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Le bureau exécutif de l'AVOMM

"L'important n'est pas ce qu'on fait de nous, mais ce que nous faisons nous-mêmes de ce qu'on a fait de nous." Jean-Paul Sartre

"L'Association d'aides aux veuves et aux orphelins de mauritanie (AVOMM) qui nous rassemble, a été créée le 25/12/95 à PARIS par d'ex-militaires mauritaniens ayant fui la terreur, l'oppression, la barbarie du colonel Mawiya o/ sid'ahmed Taya ......
Ces rescapés des geôles de ould Taya, et de l'arbitraire, décidèrent, pour ne jamais oublier ce qui leur est arrivé, pour garder aussi la mémoire des centaines de martyrs, de venir en aide aux veuves, aux orphelins mais aussi d'engager le combat contre l'impunité décrétée par le pouvoir de Mauritanie."
E-mail : avommavomm@yahoo.fr

Bureau exécutif

*Ousmane SARR, président
*Demba Niang, secrétaire général
*Secrétaire général Adjt; Demba Fall
*Alousseyni SY, Chargé des relations extérieures
*Mme Rougui Dia, trésorière
*Chargé de l’organisation Mariame Diop
*adjoint Ngolo Diarra
*Mme Mireille Hamelin, chargée de la communication
*Chargé de mission Bathily Amadou Birama
Conseillers:
*Kane Harouna
*Hamdou Rabby SY










AVOMM

Hommage à Nelson Mandela (18 juillet 1918 - 05 décembre 2013) par Hamdou Rabby Sy


L’hommage universel rendu à Nelson Mandela trouve sa légitimité dans son combat et dans cette conviction, selon lui, universellement partagée: l’impératif de soulèvement et de résistance contre l’oppression.
 
«Se soulever contre l’oppression est une attitude partagée par toute l’humanité, et c’est la plus haute aspiration de tout homme libre» (2011, p. 258).
 
Comment rendre hommage à Nelson Mandela? Dans quelle langue traduire cet hommage? Avec quels mots exprimer notre témoignage? Quelles significations donner à cette vie hors du commun? La singularité exceptionnelle de son existence nous inspire beaucoup de choses, et surtout la reconnaissance du bel exemple d’humanité que son combat a représenté.
 
Un constat s’impose : rarement un être humain a autant marqué l’humanité, toutes distinctions et toutes causes confondues par son charisme, sa simplicité, sa générosité, son humanité, son dévouement à la dignité humaine à travers le combat de toute une vie. Mandela a pris le risque maximal, extrême, dans le but d’en découdre avec le système le plus odieux que l’humanité ait connu. Il avait caractérisé ce système en ces termes : «(…) Les Sud-africains à la peau blanche avaient oublié leurs différences et bâti un système de domination raciale contre les habitants à peau noire de leur propre pays. Les structures qu’ils avaient créées formèrent la base d’une des sociétés les plus dures et les plus inhumaines que le monde ait jamais connues.»  (2003, p. 751-752.)
 
Il est clair que l’identification de la nature de l’apartheid est une donnée essentielle dans la compréhension de la logique qui s’est constituée dont les fondements sont enracinés dans l’idéologie barbare que constitue le racisme. Cette idéologie a infligé une souffrance traumatisante à l’homme noir frappé de ce fait d’indignité et d’inhumanité. Il en a résulté une société où l’opprimé et l’oppresseur ne jouissent point de leur humanité. D’où l’énoncé lumineux de Mandela : « L’opprimé et l’oppresseur sont tous deux dépossédés de leur humanité.» C’est dans ce condensé d’une prise de conscience à toute épreuve que l’humanité n’est pas divisible en barbares parce qu’oppresseurs et en victimes parce qu’opprimés que l’on peut tenter de cerner des éléments de compréhension de l’éthique de Mandela et de sa philosophie de la réconciliation. Sa bonté, dont il a été question à travers les hommages qui lui ont été rendus de façon unanime, est inscrite dans son caractère et dans son tempérament, combinant ainsi une fermeté redoutable et une générosité sans faille. Cette bonté, il l’a définie ainsi : «  La bonté de l’homme est une flamme qu’on peut cacher mais qu’on ne peut jamais éteindre ? » Comme la bonne volonté chez Kant, Mandela identifie la bonté comme cette matrice essentielle qui caractérise l’être humain, ne serait-ce que dans une temporalité instantanée et fugitive. Cela suffit pour donner de l’espoir et faire jaillir l’humanité de l’être. En avoir une conscience profonde comme exigence et devoir suffit pour l’incarner de manière constante. C’est cette bonté qui a caractérisé Mandela tout le long de son existence.

La bonté en effet, est une vertu concrète et de ce fait une attitude non conjoncturelle et circonstancielle. Cette bonté est devenue une option humaniste, éthique, politique, relationnelle, fondée sur une attitude de vigilance et de veille. Ce qui a fait de lui un homme d’exception en livrant un combat rude à la hauteur de la barbarie qui est la caractéristique absolue de l’apartheid et de tout système de discrimination raciale. A armes inégales, Mandela a fait de l’humanité, de la générosité, de l’éthique, la sève nourricière de son combat en refusant de répondre aux techniques et aux méthodes barbares de l’apartheid par les mêmes pratiques. Le combat de Mandela s’est singularisé par une démarche intransigeante sur la préservation des valeurs et des vertus humaines fondamentales face à un système, dont la logique de destruction du peuple noir reposait sur la négation de la dignité humaine, l’humiliation, l’avilissement et la servitude. Toute forme de désobéissance à l’idéologie de la haine raciale, à l’intolérance, était sévèrement punie avec une férocité démesurée.
 
Quelles sont ces valeurs et vertus qui constituent le socle de l’éthique de Mandela ? Dans la page d’ouverture des Conversations avec moi-même, un extrait d’une lettre adressée à Winnie Mandela depuis la prison, le 1er février 1975, Mandela note: « […] La cellule est un lieu parfait pour apprendre à se connaître et pour étudier en permanence et dans le détail le fonctionnement de son esprit et de ses émotions. Les individus que nous sommes ont tendance à juger leur réussite à l’aune de critères extérieurs, tels que la position sociale, l’influence, la popularité, la richesse ou le niveau d’éducation. Ce sont bien sûr des notions importantes pour mesurer sa réussite – et on comprend que beaucoup tentent d’obtenir le meilleur d’eux-mêmes sur ces points. Mais d’autres critères intérieurs sont peut-être plus importants pour juger de l’accomplissement d’un homme ou d’une femme. L’honnêteté, la sincérité, la simplicité, l’humilité, la générosité, l’absence de vanité, la capacité à servir les autres – qualités à la portée de toutes les âmes – sont les véritables fondements de notre vie spirituelle. » (2010, p. IX)
 
On aura bien compris que Mandela montre que l’apprentissage à la connaissance de soi qui passe par la méditation et le recueillement permet d’accéder à la perception approfondie du fonctionnement de notre esprit et de nos affects. Ce qui ouvre nos yeux sur la différence entre la réussite personnelle qui est de l’ordre de l’avoir et la prise de conscience de ce qui est le plus essentiel, les dispositions à être au service des autres. Ce qui n’est pas facile. Renoncer à la réussite matérielle, sociale, statutaire, au confort pour une vie au service du combat par les sacrifices n’est pas aisée, même si tous les individus peuvent y accéder. L’égalité en termes de dispositions n’est pas suffisante, il faut bien un travail sur soi. Cette dimension éthique relève d’une décision personnelle et d’un engagement doublé d’une vocation. Cette option fondamentale résulte d’un cheminement fondé sur une connaissance de soi à la hauteur du défi à relever par rapport au combat contre le système raciste fondé sur la négation de la dignité et de la liberté du peuple noir. Il est essentiel de ne jamais oublier que la férocité de la répression et les dures conditions d’enfermement n’ont fait que renforcer l’optimisme profond de Mandela quant à la défaite de l’apartheid. «  Je n’ai jamais perdu l’espoir que cette grande transformation aurait lieu. Non seulement grâce aux héros que j’ai cités, mais grâce aux hommes et aux femmes ordinaires de mon pays. J’ai toujours su qu’au plus profond du cœur de l’homme résidaient la miséricorde et la générosité. Personne ne naît en haïssant une autre personne à cause de la couleur de sa peau, ou de son passé, ou de sa religion. » (p. 753.)
 
Une conviction renforcée par le sens de l’humain a nourri l’espoir qu’il a placé dans la victoire ; espoir conforté par son courage et sa détermination à vaincre l’apartheid. Il s’y ajoute la confiance en son peuple et aux personnalités singulières issues de la communauté des oppresseurs. Cette sagesse pratique constitue une source de résolution et de détermination qui entretient une vision alternative pour l’avenir d’une société dont le système inhumain pourrait réduire les victimes à une résignation victimaire. La résistance de Mandela a produit une affirmation vigoureuse pour un autre idéal de société. Ce qu’il a clairement exprimé lors du procès de Rivonia en 1964 : « Au cours de ma vie, je me suis entièrement consacré à la lutte du peuple africain. J’ai lutté contre la domination blanche et j’ai lutté contre la domination noire. Mon idéal le plus cher a été celui d’une société libre et démocratique dans laquelle tous vivraient en harmonie et avec des chances égales. J’espère vivre assez longtemps pour l’atteindre. Mais si cela est nécessaire, c’est un idéal pour lequel je suis prêt à mourir. » (Mandela, p. 446).
 
A 95 ans, avec un hommage universel et unanime et des témoignages sur sa belle humanité exceptionnelle, le moins qu’on puisse dire c’est qu’il a réalisé son rêve. Ce qui est très rare dans l’histoire de l’humanité. Mandela est un symbole et une référence pour l’humanité entière, une et indivisible. Mais la résonance de son exemple et de la symbolique de son combat revêtent une signification particulière pour le peuple sud-africain noir, pour les peuples noirs et pour aussi et surtout pour la communauté noire africaine mauritanienne.
 
 L’universalité de l’homme Mandela prend toute son ampleur dans la singularité de l’individu qui a su transcender les barrières et les frontières des préjugés dont les peuples noirs furent victimes à travers des pratiques de haine raciale et des discriminations qui continuent encore à sévir dans certaines parties du monde, comme la République Islamique de Mauritanie. Le cynisme de l’apartheid sud-africain ne pouvait être vaincu que par une générosité hors normes et une exception humaine à nulle autre comparable. L’inhumanité, dans sa démesure, caractéristique profonde de l’apartheid et de tous les systèmes fondés sur le racisme et l’esclavage, a engendré une réplique d’humanité authentique, dont le symbole personnifié fut Madiba. Qu’il s’appelât Rolihlahla, Madiba, Nelson, le héros Mandela fut une incarnation grandiose de la résistance vertueuse et généreuse contre la barbarie et le cynisme dont la figure parfaite fut l’apartheid. Mais il s’était interrogé sur la dimension d’humanité exceptionnelle de certains de ses compagnons : «  Peut-être faut-il ces abîmes d’oppression pour créer une telle grandeur de caractère ? » (p. 752)
 
La force de grandeur est cette générosité inaltérable partagée avec ses compagnons qu’il a symbolisée tout le long de sa vie. Mandela a vécu, a réfléchi, dirigé et porté le lourd fardeau du combat contre le système le plus ignoble que l’humanité ait connu : le racisme érigé en mode de gouvernance des humains niés dans leur humanité. « Le racisme est une maladie de la conscience. » avait martelé Mandela à Londres devant les deux chambres du Parlement le 11juillet 1996. Il avait conçu son combat comme un long chemin vers la liberté. Cette liberté qu’il avait retenue comme étant le trésor le plus précieux des valeurs qui lui ont été transmises par son peuple.
Il a payé un lourd tribut pour convertir cet idéal en liberté politique effective. Il a exprimé sans ambiguïté sa haine du racisme : « Je veux affirmer une bonne fois que je ne suis pas raciste et que je déteste le racisme pour sa barbarie, qu’il vienne d’un Noir ou d’un Blanc. » La posture du combattant de la liberté s’enracine dans la pointe d’humanité inentamée et inentamable qui a servi de fil conducteur à son engagement sans faille pour la libération de son peuple et de son oppresseur.
 
La signification universelle de son combat pour l’émancipation des Noirs sous l’apartheid réside dans sa conception d’une société réconciliée où la dignité humaine et les droits de tous les êtres humains sont respectés. Cette signification prend une tournure particulière pour les peuples noirs en termes de dignité retrouvée dont il fut le symbole et un des acteurs à jamais inoubliables. La même signification prend une tournure singulière pour la communauté noire mauritanienne écartelée entre la domination esclavagiste et l’oppression politique. L’Etat mauritanien esclavagiste et raciste est une figure contemporaine de l’apartheid. La communauté noire en Mauritanie, du fait du racisme et de l’esclavage, est profondément endeuillée par la disparition de la figure emblématique du combat contre l’apartheid.
 
Mandela a ouvert une nouvelle ère dans l’histoire de l’humanité, la lumière qui  a jailli de son combat et l’espoir qu’il a fait naître font que, nous devons assumer son héritage pour l’éradication définitive du racisme. Certes, il est des blessures qui ne se refermeront pas, du moins difficilement, mais la mémoire de Mandela nous invite et nous oblige à un devoir de prise de conscience universelle du respect de l’humanité de l’être et de la résistance contre la négation de la différence et de toute forme de discrimination.
 
La vie et le combat de Nelson Mandela auront porté l’humanité à un niveau de conscience universelle de l’exigence de justice, de liberté et de dignité. C’est en ce sens qu’il est notre héros et restera le témoignage éternel de la grandeur d’âme d’un être humain. Sa lucidité et sa détermination nous donnent l’espoir que nous vaincrons un jour dans cette partie du monde qui est notre pays où une autre figure de l’apartheid continue à sévir et à priver des hommes et des femmes de leur citoyenneté dans leur propre pays, du fait de la couleur de leur peau.
 
Mandela est mort, les lois de la vie et de la biologie se sont appliquées. Tout être vivant est voué à la mort. La mort est essence et vérité de la vie. Mais, il est entré dans la conscience universelle et, à ce titre, Mandela est devenu un immortel. Le destin qu’il a eu est la vie faite œuvre. De la négation, de la destruction, il a su en faire autre chose que de la haine raciale. Il a combattu pour transformer l’inhumanité et la barbarie d’un système politique en vivre ensemble démocratique. Il a réussi son pari. Il a rendu possible la paix des cœurs et des esprits. La réconciliation est devenue l’horizon de l’Afrique du Sud de Mandela libéré. Mandela est parti se reposer après avoir montré que l’humanité peut se libérer du racisme. Il a porté un coup à la fatalité que les relations des Noirs et Blancs ne peuvent pas être harmonieuses et libérées d’un antagonisme inhumain et catastrophique.

L’apartheid est mort en Afrique du sud, mais le racisme continue à survivre dans le monde. A la mémoire de Mandela, nous devons poursuivre son œuvre pour vaincre le racisme. La trace laissée par Madiba est l’écriture la plus magnifique et la plus merveilleuse de l’histoire de l’humanité. Rolihlahla est la générosité faite œuvre, l’intelligence faite clairvoyance et la sensibilité faite amour.
 
Good bye Nelson Mandela…
 
Bibliographie
Nelson Mandela :
-      Un long chemin vers la liberté, Paris, Fayard, 1995.
-      Conversations avec moi-même, Paris, la Martinière, 2010.
-      Pensées pour-moi-même, Paris, la Martinière, 2011.
 
Hamdou Rabby SY
Philosophe et militant des Droits Humains

Pour avomm.com

Dimanche 8 Décembre 2013 - 14:37
Dimanche 8 Décembre 2013 - 14:44
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