L’enrôlement de la population consiste à « inscrire sur les rôles de l’armée », faire « adhérer à un parti » ou bien « faire entrer dans un groupe ». Trois définitions possibles et qui ne répondent en aucune manière à ce que devrait être un recensement de la population dont l’un des objectif n’est point d’identifier pour une simple opération de police politique mais pour tracer la carte démographique d’un pays et du coup esquisser des plans de développement en connaissance de cause.
Déjà le terme « d’enrôlement » pose de sérieux problème pour notre appréhension des choses mais clarifie en même temps les intentions de ses initiateurs. Le déroulement ressemble étrangement à un enrôlement dans le vrai sens du terme. Mais à quelle fin ? Il est inconcevable qu’un « recensement » se déroule comme on est en train de le vivre en Mauritanie. Il n’y a pas pire situation. Même si quelques membres de la communauté nationale ne sont pas directement concernés par les vexations nées des questions et de cette volonté « d’épuration de l’état-civil », ils devraient se poser la question de savoir depuis quand un citoyen doit-il se déplacer pour se faire « recenser » ? J’ai eu à participer en 1988 au recensement national en tant qu’agent recenseur et j’ai eu la lourde tache de sillonner l’un des quartiers de Nouakchott : de l’école de justice à l’escadron de gendarmerie. J’étais enthousiaste car je pensais m’acquitter d’un « service nationale » sans être enrôlé. Je n’étais ni agent recruteur ni « éboueur ». Mais l’enthousiasme des éboueurs est d’un autre âge et doit être combattu avec la vigueur nécessaire afin de les rappeler à l’ordre.
Bon revenons sur les trois définitions pour épiloguer un peu sur la mentalité perverse des concepteurs de ce « recensement » d’un autre genre. C’est une invention mauritanienne dont les intentions n’échappent à personne. Ceci est clair dans nos têtes et le comportement quotidien des « éboueurs de la république » en témoignent à chaque coup de fil.
- Il est vrai qu’AQMI nous dérange, mais serait-il nécessaire d’enrôler l’ensemble des 3 millions de mauritaniens pour venir à bout des velléités guerrières des attaquants de Bassikinou ? Nous ne sommes point dans un état d’urgence qui demanderait à chaque mauritanien de prouver son amour pour la patrie en danger. Là le danger est bien interne. C’est l’Etat et ses tenants qui déclarent la guerre à une partie de sa population. Ou bien s’agit-il d’enrôler les « vrais » citoyens pour se préparer à la guerre contre ceux qui « souillent » l’état-civil mauritanien ?
Je prends l’attitude de l’absurde pour comprendre ce qui m’arrive et ce que les « éboueurs » se disent entre eux au moment de concocter leurs « insultes ». Il n’y a pas plus révoltant que les complaintes de ces vieilles personnes auxquelles on demande les sépultures des parents. Je pensais plutôt que l’identification des sépultures des morts de 1960 à nos jours devait servir au deuil national et non à encore exclure. Il n’y a pas pure mort que d’être étranger chez soi. Cette situation est inadmissible et ne peut que réveiller en nous la révolte, la permanence de la révolte. J’ai assisté il y a quelques jours (lundi 18/07/2011, croisement Boghé-Rosso après avoir longuement conversé avec l’un des organisateurs de la manifestation des jeunes de Boghé) à une scène que je n’avais plus revue il y a plus de 22 ans : un homme jurer, devant des policiers têtus, être le père de sa propre fille encore mineure. Comble de l’horreur !
- Alors, je me pose encore cette autre question en me basant sur la seconde définition. L’Etat et son président cherche-t-il à faire adhérer l’ensemble des mauritanien dans l’UPR (par dérision cela peut bien donner l’IMPUR) ? Je ne le pense pas. Je le lui concède par la négation lui qui me nie et me dénie ma nationalité, la seule chose privée qui doit me revenir en propre. Quand on me prive de cette « chose » mon monde s’effondre et ma volonté de paix et d’harmonie s’effiloche. Touche pas à ma nationalité ! (comme doivent le faire les jeunes de Boghé le 21/07/2011) Ai-je envie de crier tout haut. Une carte d’identité n’est pas comparable à une carte d’adhésion à un parti.
- Enfin, je ne pense pas que le gouvernement cherche à nous dissoudre dans un groupe car ayant réussi à le faire des Haratin. L’état mauritanien a toujours été producteur d’identités singulières. C’est à cette violence pratique ouverte qu’il faut opposer une violence méthodique. Je refuse cette dissolution et cette tentative de destruction morale. Je lui oppose ma force et ma liberté de dire : assez ! Assez ces vexations quotidiennes ! Assez cette scène infinie d’humiliations ! Assez de cette passivité devant ce despotisme d’éboueurs ! Assez de cet amalgame malsain ! Assez et assez… D’ailleurs je conteste la mauritanité de la Mauritanie.
A défaut d’un « printemps », il nous faut un hivernage mauritanien pour opposer notre dignité d’homme à cette volonté de nous rendre « impurs » et indignes de bénéficier de ce bout de papier qui nous permet d’être identifié. Il nous faut donc la guerre pour avoir notre carte d’identité comme le dit ce combattant des forces nouvelles. Mais chez nous même avec une carte d’identité on est rien. Il est impossible de rester immobile devant cette ultime bavure. Si 1989 a été une « surprise », 2011 est une réelle occasion pour que l’hivernage emporte avec lui tous les centres d’enrôlement et les éboueurs avec.
Nous ne pouvons pas accepter d’être traités comme des déchets de cette « république » et voir notre destinée laissée au bon vouloir de ces piètres éboueurs.
Abderrahmane NGAÏDÉ (Bassel)
Dakar, le 20/07/2011
Source: Abderrahmane NGAÏDÉ
Déjà le terme « d’enrôlement » pose de sérieux problème pour notre appréhension des choses mais clarifie en même temps les intentions de ses initiateurs. Le déroulement ressemble étrangement à un enrôlement dans le vrai sens du terme. Mais à quelle fin ? Il est inconcevable qu’un « recensement » se déroule comme on est en train de le vivre en Mauritanie. Il n’y a pas pire situation. Même si quelques membres de la communauté nationale ne sont pas directement concernés par les vexations nées des questions et de cette volonté « d’épuration de l’état-civil », ils devraient se poser la question de savoir depuis quand un citoyen doit-il se déplacer pour se faire « recenser » ? J’ai eu à participer en 1988 au recensement national en tant qu’agent recenseur et j’ai eu la lourde tache de sillonner l’un des quartiers de Nouakchott : de l’école de justice à l’escadron de gendarmerie. J’étais enthousiaste car je pensais m’acquitter d’un « service nationale » sans être enrôlé. Je n’étais ni agent recruteur ni « éboueur ». Mais l’enthousiasme des éboueurs est d’un autre âge et doit être combattu avec la vigueur nécessaire afin de les rappeler à l’ordre.
Bon revenons sur les trois définitions pour épiloguer un peu sur la mentalité perverse des concepteurs de ce « recensement » d’un autre genre. C’est une invention mauritanienne dont les intentions n’échappent à personne. Ceci est clair dans nos têtes et le comportement quotidien des « éboueurs de la république » en témoignent à chaque coup de fil.
- Il est vrai qu’AQMI nous dérange, mais serait-il nécessaire d’enrôler l’ensemble des 3 millions de mauritaniens pour venir à bout des velléités guerrières des attaquants de Bassikinou ? Nous ne sommes point dans un état d’urgence qui demanderait à chaque mauritanien de prouver son amour pour la patrie en danger. Là le danger est bien interne. C’est l’Etat et ses tenants qui déclarent la guerre à une partie de sa population. Ou bien s’agit-il d’enrôler les « vrais » citoyens pour se préparer à la guerre contre ceux qui « souillent » l’état-civil mauritanien ?
Je prends l’attitude de l’absurde pour comprendre ce qui m’arrive et ce que les « éboueurs » se disent entre eux au moment de concocter leurs « insultes ». Il n’y a pas plus révoltant que les complaintes de ces vieilles personnes auxquelles on demande les sépultures des parents. Je pensais plutôt que l’identification des sépultures des morts de 1960 à nos jours devait servir au deuil national et non à encore exclure. Il n’y a pas pure mort que d’être étranger chez soi. Cette situation est inadmissible et ne peut que réveiller en nous la révolte, la permanence de la révolte. J’ai assisté il y a quelques jours (lundi 18/07/2011, croisement Boghé-Rosso après avoir longuement conversé avec l’un des organisateurs de la manifestation des jeunes de Boghé) à une scène que je n’avais plus revue il y a plus de 22 ans : un homme jurer, devant des policiers têtus, être le père de sa propre fille encore mineure. Comble de l’horreur !
- Alors, je me pose encore cette autre question en me basant sur la seconde définition. L’Etat et son président cherche-t-il à faire adhérer l’ensemble des mauritanien dans l’UPR (par dérision cela peut bien donner l’IMPUR) ? Je ne le pense pas. Je le lui concède par la négation lui qui me nie et me dénie ma nationalité, la seule chose privée qui doit me revenir en propre. Quand on me prive de cette « chose » mon monde s’effondre et ma volonté de paix et d’harmonie s’effiloche. Touche pas à ma nationalité ! (comme doivent le faire les jeunes de Boghé le 21/07/2011) Ai-je envie de crier tout haut. Une carte d’identité n’est pas comparable à une carte d’adhésion à un parti.
- Enfin, je ne pense pas que le gouvernement cherche à nous dissoudre dans un groupe car ayant réussi à le faire des Haratin. L’état mauritanien a toujours été producteur d’identités singulières. C’est à cette violence pratique ouverte qu’il faut opposer une violence méthodique. Je refuse cette dissolution et cette tentative de destruction morale. Je lui oppose ma force et ma liberté de dire : assez ! Assez ces vexations quotidiennes ! Assez cette scène infinie d’humiliations ! Assez de cette passivité devant ce despotisme d’éboueurs ! Assez de cet amalgame malsain ! Assez et assez… D’ailleurs je conteste la mauritanité de la Mauritanie.
A défaut d’un « printemps », il nous faut un hivernage mauritanien pour opposer notre dignité d’homme à cette volonté de nous rendre « impurs » et indignes de bénéficier de ce bout de papier qui nous permet d’être identifié. Il nous faut donc la guerre pour avoir notre carte d’identité comme le dit ce combattant des forces nouvelles. Mais chez nous même avec une carte d’identité on est rien. Il est impossible de rester immobile devant cette ultime bavure. Si 1989 a été une « surprise », 2011 est une réelle occasion pour que l’hivernage emporte avec lui tous les centres d’enrôlement et les éboueurs avec.
Nous ne pouvons pas accepter d’être traités comme des déchets de cette « république » et voir notre destinée laissée au bon vouloir de ces piètres éboueurs.
Abderrahmane NGAÏDÉ (Bassel)
Dakar, le 20/07/2011
Source: Abderrahmane NGAÏDÉ