française. Et particulièrement une composante de cette dernière : celle des ressortissants subsahariens.
L’immigration des Noirs en France a commencé, bien que très modestement, au lendemain de la deuxième guerre mondiale. Le recensement effectué à l’époque par l’Insee (Institut national de la statistique et des études économiques) fournit un renseignement chiffré sur cette population. En 1946, sur le totale d’étrangers que compte l’hexagone, seuls 0,8% proviennent d’Afrique noire. En fait, la fin de la deuxième guerre mondiale attire en France un certain nombre de travailleurs originaires d’Afrique noire que du Maghreb. Toutefois, durant cette période, peu d’entre eux se trouvent sur le territoire de la métropole. Le cas des étudiants africains reste un peu à part. Aux alentours de 1950, la France compte 2.000 étudiants africains.
Les premiers immigrants noirs africains s’établissent d’abord comme dockers, dans les ports. Si les Maliens, les Sénégalais et les Mauritaniens sont nombreux, la raison est toute simple : une partie des hommes de ces pays ont porté l’uniforme français. C’est en toute logique qu’ils se sont tournés vers la patrie qu’ils ont défendu pour y chercher un soutien économique. Plus tard, ils émigrent vers la région parisienne et y vivent en communauté.
Dans les années 50 et 60, cette immigration ne progresse pas réellement. Si l’on se penche sur les recensements effectués par l’Insee, à la fin des années 60, la population noire africaine dépasse à peine 1%.
Au début des années 60, la situation de la métropole est particulière. Alors que différents pays africains accèdent à l’indépendance, la France se trouve dans une situation complexe. Il lui est impossible de donner la nationalité française à tous ceux qui pourraient la demander dans les anciennes colonies. De même, de nombreux Français se trouvent encore dans les nouveaux états indépendants, notamment au Sénégal. Impossible non plus de les priver de leur nationalité. Si à cette période, le flux d’immigrés d’origine subsaharienne reste encore bas très bas, les lois censées contrôler le courant migratoire n’existent pas réellement.
Avant 1974 et la cessation officielle de l’immigration, aucune politique restrictive d’immigration n’existe. Le gouvernement français n’éprouve pas le besoin de limiter le flux de population en provenance d’Afrique noire. Pour autant, la France entend bien faire en sorte de veiller à ce que les candidats à l’immigration restent chez eux. Des accords signés entre la France et les pays francophones précisent que les ressortissants d’Afrique noire peuvent venir en France en possédant uniquement une carte d’identité et conserver une liberté de circulation totale. Ni titre de séjour, ni permis de travail ne sont nécessaires.
Le tournant des années 70-80
En fait, le véritable tournant se situe entre les années 70 et 80. Une étude réalisée par Michèle Tribalat une chercheuse de l’Ined (Institut national de l’étude démographique), donne un aperçu précis de la composition du flux de population qui se rend en France. L’étude révèle que les hommes originaires d’Afrique de l’ouest (Mali, Sénégal, Mauritanie, Cameroun etc.) sont les premiers à se rendre en France. Ils représentent un quart de nombre total d’immigrés. Et ce pour différentes raisons.
Les crises politiques profondes de nombreux Etats ayant accédé à l’indépendance alliées à la crise économique de taille qui traverse la plupart des Etats francophones poussent les populations à émigrer. A cela, il faut ajouter la sécheresse des années 70...Tous ces éléments rassemblés permettent de mettre en lumière le caractère économique de cette immigration.
La "véritable" vague d’immigration qui prend place dans les années 70 prend la France au dépourvu, même si le pays est habitué aux flux massifs de population depuis le 19ème siècle. La majorité des immigrants originaires d’Afrique noire s’installent dans des foyers prévus à cet effet. Les logements au confort bien chiche, ne permettent pas aux immigrants de bénéficier de qualité de vie décante. En outre, le règlement intérieur de ces structures interdit aux locataires, en majeure partie célibataires, toute présence féminine. L’hygiène, quant à elle n’est présente qu’à l’état de concept...
Les pouvoirs publics réagissent peu à peu. Des locaux sont mis à disposition des immigrants. Des jeunes hommes s’entassent à une dizaine dans des chambres de quelques mètres carrés. L’autre solution développée par le gouvernement se trouve être les hôtels. Depuis le milieu des années 60, le gouvernement à recours aux bâtiments hôteliers pour loger en urgence. Le problème du logement ne concerne pas que les Africains à l’époque.
Selon un chiffre avancé dans l’un des ouvrages de Gérard Noiriel, plus de 2,9 millions de personnes se trouvent être ce que l’on appelle encore aujourd’hui des "mal-logés". La majorité d’entre eux sont originaire d’Afrique noire. Dans les années 80, le nombre d’immigrés noirs africains augmente significativement. En fait, 4, 3% du nombre total d’immigrés se trouvent originaire du continent noir.
Toutes ces données permettent d’établir une vision un peu plus nuancée d’un phénomène migratoire que certains ont tôt fait de nommer « problème ». Au vu des chiffres recueillis par l’Insee, on mesure à quel point certains jugements peuvent s’avérer relatifs.
Par Thomas Pagbe
Source: grioo
(M)
L’immigration des Noirs en France a commencé, bien que très modestement, au lendemain de la deuxième guerre mondiale. Le recensement effectué à l’époque par l’Insee (Institut national de la statistique et des études économiques) fournit un renseignement chiffré sur cette population. En 1946, sur le totale d’étrangers que compte l’hexagone, seuls 0,8% proviennent d’Afrique noire. En fait, la fin de la deuxième guerre mondiale attire en France un certain nombre de travailleurs originaires d’Afrique noire que du Maghreb. Toutefois, durant cette période, peu d’entre eux se trouvent sur le territoire de la métropole. Le cas des étudiants africains reste un peu à part. Aux alentours de 1950, la France compte 2.000 étudiants africains.
Les premiers immigrants noirs africains s’établissent d’abord comme dockers, dans les ports. Si les Maliens, les Sénégalais et les Mauritaniens sont nombreux, la raison est toute simple : une partie des hommes de ces pays ont porté l’uniforme français. C’est en toute logique qu’ils se sont tournés vers la patrie qu’ils ont défendu pour y chercher un soutien économique. Plus tard, ils émigrent vers la région parisienne et y vivent en communauté.
Dans les années 50 et 60, cette immigration ne progresse pas réellement. Si l’on se penche sur les recensements effectués par l’Insee, à la fin des années 60, la population noire africaine dépasse à peine 1%.
Au début des années 60, la situation de la métropole est particulière. Alors que différents pays africains accèdent à l’indépendance, la France se trouve dans une situation complexe. Il lui est impossible de donner la nationalité française à tous ceux qui pourraient la demander dans les anciennes colonies. De même, de nombreux Français se trouvent encore dans les nouveaux états indépendants, notamment au Sénégal. Impossible non plus de les priver de leur nationalité. Si à cette période, le flux d’immigrés d’origine subsaharienne reste encore bas très bas, les lois censées contrôler le courant migratoire n’existent pas réellement.
Avant 1974 et la cessation officielle de l’immigration, aucune politique restrictive d’immigration n’existe. Le gouvernement français n’éprouve pas le besoin de limiter le flux de population en provenance d’Afrique noire. Pour autant, la France entend bien faire en sorte de veiller à ce que les candidats à l’immigration restent chez eux. Des accords signés entre la France et les pays francophones précisent que les ressortissants d’Afrique noire peuvent venir en France en possédant uniquement une carte d’identité et conserver une liberté de circulation totale. Ni titre de séjour, ni permis de travail ne sont nécessaires.
Le tournant des années 70-80
En fait, le véritable tournant se situe entre les années 70 et 80. Une étude réalisée par Michèle Tribalat une chercheuse de l’Ined (Institut national de l’étude démographique), donne un aperçu précis de la composition du flux de population qui se rend en France. L’étude révèle que les hommes originaires d’Afrique de l’ouest (Mali, Sénégal, Mauritanie, Cameroun etc.) sont les premiers à se rendre en France. Ils représentent un quart de nombre total d’immigrés. Et ce pour différentes raisons.
Les crises politiques profondes de nombreux Etats ayant accédé à l’indépendance alliées à la crise économique de taille qui traverse la plupart des Etats francophones poussent les populations à émigrer. A cela, il faut ajouter la sécheresse des années 70...Tous ces éléments rassemblés permettent de mettre en lumière le caractère économique de cette immigration.
La "véritable" vague d’immigration qui prend place dans les années 70 prend la France au dépourvu, même si le pays est habitué aux flux massifs de population depuis le 19ème siècle. La majorité des immigrants originaires d’Afrique noire s’installent dans des foyers prévus à cet effet. Les logements au confort bien chiche, ne permettent pas aux immigrants de bénéficier de qualité de vie décante. En outre, le règlement intérieur de ces structures interdit aux locataires, en majeure partie célibataires, toute présence féminine. L’hygiène, quant à elle n’est présente qu’à l’état de concept...
Les pouvoirs publics réagissent peu à peu. Des locaux sont mis à disposition des immigrants. Des jeunes hommes s’entassent à une dizaine dans des chambres de quelques mètres carrés. L’autre solution développée par le gouvernement se trouve être les hôtels. Depuis le milieu des années 60, le gouvernement à recours aux bâtiments hôteliers pour loger en urgence. Le problème du logement ne concerne pas que les Africains à l’époque.
Selon un chiffre avancé dans l’un des ouvrages de Gérard Noiriel, plus de 2,9 millions de personnes se trouvent être ce que l’on appelle encore aujourd’hui des "mal-logés". La majorité d’entre eux sont originaire d’Afrique noire. Dans les années 80, le nombre d’immigrés noirs africains augmente significativement. En fait, 4, 3% du nombre total d’immigrés se trouvent originaire du continent noir.
Toutes ces données permettent d’établir une vision un peu plus nuancée d’un phénomène migratoire que certains ont tôt fait de nommer « problème ». Au vu des chiffres recueillis par l’Insee, on mesure à quel point certains jugements peuvent s’avérer relatifs.
Par Thomas Pagbe
Source: grioo
(M)