Kaédi vient de vivre ce matin des incidents d'une rare violence suite à une manifestation contre l'enrôlement qui a dégénéré en affrontements avec les forces de l'ordre. Il y aurait des blessés de part et d'autre et la situation n'aurait été sous contrôle qu'aux alentours de 14 heures. De sources concordantes on apprend que le palais de justice et le centre de recensement auraient été saccagés, plusieurs axes de la ville sont jonchés de pneus brûlés et le marché est fermé pour prévenir tout acte de vandalisme. A ce niveau d'information, l'Alliance pour la Justice et la Démocratie/Mouvement pour la Rénovation (AJD/MR) :
1. condamne ces violences ayant entraîné des blessés et la destruction de biens publics et privés, la voie pacifique et non violente doit être privilégiée pour sauvegarder l'unité nationale ;
2. met en garde contre toute tentative de récupération par certaines forces politiques ou mouvements d'une revendication juste et spontanée défendant le droit à la nationalité;
3. rappelle aux autorités notre insistance pour la suspension de l'opération d'enrôlement des populations et la révision de la commission nationale chargée de ce dossier déjà acceptée par le chef du gouvernement mais qui n'a pas encore connu un début d'exécution".
C'est le communiqué que l'AJD/MR de Sarr Ibrahima a rendu public dans la journée de samedi à la suite de graves évènements de Kaédi. On le reprend ici pour ce qu'il comporte de justesse dans la prise de position et pour sa rapidité.
Ce qui s'est passé à Kaédi est grave parce qu'il a produit la violence dans une ville de la Vallée du fleuve Sénégal. Une violence inutile et dangereuse. C'est pourquoi elle ne peut être que condamné. Certains diront "bien calculée"… nous nous en tiendrons quant à nous aux évènements. Rien, absolument rien, ne peut justifier l'usage de la violence, ni de la part de manifestants cherchant à exprimer leur positon, ni de celle des forces de l'ordre dont la mission est de maintenir l'ordre et de protéger les biens et la quiétude des citoyens. C'est bien un Rubicon franchi. Sans gravité heureusement, parce qu'il n'a pas entraîné de dégâts humains. Par contre, du point de vue de la symbolique politique, les évènements de Kaédi interpellent à plus d'un titre.
Sur l'objet de la manifestation. Depuis son lancement, l'enrôlement de la population suscite un émoi dans la communauté négroafricaine de Mauritanie.
"Communauté négro-africaine"… autant dire qu'au sein de cette communauté certaines franges intellectuelles et politiques se sont dressées pour demander la suspension d'une telle opération. La réponse du pouvoir est arrivée tardive sous la forme d'une campagne d'explications qui a commencé par un long débat à TVM entre différents responsables. Toutes les langues nationales en plus du français ont été utilisées pour expliquer l'opération. Ce qui a eu un effet certain.
D'une part, on nous a dit que l'opération ne vise pas à déterminer la nationalité, qu'elle n'exclut personne et que pour ce faire elle fixe des critères qui sont valables pour tous. L'accalmie relative qui a suivi a vite pris fin avec les manifestations à Paris, puis la reprise de celles de
Nouakchott et enfin Kaédi. La campagne d'explication n'a pas porté parce qu'elle s'est arrêtée aussi brusquement qu'elle a commencé. Ce sont les appréhensions et les préjugés qui ont été cultivés et développés sur la scène. Du coup, nous sommes revenus à la première atmosphère de rejet systématique qui, finalement, s'exprime aujourd'hui par la violence dans la rue. Biens publics et privés ont été visés par les manifestants. C'est bien d'une colère aveugle qu'il s'agit. Nous avons besoin de savoir à quoi rime tout cela ? Comprendre l'opération comme une énième tentative de la Mauritanie de fixer l'identité de ses habitants, d'en connaitre le nombre, de les "adresser"…
L'opération a été présentée comme une réforme de l'état civil en introduisant les moyens les plus modernes dans la collecte et le traitement des données.
Combien sommes-nous ? qui sommes-nous ? où sommes-nous ? que faisons-nous ? de quoi nous vivons ? comment nous habitons ? Qui cela doit-il déranger ? Pas un Mauritanien.
Seulement, le zèle de certains responsables de bureau a introduit une sorte de suspicion et donné l'air qu'on était en présence d'une inquisition dont l'objectif final était de dénier la "mauritanité" de certains. Effectivement personne ne peut - et ne doit - prétendre à cela. La communication officielle étant absente, la confiance étant entamée par la suspicion de départ, le dialogue n'arrivant pas, on devait forcément s'attendre à un scénario comme celui de Kaédi. La conjoncture s'y prête. Ce qu'il faut éviter absolument, c'est l'instrumentalisation politique de l'évènement.
Nous n'avons que trop souffert des extrémismes qui se nourrissent les uns des excès des autres.
Par: Mohamed Fall Ould Oumère
Edito La Tribune
Source: La Tribune
1. condamne ces violences ayant entraîné des blessés et la destruction de biens publics et privés, la voie pacifique et non violente doit être privilégiée pour sauvegarder l'unité nationale ;
2. met en garde contre toute tentative de récupération par certaines forces politiques ou mouvements d'une revendication juste et spontanée défendant le droit à la nationalité;
3. rappelle aux autorités notre insistance pour la suspension de l'opération d'enrôlement des populations et la révision de la commission nationale chargée de ce dossier déjà acceptée par le chef du gouvernement mais qui n'a pas encore connu un début d'exécution".
C'est le communiqué que l'AJD/MR de Sarr Ibrahima a rendu public dans la journée de samedi à la suite de graves évènements de Kaédi. On le reprend ici pour ce qu'il comporte de justesse dans la prise de position et pour sa rapidité.
Ce qui s'est passé à Kaédi est grave parce qu'il a produit la violence dans une ville de la Vallée du fleuve Sénégal. Une violence inutile et dangereuse. C'est pourquoi elle ne peut être que condamné. Certains diront "bien calculée"… nous nous en tiendrons quant à nous aux évènements. Rien, absolument rien, ne peut justifier l'usage de la violence, ni de la part de manifestants cherchant à exprimer leur positon, ni de celle des forces de l'ordre dont la mission est de maintenir l'ordre et de protéger les biens et la quiétude des citoyens. C'est bien un Rubicon franchi. Sans gravité heureusement, parce qu'il n'a pas entraîné de dégâts humains. Par contre, du point de vue de la symbolique politique, les évènements de Kaédi interpellent à plus d'un titre.
Sur l'objet de la manifestation. Depuis son lancement, l'enrôlement de la population suscite un émoi dans la communauté négroafricaine de Mauritanie.
"Communauté négro-africaine"… autant dire qu'au sein de cette communauté certaines franges intellectuelles et politiques se sont dressées pour demander la suspension d'une telle opération. La réponse du pouvoir est arrivée tardive sous la forme d'une campagne d'explications qui a commencé par un long débat à TVM entre différents responsables. Toutes les langues nationales en plus du français ont été utilisées pour expliquer l'opération. Ce qui a eu un effet certain.
D'une part, on nous a dit que l'opération ne vise pas à déterminer la nationalité, qu'elle n'exclut personne et que pour ce faire elle fixe des critères qui sont valables pour tous. L'accalmie relative qui a suivi a vite pris fin avec les manifestations à Paris, puis la reprise de celles de
Nouakchott et enfin Kaédi. La campagne d'explication n'a pas porté parce qu'elle s'est arrêtée aussi brusquement qu'elle a commencé. Ce sont les appréhensions et les préjugés qui ont été cultivés et développés sur la scène. Du coup, nous sommes revenus à la première atmosphère de rejet systématique qui, finalement, s'exprime aujourd'hui par la violence dans la rue. Biens publics et privés ont été visés par les manifestants. C'est bien d'une colère aveugle qu'il s'agit. Nous avons besoin de savoir à quoi rime tout cela ? Comprendre l'opération comme une énième tentative de la Mauritanie de fixer l'identité de ses habitants, d'en connaitre le nombre, de les "adresser"…
L'opération a été présentée comme une réforme de l'état civil en introduisant les moyens les plus modernes dans la collecte et le traitement des données.
Combien sommes-nous ? qui sommes-nous ? où sommes-nous ? que faisons-nous ? de quoi nous vivons ? comment nous habitons ? Qui cela doit-il déranger ? Pas un Mauritanien.
Seulement, le zèle de certains responsables de bureau a introduit une sorte de suspicion et donné l'air qu'on était en présence d'une inquisition dont l'objectif final était de dénier la "mauritanité" de certains. Effectivement personne ne peut - et ne doit - prétendre à cela. La communication officielle étant absente, la confiance étant entamée par la suspicion de départ, le dialogue n'arrivant pas, on devait forcément s'attendre à un scénario comme celui de Kaédi. La conjoncture s'y prête. Ce qu'il faut éviter absolument, c'est l'instrumentalisation politique de l'évènement.
Nous n'avons que trop souffert des extrémismes qui se nourrissent les uns des excès des autres.
Par: Mohamed Fall Ould Oumère
Edito La Tribune
Source: La Tribune